19 mai 2023

François-Henri Désérable : « En Iran, la République islamique est déjà morte... »

À l’heure où j’écris cette intro, j’apprends que trois hommes viennent ce jour d’être exécutés en Iran. Trois de plus. Le pouvoir les accusait d’avoir causé la mort de membres des forces de l’ordre, dans le cadre de ces manifestations qui, dans le pays, se succèdent depuis neuf mois, depuis la mort de Mahsa Amini. Mahsa Amini, cette jeune Kurde iranienne décédée peu après son arrestation par la police des mœurs en septembre dernier, une affaire de code vestimentaire pas respecté, et on sait que ces gens-là ne rigolent pas là-dessus - pas sûr qu’ils rigolent sur grand chose d’ailleurs. Depuis lors, ce sont de larges franges du pays, les femmes éprises de liberté en tête, qui crient leur rage face à un régime des mollahs qui se raidit toujours plus, et qui par ailleurs se montre de plus en plus incapable d’assurer un semblant de prospérité matérielle à ses citoyens, ou bien à ses prisonniers on ne sait plus trop.

François-Henri Désérable, écrivain remarqué et salué depuis dix ans, a parcouru l’Iran à la fin 2022, au plus fort, donc, de la contestation. Il en a tiré un récit précieux, qui vaut aussi témoignage, pour lui mais surtout pour celles et ceux qu’il a rencontré.e.s, et qui se sont confié.e.s à lui. L’Usure du monde - Une traversée de l’Iran (Gallimard, mai 2023), c’est un ouvrage qui nous fait penser, comme lui le pense, que le régime actuellement en place à Téhéran, un pouvoir sur la défensive comme jamais, est en train de cramer vitesse grand V le peu de légitimité que la population pouvait encore lui accorder. Ce que ce livre met en lumière surtout, c’est l’extraordinaire vitalité d’un peuple qui compte parmi les plus fins et lettrés au monde. Je me suis permis d’en donner une illustration en reproduisant ici la page 73, émouvante, lisez vous-même, Désérable raconte ça tellement mieux que moi... Quand on considère ce peuple, son intellect, son courage aussi, et quand on songe en même temps à l’obscure captivité dans laquelle ses leaders, le rahbar Khamenei en tête, entendent le tenir, on se dit que cet attelage-là ne tiendra plus longtemps. On l’espère...

Je remercie François-Henri Désérable pour l’interview qu’il m’a accordée, et pour sa fidélité. Quant à son livre, qui est aussi un formidable récit de voyage, il faut le lire et le faire lire, s’en imprégner et partager, c’est peut-être, à notre niveau, la meilleure manière de rendre hommage à Mahsa Amini, à ses sœurs et à ses frères de combat, et tout ça mis bout à bout pourrait bien contribuer à faire bouger les lignes. Exclu Paroles d’Actu, par Nicolas Roche.

 

Extrait du livre

 

 

EXCLU - PAROLES D’ACTU

François-Henri Désérable : « En Iran,

la République islamique est déjà morte... »

L'Usure d'un monde

L’Usure dun monde - Une traversée de l’Iran (Gallimard, mai 2023).

 

François-Henri Désérable bonjour et merci de m’accorder cette nouvelle interview pour L’Usure du monde (Gallimard), qui fait écho à L’Usage du monde, récit de voyage de 1963 signé par l’écrivain suisse Nicolas Bouvier et illustré par son compère Thierry Vernet. Eux avaient traversé (entre autres pays) l’Iran, celui du Shah à l’époque, tout comme toi fin 2022, dans un contexte très particulier, celui des manifestations et des répressions suivant la mort de celle dont il faut écrire le nom encore et encore, Mahsa Amini. J’ai envie de m’arrêter sur les titres, qui sont très parlant. Parler de l’"usure" du monde, c’est quoi, la marque d’un pessimisme ? Ou au contraire, d’un besoin de ne pas rester dans la contemplation, même si tu as comme eux décrit nombre de merveilles, et de secouer tout ça ?

Ce monde auquel mon titre fait référence, c’est celui de la République islamique, un régime liberticide et thanatocratique (régnant par la mort et par la peur des mises à mort), qui réprime dans le sang les aspirations de son peuple. Et si je parle d’usure, c’est parce que, en réalité, ce régime est déjà mort  : il est comme un arbre qui se décompose sur pied, et chaque voix qui s’élève, chaque slogan, chaque manifestation est un petit coup de hache porté à ce bois mort. Reste à savoir combien de temps il faudra pour l’abattre, pour lui porter le coup fatal.

 

Pour cet ouvrage, tu n’es plus romancier mais un témoin qui donne la parole à d’autres  : comme tu me l’as dit toi-même, tu te vois comme le "greffier" d’un livre que "les Iraniens ont écrit". À partir du moment où tous ces gens t’ont donné leur confiance, leur amitié aussi (je laisse aux lecteurs le plaisir de les rencontrer un à un), t’es-tu senti investi d’une forme de responsabilité particulière ?

La seule responsabilité qui m’incombait était de dire les choses telles que je les avais vues, même si je ne le fais jamais qu’à travers une sensibilité qui m’est propre. C’est d’ailleurs la difficulté du récit de voyage  : dépourvu d’intrigue (au contraire de la fiction), il repose entièrement sur une façon de dire les choses, c’est-à-dire la transcription d’une façon de les voir, qui dépend elle-même d’une manière d’être au monde.

 

Ce livre a valeur de témoignage on l’a dit, et je suis persuadé qu’il mérite d’être lu au-delà des frontières de la Francophonie. Des traductions sont-elles prévues, en anglais, peut-être en farsi ? Et j’imagine que pour l’heure, tu ne pourras pas vraiment envoyer ce texte à ceux que tu racontes, pour ne pas les mettre en danger...

Ce texte sera sûrement traduit dans d’autres langues (j’ai la chance d’avoir des éditeurs étrangers qui me sont plutôt fidèles), mais en anglais, je n’en sais rien (je n’ai jamais été traduit en anglais), et j’espère le voir traduit en persan (alors il pourrait être diffusé en Iran de manière clandestine, sous le manteau, comme autrefois les samizdats (en URSS et dans l’ancien bloc de l’Est, ndlr) ou comme aujourd’hui en Russie Le Mage du Kremlin de mon ami Giuliano Da Empoli). 

 

Ce qui est plaisant aussi dans ton livre, c’est la mesure dont tu fais preuve, sans caricature : je songe à Yassin, une de tes rencontres, un type serviable et ouvert et en même temps, un soutien sincère du régime. Voir la vérité, vouloir la regarder en face, ça suppose aussi d’assumer tout ce qu’elle a de complexe ?

Dire que les serviteurs zélés de la République islamique sont tous des fanatiques sanguinaires qui jouent aux billes avec les yeux des dissidents politiques, ça serait peut-être plus simple, mais ça serait surtout faux. Il y a parmi eux d’excellents pères de famille, bons époux, bons citoyens, braves types qui ne feraient pas de mal à une mouche – même aux mouches iraniennes (Bouvier dans L’Usage du monde consacre un merveilleux passage à sa haine des mouches. Attends, je vais le retrouver. Le voici  : «  J’aurai longtemps vécu sans savoir grand-chose de la haine. Aujourd’hui j’ai la haine des mouches. Y penser seulement me met les larmes aux yeux. Une vie entièrement consacrée à leur nuire m’apparaîtrait comme un très beau destin. Aux mouches d’Asie s’entend, car, qui n’a pas quitté l’Europe n’a pas voix au chapitre. La mouche d’Europe s’en tient aux vitres, au sirop, à l’ombre des corridors. Parfois même elle s’égare sur une fleur. Elle n’est plus que l’ombre d’elle-même, exorcisée, autant dire innocente. Celle d’Asie, gâtée par l’abondance de ce qui meurt et l’abandon de ce qui vit, est d’une impudence sinistre. Endurante, acharnée, escarbille d’un affreux matériau, elle se lève matines et le monde est à elle. Le jour venu, plus de sommeil possible. Au moindre instant de repos, elle vous prend pour un cheval crevé, elle attaque ses morceaux favoris : commissures des lèvres, conjonctives, tympan. Vous trouve-t-elle endormi ? elle s’aventure, s’affole et va finir par exploser d’une manière bien à elle dans les muqueuses les plus sensibles des naseaux, vous jetant sur vos pieds au bord de la nausée.  »)

Mais revenons-en à ta question. Assumer la vérité dans tout ce qu’elle a de complexe, dis-tu. Oui, c’est exactement ça. J’aime beaucoup la définition que donne Faulkner de la littérature  : «  Écrire, dit-il, c’est comme craquer une allumette au cœur de la nuit en plein milieu d’un bois. Ce que vous comprenez alors, c’est combien il y a d’obscurité partout. La littérature ne sert pas à mieux voir. Elle sert seulement à mieux mesurer l’épaisseur de l’ombre.  » Eh bien, c’est pareil avec le voyage  : on ne voyage pas pour se rincer l’œil de nouveaux paysages, non, on voyage pour en revenir avec des yeux différents, un regard plus aiguisé, accoutumé à l’ombre – à l’épaisseur de l’ombre, c’est-à-dire au réel dans toute sa complexité. Autrement, on ne fait pas un voyage : on fait du tourisme.

 

Un tête-à-tête avec Khamenei, une question à lui poser les yeux dans les yeux, à supposer que ce soit possible, ça donnerait quoi ?
 
Ça donnerait deux personnes qui non seulement ne parlent pas la même langue (pour ça, me diras-tu, il y a des interprètes), mais qui ne parlent pas non plus le même langage. Moi, je dirais qu’il parle celui du fondamentalisme, du fanatisme, du dogmatisme  ; lui, que je parle celui de l’impérialisme, de l’impiété, du sacrilège. Et lui comme moi, nous serions chacun intimement convaincus d’avoir raison. Bref, nous n’aurions pas grand-chose à nous dire. Mais si je pouvais lui poser une question, une seule, je le ferais peut-être sous la forme d’un dessin : je le dessinerais avec sa barbe et son turban, sauf que le turban serait fait de cordes – celles auxquelles lui et ses affidés font pendre les dissidents iraniens. Et je lui dirais : «  Moi, ce qui m’offense, tu vois, ce sont les cordes autour du cou des Iraniens, et toi, c’est le dessin. Comment le dessin peut t’offenser davantage que les cordes ?  » Et puis je serais arrêté sur-le-champ, et je prendrais Me Camille Gilletta de Saint Joseph et Me Richard Malka comme avocats.

 

Manifestations Iran

Une manifestation en Iran. Source : Gerry Images/AFP.

 

Tu as déjà un peu évoqué ce point mais, au vu de ce que tu as pu palper, sentir de l’opposition apparemment massive du peuple iranien envers le régime, et tenant compte de tes connaissances historiques, penses-tu que la République islamique pourra se maintenir cinq années de plus ?

Les révolutions ne se font pas en un jour. Il aura fallu un an entre les premières manifestations à Qom en janvier 1978 et le départ du Shah en janvier 1979. Ce mouvement de contestations initié à la suite de la mort de Mahsa Amini n’a que quelques mois. La défiance du peuple iranien à l’égard du régime est immense: à terme, la République islamique est condamnée. Mais je ne veux pas me risquer à faire des prédictions. Les Iraniens eux-mêmes ne s’y risquent pas. La plupart de ceux que j’ai rencontrés sont des pessimistes enthousiastes: la chute prochaine du régime, ils ont du mal à y croire ; mais pas un jour ne passe sans qu’ils l’appellent de leurs vœux.

 

Quelles leçons retenir de ce courage plus fort que la peur dont font montre au quotidien bon nombre d’Iraniens, et davantage encore au vu de ce qu’elles risquent, d’Iraniennes ? Qu’a-t-on à apprendre d’eux, dans nos pays libres où peut-être, on tient un peu trop la liberté comme acquise ?

Il y a assez peu de chances que nos démocraties s’effondrent d’un seul coup, comme un château de cartes, pour reprendre une image éculée. Il y a des pays où un coup d’état militaire, où une guerre civile, où le charisme d’un général galonné peuvent balayer la démocratie – la liberté – en l’espace de quelques jours. Nous, en Europe, nous semblons plutôt à l’abri. Mais nos démocraties peuvent s’affaiblir, on peut rogner nos libertés par petites touches juxtaposées  : c’est la technique du pointillisme. Le plus souvent on ne s’en aperçoit pas tout de suite, parce qu’on a le nez sur le tableau, c’est-à-dire dans l’actualité immédiate. Alors on prend du recul, on fait trois pas en arrière, on a une vue du tableau dans son ensemble, et on s’aperçoit combien nos libertés se sont restreintes. À nous, citoyens, d’être en état de veille permanent, diligents, vigilants, intransigeants quand il s’agit de les préserver.

 

On part là sur une question qui peut-être nous dépasse un peu, mais je te la pose quand même : comment peut-on les aider à faire bouger les choses chez eux, nos États et nous autres simples citoyens ? On sait que les embargos font d’abord souffrir les peuples ; les classes dirigeantes elles, largement corrompues, non seulement s’en accommodent, mais elles se servent de cette idée de menace extérieure pour affermir leur emprise sur la société. Alors quoi, ce qu’il faut faire surtout, c’est parler d’eux, de ceux qui luttent ? 

Écrire, parler, on n’a que ça. Ça n’est peut-être pas grand-chose, ça n’est pas rien pour autant. J’espère que mon récit y contribue.

 

Des représentants de la République islamique ont-ils chercher à se renseigner sur toi, peut-être à t’intimider après ton départ du pays ? Quelque chose peut-être depuis la sortie du livre ?

