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Paroles d'Actu
23 septembre 2021

S. Gauthier, B. Blary : « Cutshin Creek », interview

Avec ce nouvel article, qui entend mettre en lumière un bel album, Cutshin Creek (Passés/Composés, 2021) du duo Séverine Gauthier-Benoît Blary, je suis heureux d’accorder une fois de plus sur Paroles d’Actu, un espace pour rendre à cette inspirante forme d’expression artistique qu’est la bande dessinée, les hommages qu’elle mérite. Faire une BD, c’est un exercice exigeant, qui suppose un gros travail préparatoire (documentation, etc...) mais aussi, de scénariser au plus serré (donc l’essentiel) pour respecter un cadrage strict, d’exprimer par le dessin ce que les mots ne peuvent décrire. Et, souvent, les BD sont des œuvres composées à quatre mains, ou plus, donc il faut s’accorder. Je salue S. Gauthier et B. Blary, qui ont accepté de répondre à mes questions, ainsi que les artisans des albums précédemment chroniqués : Isabelle Dethan et Antoine Ozanam (Severiano de Heredia), Noël Simsolo (Napoléon), Alcante, Denis Rodier et Laurent-François Bollée (La Bombe). Place maintenant, avec Cutshin Creek, à une héroïne féminine inspirante, une book lady qui, dans les Appalaches de la Grande Dépression, va se trouver au mauvais endroit, au mauvais moment... Une exclu Paroles d’Actu, par Nicolas Roche.

 

Cutshin Creek

Cutshin Creek (Passés/Composés, 2021)

 

EXCLU PAROLES D’ACTU

I. Séverine Gauthier, scénariste

Comment est née l’aventure Cutshin Creek ?

L’album est né parce que Benoît et moi avions envie de collaborer sur une nouvelle histoire. Nous trouvions intéressant de mettre en scène une poursuite, une traque. Et puis, cette idée de traque a rencontré l’univers fascinant de ces femmes qui, dans les années 30, ont participé à ce programme culturel dans les Appalaches. Les deux idées se sont amalgamées pour devenir Cutshin Creek. La naissance d’un album et la construction d’un scénario sont des processus assez longs (enfin, en ce qui me concerne…), et le projet s’est construit petit à petit, après pas mal de recherches sur le sujet.

 

Que retiendrez-vous de cette collaboration avec Benoît Blary ?

Nous n’en sommes pas à notre première collaboration. Benoît est un dessinateur qui s’investit énormément dans les univers et les histoires qu’il met en images. Il se documente beaucoup pour apporter aux récits ce qu’il faut de réalisme pour qu’on entre dans l’histoire. Il est très précis, très organisé dans son travail. Ce rend la collaboration facile et très enrichissante. Il a l’habitude de lire mes scénarios et sait parfaitement transcrire en image mes intentions d’écriture.

 

Que vous inspirent-elles, ces book ladies qui parcouraient les terres parfois sauvages et hostiles d’Amérique pour promouvoir la lecture ?

L’histoire de ces femmes est incroyable, leurs parcours sont fascinants. Elles ont été des pionnières, des aventurières, et ont assuré une mission méconnue souvent salutaire pour les communautés des Appalaches particulièrement impactées par la crise économique des années 30. En me documentant sur leur histoire, je n’ai pu ressentir que de l’admiration pour leur engagement.

 

Vous avez beaucoup travaillé sur les nations amérindiennes des États-Unis : estimez-vous qu’au-delà de symboles affichés, il y a du mieux dans la manière dont on les considère aujourd’hui ?

Il y a du mieux, il y a du moins bien aussi. Il reste encore tellement à faire qu’il est difficile de le résumer en quelques mots.

 

La BD est-elle une belle manière, peut-être de plus en plus populaire, d’entraîner des publics jeunes vers la lecture, et vers une sensibilité à l’histoire?

Je ne pense pas que la bande dessinée entraîne vers la lecture. La bande dessinée, c’est de la lecture, une expérience de lecture différente, exigeante, qui demande que le lecteur en maîtrise les codes. Je pense que, même enfant, un lecteur est attiré par différents types de livres  : albums illustrés, romans, bandes-dessinées, etc. l’un ne conduisant pas nécessairement à la lecture des autres.

Je pense que les lecteurs qui se tournent vers les bandes dessinées historiques ou historiennes ont déjà un intérêt marqué pour l’histoire en général ou pour le sujet abordé dans le livre et sont désireux d’en découvrir davantage.

 

Parmi vos publications jusqu’à présent, lesquelles ont une place particulière dans votre cœur, et lesquelles nous recommanderiez-vous d’aller découvrir ?

Tous mes albums ont une place particulière parce qu’ils correspondent à un moment de ma vie ou une étape de ma carrière d’autrice. Si vous avez aimé Cutshin Creek, je peux vous conseiller la lecture de Virginia, une histoire en trois tomes, également mise en images par Benoît. Mais j’ai vraiment du mal à choisir, je ne peux que tous vous les recommander  !

