Le week end dernier, deux législatives partielles avaient lieu en dehors du territoire national. Les Français établis en Amérique du Nord ont préféré l'ex-député altoséquanais Frédéric Levebre au Montréalais Franck Scemama pour les représenter. Dans la huitième circonscription, comprenant notamment Israël, l'Italie, la Grèce et la Turquie, c'est l'UDI Meyer Habib qui l'a emporté face à la candidate UMP Valérie Hoffenberg. Il y a un an, chacun de ces sièges était occupé par une socialiste, avant l'annulation des deux élections par le Conseil Constitutionnel - et la diminution d'autant des effectifs de la majorité présidentielle -. Il y a cinq ans, ces circonscriptions extraterritoriales n'existaient pas. Elles sont nées de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, voulue par Nicolas Sarkozy. Un an après son élection et l'installation de François Hollande à l'Élysée, le député socialiste de la septième circonscription (l'Europe centrale et orientale) Pierre-Yves Le Borgn' a accepté d'évoquer pour Paroles d'Actu ces Français dont il entend porter les voix, ses idées, ses engagements, ses espoirs pour le quinquennat. Je l'en remercie. Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche, alias Phil Defer.  EXCLU

 

 

ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU

PIERRE-YVES LE BORGN'

Député de la 7ème circonscription des Français établis hors de France

 

"Aidons nos PME, revalorisons l'apprentissage"

 

Pierre-Yves Le Borgn'

(Photos proposées à ma demande par Pierre-Yves Le Borgn')

 

 

Q : 23/04/13

R : 09/06/13

 

 

Paroles d'Actu : Bonjour Pierre-Yves le Borgn'. Vous êtes depuis juin 2012 le Député des Français de l'étranger établis dans la septième circonscription extraterritoriale. (Albanie, Allemagne, Autriche, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Croatie, Hongrie, ancienne République yougoslave de Macédoine, Pologne, Roumanie, Serbie, Monténégro, Kosovo, Slovénie, République tchèque, Slovaquie) Un territoire vaste, très vaste... À quoi votre quotidien d'élu ressemble-t-il ?

 

Pierre-Yves Le Borgn' : En effet, le territoire est grand. Seize pays, un territoire de 1,6 million de km2. C’est certain que ce chiffre n’a pas grand-chose à voir avec la taille des circonscriptions de mes collègues de France métropolitaine et ultramarine, qui mesurent quelques dizaines voire centaines de km2.

 

Après quasiment un an à l’Assemblée nationale, j’arrive à gérer mon emploi du temps. Il m’a cependant fallu près d’un semestre de rodage. Le lundi, je suis chez moi où je peux travailler au calme. Les mardis, mercredis et jeudis, je suis au Palais Bourbon où j’enchaîne les rendez-vous et les réunions. J’assiste naturellement aux questions posées au gouvernement et aux différentes séances dans l’hémicycle et ce de jour comme de nuit. C’est un rythme d’enfer, passionnant et parfois éprouvant.

 

Enfin, le vendredi, je suis à Cologne, où se trouve ma permanence parlementaire, pour y rencontrer les compatriotes qui le souhaitent ou bien je me rends dans le reste de la circonscription. Lorsque je suis en dehors de l’Allemagne, ce qui est en général le cas une à deux fois par mois au moins, j’organise des déplacements de deux à trois jours afin de tenir compte des difficultés de transport, notamment vers les Balkans.

 

 

PdA : Il est difficile et toujours un peu périlleux de chercher à synthétiser sur la base de situations individuelles complexes et souvent très différentes. Pouvez-vous malgré cela nous parler de ces Français qui vous ont élu l'année dernière, nous faire part de ce qui les préoccupe, peut-être d'une manière un peu décalée par rapport au reste de la communauté nationale ?

 

P.-Y.L.B. : Il y a des  sujets communs à tous les Français de la 7ème circonscription comme les bourses scolaires, les frais de scolarité élevés dans les écoles françaises, la protection consulaire, l’action sociale et plus particulièrement la question de la liquidation des retraites ou celle de la couverture santé. Une question plus légère mais non moins importante qui revient souvent lors de mes réunions publiques concerne le visionnage de programmes télévisuels par Internet depuis l’étranger. Enfin, un sujet très délicat est celui des conflits d’autorité parentale. Beaucoup de parents divorcés, en Allemagne notamment, me contactent parce qu’ils rencontrent des difficultés à obtenir un droit de garde et de visite de leur enfant. Ces difficultés sont induites par le défaut de la coordination de droit de la famille au niveau européen et je m’emploie beaucoup depuis de nombreux mois à prévenir ces difficultés. Je n’ai pas trop communiqué sur cette action-là car le sujet est très sensible et je préfère le faire au bon moment, lorsque j’aurai au demeurant des résultats à afficher.