Soixante-dix journalistes ont été arrêtés en Iran depuis la mort de Mahsa Amini, vingt-cinq sont toujours derrière les barreaux, et Reporters sans frontières, dans son classement annuel sur la liberté de la presse, a placé l’Iran à la 177è place (sur 180), juste devant la Corée du Nord, la Chine et le Vietnam. Les Gardiens de la Révolution ne sont pas très enthousiastes à l’idée qu’on vienne fouiller leurs poubelles. Moi, ils m’ont pris pour un simple touriste, ils n’ont pas cherché à m’intimider  : ils m’ont seulement fait comprendre que mon séjour était terminé. Et depuis la sortie du livre, non, rien – si ce n’est que je ne peux plus mettre les pieds en Iran.

 

Qu’est-ce que ce périple t’aura appris sur toi ? Et en quoi en es-tu revenu changé pour de bon ?

Est-ce qu’on revient vraiment changé pour de bon d’un voyage ? Tu sais, je garde toujours à l’esprit la dernière page de L’Usage du monde. Bouvier est seul, ça fait déjà un an et demi qu’il est sur la route, il est en Afghanistan qu’il s’apprête à quitter pour l’Inde. Il fume un narghileh en regardant la montagne  : «  L’étendue de la montagne, le ciel clair de décembre, la tiédeur de midi, le grésillement du narghileh… Ce jour-là, j’ai bien cru tenir quelque chose et que ma vie s’en trouverait changée. Mais rien de cette nature n’est définitivement acquis. Comme une eau, le monde vous traverse et pour un temps vous prête ses couleurs. Puis se retire, et vous replace devant ce vide qu’on porte en soi, devant cette espèce d’insuffisance centrale de l’âme qu’il faut bien apprendre à côtoyer, à combattre, et qui, paradoxalement, est peut-être notre moteur le plus sûr.  » Voilà, c’est exactement ça  : l’Iran, pendant un temps, m’a prêté ses couleurs.  Et ce vide qu’on porte en soi, on le comble en écrivant.

 

FH Désérable en Iran

François-Henri Désérable en Iran, dans le désert de Lout.

 

Après l’Iran, tu aurais envie, à côté de ton activité de romancier, de poursuivre un peu dans cette veine de l’écrivain-témoin, partir explorer l’Afghanistan des Talibans ou bien la Corée du Nord de Kim Jong-un ? Ce serait tout sauf simple évidemment, mais quelque part l’idée te titille ?

Le Pakistan. J’ai envie de voyager au Pakistan, et pour longtemps. L’Afghanistan, oui, bien sûr, c’est sur la liste. La Corée du Nord aussi. Et remonter l’Afrique en Jeep du Cap au Caire  : un vieux rêve.

 

Philippe Sollers vient de nous quitter à l’âge de 86 ans. Tu m’as confié que ta première visite de Venise s’était faite avec, sous le bras, le Dictionnaire amoureux qu’il avait consacré à la Sérénissime. De Nicolas Bouvier - avec Thierry Vernet - jusqu’à Sollers donc, dirais-tu qu’en ce qui te concerne au moins, si "les voyages forment la jeunesse", les lectures font les envies de voyages ? Quels autres livres ont été de ce point de vue les plus inspirants pour toi ?

Un mot sur Sollers. J’ai rencontré Sollers il y a dix ans – j’en avais vingt-cinq –, à la parution de Tu montreras ma tête au peuple. Il l’avait lu, et il m’avait reçu dans son bureau chez Gallimard. Sollers tel qu’on l’imagine  : les bagues, le fume-cigarette, la curiosité, l’érudition, la malice, le rire en cascade. Nous avions parlé de Bernadotte, le maréchal d’Empire devenu roi de Suède, et qui dans sa jeunesse s’était fait tatouer «  Mort aux rois  ». Écrivez quelque chose là-dessus, m’avait dit Sollers, faites-en un roman dans L’Infini. Je n’en ai pas fait de roman, j’ai préféré écrire sur Évariste Galois, mais par la suite, Sollers a accueilli deux de mes textes dans sa revue  : l’un sur un voyage à Beyrouth, l’autre sur un voyage à Vilnius («  Pour saluer un certain M. Piekielny  », qui, pour le coup, devait donner plus tard un roman). Quand on se voyait, c’était toujours chez Gallimard, toujours dans son bureau. Michon a dit récemment qu’il était «  le dernier écrivain du XIXè siècle  ». Eh bien Sollers était le dernier écrivain du XVIIIè  : il n’était pas le contemporain de Houellebecq, non, il était celui de Casanova. Celui de l’amour et du plaisir.

J’ai lu beaucoup de choses sur Sollers depuis sa mort  : «  l’anarchiste bourgeois  » (la formule est de Yannick Haenel, et elle est très juste), le «  virtuose du troisième degré  » (de Lambron, très juste aussi), etc. Mais il y a un point sur lequel les nécrologies n’ont pas assez insisté  : son amour dévorant pour Venise. La première fois que je suis allé à Venise, c’était avec son Dictionnaire amoureux sous le bras. La découverte de Venise a été le plus grand choc esthétique de ma vie. Ce fut aussi le cas pour Sollers. Quand il arrive place Saint-Marc à l’automne 1963, son sac lui tombe de la main droite, tant il est «  pétrifié et pris  »  : «  Je sais, d’emblée, que je vais passer ma vie à tenter de coïncider avec cet espace ouvert, là, devant moi  ». Quand on se voyait, on ne parlait que de Venise. Il n’y allait plus depuis la mort de Dominique Rolin. Un jour, mon téléphone sonne, je décroche et j’entends  : «  Désérable  ? J’ai appris que vous alliez à Venise. Ce qui me ferait plaisir, vraiment plaisir, c’est que vous allumiez deux cierges à la Basilique Santa Maria della Salute pour elle et moi.  » Dans l’un de ces derniers livres, où il parle de Venise, il m’avait laissé cette dédicace  : «  Eh bien, la magie continue  ». Elle continuera encore  : chaque fois que sur les Zattere je passerai devant la Calcina, où il avait ses habitudes, je penserai à lui.

 

 

Bel hommage...

Est-ce que les lectures font les envies de voyage  ? Oui, mille fois oui. Parmi les récits de voyage qui ont compté pour moi, il y a évidemment ceux de Bouvier, il y a ceux du Polonais Kapuściński (ah, Ébène  !), il y a L’Odeur de l’Inde de Pasolini, Tristes tropiques de Lévi-Strauss (on l’oublie trop souvent, mais c’est un récit de voyage), Autoportrait (à l’étranger) de Jean-Philippe Toussaint, Paysage avec palmiers de Bernard Wallet, Voyage à motocyclette de Che Guevara (il y a quelques années, j’ai refait exactement le même voyage à travers l’Amérique du sud, et j’en ai tiré un récit qui sera peut-être un jour publié), ou encore La Trêve, de Primo Levi, que j’ai lu récemment et qui m’a scié en deux tellement c’est beau.

 

J’espère que ce projet de récit sud-américain se fera ! Il y a dix ans presque jour pour jour paraissait Tu montreras ma tête au peuple, déjà chez Gallimard. Quel bilan tires-tu de ces dix premières années en tant qu’écrivain professionnel, si d’ailleurs tu te définis ainsi  ? Où sont à cet égard tes enthousiasmes, tes découragements aussi ?

J’ai appris à faire le distinguo entre la littérature et le milieu littéraire. Avec le milieu littéraire, je sais à quoi m’en tenir, j’ai fait mienne la phrase de Cioran  : «  Et avec quelle quantité d’illusions ai-je dû naître pour pouvoir en perdre une chaque jour  ?  » Mais il y a la littérature. Et par la littérature il y a des admirations parfois réciproques, des amitiés qui se forgent et qui perdurent – Clément Bénech, Maria Pourchet, Miguel Bonnefoy, Guillaume Sire, Lilia Hassaine, Mohammed Mbougar Sarr, pour citer quelques noms.

 

Tes projets et surtout, tes envies pour la suite ?

Un roman dont j’ai eu l’idée il y a tout juste trois ans, et qui m’a demandé de longues, très longues recherches. C’est une histoire qui se passe entre Delhi, la Bourgogne et New York.

 

Un dernier mot ?

Trois derniers mots, et en persan  :

Zan, Zendegi, Azadi (Femmes, vie, liberté, ndlr).

 

François-Henri Désérable

Crédit photo : Claire Désérable.

 

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07 janvier 2020

« États-Unis-Iran... les monarchies du Golfe ont peur. Et à juste titre... », par Olivier Da Lage

Pour ce premier article de l’année 2020 - que je vous souhaite à toutes et tous, amis lecteurs, ainsi que pour vos proches, heureuse et enthousiasmante autant que possible -, j’aurais préféré choisir un sujet moins lourd, moins sombre. Mais l’actualité s’impose à nous, et elle est rarement légère : il y a cinq ans tout juste, alors que la France se remettait à peine des réjouissances du réveillon, le massacre perpétré à Charlie Hebdo venait bouleverser tout un pays et lui envoyer à la figure quelques froides réalités du monde qu’il avait un peu oubliées.

Le meurtre par les forces américaines, le 3 janvier à Bagdad, du général iranien Qassem Soleimani, commandant de la Force Al-Qods du corps des Gardiens de la révolution islamique, a considérablement ravivé les tensions, coutumières depuis 1979, entre les États-Unis de Trump et l’Iran des mollahs. Les inquiétudes se font sentir depuis quelques jours dans toute cette région du monde, aux équilibres fragiles, et déjà largement déstabilisée par les conflits internes et inter-États. Le journaliste de RFI Olivier Da Lage, spécialiste de la péninsule arabique, a accepté, à ma demande, de nous livrer son décryptage de la situation, avec un focus particulièrement éclairant nous expliquant la crise vue d’Arabie saoudite, et des Émirats arabes unis. Merci à lui ! Une exclusivité Paroles d’Actu. Par Nicolas Roche.

 

« En première ligne dans l’affrontement États-Unis-Iran,

les monarchies du Golfe ont peur. Et à juste titre... »

 

Ali Khamenei

Le guide suprême Ali Khamenei, le 6 janvier 2020. Source : REUTERS via RFI.

 

“Be careful what you wish for, you may just get it”.

Depuis plus d’une dizaine d’années, plusieurs monarques du Golfe pressent les États-Unis d’attaquer l’Iran et de renverser son régime. Feu le roi Abdallah d’Arabie saoudite, recevant en 2008 le général américain David Petraeus, avait imploré les Américains de «  couper la tête du serpent  », autrement dit l’Iran. Le même message, plus direct et employant des expressions moins imagées, était relayé par les souverains de Bahreïn et d’Abou Dhabi, à la grande satisfaction du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou qui se félicitait publiquement de la convergence entre Israël et les monarchies du Golfe.

Mais l’administration Obama ne partage pas cette vision extrême de la façon de traiter avec l’Iran. De toute façon, les États du Golfe, ou en tout cas certains d’entre eux, sont ulcérés par la façon dont Obama réagit aux «  printemps arabes  » qu’ils voient comme une menace existentielle alors que les États-Unis voient une opportunité pour les peuples de la région de se faire entendre. Le comble est atteint lorsqu’ils apprennent en 2015 qu’Américains et Iraniens négocient secrètement depuis un an et demi sous l’égide du sultanat d’Oman qui ne leur a rien dit, bien qu’il soit membre du Conseil de coopération du Golfe, comme les cinq autres monarchies de la Péninsule arabique. Ces négociations aboutiront à l’accord sur le nucléaire iranien signé à Vienne le 14  juillet 2015.

« L’Arabie saoudite et les E.A.U. ont travaillé en sous-main

pour faire élire Donald Trump, attendant après sa victoire

la mise en œuvre d’un programme de déstabilisation de l’Iran. »

Avec Obama, la rupture est totale et l’Arabie saoudite, comme les Émirats arabes unis et Bahreïn, misent sur son successeur à venir. En fait, ils font davantage que miser  : comme on le sait désormais, Abou Dhabi et Riyadh ont travaillé en sous-main pour faire élire Donald Trump. Ce dernier l’ayant emporté, ils attendent la mise en œuvre d’un programme de déstabilisation de l’Iran. De fait, les principaux responsables de l’administration Trump sont connus pour leur hostilité à la République islamique et leurs critiques passées de la passivité supposée d’Obama. Enhardi, le tout nouveau prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salman, annonce même en 2017 qu’il va porter la guerre sur le sol iranien. Les premiers gestes de Trump comblent d’aise ces émirs va-t-en guerre  : retrait de l’accord de Vienne, renforcement des sanctions pour infliger une «  pression maximale  » sur l’Iran, menaces à l’encontre des Européens qui se risqueraient à ne pas respecter les sanctions… américaines, etc.

Mais au fil du temps, un doute affreux les saisit  : et si Trump, en fin de compte, n’était qu’un faux dur, répugnant au conflit  ? Après tout, il s’est fait élire sur la promesse de rapatrier les troupes américaines, dont plusieurs dizaines de milliers stationnent au Moyen-Orient et alentour. Ils voient la confirmation de leurs soupçons lorsqu’en juin 2019, un drone américain est abattu par l’Iran au-dessus du golfe Persique sans que cela provoque la moindre réaction. Pis  : Donald Trump révèle que les militaires avaient préparé une action de représailles et qu’il y a renoncé en apprenant que le bombardement risquait de provoquer la mort de 250 Iraniens.

Quarante ans après Carter, et trois ans seulement après Obama, les monarques du Golfe se sentent à nouveau abandonnés par l’allié américain.

« Pris de doute quant à la détermination américaine

sur la question iranienne, Riyadh et Abou Dhabi se sont résignés,

à partir de juin, à une révision de leur stratégie face à Téhéran. »

Dans ce contexte, deux événements vont les conduire à réviser en profondeur leur stratégie.

