Hier, c’était les 10 ans de Paroles d’Actu. Et je remercie, à cette occasion, les quelques aimables témoignages que j’ai reçus. Je suis du sud-lyonnais, et j’ai déjà reconnu avoir assez peu, et sans doute trop peu mis en avant ma région dans mes articles, via mes choix d’invités. J’entends remédier à cela à l’avenir. Je suis heureux de vous proposer ce soir une rencontre avec Julien Tixier, un des fondateurs (il y a aussi 10 ans !) d’un bar à cocktails lyonnais qui mérite d’être découvert, Le Fantôme de l’Opéra ! Exclu, par Nicolas Roche.
EXCLU - PAROLES D’ACTU
Julien Tixier : « La vie débordera toujours,
on l’a bien vu pendant la crise, et c’est tant mieux ! »
Photo : Arnaud Bathiard.
Julien Tixier bonjour. Vous vous présentez, en quelques mots ?
Bonjour, alors jusqu’en 2015 j’ai dessiné pour l’édition française, ça allait du simple dessin à des albums, puis j’ai pris du recul car ça m’amusait beaucoup moins. Désormais je me concentre sur l’écriture, et j’écris principalement des chroniques, la plupart pour un média dédié à la musique. Je développe aussi une carrière dans la photo. Et je suis l’un des fondateurs du Fantôme.
Quelle est l’histoire du Fantôme de l’Opéra (pas celui de Gaston Leroux, le vôtre, celui de Lyon) ?
Le Fantôme a ouvert il y a 10 ans en juillet 2011. Le Fantôme c’est vraiment l’histoire d’un coup de tête qui s’est prolongé. Je discutais avec des copains un soir et on s’est dit, « et si on ouvrait un bar à cocktails ? » C’est ce que l’on a fait. Aussi simplement que ça. Sans trop réfléchir en fait. Peut-être même sans trop y croire vraiment.
D’où vous vient votre goût pour ces ambiances-là (littérature, musique, ciné...) ?
Du domaine artistique dans lequel j’évolue. Raconter des histoires, créer, j’aime ça. Un bar à cocktails ça peut être un peu ce prolongement. Le côté "fantôme", ça a un imaginaire large, qui permet de partir dans le romantisme, dans quelque chose d’enflammé ou de plus sombre, de plus étrange. Ça laisse des possibilités. Et puis le 19ème siècle ou le début du 20ème, c’est immédiatement visuel.
Qu’est-ce que ça suppose, de gérer un tel établissement, en temps normal et en temps de Covid ?
En temps de Covid, c’est assez simple : on nous a forcés à fermer. Ça limite le travail. En temps normal, je suis plus dans la coordination. La cheffe barmaid, Jessica, qui est aussi l’une de mes associés s’occupe de l’opérationnel. Un autre associé va s’occuper de la comptabilité par exemple, un autre des commandes... Moi je fais le lien, et je m’occupe de l’image de l’établissement, de sa stratégie, et de son positionnement.
Comment avez-vous vécu les quinze derniers mois à titre pro, et à titre perso ?
À titre personnel, très bien. Je suis quelqu’un de libre et d’assez rationnel, donc je n’ai pas changé ma façon de vivre. En aucun cas. Je me suis reconcentré totalement sur mes activités artistiques. J’ai beaucoup travaillé, je suis beaucoup sorti, j’ai rencontré du monde, développé des projets. Concernant Le Fantôme, il suffisait d’attendre, alors on a attendu.
Pour vous, dans tout ce malheur, y aura-t-il eu un peu de bon ? Aurez-vous appris, retenu quelque chose de cette crise ?
Je pense qu’il n’y a pas grand-chose à retenir d’une époque comme celle-là. Il faudrait beaucoup de temps pour expliquer sereinement et précisément. Je ne pense pas qu’en quelques lignes on puisse le faire de manière pertinente. Mais pour résumer on a vu l’émotivité, la manipulation, l’égo, le corporatisme exacerbé, l’absence de rationalité prendre souvent le pas sur tout. Sur le pragmatisme, sur l’intelligence ou même sur la simple capacité de réflexion. Il n’y avait pas de débat, que des évidences à suivre, une façon dictée de voir la vie, une vision court-termiste, sans arriver à seulement entrevoir le pire du moindre mal. La notion de liberté s’est retrouvée totalement ignorée par certains, renvoyée à une simple chose secondaire, que l’on pouvait finalement mettre de côté. Certains ont même osé conseiller d’éviter de se parler. Quand on en arrive à ce niveau, je ne suis pas certain qu’il faille retenir beaucoup de choses. Et je passe sur la défaite de la sémantique, avec de la guerre, des héros, et des couvre-feux...
Le point rassurant, et il existe, c’est que l’on ne peut contenir la vie. Celle-ci débordera toujours, et on l’a bien vu. Quand la philosophe Barbara Stieglier parlait d’hébétement ou de sidération d’une partie de la population, une autre partie, la jeunesse particulièrement, ne l’a pas été, et d’une certaine façon a tenu tête à cette période, et à ces prétendues évidences. La turbulence a quelque chose de rassurant.
Dans quel état d’esprit vous trouvez-vous alors qu’intervient une nouvelle levée de restrictions, et que l’été s’installe ?
Au beau fixe. On trace notre route comme on l’a toujours fait.
Une, deux ou trois photos, commentées par vous ?
La première, car c’est Jessica, ma complice depuis sept ans je crois. On a forcément un lien de travail fort. C’est une créatrice passionnée.
La deuxième, car on s’amuse à casser les règles coincées des cocktails. On ose avec beaucoup de nonchalance. Ce cocktail s’appelle "Allez Friponne, touche-moi la corne, je suis une licorne." Il est à la barbe à papa.
La troisième, car on soigne toujours au maximum nos décorations.
Le cocktail qui vous ferait tomber, vous ? ☺
D’une manière générale, si vous mettez des fruits rouges, framboise de préférence, ça devrait me plaire.
Les arguments pour donner envie aux Lyonnais (et aux autres d’ailleurs, non mais) de venir découvrir (façon de parler brrr...) le Fantôme de l’Opéra ?
Je dirais que c’est une alchimie, un équilibre entre plein de choses qui ont fait que les gens ont adhéré au Fantôme. Le lieu, l’ambiance décontractée de l’équipe, la musique que l’on passe, les cocktails eux-mêmes, leur décoration que l’on pousse, oui il y a plein de choses je pense.
Mais à sortir des points particuliers, je dirais que Le Fantôme a une carte exclusivement composée de créations. On ne reste pas dans des classiques. Ce qui nous plait c’est créer. Et puis quand on a ouvert Le Fantôme, on ne voulait pas lui coller un esprit guindé, avec ambiance stéréotypée, uniformes et tout le décorum. On ne se prend pas au sérieux surtout.
Vos projets, vos envies pour la suite ? P’tit scoop ?
Alors désolé pour le scoop, pour l’instant rien de prévu. À part tout simplement continuer à s’amuser entre nous et nos clients.
Un dernier mot ?
Je ne sais pas... Liberté, ou alors turbulence, c’est beau ça, non ?
Interview : mi-juin 2021.
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