 

 

PdA : Juriste international de formation, vous avez notamment travaillé à Mayence, à Francfort, en tant que cadre-dirigeant au sein d'une société de fabrication de panneaux solaires. L'Allemagne, sa culture du dialogue, sa politique de l'offre... sont souvent présentés comme des modèles dont il faudrait s'inspirer pour assainir et redynamiser notre économie. Vous connaissez bien nos deux pays. Voyez-vous des domaines dans lesquels nous devrions, à votre avis, nous inspirer de nos partenaires allemands ?

 

P.-Y.L.B. : Pourquoi se limiter à l’Allemagne ? Il me semble qu’il faudrait s’inspirer des méthodes ayant fait leurs preuves dans chaque pays de la circonscription et pas seulement en Allemagne. J’admire le dynamisme de l’économie allemande et notamment la force de son tissu d’entreprises de taille intermédiaire, championnes de l’exportation. C’est le fameux « Mittelstand », qui n’a pas d’équivalent en France, malheureusement. Il faut aider nos petites et moyennes entreprises à se développer car elles sont un atout pour notre économie et de ce fait pour l’emploi.

 

Un autre point positif que nous pouvons trouver de ce côté du Rhin concerne l’apprentissage. En effet, cette méthode d’enseignement est trop peu valorisée en France. Il faut encourager les collégiens à rejoindre un Centre de Formation pour Apprentis et faire disparaître cette idée reçue consistant à faire passer les apprentis pour des personnes inintelligentes. Lors de son déplacement à Blois, le Président François Hollande a annoncé des mesures importantes pour l’apprentissage. Cette formation professionnelle est un atout pour les adolescents et pour notre pays.

 

 

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PdA : Plus globalement, vous revendiquez pleinement votre ouverture sur l'international, votre culture profondément européenne. Vous avez ainsi étudié au Collège d'Europe à Bruges, travaillé en Allemagne, en Belgique, au Luxembourg et aux États-Unis. Qu'avez-vous appris au contact de ce monde-là, ces leçons que vous souhaiteriez, peut-être, partager avec ceux de nos compatriotes - et ils sont nombreux - qui ne voient pas forcément la mondialisation d'un très bon œil ?

 

P.-Y.L.B. : Nous célébrons cette année le cinquantième anniversaire du Traité de l’Elysée, dont l’une des heureuses conséquences a été de donner naissance à l’Office Franco-Allemand pour la Jeunesse (OFAJ), qui a permis à des milliers de jeunes de découvrir une autre culture en traversant le Rhin. Quitter son pays pour s’établir ailleurs n’est pas une décision facile à prendre. J’ai fait ce choix. Cela n’a pas toujours été facile. J’en ai parfois bavé, mais j’ai travaillé d’arrache-pied, apprenant de toutes les cultures dans lesquelles je m’immergeais, et j’ai réussi professionnellement. Vivre dans différents pays m’a permis de découvrir d’autres méthodes de travail. Mon expérience professionnelle est un melting pot de ces cultures d’entreprises dans les quatre pays que j’ai connus.

 

Ma conclusion est donc qu’il ne faut pas craindre l’ouverture au monde et aux autres mais bien au contraire utiliser ce qu’elle peut apporter de positif pour une carrière et un parcours de vie.

 

 

PdA : Sans transition, une question d'"actualité immédiate", ce sera la seule de cet entretien. À l'heure où je vous la propose, l'Assemblée nationale vient d'adopter le Mariage pour tous. Vous l'avez fait, avec vos collègues députés. Dans quel état d'esprit vous trouvez-vous suite à ce vote ?

 

P.-Y.L.B. : Je suis heureux et fier. Cela est un véritable honneur pour moi d’avoir participé à ce changement sociétal important. Avec cette loi, le mariage est devenu ouvert à tous. Il n’était pas normal que dans notre pays, nous ne reconnaissions pas l’égalité des couples devant la loi.

 

 

PdA : Quelles sont les thématiques, les causes sur lesquelles vous souhaiterez vous engager tout particulièrement à titre personnel durant ce quinquennat ?

 

P.-Y.L.B. : J’ai déjà évoqué les problèmes de garde d’enfants, qui sont l’une de mes priorités. Je souhaiterais œuvrer pour rapprocher nos politiques et législations nationales en droit de la famille. Si nous sommes arrivés à élaborer un droit matériel commun du mariage entre la France et l’Allemagne, nous pourrons le faire sur le divorce et les successions. C’est une nécessité. L’accès à l’enseignement français à l’étranger est également une thématique importante car beaucoup de familles souffrent de frais de scolarité trop élevés. Pour les familles demeurant trop loin d’un établissement français, une solution serait de développer les filières bilingues.