En juin 2019, deux pétroliers croisant en mer d’Oman, à l’orée du fameux détroit d’Ormuz qui commande l’accès au Golfe, font l’objet d’attaques non revendiquées mais attribuées à l’Iran sans que les démentis de ce dernier ne parviennent à convaincre. Les deux pétroliers sont évacués mais ne coulent pas et tout laisse à penser que ces attaques n’en étaient pas véritablement et constituaient plutôt un avertissement. C’est en tout cas ce que croient comprendre les Émirats arabes unis qui, dans la foulée, annoncent le retrait de leur contingent militaire du Yémen, où ils combattent les Houthis, soutenus par l’Iran. Et en juillet, de hauts responsables émiriens se rendent à Téhéran pour y discuter sécurité maritime. C’est le premier contact de ce niveau depuis six ans entre les deux pays.

De même, le 14 septembre, des installations pétrolières saoudiennes situées à Abqaiq dans la province orientale sont attaquées par les airs avec une précision diabolique. Les Houthis revendiquent une attaque par drones, ce qui est immédiatement mis en doute, à la fois en raison de la sophistication de l’attaque et de la distance de la frontière yéménite. Les regards se tournent naturellement vers Téhéran dont les démentis ne convainquent pas plus qu’en juin. Les Iraniens ne cherchent d’ailleurs pas vraiment à dissiper l’impression qu’ils sont derrière une attaque qui, analyse faite, viendrait plutôt du nord que du sud et parvient à endommager, sans détruire complètement, ces installations vitales pour les exportations saoudiennes. La production de pétrole est temporairement réduite de moitié mais peut progressivement reprendre son rythme de croisière dans les mois qui suivent. Quoi qu’il en soit, à Riyadh aussi, le message a été parfaitement reçu.

Puisque les États-Unis ne semblent pas prêts à venir au secours de leurs alliés arabes, ces derniers doivent s’adapter à la situation nouvelle et, pour la première fois depuis 2015, les Saoudiens paraissent sérieux en affirmant qu’ils veulent mettre fin à la guerre au Yémen. De même, la tonalité des discours saoudiens à l’égard de l’Iran s’est considérablement assouplie. Riyadh et Téhéran échangent directement, ainsi que par l’intérmédiaire de pays tiers naguère encore marginalisés par l’Arabie, comme Oman, le Koweït et le Pakistan.

C’est alors que, prenant tout le monde par surprise, Donald Trump ordonne fin décembre le bombardement de cinq sites des Kataëb Hezbollah irakiennes, une milice chiite liée à l’Iran, en représailles après la mort d’un «  sous-traitant  » américain en Irak (autrement dit un mercenaire employé par l’armée américaine) tué lors de l’attaque d’une base militaire américaine près de Kirkouk quelques jours auparavant. Moins d’une semaine plus tard, le 3 janvier, le général iranien Qassem Soleimani était pulvérisé par un missile tiré d’un drone américain alors qu’il venait de quitter l’aéroport de Bagdad. Soleimani, l’architecte de l’expansion politico-militaire de l’Iran au Moyen-Orient, était un très proche du guide suprême iranien, l’ayatollah Khamenei au point que nombre d’observateurs le qualifiaient de numéro deux du régime, avant même le président Rohani.

« Soleimani, qui supervisait directement plusieurs milices

chiites irakiennes, revenait à Bagdad avec la réponse du Guide

à une proposition saoudienne de désescalade transmise par l’Irak,

qui agissait en tant que médiateur. »

Soleimani, qui supervisait directement plusieurs milices chiites irakiennes, revenait à Bagdad avec la réponse du Guide à une proposition saoudienne de désescalade transmise par l’Irak, qui agissait en tant que médiateur. L’Arabie saoudite a donc doublement été prise de court, à la fois par une réaction américaine violente qu’elle n’attendait plus, et par le fait que celle-ci intervient alors que Riyadh est engagé dans un processus diplomatique de rapprochement avec la République islamique. Mais à Washington, l’heure est désormais à la rhétorique guerrière, dans la bouche du président Trump que de son ministre des Affaires étrangères Mike Pompeo, sans considération pour les alliés des Américains, qu’il s’agisse des Européens, ouvertement méprisés par Pompeo, ou des alliés arabes du Golfe. Quand ces derniers affirment qu’ils n’ont pas été consultés ni même informés préalablement, leurs déclarations semblent crédibles, tant ils apparaissent désemparés.

À Abou Dhabi, le ministre des Affaires étrangères Anouar Gargarsh que l’on a connu plus belliqueux, plaide désormais pour un «  engagement rationnel  » et souligne que «  la sagesse et l’équilibre  » doivent prévaloir. Son homologue saoudien, Adel Jubeir, qui n’était pas le dernier à dénoncer l’Iran dans les termes les moins diplomatiques, insiste désormais sur «  l’importance de la désescalade pour épargner les pays de la région et leurs peuples des risques d’une escalade  ».

Un universitaire des Émirats arabes unis, Abdulkhaleq Abdulla qui a mis son talent et son influence au service du discours anti-iranien de son gouvernement ces dernières années, déclare à présent que le message à Trump des dirigeants du Golfe peut se résumer ainsi  : «  Épargnez-nous s’il vous plaît une autre guerre qui serait destructrice pour la région. Nous serons les premiers à payer le prix d’une confrontation militaire. Il en va donc de notre intérêt vital que les choses restent sous contrôle  ».

Enfin, le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salman, dépêche aux États-Unis son frère cadet Khaled ben Salman, vice-ministre de la Défense, ancien ambassadeur à Washington et homme de confiance de MBS avec un message simple à l’attention de l’administration américaine  : «  faites preuve de retenue  ».

« Les pétromonarchies du Golfe ont cessé de croire qu’une offensive

américaine contre l’Iran pourrait être sans conséquence

pour elles-mêmes ; elles espèrent désormais un apaisement. »

L’attaque de juin 2019 contre les pétroliers et celle du 14 septembre contre les installations pétrolières d’Arabie a tiré certaines monarchies pétrolières de leur rêve éveillé dans lequel les Américains pouvaient frapper l’Iran sans conséquences pour eux-mêmes. Cette inconscience était d’autant plus incompréhensible que les Iraniens, depuis plus de trente ans, ont toujours été très clairs  : en cas d’attaque américaine ou israélienne, ce sont les monarchies situées de l’autre côté du Golfe qui en paieront le prix. Leurs installations pétrolières et pétrochimiques sont des cibles faciles et aisément à la portée des missiles de la République islamique, tout comme, ce qui est d’ailleurs beaucoup plus grave, les usines de dessalement de l’eau de mer qui assurent l’essentiel du ravitaillement en eau potable des pétromonarchies.

Il ne faudra pas longtemps aux souverains du Golfe, qui ont si longtemps plaidé pour une attaque contre l’Iran auprès des dirigeants américains, pour voir si leur influence est suffisante afin de persuader désormais Donald Trump du contraire.

par Olivier Da Lage, le 7 décembre 2020

 

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09 janvier 2016

Olivier Da Lage : « L'Arabie Saoudite jouit d'un leadership incontesté sur le monde sunnite »

Olivier Da Lage, journaliste à Radio France internationale (RFI) depuis 1983, connaît très bien le Moyen-Orient, région qu’il a beaucoup étudiée et pratiquée et à laquelle il a consacré de nombreux articles et plusieurs ouvrages, dont Géopolitique de lArabie Saoudite (Éd. Complexe, 1996/2006), Ces trente ans qui ébranlèrent le golfe Persique (Éd. du Cygne, 2011) et Qatar : les nouveaux maîtres du jeu (Éd. Démopolis, 2013). Dans un contexte marqué, sur fond de frictions confessionnelles inaltérées, par la recrudescence des tensions entre l’Arabie Saoudite et l’Iran et par l’omniprésence de la problématique Daesh, il a accepté de répondre (09/01) aux questions que je lui ai proposées (07/01). Je le remercie pour le sérieux avec lequel il a considéré ma requête et espère que cet article aidera à clarifier certains points obscurs, à mieux comprendre une réalité complexe. Nicolas Roche

 

ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D’ACTU

« L’Arabie Saoudite jouit d’un leadership

incontesté sur le monde sunnite »

Interview dOlivier Da Lage

 

Ambassade saoudienne à Téhéran

L’ambassade d’Arabie Saoudite à Téhéran en flammes, le 2 janvier. Photo : Atta Kenare/AFP/Getty Images.

 

Paroles d’Actu : Après l’aggravation des tensions entre l’Arabie Saoudite et l’Iran provoquée par l’exécution d’un important dignitaire chiite par le royaume des Saoud, nombre de pétromonarchies du Golfe ont apporté leur soutien explicite à Riyad. Est-ce un phénomène que l’on retrouve peu ou prou dans d’autres capitales sunnites ? Au fond ma question est la suivante : l’Arabie Saoudite bénéficie-t-elle nécessairement auprès de ceux des sunnites qui s’intéressent à la géopolitique d’une image de « leader » parmi d’autres en vue d’une « cause commune » ou bien n’est-ce là qu’un cliché basé sur une vision faussée des fractures confessionnelles dans l’Islam ?

 

Olivier Da Lage : Le soutien des autres monarchies du Golfe membres du Conseil de coopération du Golfe (à l’exception notable du sultanat d’Oman) était acquis. À la fois parce que plusieurs d’entre elles partagent les craintes saoudiennes vis-à-vis de l’Iran, notamment le Bahreïn, et parce que les pressions saoudiennes qui s’exercent sur elles ne leur laissent guère le choix. Il y a quand même des nuances, car si le Bahreïn a rompu ses relations diplomatiques avec l’Iran, comme l’Arabie, les autres se sont contentés de rappeler leur ambassadeur. Le Soudan et Djibouti ont également rompu leurs relations diplomatiques avec Téhéran. Mais on peut imaginer que la dépendance financière de ces pays à l’égard de Riyad est une partie importante de l’explication. Le poids de l’aide financière saoudienne pèse lourd dans le positionnement de nombreux pays. Cela étant, il ne fait pas de doute que le monde sunnite partage largement une même inquiétude à l’égard de l’Iran et de son influence. L’Arabie cherche bien entendu à se poser en leader du monde sunnite. Une position que pour le moment, aucun autre pays musulman ne cherche à lui disputer.

 

PdA : L’Égypte ne s’inscrit pas dans cette logique de luttes d’influence sur la base de lignes confessionnelles ?

 

ODL : L’Égypte, qui s’inscrit également dans ce conflit chiites-sunnites, dans la lignée du soutien qu’avait apporté le président Moubarak à Bagdad lors de la guerre Iran-Irak, est trop affaiblie par sa situation intérieure pour pouvoir prétendre à son traditionnel rôle de chef de file du monde arabe. Par conséquent, Le Caire s’aligne largement sur les positions de Riyad.

 

PdA : La lecture qu’on se fait de l’Islam dans les hautes sphères de l’Arabie Saoudite et du Qatar diffère-t-elle de manière substantielle - j’entends, sur le fond de la doctrine - de celle qui a cours chez les idéologues d’Al-Qaïda et de Daesh ?

 

ODL : Difficile à dire. Dans les sphères gouvernementales du Qatar, je ne pense pas que l’on se reconnaisse dans la doctrine de l’État islamique, même si cette dernière puise dans le wahhabisme qui est la doctrine religieuse commune au Qatar et à l’Arabie. Dans le cas de l’Arabie, c’est plus compliqué. Il y a certainement une parenté, un cousinage entre la doctrine dont se réclame l’établissement religieux wahhabite qui légitime le pouvoir de la famille al-Saoud et celle de Daesh. Le très net raidissement du pouvoir saoudien depuis l’arrivée du roi Salman en janvier 2015, avec la multiplication des exécutions et des châtiments corporels donne du crédit à ceux qui font le lien entre les deux, ce qui a le don de mettre en fureur les responsables du royaume, qui ont menacé de procès tous ceux qui établissent une telle comparaison.

 

PdA : L’Arabie Saoudite et le Qatar, en tant qu’États souverains ou individus proches du pouvoir, ont-ils favorisé directement, de par des formations ou des financements, la propagation d’un Islam fondamentaliste hors de leurs frontières - peut-être à l’intérieur des nôtres ?

 

ODL : D’une manière ou d’un autre, sans aucun doute. Pas avec la volonté de subvertir la société française, mais parce que tout simplement, ils considèrent comme de leur devoir (et aussi de leur intérêt) de promouvoir l’Islam partout dans le monde (c’est la daawa, l’appel islamique) et il se trouve que la forme d’islam qu’ils favorisent est celle qui leur ressemble, comme on a pu le voir avec l’émergence de courants salafistes là où ils n’existaient pas, ou étaient négligeables : en Asie centrale, en Afrique, dans les Balkans, et en Europe occidentale.

 

PdA : Comment expliquer les revirements (récents) de ces États par rapport à, disons, leurs positions d’ambiguïté face au terrorisme islamiste ?

 

ODL : Pour au moins deux raisons : du fait des pressions internationales (venues notamment des États-Unis et dEurope), mais surtout parce que l’État islamique leur a déclaré la guerre, ce qui ne leur laisse guère le choix.

 

PdA : Les ambiguïtés manifestées jusqu’à récemment par la Turquie de R.T. Erdogan face à Daesh ont-elles des fondements autres qu’économiques (trafics, etc.) et tactiques (affaiblissement des positions kurdes) ?

 

ODL : Non pas vraiment. Il y a aussi l’objectif affiché depuis quatre ans de renverser le régime de Bachar al-Assad en Syrie, et pour ce faire, tous les moyens sont bons.

 

PdA : Daesh peut-il être vu, dans un contexte de renforcement objectif du croissant chiite, comme un avatar du nationalisme sunnite pour les sunnites d’Irak et de Syrie notamment ?