 

Virginia

Virginia, intégrale (Éd. du Long Bec, 2019)

 

Vos projets, et surtout vos envies pour la suite ?

Je travaille en ce moment sur l’écriture d’une série de romans intitulée Aliénor, fille de Merlin publiée par L’école des loisirs. Les deux premiers tomes sont déjà disponibles. Ça occupe une grande partie de mon temps. J’ai plusieurs projets de bande dessinée et de romans en préparation, mais rien n’est encore signé pour le moment.

 

Séverine Gauthier

 

 

II. Benoît Blary, le dessinateur

Que retiendrez-vous de cette aventure, et de votre travail avec Séverine Gauthier ?

Que j’aimerais avoir l’occasion de travailler une nouvelle fois avec elle. J’aime sa façon d’écrire et ses lignes de dialogues. Il y a un réel travail d’écriture sur lequel je peux appuyer mon dessin. Ses découpages sont précis tout en me laissant une grande liberté dans la mise en scène, le choix des cadrages. Ce qui est vraiment plaisant pour moi dans le travail de la mise en images.

 

Votre dessin très caractéristique, colle parfaitement à l’atmosphère sombre de ce western. Qu’est-ce qui a nécessité le plus de travail pour cette réalisation ?

Une grosse partie du travail se joue lors de la réalisation du storyboard, qui va définir le ton et le rythme du récit, déjà amorcés à l’écrit par Séverine. La recherche de documentation a aussi son importance afin de retranscrire l’ambiance de l’époque. Les gammes colorées jouent aussi une part non négligeable dans la narration, pour rendre les atmosphères.

 

Cutshin Creek visuel

Visuel Cutshin Creek, aimablement transmis par B. Blary.

 

Votre œuvre compte pas mal d’histoires, d’univers différents. Est-ce qu’à chaque fois, pour s’immerger dans un autre monde, une autre époque, un dessinateur de BD se réinvente ?

En ce qui me concerne, j’essaie de faire ressentir l’univers concerné par la mise en scène, le rythme du récit. Le rôle des décors a aussi une grande importance dans ce cas. Pour ce qui est de la part graphique, j’essaie d’évoluer mais je ne me «  réinvente  » pas vraiment, surtout du fait des contraintes diverses et variées liées à la production d’un album qui incitent à aller à l’efficacité, à ce que je maîtrise (plus ou moins…). Je me sers parfois de mes «  coins de feuilles  » publiés sur Facebook pour tester des outils, des rendus différents, pour éventuellement les intégrer à la réalisation de mes planches de bandes dessinées.

 

Est-ce qu’on pense plus ou moins à des acteurs, ou à des gens qu’on connaît, quand on dessine des personnages ?

Sans doute inconsciemment. Je ne me base que très rarement sur une personne réelle, sauf si le récit l’impose, bien entendu.
Je suis davantage inspiré par mes lectures de romans, la musique, etc., pour retrouver des ambiances plutôt que des éléments précis tels une tête de personnage. Mais tout ceci reste assez informel, c’est une sorte de bagage me nourrissant. Je fais parfois des clins d’œil dans mes planches aux peintres, musiciens, etc., qui me sont chers. C’est dans Virginia que l’on en trouve le plus à ce jour.

 

Si vous deviez donner quelques conseils à un(e) jeune aimant dessiner et qui aurait envie de se lancer sérieusement dans la BD ?

Je ne suis pas certain d’être bien placé pour cela, mais disons que la curiosité et la constance dans le travail me semblent importants. Il faut être endurant et ne pas compter ses heures… Même si ce n’est pas évident, surtout lorsque l’on débute, il ne faut pas hésiter à montrer son travail aux professionnels pour en retirer des critiques constructives et ainsi progresser.

 

Parmi vos créations, lesquelles comptent particulièrement à vos yeux, celles que vous auriez envie de faire découvrir à nos lecteurs ?

Virginia me tient à cœur, par son personnage principal, Doyle, et l’univers western et guerre de sécession oscillant sur la frontière de l’étrange et du fantastique. Ceci étant un mélange me plaisant beaucoup et sur lequel j’aimerai encore travailler. Sigurd & Vigdis, aussi, pour son couple de Vikings. Mais je dirais qu’il faut lire tous mes albums qui ont tous un intérêt particulier pour moi, bien entendu  !

 

Sigurd & Vigdis

Sigurd & Vigdis (Le Lombard)

 

Vos projets, vos envies surtout pour la suite ?

J’ai le plaisir de travailler sur un nouvel album avec Stéphane Piatzszek et un autre avec Marzena Sowa. J’ai d’autres projets de BD sur le feu, plus divers travaux réguliers d’illustration, etc.

 

Benoît Blary

 

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