 

L’accès à la langue et à la culture française par nos compatriotes est aussi une priorité car c’est souvent ce qui permet à nos concitoyens de garder un lien avec notre pays. J’ai d’ailleurs utilisé une grande partie de ma réserve parlementaire pour permettre à différentes bibliothèques de ma circonscription d’acquérir de nouveaux livres, de faire des travaux pour rendre l’accueil des usagers agréable ou permettre un meilleur accès aux livres.

 

 

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PdA : Près d'un an a passé depuis les élections présidentielle et législatives... L'enthousiasme populaire n'est plus tout à fait de mise... Quant la confiance, celle accordée à l'exécutif, elle est en berne. La crise, d'accord, mais elle n'est jamais qu'un élément de ce désamour, plus profond et qui touche à la politique menée, aux priorités affichées, aux personnalités elles-mêmes. L'inquiétude, voire la défiance sont exprimées par nombre de nos compatriotes, dont pas mal d'électeurs du président. Où en êtes-vous par rapport à tout cela ? Confiant, vous l'êtes toujours ?

 

P.-Y.L.B. : Bien sûr que je suis toujours confiant. Un célèbre adage dit : Paris ne s’est pas fait en un jour. Il me semble donc qu’il faut laisser du temps au temps. Je comprends bien évidemment les Français vivant dans une situation délicate qui souhaiteraient que leur vie s’améliore rapidement. La majorité a besoin de temps pour améliorer la situation de la France. Nous avons hérité d’une situation économique et sociale très dégradée par la crise certes, mais aussi par les choix de la droite au pouvoir durant 10 années. François Hollande l’a très bien dit lui-même : « Je demande à être jugé au terme des cinq ans ».

 

 

PdA : Cette question de la confiance me pousse à en aborder une autre, fondamentale pour le bon fonctionnement de notre société. Votre parcours, celui de votre famille est exemplaire. Celui de la méritocratie républicaine, de "l'émancipation et l'élévation sociale grâce à l'école laïque et aux bourses scolaires". Aujourd'hui, l'ascension de l'échelle sociale, la génération suivante vivant forcément mieux que la précédente, beaucoup de gens n'y croient tout simplement plus. La morosité des perspectives économiques, la remise en cause d'acquis sociaux - y compris par la gauche - et le poids écrasant de la dette ne sont évidemment pas étrangers à ce ressenti ô combien préoccupant... Qu'avez-vous envie de répondre à ces personnes ?

 

P.-Y.L.B. : Je répondrais qu’il ne faut jamais baisser les bras. Grâce à l’École de la République, l’ascension sociale est possible. J’en suis le parfait exemple. Je suis le petit-fils d’un cheminot, d’une garde-barrière, d’un boulanger et d’une coiffeuse. Grâce aux bourses, mon père et mère ont pu suivre des études et devenir instituteurs. Ils ont su, confiants en l’école et nous inculquant le goût du travail, nous aider, ma sœur et moi, à faire des études longues.

 

Nous vivons une époque difficile et je comprends les doutes de nos compatriotes, mais ne plus essayer de se battre contre l’injustice sociale serait le pire exemple à donner à nos enfants. C’est dans la solidarité nationale, avec le sens des devoirs et des droits qui fondent la République, que l’on construit l’avenir.

 

 

PdA : Revenons à des horizons plus immédiats, même si l'avenir se jouera en grande partie au cours de ce quinquennat... Sur la base de quels résultats tangibles, de quels chantiers sérieusement entrepris pourrez-vous sincèrement déclarer, au printemps 2017, "Oui, Hollande, a été utile à la France et aux Français" ?

 

P.-Y.L.B. : Comme vous l’écrivez, tout va se jouer au cours du quinquennat. Je vous donne donc rendez-vous en 2017 pour répondre à cette question. Et je vous redis ma confiance en l’action menée par le Président de la République.

 

 

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PdA : Un message pour nos lecteurs ?

 

P.-Y.L.B. : N’hésitez par à aller sur mon site, j‘y poste très régulièrement des articles.

 

 

PdA : Que peut-on vous souhaiter, Pierre-Yves Le Borgn' ?

 

P.-Y.L.B. : Que j’arrive à réaliser tout ce que j’ai entrepris pour nos compatriotes. C’est là qu’est ma motivation, ma volonté de servir.

 

 

 

Merci encore, Pierre-Yves Le Borgn', pour vos réponses, pour votre enthousiasme. Merci également à Cyril Mallet, collaborateur du Député, pour sa patience, pour nos échanges. Si vous êtes vous aussi un(e) Français(e) établi(e) à l'étranger, n'hésitez pas à nous faire part de votre expérience, en commentaire. Nicolas alias Phil Defer

 

 

 

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