 

ODL : Oui, très certainement. Pour des raisons avant tout opportunistes. En Irak et en Syrie, les populations sunnites se considéraient comme opprimées par les chiites (en Irak) ou le pouvoir alaouite en Syrie. Les jihadistes de l’État islamique sont apparus comme plus déterminés et efficaces que les autres mouvements pour les débarrasser de ces oppresseurs, ce qui explique largement la facilité avec laquelle quelques dizaines de milliers de combattants seulement ont pu venir à bout de l’armée irakienne dans les zones habitées par les sunnites en Irak.

 

PdA : Quelles sont les clés pour atteindre, à plus ou moins long terme, l’objectif largement partagé d’une reprise en main de ces pays par des modérés non (ou moins) sectaires ?

 

ODL : La réponse est tout sauf évidente : il faut que les pays occidentaux cessent de bombarder de façon indiscriminée des zones sunnites, faisant immanquablement des victimes civiles parmi les populations sunnites ; que l’on profite du processus diplomatique en cours avec l’Iran pour lui demander d’user de son influence de façon modératrice sur ses protégés en Irak et en Syrie (ce qui suppose qu’on traite l’Iran en partenaire à part entière) ; que l’on noue un partenariat avec les tribus sunnites de ces pays pour les détacher du soutien à l’État islamique (cette tendance se manifeste déjà) ; que l’on coupe les débouchés financiers et commerciaux de de Daesh à l’étranger ; que l’on poursuive la guerre secrète visant à éliminer les principaux cadres de l’organisation, sans faire intervenir ouvertement des soldats occidentaux sur un sol considéré comme musulman par tous les acteurs régionaux. Enfin, que l’on encourage un processus régional de désescalade, ce qui promet d’être extrêmement difficile dans l’avenir prévisible, au vu du récent regain de tension entre l’Iran et l’Arabie.

 

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19 décembre 2015

Fariba Adelkhah : « L'Islam n'est pas le passé de l'Iran mais bel et bien son avenir »

Fariba Adelkhah a vu le jour dans ce grand pays qu’est l’Iran ; c’était encore, pour ce qui la concerne, l’Iran d’avant la révolution qui entraîna la chute de la monarchie Pahlavi, l’Iran d’avant la République islamique proclamée en 1979. Docteur en anthropologie (EHESS, 1989), elle est membre des comités scientifiques de Iranian Studies et de la Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée. Nombre de ses travaux portent sur une conjugaison de ses deux grands pôles d’expertise, l’anthropologie politique et sociale et l’Iran ; on lui doit notamment, pour ne citer que deux de ses écrits récents, Les mille et une frontières de lIran (Karthala, 2012) et Les Paradoxes de lIran (Le Cavalier bleu, 2013). Je la remercie vivement, d’abord pour sa bonté à mon égard, ensuite d’avoir accepté de répondre (17/12) aux questions que je lui avais préparées (01/12). Ses réponses apportent des éclairages précieux sur des points souvent méconnus, des précisions qui peuvent aider à faire tomber quelques idées reçues - et c’est très bien ainsi. Nicolas Roche

 

ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D’ACTU

« L’Islam n’est pas le passé de l’Iran

mais bel et bien son avenir »

Interview de Fariba Adelkhah

 

Iran leaders

Le Guide suprême Ali Khamenei et le président Hassan Rohani. En fond, un portrait

de Rouhollah Mousavi Khomeini, père de la République islamique d’Iran. Source de l’illustration : presstv.ir.

 

Paroles d’Actu : Bonjour Fariba Adelkhah, merci de m’accorder cet entretien. On le sait, si Daesh a pu prospérer et se développer sur de larges pans de terres sunnites d’Irak et de Syrie, c’est en partie le résultat de l’affaiblissement dramatique de l’État irakien et, au moins autant, de politiques discriminatoires (ou en tout cas pas suffisamment inclusives) menées par les gouvernements chiites de Bagdad et de Damas à l’encontre des populations sunnites (minoritaires dans le premier cas, majoritaires dans le second).

La première question que j’aimerais vous poser, je me la pose depuis un moment : la fracture sunnite/chiite au sein de l’Islam, élément majeur de la géopolitique moyen-orientale, est-elle cantonnée dans ses concrétisations aux prêches de quelques religieux, aux agissements de certaines de leurs ouailles et, évidemment, aux mouvements que sous-tendent des considérations (géo)politiques ou bien sont-elles prégnantes dans l’esprit de la plupart des croyants ? Posé autrement : cette opposition qu’on voit de l’extérieur est elle ancrée dans la culture des uns et des autres ou bien, in fine, ne vit-elle que par les manipulations politiques qui en sont faites ?

 

Fariba Adelkhah : Je souhaiterais ici, sans sous-estimer la violence et son coût, mettre en avant quelques éléments anthropologiques. C’est aux expert(e)s de la question de savoir comment les intégrer à leurs analyses. La fracture chiites-sunnites est d’abord politique. Elle tient notamment à la compétition entre les États, à la forme de gestion des régions et des populations récalcitrantes tout au long du siècle dernier, ou encore aux politiques discriminatoires et sectaires liées au partage des ressources et au nationalisme.

 

Elle est également religieuse, bien sûr. Par exemple quand les sunnites considèrent les chiites comme « indignes » parce que trop liés aux rituels zoroastriens, et déviants dans certaines de leurs pratiques, telles que le recours au saints (tavassol ou shefa’at). Réciproquement, les chiites qui considèrent un peu rapidement que les sunnites sont irrespectueux à l’égard de la famille du Prophète et, par extension, de ses petits-enfants, au point d’avoir causé leur martyre. La vénération, assez exagérée, pour la famille du Prophète est à l’origine de la fracture religieuse. Mais il y a plus, et cela tient au statut du clergé dans la tradition chiite, qui se fonde entre autres sur le renforcement de la différence avec les autres courants juridiques. Certains courants chiites se sont radicalisés, comme le mahdisme. D’autres formes de pratiques telles que le chant dans les réunions religieuses, des pèlerinages sur des lieux saints dont l’origine est incertaine, ou encore la publication de livres de prières qui ne sont pas directement issus du Coran peuvent faire problème aux yeux d’autres croyants.

 

Enfin, la tension entre chiites et sunnites est historique et ancrée dans certaines régions fertiles, comme à Parachinar, au sud de l’Afghanistan, sur la frontière pakistanaise, où les chiites ont cohabité de tout temps, sur la route menant vers l’Inde, avec les sunnites, non sans conflits. Le fond du problème n’a alors pas grand-chose à voir avec la religion. Il porte plutôt sur le partage du pouvoir, dans une région prospère, entre deux groupes ethniques et confessionnels qui la dominent ou y sont influents. Ce genre de tension ne se cantonne pas à la différence confessionnelle, et on peut le retrouver dans d’autres régions, où s’opposent des familles appartenant pourtant à la même confession, voire des fratries au sein d’une même famille.

 

Toutefois, on ne peut pas parler d’une fracture au quotidien. On ne retrouve pas la fracture dans la vie de tous les jours ! Les familles chiites et sunnites n’ont pas cessé d’échanger au travers des alliances matrimoniales et dans les affaires. Aujourd’hui plus que jamais, car le développement des universités, des zones franches ou encore des modes de communication modernes, le tourisme, y compris religieux, sous forme de pèlerinage, ont facilité autant la mixité confessionnelle que la radicalisation ethnique. Que ce soit en Iran ou en Afghanistan, il n’est pas étrange, ni d’ailleurs rare, de se trouver dans des groupes mixtes confessionnellement, en pleine région sunnite.

 

Et Daesh, après tout, n’assassine pas que des chiites, même si son discours est délibérément violent à l’encontre des non sunnites, notamment à l’encontre du voisin iranien qui monte en puissance. Aussi ne faudrait-il pas oublier que le quarantième jour du deuil de l’Imam Hossein, le troisième Imam chiite, a été l’occasion, pour vingt millions de pèlerins, dont quatre venus de l’étranger, notamment de l’Iran, de se recueillir, le 22 novembre dernier. sur sa tombe pendant trois jours à Karbala, au cœur de la région la plus sous tension, en Irak. Les chiites disent avec une certaine fierté que « le sang n’a coulé du nez de personne », alors que l’entraide et les offrandes prodiguées aux pèlerins par les habitants s’observaient tout au long de la route.

 

« Les rapports entre États de la région ne suivent pas 

strictement les lignes confessionnelles »

 

En outre, si on y regarde bien, la politique des États n’est pas strictement confessionnelle. L’Arabie saoudite ne ferme ses frontières ni aux Ismaélites, ni aux chiites. Il ne faut pas non plus sous-estimer le nombre des sunnites qui font des études religieuses dans la ville sainte chiite de Qom. Si l’Iran ne voulait entretenir des relations qu’avec des pays chiites, il n’aurait guère d’interlocuteurs ! Pendant la guerre contre les Soviétiques, dans les années 1980, l’Iran a servi de terre d’asile non pas au clergé chiite, mais aux djihadistes sunnites afghans les plus radicaux, ceux d’Hekmatyar.

 

La radicalisation religieuse va de pair avec le développement des pratiques touristiques, y compris des pèlerinages, des échanges commerciaux et de l’économie informelle, dans lesquelles les femmes s’impliquent autant que les hommes. Et il faudrait réfléchir à la place des femmes dans les mouvements djihadistes.

 

Évidemment, on peut toujours parler de leur manipulation ou de leur instrumentalisation. Mais ces phénomènes sont trop massifs pour qu’on les réduise à cette logique instrumentale, et il est de toute façon difficile de savoir qui manipule qui. Les arroseurs sont souvent arrosés. Il s’agit plutôt d’un jeu de tactiques disséminées, de stratégies complexes, difficilement réductibles à la guerre factionnelle entre chiites et sunnites.

 

PdA : Il est difficile de sonder l’âme d’un peuple auquel on ne donne pas souvent la parole. Que savons-nous de la manière dont la population iranienne observe les évènements qui ont cours chez les voisins d’Irak, de Syrie, du Yémen ? Que savons-nous de l’état de l’opinion iranienne à l’égard de l’alliance entre la République islamique et le régime Assad ? Plus globalement, qu’est-ce qui, en matière d’affaires extérieures, est un objet de préoccupation dans la population iranienne, hormis la nécessité d’un rétablissement effectif de rapports diplomatiques, commerciaux et financiers normalisés avec le reste du monde ? 

 

F.A. : C’est la peur. On en parle avec beaucoup d’inquiétude. Cela relève de l’imprévisible qui angoisse et qui tourmente au quotidien, dans un pays qui a connu une révolution, en 1979, et huit ans de guerre.

 

Déjà, quand « tout allait bien en Syrie » et que quelques centaines de milliers de pèlerins visitaient ce pays chaque année, on les entendait dire que l’Iran était décidément un pays inégalable. Qu’entendrions-nous aujourd’hui ! « Il y a de la crise partout sauf chez nous, en Iran, que Dieu nous protège », répète-t-on souvent. Ou encore : « Dieu a eu pitié de nous »… L’Iranien, même lambda, a regardé les Printemps arabes, notamment en Egypte, avec beaucoup plus de scepticisme que les analystes en Occident. Et pour cause ! Car la génération qui a fait la révolution de 1979 est toujours au pouvoir : « Ils ne savent pas ce qui les attend ! », disait une femme âgée de 75 ans. Et de continuer : « Nous ne savions pas non plus, quand nous avons fait notre Révolution ». Les Iraniens s’identifient à la population de la région. L’analyse politique voit d’ailleurs dans le repli des Iraniens sur eux-mêmes, ou encore dans leur soutien à l’État, malgré les problèmes politiques, le signe que les événements des Printemps arabes n’avaient rien de rassurant et qu’il fallait à tout prix en éviter de similaires en Iran même, tant l’expérience des troubles au début de la révolution semble ineffaçable, et toujours traumatisante dans la mémoire populaire ou nationale. Leur nationalisme indécrottable fait certes que les Iraniens se sentent différents des autres, mais ils se sentent aussi concernés par les problèmes que vivent les gens de la région, et bon an mal an ils s’identifient à eux, en dépit de leur sentiment de supériorité culturelle. C’est la proximité géographique qui créé le sentiment de vulnérabilité. La pratique massive de la contrebande, du commerce informel, du pèlerinage démontre à elle seule la porosité des frontières nationales, et la contiguïté du danger.

 

« Le discours sécuritaire du régime est porteur auprès d’une

population qui regarde avec angoisse les troubles extérieurs »

 

Néanmoins, dans l’angoisse et la peur qui dominent les esprits, il y a sans doute plus que l’expérience d’un passé dont on ne veut pas la réédition. Il ne faudrait pas oublier que les grands perdants de la guerre Iran-Irak, les Gardiens de la Révolution, qui s’étaient vus obligés de se lancer dans les affaires pour survivre après le cessez-le-feu de 1988, trouvent, dans la crise régionale, une opportunité pour revenir sur scène et pour se refaire une peau neuve. Leur discours sécuritaire entretient ce climat de peur en mettant en avant l’impératif de la Défense nationale et de la protection de la République islamique. Il leur permet d’obtenir de nouveaux moyens financiers et un regain de légitimité, voire de sympathie dans l’opinion, ce à quoi s’emploient les médias. La soudaine popularité du « Sardar » – entendre Sardar Ghasemi, le commandant de l’unité Qods, la branche opérationnelle des Gardiens de la Révolution à létranger, omniprésente en Irak et en Syrie – est de ce point de vue révélatrice.

 

La gestion des conflits régionaux n’a rien de simple. Il est inévitable que le danger qu’ils représentent ait des répercussions sur le climat politique en Iran, et que la thématique de la sécurité monte en puissance. Ces répercussions sont d’autant plus évidentes que jamais l’Iran n’a été autant en symbiose avec le Moyen et le Proche-Orient, par le biais du commerce, du pèlerinage, de l’investissement, de la diplomatie… et de la guerre. Pour autant, la peur n’a pas fait fuir les Iraniens de La Mecque, de Nadjaf, de Kerbela. Et les responsables du waqf – de la fondation religieuse – en charge du pèlerinage en Syrie attendent avec impatience la paix pour pouvoir y emmener à nouveau les pèlerins, sur les lieux saints du chiisme qui sont situés notamment à Damas.

 

PdA : L’accord sur le nucléaire iranien daté de juillet dernier a propulsé le nouveau président de la République islamique Hassan Rohani, apparemment un pragmatique, au cœur du jeu diplomatique. Mais, dans le même temps, les signaux, disons, moins accommodants qui ont été envoyés par Ali Khamenei, guide suprême de la Révolution et numéro un du régime, n’ont échappé à personne. Pouvez-vous nous rappeler comment s’articule, pour l’heure en tout cas, le partage de l’autorité entre ces deux fonctions s’agissant en particulier de la conduite de la diplomatie et de la défense nationales ?

 

F.A. : Le Guide de la Révolution a joué son rôle, non sans méfiance à l’encontre d’une négociation qui mettait côte à côte la République islamique et le vieil ennemi américain, sans que l’on ait de certitude sur l’issue du processus.

 

Le Guide veille à ce que personne ne soit exclu de sa « nappe », pour reprendre la métaphore habituelle du repas. Autrement dit, il doit y avoir une assiette pour tout le monde. On se le représente, sans doute de façon un peu tribale, comme le pilier central de la tente. Et si la tente est plus que le pilier, elle n’existe pas sans celui-ci.

 

Hassan Rohani, et donc son ministre des Affaires étrangères Zarif, n’auraient pas pu avancer d’un pas sans le soutien du Guide. Ils avaient le feu vert dès le départ, mais les adversaires du président de la République ne se sont pas résignés au silence. Ils continuent à critiquer, encore aujourd’hui. C’est qu’ils ont aussi un appui à l’intérieur du système. Et on ne rompt l’équilibre de celui-ci qu’à ses propres dépens. Nul n’a intérêt à afficher ses gains au détriment des autres.

 

Cela dit, les choses ont un peu changé dans les dix dernières années. L’ampleur de l’économie informelle, et l’opportunité d’enrichissement qu’a fournie à certains groupes d’intérêt la nécessité de contourner les sanctions internationales, ont conféré à des acteurs impliqués dans ces flux économiques une autonomie considérable par rapport au pouvoir politique.

 

« Point méconnu à ne pas négliger : l’exercice du pouvoir au

sein de la République islamique est profondément collégial »

 

Tel est le véritable enjeu aujourd’hui. Même si la rente pétrolière demeure importante, elle ne constitue plus la seule source d’enrichissement. L’économie informelle en représente une autre, plus difficile à contrôler par l’État, bien que ses acteurs soient eux-mêmes parties prenantes à ces échanges. La question est d’autant plus complexe que l’exercice du pouvoir, en République islamique, est profondément collégial et que – hormis quelques purges, ou mises à l’écart, durant la guerre ou après la crise électorale de 2009 – l’ensemble de la classe politique révolutionnaire y demeure associée par le biais de différentes instances d’arbitrage. Tous ces gens se tiennent un peu par la barbichette, si vous me passez l’expression. C’est bien l’extraordinaire longévité et stabilité de la classe politique iranienne depuis 1979 qu’il faut souligner.

 

PdA : Les fondations de l’édifice étatique qu’avait bâti l’ayatollah Khomeini sont-elles solides pour autant ? Quelle évolution vous risqueriez-vous à prédire au régime de Téhéran pour l’après-Khamenei et pour la suite au regard des factions en présence et, bien sûr, de ce que sont les aspirations profondes du peuple iranien ?

 

F.A. : Cela pourrait vous paraître surprenant, mais l’après-Khamenei est aussi pensé, aujourd’hui, en Iran. On reste plus ou moins dans le même débat qui a préoccupé le clergé iranien dans les années 1960. Seulement, à l’époque, le clergé n’était pas au pouvoir. On soulignait déjà l’impossibilité de s’appuyer sur une seule « source d’imitation » théologique, et on réfléchissait à la possibilité de créer un conseil composé de quelques-uns des grands ténors religieux de l’époque, auxquels seraient associés des intellectuels islamiques recrutés dans le cercle du Mouvement de la Libération nationale. La Révolution, l’aura de l’Imam Khomeyni, la difficulté de sa succession dans le contexte troublé de l’après-guerre en ont décidé autrement. Il fut choisi, en 1989, de remplacer l’Imam Khomeyni par le président de la République, Ali Khamenei, alors que celui-ci était lui-même partisan d’une instance collégiale, tout comme Ali Akbar Hachemi Rafsandjani, le président du Parlement, qui deviendra alors président de la République. Mais ces débats sont toujours d’actualité, même si l’enjeu en est autre aujourd’hui. L’arrivée au pouvoir du clergé a changé la donne. La fondation de la République islamique a métamorphosé le rapport au transcendant et la dimension islamique. Prévaut un véritable pluralisme de l’expression religieuse, qui n’est pas sans répercussions sur les dynamiques sociales, politiques, mais aussi économiques ou médiatiques. C’est dans ce contexte que Rafsandjani vient de soulever, à ses risques et périls, la question de l’intérim du Guide de la Révolution si celui-ci venait à être empêché, et qu’il a ouvert ce débat houleux dans des termes désacralisés et strictement institutionnels.

 

Une page est bien tournée avec ce pluralisme religieux. Ce qui me fait dire que l’islam n’est pas le passé de l’Iran, mais bel et bien son avenir. Le respect de cette expérience historique, laquelle ne se cantonne ni à l’allégeance à la République islamique ni à son autoritarisme, sera le critère d’évaluation et de légitimité de toute alternative au régime, ou de sa recomposition politique.

 

Fariba Adelkhah

 

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10 octobre 2013

Barthélémy Courmont : "N'oublions pas l'héritage d'Hiroshima..."

   En août 2015, le Japon et le reste du monde se souviendront, à l'occasion de leur soixante-dixième anniversaire, des deux uniques bombardements atomiques de l'Histoire : Hiroshima, le 6 août 1945, Nagasaki, le 9 août 1945. Deux noms qui resteront à jamais associés à l'horreur qu'inspire cette arme : ses retombées, ses images, terrifiantes... Ses victimes, innombrables... Jusqu'à quatre cent mille morts, peut-être davantage... Des dommages irréversibles. Des stigmates qui se sont perpétués, transmis, et qui se transmettent encore. Les leçons, le message aussi : « Plus jamais ça ! ».

   Barthélémy Courmont est professeur de science politique à l'Université Hallym, en Corée du Sud, il est également chercheur associé à l'I.R.I.S. Il fut il y a quelques années l'auteur de l'ouvrage Pourquoi Hiroshima ? (L'Harmattan). Il a accepté d'évoquer pour Paroles d'Actu les coulisses de la décision de Truman, quelques aspects méconnus de la Guerre froide, les enjeux, les périls liés au nucléaire militaire au 21ème siècle. Tantôt terrifiant, tantôt rassurant, un document passionnant, dont je le remercie chaleureusement. Bonne lecture ! Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche, alias Phil Defer. EXCLU

 

ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU

BARTHÉLÉMY COURMONT

Rédacteur en chef de la revue trimestrielle Monde chinois, nouvelle Asie

Chercheur associé à l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS)

 

« N'oublions pas l'héritage d'Hiroshima »

 

Hiroshima

(Hiroshima. AP)

 

Q. : 21/09/13 ; R. : 08/10/13

 

Paroles d'Actu : Bonjour Barthélémy Courmont... « Comme si la Lune, les étoiles, et toutes les planètes venaient de me tomber sur la tête ». Avril 1945. Franklin Roosevelt est mort. Harry Truman n'a que trop conscience du poids de la charge qui pèse désormais sur lui. Lorsqu'il est informé, quelques semaines plus tard, de la réussite du test d'une nouvelle arme surpuissante, il apparaît qu'il sera rapidement confronté à un choix extraordinairement lourd... Que sait-on de ses réflexions, de ses questionnements préliminaires ? A-t-il été sérieusement pris de doutes, de cas de conscience avant de valider l'utilisation du feu nucléaire contre le Japon ?

 

Barthélémy Courmont : Il convient de replacer le moment où Harry Truman est informé de l’existence du Projet Manhattan par Stimson (le secrétaire à la Guerre, ndlr), en avril 1945, dans son contexte. Roosevelt vient de disparaître et, en vertu de la Constitution, c’est le vice-président qui devient immédiatement président des États-Unis. Truman est alors aux antipodes de ce que fut Roosevelt. L’homme du New Deal, élu quatre fois (cas unique dans l’histoire des États-Unis), au fort charisme et garant d’une présidence forte, laissait sa place à un sénateur du Missouri, arrivé à la Maison Blanche consécutivement à l’élection de novembre 1944, et qu’il avait, aux dires des historiens, choisi comme co-listier pour ne pas être encombré d’une personnalité trop forte. Autant dire que rien ne prédestinait alors Truman à la présidence des États-Unis. Ajoutons à cela que la guerre n’était pas terminée, ni en Asie, ni en Europe, et qu’il lui restait donc non seulement à finir le travail, mais aussi et surtout à préparer les États-Unis au nouvel ordre mondial issu du conflit. Truman n’avait pas la moindre idée de l’existence du Projet Manhattan, que Roosevelt avait souhaité garder secret au point de ne pas en informer son vice-président. Trois semaines plus tard, l’Allemagne capitulait sans conditions, puis venait le temps des empoignades avec Staline à Postdam, tandis qu’exactement au même moment, le premier essai nucléaire était mené avec succès à Alamogordo, dans le désert du Nouveau-Mexique, le 18 juillet 1945. Ces premiers mois de la présidence Truman furent d’une richesse exceptionnelle, un véritable moment historique, et c’est sur les épaules d’un président peu expérimenté que des décisions d’une importance cruciale pesèrent. Il fit front avec détermination, et, si on peut bien sûr lui reprocher d’avoir été le seul homme d’État à utiliser le feu nucléaire, il convient de tenir compte de ce contexte très particulier.

 

Dès l’annonce officielle de la destruction d’Hiroshima, Harry Truman a reconnu avoir pris la décision seul, après consultation de ses conseillers militaires et diplomatiques, mais considérant qu’il s’agissait de la décision la plus sage. Dans ses Mémoires, Truman est revenu sur cette décision, qu’il reconnaît avoir été l’une des plus importantes de sa vie. S’il n’exprime pas le moindre doute sur le fait qu’il a pris la bonne décision, c’est en s’appuyant sur le lien de cause à effet entre le bombardement nucléaire et la capitulation japonaise (même s’il est difficile de savoir si le Japon n’aurait pas, de toute façon, capitulé à très courte échéance), et sur le fait que ce choix était selon lui le “moins pire”, notamment si on se réfère aux évaluations des pertes consécutives à une invasion du Japon, comparable à la campagne menée en Europe. N’oublions pas non plus le volet financier du projet, qui a coûté à l’époque deux milliards de dollars, en d’autres termes un immense sacrifice, d’autant que les États-Unis étaient en guerre sur deux fronts, et ne pouvaient dès lors se permettre des dépenses inutiles. En utilisant le résultat de ces recherches coûteuses, Truman justifiait ces dépenses, notamment auprès des membres du Congrès, dont il convient de rappeler qu’ils n’en étaient en rien informés. Dans ces conditions, il va de soi que, dans les réflexions du président américain, le sort des victimes japonaises n’entrait pas en considération.

 

Aux côtés de Truman, deux personnages jouèrent un rôle décisif : Henry Stimson et James Byrnes. Le secrétaire à la Guerre, qui fut le premier à informer Truman de l’existence du projet Manhattan, n’appréciait pas le principe du bombardement des villes, et fut celui qui demanda le retrait de Kyoto (l'ancienne capitale impériale, ndlr) des cibles nucléaires. Il accepta l’idée que la bombe atomique était un choix permettant l’économie de vies humaines, mais il serait erroné de considérer qu’il s’en accommoda pleinement. De son côté, Byrnes, que Truman nomma au Département d’État à la place de Stettinius, était plus concerné par la confrontation éventuelle avec les Soviétiques qu’avec la fin de la guerre du Pacifique. Pour lui, la bombe atomique permettait de porter un coup à Moscou autant qu’à Tokyo, et pour cette raison il fut dès le départ enthousiasmé par le projet. Notons en parallèle que les scientifiques ayant contribué au Projet Manhattan s’élevèrent contre une utilisation de leur engin une fois la capitulation allemande validée, par le biais d’une pétition, mais qui resta lettre morte. L’utilisation de la bombe atomique, c’est le passage de relais du monde scientifique aux décideurs politiques, qui deviennent les seuls maîtres du feu nucléaire.

 

Enfin, en août 1945, la haine vis-à-vis des Japonais atteignait aux États-Unis son paroxysme, avec notamment les douloureuses expériences d’attaques kamikazes, et si elle ne put influencer directement la décision d’utiliser l’arme nucléaire, elle joua en revanche un rôle important dans les préparatifs de l’attaque, notamment en laissant de côté des questions humanistes et moralisatrices qui auraient été soulevées dans le cas d’un bombardement atomique d’une ville allemande. Ainsi, là où l’utilisation de l’arme nucléaire contre l’Allemagne aurait sans doute été à l’origine d’un vaste débat de société, même a posteriori, de telles considérations ne furent jamais évoquées à un tel niveau dans le cas d’Hiroshima, et il fallut attendre la Guerre froide et la crainte d’une guerre nucléaire avec des pertes civiles potentiellement inacceptables pour que le souvenir des horreurs d’Hiroshima et de Nagasaki ne s’impose dans des débats sur la discrimination raciale.

 

PdA : Parmi les arguments invoqués pour justifier cette décision : la fanatisation de l'État-major japonais qui eût requis, pour l'obtention d'une paix sans condition par des voies conventionnelles, une victoire militaire totale, donc une invasion, forcément terriblement coûteuse au plan humain ; la volonté d'affirmer la puissance et la résolution des États-Unis face à une Union soviétique de plus en plus entreprenante en Europe de l'est. Quel est le jugement des historiens d'aujourd'hui, votre jugement s'agissant de l'éventuel "bien-fondé" de l'arbitrage final de Truman ?

 

B.C. : Comme sur de nombreux autres points, les historiens restent divisés sur cette question essentielle, et notamment en ce qui concerne les tentatives de négociation d’une capitulation honorable par la diplomatie japonaise dans les semaines qui précédèrent le double bombardement nucléaire. C’est cependant au milieu des années 1960, sous l’impulsion de jeunes historiens comme Gar Alperovitz ou Barton Bernstein (qui publièrent par la suite un nombre important d’ouvrages et d’articles scientifiques), qu’un nouveau regard, beaucoup plus critique, fut porté sur la décision d’utiliser la nouvelle arme et les premières semaines de l’administration Truman. Qualifiés de révisionnistes, ces historiens remirent en cause les arguments “officiels”, en apportant les preuve des efforts des diplomates japonais, et en replaçant la décision de Truman dans le cadre d’une Guerre froide qui ne disait pas encore son nom.

 

Nous avons vu que plusieurs membres de l’administration Truman, Byrnes en particulier, étaient incontestablement partisans d’une ligne dure vis-à-vis de Moscou. Le nouveau secrétaire d’État considérait ouvertement, en juillet 1945, alors que s’organisait la conférence de Postdam, que la confrontation avec l’Union soviétique était, d’une manière ou d’une autre, inévitable. Dès lors, s’il était décidé d’adopter une position de fermeté dans les négociations diplomatiques qui opposaient Truman à Staline, tous les moyens pouvant permettre de prendre un avantage décisif devaient être prises en considération. Ces éléments nous amènent à penser que l’arme nucléaire fut dès lors pensée comme une asymétrie dans ce qui deviendra officiellement la Guerre froide, offrait à Washington une avance dans sa rivalité avec Moscou. Il est nécessaire ici de revenir sur les conditions dans lesquelles les relations russo-américaines se détériorèrent après la conférence de Yalta, les points de divergence, ainsi que les questions relatives aux informations concernant l’utilisation de la bombe atomique, l’entrée en guerre de l’Union soviétique contre le Japon, et la stratégie « pré-Guerre froide » telle qu’elle fut développée à Washington.

 

Reste la question de l’estimation des pertes américaines consécutives à la prolongation du conflit, qui joua un rôle important dans le processus décisionnel. Elle mérite quelques éclaircissements sur lesquels je me suis penché. Dans les mois qui précédèrent la capitulation du Japon, et plus encore après la fin des hostilités en Europe, les autorités politico-militaires américaines se penchèrent sur les différents scénarios permettant de mettre un terme à la guerre du Pacifique. Après la fin des hostilités en Europe, les premières troupes américaines furent transférées sur le théâtre du Pacifique, en vue d’un éventuel débarquement sur les côtes japonaises, suivi d’une progression terrestre, à la manière de ce qui avait été effectué un an plus tôt en Europe.

 

Le 10 mai 1945, au lendemain de la première réunion de la commission provisoire chargée d’étudier les différentes options offertes dans la guerre contre le Japon, Henry Stimson assista à une réunion des chefs d’état-major dont l’objectif était d’étudier les différents aspects de l’invasion du Japon, et de préparer cette invasion. La première conclusion des chefs militaires était que l’entrée en guerre de l’Union soviétique n’était pas nécessaire au succès du débarquement, et que les troupes américaines avaient la capacité technique de faire plier les forces japonaises sans avoir besoin d’une assistance de Moscou. Cela supposait bien entendu un sacrifice important, mais celui-ci permettait d’éviter un partage des bénéfices une fois la victoire obtenue. D’un autre côté, les chefs d’état-major reconnaissaient qu’une invasion de la Mandchourie par l’Armée rouge pouvait être suffisante pour pousser le Japon à la capitulation, et ce avant même que les troupes américaines ne doivent s’engager dans un débarquement coûteux en vies humaines. S’opposaient ainsi deux conceptions, l’une favorisant une invasion et la non-participation de l’Union soviétique, l’autre privilégiant une économie de vies humaines et l’entrée en guerre de l’Armée rouge. Mais, tandis que les hostilités venaient de prendre fin en Europe, les dirigeants politiques américains continuaient d’espérer que Moscou se joigne rapidement aux opérations dans le Pacifique. La priorité des dirigeants américains, y compris des militaires, était de parvenir à une reddition du Japon à moindre coût humain, et, pour cette raison, la participation de l’Armée rouge était vivement souhaitée. Pour autant, la possibilité d’une invasion ne fut pas écartée, et les chefs d’état-major furent chargés de réfléchir aux différentes options.

 

Le 25 mai, le Joint Chiefs of Staff approuva un plan d’invasion du Japon prévu par un débarquement sur l’île de Kyushu le 1er novembre 1945, sous le nom d’opération Olympic. Considérant que la poursuite des bombardements conventionnels et du blocus maritime ne pouvait être suffisante pour faire plier l’empereur, les chefs militaires américains décidèrent de préparer un plan d’invasion comparable à ceux en Europe, qui apporterait des résultats significatifs malgré des pertes lourdes. Le président Truman donna son accord le 18 juin, considérant à ce moment que la situation politico-militaire du Japon justifiait un débarquement, qui malgré les pertes énormes aurait été un succès et aurait mis fin aux hostilités. Cette opération nécessitait la participation de l’allié soviétique qui, en attaquant la Mandchourie, aurait occupé le plus gros de l’armée japonaise, rendant le débarquement possible. L’opération Olympic supposait donc, comme cela avait été prévu à Yalta, la coopération de Staline contre le Japon. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la date du 1er novembre avait été retenue, soit trois mois après la date limite prévue pour l’entrée en guerre de l’URSS contre le Japon, c’est-à-dire à un moment où le gros des forces japonaises aurait été mobilisé en Mandchourie.

 

L’opération Olympic, dans l’hypothèse où elle n'aurait suffi à faire capituler le Japon, devait être suivie d’une autre opération, du nom de Coronet, qui consistait, à partir de Kyushu, à débarquer sur l’île principale de l’archipel, Honshu, puis de progresser jusqu’à Tokyo, à la manière de ce qui avait été fait en Allemagne. Le début de cette opération était prévu pour le 1er mars 1946, supposant au préalable le succès d’Olympic et l’implantation des forces américaines dans l’archipel.

 

Le général George C. Marshall était favorable au plan d’invasion, qu’il avait cautionné comme étant à son avis la seule possibilité de venir à bout des forces japonaises. Si certains, comme l’amiral Ernest J. King, souhaitaient multiplier les assauts sur les positions japonaises en Chine et en Corée avant d’attaquer l’archipel, Marshall considérait qu’un débarquement sur Kyushu était possible, et aurait été couronné de succès. Avant que la bombe atomique ne vienne s’installer comme un adversaire de taille à la stratégie de l’invasion, Marshall s’était imposé à Washington parmi les autres chefs militaires comme l’homme providentiel apportant enfin une solution à une guerre trop longue et coûteuse. L’Army prenait le dessus sur la Navy, profitant des effectifs mis à disposition de ces opérations après leur démobilisation en Europe, et offrant la solution la plus radicale, permettant à coup sûr un succès sur le Japon, même au prix de lourdes pertes.

 

Les principaux amiraux, King à leur tête, considéraient pour leur part que l’invasion du Japon n’était pas nécessaire, et en ce sens ne partageaient pas le point de vue des généraux de l’Army. Pour eux, les opérations Olympic et Coronet n’auraient jamais dû être préparées, puisque tout débarquement sur les côtes japonaises aurait été plus meurtrier que la poursuite des raids aériens et du blocus maritime. Cependant, et ce point est important, dans les discours qui ont immédiatement suivi le bombardement d’Hiroshima, aucune mention n’a été faite de la possibilité de poursuivre le blocus maritime, tandis que l’invasion était annoncée comme étant la seule alternative à la bombe. Il semble donc que les choix stratégiques de l’Army aient fortement influencé les dirigeants américains, tandis que les options de la Navy furent négligées. Cela s’explique en partie par l’image dont bénéficiaient les généraux de l’Army, auréolés de victoires en Europe, par rapport aux amiraux de la Navy.

 

Les options proposées par la Navy, qui reposaient sur une stratégie de long terme visant à affaiblir un Japon totalement isolé, et un usage limité de la violence, restèrent ainsi sans écho, et ne furent révélées que par la suite, notamment dans les mémoires des amiraux concernés. Intensifier le blocus maritime, et le poursuivre pendant plusieurs mois, aurait ainsi, selon la Navy, permis d’éviter Hiroshima et Nagasaki, et rendu inutile toute tentative de débarquement. Il convient donc de s’interroger sur les choix de l’état-major et de la Maison Blanche, qui dès leurs premières réunions concernant la préparation de la dernière phase de la guerre du Pacifique, semblèrent écarter des stratégies d’essoufflement. En fait, à l’inverse des généraux de l’Air Force, les officiers de la Navy n’estimaient pas indispensable une intensification des bombardements contre les villes japonaises, considérant que l’endiguement aurait pu être suffisant.

 

La conférence du 18 juin autour du président Truman rassembla les principaux acteurs militaires et politiques américains, les généraux Marshall et Ira C. Eaker (représentant le chef d’état-major des forces aériennes, Henry H. Arnold), les amiraux Leahy et King, le secrétaire à la Marine Forrestal et le secrétaire-adjoint à la Guerre John McCloy. Le secrétaire à la Guerre Henry Stimson était souffrant et avait au départ annoncé qu’il serait absent (et remplacé par McCloy), mais il se présenta pourtant à la Maison Blanche au début de la réunion. Si ce fut à l’occasion de cette rencontre que Truman donna son aval à l’opération Olympic, les différentes personnalités présentes montrèrent leurs divergences, et masquèrent leurs préoccupations concernant la participation de l’Union soviétique à l’effort de guerre. Les chefs militaires avaient été convoqués quatre jours plus tôt, le 14 juin, avec comme recommandation de présenter des estimations concernant les pertes humaines dans le cas d’une invasion terrestre du Japon, de l’intensification des bombardements, ou d’un blocus naval. Dans le memorandum conviant les participants à la réunion, Leahy notait ainsi que « Truman souhaite être informé de ce que nous souhaitons que les Russes fassent ». Illustrant l’importance de l’événement, Truman nota dans son journal la veille de la réunion : « Je dois prendre une décision concernant la stratégie à adopter au Japon. Devons-nous envahir le Japon ou le bombarder et préparer un blocus ? C’est la décision la plus importante à ce jour, mais je la prendrai une fois que j’aurais tous les éléments entre les mains ».

 

Stimson avait entretenu McCloy de ses préoccupations la veille de la réunion, et devant le silence du secrétaire-adjoint lors de la conférence, Truman lui demanda son avis alors que celle-ci se terminait. McCloy le lui donna, selon ces termes, qui restent l’un des témoignages les plus importants concernant les débats entourant l’utilisation de l’arme nucléaire : « Il suggéra alors une solution politique… Quelque communication au gouvernement japonais qui énoncerait nos conditions, où nous n’emploierions pas les mots de ‘reddition inconditionnelle’, mais qui nous procurerait tous nos objectifs. ‘Quelles seraient ces conditions ?’ me demanda le président. J’improvisai : nous ne menacerions pas leur existence en tant que nation ; nous les autoriserions à choisir leur propre forme de gouvernement, y compris le maintien du Mikado (l'institution impériale, ndlr), mais uniquement sur la base d’une monarchie constitutionnelle, etc. ‘Bon ! J’y avais pensé, dit le président. Pourriez-vous mettre cela en forme, le donner au secrétaire d’État pour voir ce que nous pourrions en faire ?’ ‘Je suis très heureux que cette question ait été soulevée’, observa M. Stimson. Je demandais alors s’il ne fallait pas leur dire que nous avions la bombe atomique. Le mot produisit comme un saisissement. On n’avait pas le droit de le prononcer, pas plus que de parler de tête de mort et de tibias dans un cercle distingué à Yale. Cela ne se faisait pas ! ‘Je pense que notre position morale serait meilleure si nous leur donnions un avertissement spécifique au sujet de la bombe’ ajoutai-je. Un désaccord se manifesta. ‘Nous ne savons pas si elle éclatera, objecta-t-on. En cas d’échec, notre prestige serait grandement atteint.’ ‘Mais, répondis-je, tous les savants assurent que la chose explosera ; il est précisément question de l’essayer, mais ils sont tout à fait certains, d’après les rapports que j’ai vus, de la réussite. L’avantage moral que nous prendrions devrait faire accepter le risque d’un essai raté. Parlons au moins en termes généraux de sa puissance. Annonçons qu’une seule bombe détruirait une ville entière. Ils comprendraient.’ ‘Envoyez votre mémorandum au Département d’État, dit le président ; nous étudierons la question.’ Le point de vue des soldats et des marins présents était intéressant. Ils se montrèrent tous soucieux d’employer leurs propres forces pour mettre fin à la guerre. L’amiral Leahy, qui était une sorte de conseiller général et ne commandait aucune force, me parut seul d’accord pour rechercher un règlement politique… Je m’en souviens très nettement… Le général Marshall prit position. L’utilisation de la bombe, dit-il, aurait des conséquences politiques si formidables qu’il laisserait les civils prendre toutes les décisions à son sujet. Il comptait n’y intervenir d’aucune manière. Cependant, je ne l’entendis jamais exprimer l’opinion qu’il ne fallait pas l’utiliser… ».

 

La réunion commença à 15h30. Après avoir présenté l’enjeu de la réunion, Truman donna la parole à Marshall, en tant que chef du Joint Chiefs of Staff. Celui-ci se montra favorable à un débarquement à Kyushu, considérant qu’il s’agissait de l’option la moins coûteuse en vies humaines. Marshall estimait que la conquète de Kyushu était essentielle à la bonne poursuite des bombardements des villes d’Honshu, et indispensable à l’éventuelle formation d’un blocus. Le chef du J.C.S. expliqua ensuite que le débarquement devrait être programmé avant le 1er novembre 1945, afin de ne pas laisser à l’industrie japonaise le temps de se réorganiser et de produire de nouvelles capacités de défense. S’attardant sur la question du calcul des pertes dans le cas d’une invasion, Marshall considéra enfin que toute projection était déplacée, mais qu’il ne pensait cependant pas que le nombre de victimes américaines puisse dépasser le chiffre de la prise de Luzon (Philippines), c’est-à-dire 31 000 morts et disparus. Les arguments de Marshall, appuyés par l’Army et la Navy, étaient que la victoire sur le Japon ne pourrait être obtenue uniquement depuis les airs, et qu’il fallait par conséquent se résoudre à considérer un débarquement comme la seule option permettant d’envisager la victoire finale. Marshall rappelait souvent que les bombardements n’avaient pas été suffisants pour faire définitivement plier l’Allemagne nazie, et qu’il avait fallu attendre le débarquement sur les côtes normandes, et la progression vers Berlin pour que la victoire finale se dessine enfin. L’amiral King se montra totalement favorable à la proposition de Marshall, considérant que Kyushu était la « clef de toute opération », et que l’invasion d’une des principales îles de l’archipel japonais aurait des effets importants, permettant même une éventuelle fin des hostilités avant même l’invasion d’Honshu.

 

Suite à ces présentations, l’amiral Leahy contesta les estimations de Marshall concernant le nombre de victimes, considérant que les pertes dans le cas d’un débarquement à Kyushu seraient comparables à celles d’Okinawa. Il avança donc le chiffre de 49 000 morts en opposition aux 31 000 de Marshall. King se montra immédiatement sceptique, considérant que la marge de manœuvre à Kyushu serait nettement supérieure à celle d’Okinawa, et que pour cette raison, le nombre de victimes ne dépasserait pas celui de Luzon, ou de très peu, mais en aucun cas ne serait aussi élevé qu’à Okinawa. En réponse à cette réaction, Leahy décrivit les différentes raisons rendant l’invasion de Kyushu difficile et particulièrement meurtrière, appuyant une fois de plus sur l’idée selon laquelle les pertes seraient plus proches de celles d’Okinawa que de Luzon.

 

Truman se montra nerveux, et conclua que, d’une façon ou d’une autre, l’opération proposée pouvait avoir pour conséquence, dans le pire des cas, de provoquer des pertes aussi lourdes qu’à Okinawa, ce à quoi les personnalités présentes ne purent que se montrer d’accord, notamment le général Eaker, qui mentionna au passage avoir également l’accord d’Arnold. Les personnes présentes tombèrent également d’accord sur le fait que le temps était favorable aux Japonais, et qu’il fallait dans ces conditions préparer un plan d’invasion dans les délais les plus brefs possibles, et sans retard. Le président Truman conclua la séance en considérant que, malgré le coût humain important d’un débarquement à Kyushu, à certains égards comparable à Okinawa, cette opération s’avérait être l’option la plus crédible, et c’est donc à cette occasion qu’il donna son feu vert à la préparation du plan d’invasion.

 

Enfin, et ce point est important, lors de la conférence, le général Marshall cita l’opinion du général MacArthur, qui n’était pas présent. Ceux-ci se présentaient ainsi : « Les risques et les pertes du débarquement seront grandement réduits si les Russes attaquent en Sibérie suffisamment à l’avance pour obliger l’ennemi à engager le gros de ses forces. A mon avis, rien ne doit être changé à Olympic ». Truman comprenait le désir des militaires de voir l’Armée rouge entrer en guerre, mais, d’un autre côté, souhaitait limiter autant que possible la participation de l’Union soviétique à la guerre contre le Japon, afin de se placer en position de force une fois l’armistice signée. Indiscutablement, dans l’esprit du président américain, du succès de l’essai nucléaire dépendait le choix de la stratégie à adopter pour remporter la victoire finale. Si, en juin, l’opération Olympic était l’option la plus acceptable, car elle permettait de conduire à la défaite du Japon, les conditions évoluèrent rapidement, et ,un mois plus tard, les perspectives d’un débarquement furent laissées de côté au profit d’une option nettement moins coûteuse, et plus rapide.

 

Cependant, considérer que, dès le départ, les considérations entourant le projet d’un débarquement étaient une fausse piste est une erreur dans la mesure où, malgré les rapports des scientifiques, rien n’indiquait que la bombe serait opérationnelle dans les délais prévus. Ce qui préoccupait Truman n’était pas de savoir si les États-Unis disposeraient un jour de la bombe atomique, et si celle-ci serait effectivement aussi puissante que prévu, mais à quel moment elle serait opérationnelle et utilisable. Dans le cas d’une entrée en guerre de l’Union soviétique, les États-Unis devaient être prêts à lancer une offensive permettant de remporter la victoire finale, même si cela devait supposer un coût humain excessivement important. Cependant, il convient de s’interroger sur les conditions dans lesquelles l’opération Olympic a peu a peu été abandonnée au profit du bombardement atomique, et les arguments qui furent avancés par les autorités américaines.

 

PdA : 6 août 1945 : Hiroshima... 9 août 1945 : Nagasaki... et leurs suites... Quels sont les chiffres, les images dont vous estimez qu'ils devraient rester gravés dans l'esprit de nos lecteurs comme ils le sont dans le vôtre ?

 

B.C. : Au-delà de son caractère sinistre, la question des chiffres concernant les victimes est intéressante en ce qu’elle continue de diviser, près de soixante-dix ans après les deux bombardements nucléaires, les historiens. La raison est propre à la nature même des engins utilisés, dont on sait que les victimes succombèrent à quatre catégories de facteurs : le souffle de l’explosion; l’extrême chaleur dégagée lors de l’explosion; les incendies qui se propagèrent dans des villes construites essentiellement en bois; et, bien entendu, les radiations. L’évaluation des victimes dues aux radiations est beaucoup plus difficiles que les trois catégories précédentes, en raison de la période d’étude, et de l’identification de conditions au-delà desquelles les victimes ne seraient pas considérées comme directement exposées.

 

Dans ces conditions, le nombre de victimes exact est difficile à déterminer, et varie de données dites “basses” (80 000 pour Hiroshima et 60 000 pour Nagasaki) à “hautes” (plus de 400 000 pour les deux bombardements réunis), selon la place qu’on accorde aux victimes de cancers des années après l’évènement, et pour lesquels le lien avec l’exposition aux radiations est hautement probable, mais ne constitue pas toujours une évidence. Prenons l’exemple d’Hiroshima. Plusieurs années après l’explosion atomique, les habitants se sont dispersés. Certains sont restés à Hiroshima, d’autres par contre ont quitté à jamais cette terre maudite. C’est notamment le cas de ceux qui avaient perdu biens et proches, ou plus simplement de ceux qui ont trouvé refuge dans d’autres régions, une fois la guerre finie. Il est par conséquent difficile de retrouver des traces de tous les habitants pour les comptabiliser parmi des victimes d’Hiroshima. De plus, rien ne prouve, malgré les soupçons, que ces personnes sont décédées des suites d’Hiroshima, et les nombreux cas de cancers peuvent, même pour une part infime d’entre eux, ne pas être dus aux radiations dégagées le 6 août 1945. Dans cette catégorie sont également comptés tous les enfants nés de victimes d’Hiroshima, et qui souffraient de maux transmis par leurs parents, et transmirent ces maux par la suite. Là encore, il est particulièrement difficile de compter combien de personnes sont décédées vingt, trente ou cinquante ans plus tard des suites des radiations dégagées. Enfin, cette catégorie souffre du rapport victimes/population qui n’est pas quantifiable. Si 300 000 personnes sont décédées directement ou indirectement des suites de la destruction d’Hiroshima depuis 1945, comme l’affirment certaines sources, la population de la ville reste difficile à connaître, à moins de faire une somme de tous les renouvellements de population depuis cette période, ce qui semble impossible.

 

Un chiffre mérite cependant à mon sens d’être retenu : 1. Il a fallu une seule bombe pour détruire chaque ville, là où le bombardement de Tokyo en mars 1945 (plus de 300 000 morts) a nécessité la mobilisation de milliers de bombardiers, et d’un nombre incalculable de bombes incendiaires. Ce chiffre est encore plus éloquent dans le cas d’Hiroshima, quand on sait que cette ville n’avait pas été victime d’un seul raid aérien avant le 6 août 1945. Une seule bombe fut donc nécessaire pour détruire à près de 90% une ville importante, et les images prises dans les jours qui suivirent les deux bombardements se passent à ce titre de commentaires. L’image d’une déshumanisation, qui contraste, quand on visite les magnifiques et terrifiants à la fois musées d’Hiroshima et de Nagasaki, avec l’humanisme que ces deux villes souhaitent désormais véhiculer.

 

Pourquoi H

 

PdA : Au-delà de l'horreur qu'elles évoquent, peut-on dire de ces dates qu'elles marquent le début de quelque chose de profondément nouveau, différent, dans la manière d'aborder les relations internationales notamment ?

 

B.C. : Incontestablement. La capacité de destruction de l’arme nucléaire ouvrit une nouvelle ère des relations internationales, dont la Guerre froide fut le catalyseur pendant plus de quarante ans, et dans laquelle les rapports de force sont totalement bouleversés.

 

De fait, depuis soixante-dix ans, l’arme nucléaire s’impose comme le symbole de la puissance par excellence. Avec elle, l’humanité a été mise en possession de sa propre mort car, si la planète a survécu à toutes les guerres, y compris deux à échelle mondiale, qu’elle a subies, chacun a conscience qu’elle aurait été anéantie par la troisième si celle-ci avait été nucléaire. Lancés dans une formidable course aux armements, qui les a conduit à posséder chacun jusqu’à plus de 13 000 armes nucléaires déployées, et autant en réserve, Moscou et Washington avaient de quoi faire disparaître trente à quarante fois le monde. Cependant, conscients de leurs responsabilités, les deux superpuissances ont toujours évité, depuis Hiroshima et Nagasaki, d’utiliser ces armes dont elles savaient qu’elles pourraient les entraîner au-delà de l’irréparable.

 

On peut considérer qu’avec l’arme nucléaire, l’Homme devint maître de son propre destin, mais cette maîtrise est placée entre les mains de certains. En d’autres termes, à partir de 1945, certaines personnes disposèrent du pouvoir de destruction de tous, eux-mêmes compris. La victoire était celle de l’État (et des théories réalistes des relations internationales), mais pas de l’individu, là où des armes plus simples restaient accessibles au plus grand nombre, comme le prouve l’importance des trafics d’armes de petit calibre. En ce sens, le progrès technique réalisé avec la bombe atomique ne peut être comparé avec les différentes évolutions dans l’histoire de la guerre, aucune arme n’ayant jamais eu de capacité décisive aussi marquée. C’est non seulement l’intensité de la destruction, mais aussi la nature de celle-ci, reposant sur le pouvoir décisionnel d’un petit nombre, qui furent totalement bouleversées. De même, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, l’Homme en possession de l’arme nucléaire pouvait avoir le contrôle de la terre, avec tous les risques que cela implique. La guerre restait la « poursuite de la politique par d’autres moyens », selon les termes de Carl von Clausewitz, mais l’arme nucléaire offrit la possibilité de contrôler l’avenir de l’humanité toute entière. Ces « moyens » devenaient quasi irrationnels, dans la mesure où ils pouvaient apporter une destruction totale et sans aucune distinction.

 

Admirée, redoutée, fascinante, terrorisante, déshumanisante aussi, l’arme nucléaire a ainsi été génératrices de sentiments contradictoires. Gage de paix et de sécurité pour les uns, annonce de l’apocalypse pour les autres ; partisans de la dissuasion nucléaire ou avocats d’un désarmement nucléaire général et complet convaincus de l’urgence absolue d’un tel programme ; pays dotés d’armes nucléaires ou pays qui par choix ou par impossibilité juridique, scientifique ou financière n’en sont pas pourvus ; responsables politiques, chefs militaires, essayistes ou experts, du Nord au Sud, tous restent persuadés du caractère absolu de l’atout nucléaire. Les pays qui en sont pourvus, qu’on les jalouse, les admire ou les condamne, restent malgré tout considérés comme au-dessus du lot, dotés d’un avantage incomparable à tous les autres. Ainsi, depuis soixante-dix ans, les pays nucléaires règnent sur l’Olympe de la puissance, et l’arme suprême sert de moteur aux relations internationales.

 

PdA : J'aimerais, pour cette question, faire appel à votre intime conviction. La possession par chacun des deux camps d'arsenaux pléthoriques, l'assurance qui en a découlé d'une destruction mutuelle certaine en cas de conflit nucléaire ont contribué à éviter, précisément, les conflits directs et à grande échelle entre les deux blocs. La situation aurait-elle été la même si l'arme nucléaire n'avait pas été développée ? La "guerre froide" serait-elle restée "froide", je pense en particulier au théâtre européen ?

 

B.C. : Il est bien sûr difficile de répondre à cette question sans tomber dans une forme de politique-fiction, ou d’extrapolations qui resteront de toute façon invérifiables. Il convient d’abord de rappeler que, si l’arme nucléaire a, de fait, réduit les risques de confrontation entre Washington et Moscou, elle n’est pas parvenue, selon la formule de Raymond Aron, à assurer la paix entre les deux blocs. Par ailleurs, plusieurs conflits, même par acteurs interposés, confirment que les deux blocs n’en restèrent pas à des rhétoriques et des politiques de dissuasion, mais n’hésitèrent pas en certaines occasions à passer à l’attaque. Le cas de la Guerre de Corée est à ce titre particulièrement intéressant, considérant que les deux puissances possédaient déjà le feu nucléaire (Moscou ayant procédé à son premier essai en 1949), et que la puissance de ces armes était suffisamment limitée (en comparaison avec les armes thermonucléaires développées plus tard) pour en « permettre » l’utilisation. La question fut évoquée côté américain, pour endiguer l’offensive des « volontaires » chinois, mais elle resta sans effet, et la déclassification des archives des deux pays n’indique pas une volonté d’utiliser l’arme nucléaire afin de prendre l’avantage sur l’autre bloc.

 

Cela signifie-t-il que l’opposition idéologique et politique entre Moscou et Washington n’aurait pas été au-delà de ce qu’elle fut sans l’équilibre de la terreur imposé par l’arme nucléaire ? Difficile de se prononcer, mais il serait erroné de considérer l’origine des conflits, et les motivations de ceux-ci, sur la simple base des capacités militaires à la fois offensives et défensives. La guerre est analysée de multiples manières, et les théories sur le dilemme de sécurité nous offrent un regard pertinent sur les risques de déclenchement d’un conflit. Mais de là à en conclure que, sans l’arme nucléaire et les capacités de représailles, la guerre froide aurait dégénéré en un conflit ouvert entre les deux blocs, il y a un pas. N’oublions pas que les deux pays disposaient, en marge de leur arsenal nucléaire, de capacités dites conventionnelles considérables, qui ne furent cependant jamais utilisées à grande échelle, et ce malgré l’existence de « plans », desquels étaient d’ailleurs exclues les armes nucléaires.

 

Vous faites cependant référence, dans votre question, à la possibilité de voir les deux grandes puissances s’affronter sur d’autres théâtres d’opérations, et cette question fait écho à la crise des euromissiles. Moins célèbres que les fusées de Cuba, les forces nucléaires intermédiaires (FNI), plus communément appelées euromissiles, ont cependant donné lieu à la plus grande controverse stratégique des années 1980, et à certains égards de toute la Guerre froide. L’Union soviétique avait déployé au milieu des années 1970 des SS-20, missiles nucléaires terrestres qualifiés d’« euromissiles », car leur portée ne leur permettait d’atteindre que le sol européen, et laissait le territoire américain à l’abri. Les dirigeants européens, au premier rang desquels les Allemands de l’Ouest, craignaient un « découplage » de la défense de l’Europe de celle des États-Unis. Si l’Union soviétique utilisait les SS-20, les Américains étaient certains de ne subir aucun dommage chez eux, ce qui ne devait pas nécessairement supposer que la puissance nucléaire américaine soit utilisée au même titre qu’elle le serait dans le cas d’une attaque contre le territoire américain.

 

Pour répondre au défi, les Européens demandèrent aux Américains de déployer leurs propres euromissiles, l’objectif étant de dissuader Moscou de se lancer dans une bataille nucléaire sur le sol européen, dont les conséquences auraient été aussi terribles de part et d’autre. En 1979, l’OTAN adoptait ainsi la « double décision ».

 

Les États-Unis déployèrent des missiles de croisière et des Pershing II à partir de 1983, mais entre temps, une négociation soviéto-américaine s’engagea et aboutit sur un accord mutuellement acceptable. Moscou choisit l’intransigeance en profitant du décalage entre l’ouverture des négociations et le déploiement des missiles américains. Les autorités soviétiques espéraient qu’en durcissant le ton, elles feraient peur aux gouvernements européens qui, du coup, renonceraient au soutien apporté par les missiles américains. Alors que Moscou avait déployé ses SS-20 plusieurs années auparavant, les Soviétiques accusaient Washington de relancer la course aux armements. Finalement, malgré une mobilisation d’une partie des opinions publiques ouest-européennes contre le déploiement des missiles, les Occidentaux gardèrent le cap et, devant l’échec de la négociation - que l’Union soviétique, jouant la carte de l’intimidation, n’avait jamais prise au sérieux -, les premiers déploiements de Pershing eurent lieu en novembre 1983. Les Soviétiques réagirent vivement en rompant les négociations nucléaires de Genève. Mais après une courte période de bouderie diplomatique, Moscou allait revenir à la table de négociation. De façon réaliste, elle enregistrait que son opération de découplage non seulement n’avait pas réussi, mais se retournait contre elle. Elle comptait obtenir un avantage stratégique, mais se retrouvait finalement sous la menace de missiles terrestres à dix minutes de Moscou. Les États-Unis, de par leur éloignement, n’étaient pas pour leur part dans la ligne de mire des euromissiles, ce qui était un avantage considérable. Cette crise est en ce sens révélatrice de l’absence de situation totalement symétrique, en Europe comme à Cuba vingt ans plus tôt, et c’est peut-être cette absence de symétrie qui fut, dans le cas de la Guerre froide, la meilleure garantie de non-utilisation de la force armée, et de sa composante nucléaire.

 

Tsar Bomba

La Tsar Bomba soviétique (1961) fut l'arme la plus puissante jamais utilisée par l'Homme.

Elle équivalut aux explosions combinées d'Hiroshima et de Nagasaki... multipliées par 1 400...

Elle représenta l'apogée d'une course folle aux armements. Le début d'une sérieuse prise de conscience...

 

PdA : Avançons un peu dans le temps... 2003 : l'Irak est envahi par l'Amérique de Bush. Le rapport de forces est totalement disproportionné, le régime écrasé. 2006 : la Corée du nord effectue son premier essai nucléaire. Une assurance-vie à l'efficacité redoutable... Un moyen d'entamer de sérieuses négociations, de pouvoir faire valoir son point de vue, en tout cas. L'appel d'air n'est-il pas préoccupant s'agissant de la non-prolifération ?

 

B.C. : Ce qui est intéressant dans cette question, c’est l’attitude de Pyongyang face à l’invasion de l’Irak en 2003. Le régime de Saddam Hussein ne disposait pas d’armes de destruction massive, ce qui précipita la campagne militaire américaine. De son côté, la stratégie du fou ou du pire de Pyongyang repose sur sa force nucléaire supposée et déclarée, et des capacités balistiques démontrées à l’occasion de plusieurs essais. Si elle n’est pas officiellement formulée, la stratégie de dissuasion nord-coréenne, qui doit assurer la survie du régime et favoriser les négociations avec les adversaires désignés, s’appuie sur deux piliers sans lesquels elle n’aurait aucune portée : la menace permanente d’une utilisation, et une opacité complète sur les réelles capacités nucléaires dont dispose ce pays. Cette double caractéristique est essentielle pour permettre à Pyongyang d’énoncer une stratégie pouvant être couronnée d’effet. Elle est fragile et dangereuse, mais si elle bien maniée, elle offre à ce petit pays exsangue une capacité de nuisance, et donc de marchandage, totalement disproportionnée.

 

Les États proliférants s’efforcent généralement, une fois qu’ils ont constitué un arsenal nucléaire, de définir une doctrine de dissuasion informant les agresseurs éventuels des réponses auxquelles ils devraient s’attendre. L’Inde et le Pakistan se sont ainsi échangé des signaux très clairs en ce sens après leurs campagnes d’essais en 1998, et instauré une sorte d’équilibre de la terreur calqué sur le modèle de la guerre froide. Pyongyang a pour sa part choisi de terroriser ses voisins en brandissant la menace de l’emploi, et allant même jusqu’à l’annoncer en réponse à ce qui serait perçu comme une provocation. Il s’agit là d’une nouvelle forme d’utilisation de l’arme nucléaire, qualifiée de stratégie du fou en ce qu’elle s’inspire de la Mutual Assured Destruction (MAD), et est renforcée par le caractère souvent jugé imprévisible du régime nord-coréen. Le message pourrait ainsi être caricaturé en ces termes : « Ne m’approchez pas de trop près où je fais tout sauter ! ». En terrorisant ses adversaires, et en utilisant à cet effet son arme nucléaire, là où ses capacités conventionnelles dépassées n’ont pas le même impact, Pyongyang pratique une forme de dissuasion par le chantage. Il faut remonter, toutes proportions gardées, à l’époque où les États-Unis détenaient le monopole du nucléaire, entre 1945 et 1949, pour retrouver une situation similaire, avant que l’équilibre de la terreur ne s’impose. La différence de taille est que la Corée du Nord place son existence dans la balance, ce qui a pour effet de bouleverser les comportements habituels qui définissent la dissuasion nucléaire.

 

L’autre pilier de la stratégie de dissuasion de Pyongyang est l’opacité de ses capacités. Les adversaires désignés du régime nord-coréen sont ainsi dans l’incertitude la plus totale, non seulement en ce qui concerne ses intentions, mais aussi et surtout les moyens permettant de les mettre à exécution. Or, dans un bras de fer de cette nature, le plus important n’est pas l’information dont on dispose sur le niveau de ses propres forces, mais l’information à laquelle l’autre n’a pas accès. Pyongyang joue sur cette incertitude, et l’alimente en permanence, à coup d’annonces et de tests dont les succès réels ne peuvent être démontrés et restent flous. Ici, le message serait : « Ne m’approchez pas de trop près car vous ne savez pas de quoi je suis capable ! ». Face à ce discours, la prise de risque est totale. Qui se lancerait ainsi dans une offensive militaire contre un pays dont on ne connaît que trop peu les capacités, et qui prétend par ailleurs disposer de moyens de riposte disproportionnés ?

 

L’opacité des capacités nucléaires de Pyongyang peut être interprétée comme la preuve de son manque de consistance. En d’autres termes, nous sommes en droit de nous interroger si la Corée du Nord dispose d’une véritable force de frappe nucléaire (à savoir des ogives pouvant être montées sur des missiles), et même si elle dispose de l’arme nucléaire tout court. Après tout, on pourrait tout aussi bien considérer que Pyongyang ne dispose pas de l’arme, ou en tout cas d’une arme utilisable, et pratique ainsi une forme inédite de dissuasion nucléaire sans le nucléaire. En ce sens, l’arme nucléaire nord-coréenne peut être qualifiée d’arme du pauvre, moins coûteuse que des capacités conventionnelles auxquelles le régime ne peut prétendre, mais qui lui permet par son potentiel destructeur de se hisser au niveau des grandes puissances. Et le résultat est plutôt spectaculaire pour un petit pays dont on imagine difficilement le régime capable de survivre sans l’arme nucléaire, ou plus exactement sans le doute qu’il laisse planer sur la possibilité qu’il la possède. À ce petit jeu, il y a de fortes chances que Pyongyang poursuive cette stratégie tant qu’elle sera en mesure de le faire, et on pourrait même imaginer d’autres régimes tentés par la même forme de dissuasion, suggérant un risque de prolifération de telles pratiques.

 

PdA : Il est difficile d'imaginer qu'un État, quel qu'il soit, utilise l'arme (thermo)nucléaire de nos jours, sauf en cas de péril mortel. Les retombées seraient incalculables, la désapprobation internationale unanime. Est-il réaliste, en revanche, de craindre que certaines ogives puissent tomber entre les mains de groupes extrémistes ? On a beaucoup parlé du Pakistan comme possible "maillon faible" du club nucléaire. Le club compte-t-il des "maillons faibles" évidents, aujourd'hui ?

 

B.C. : Il est évident que des groupes terroristes se dotant de l’arme nucléaire imposeraient une nouvelle grille de lecture de la dissuasion. Cette dernière repose sur le rôle central de l’État, et sur la rationalité qui l’accompagne. Il est ainsi de fait assez difficile d’imaginer un dirigeant s’exposer à des représailles massives, également qualifiées de disproportionnées, se mettre à dos la communauté internationale, sans même faire mention des effets possibles de l’utilisation de sa propre arme contre lui-même. Le scénario d’Hitler dans son bunker, prêt à toutes les extrémités pour entrainer avec lui sa propre population, reste heureusement très rare, mais il ne doit cependant pas être exclu, et sert de mise en garde contre ceux qui détiennent le feu nucléaire. Dans le cas des États, s’il est souhaitable que la dissuasion repose sur les épaules d’un individu, afin d’en assurer la crédibilité, elle doit également être entourée de garde-fous, afin d’éviter le pire. Dans le cas des groupes terroristes, de tels garde-fous n’existent pas nécessairement, selon la nature et les revendications du groupe terroriste bien entendu. Les attentats de New York et Washington du 11 septembre 2001 eurent pour effet de renforcer la crainte de voir des groupes terroristes se doter d’armes de destruction massive (il s’agissait notamment d’un des aveux d’Oussama ben Laden, enregistré en 1998), et d’imposer de nouveaux codes de conduite en matière de contrôle des activités pouvant être détournées par des groupes terroristes. C’est ainsi que le Conseil de Sécurité de l’O.N.U. adopta en 2004 une de ses résolutions les plus importantes de ces dernières années, la 1540, dont l’objectif est de réduire les risques de prolifération par des acteurs non étatiques, en imposant aux États de renforcer les contrôles et les dispositifs juridiques liés à la protection des sites dits sensibles.

 

Pour autant, les armes de destruction massive constituent-elles la principale menace à laquelle des puissances comme les Etats-Unis doivent faire face ? Utilisées de façon classique, à savoir par le biais d’un vecteur balistique, elles restent l’apanage des États, et la politique de dissuasion permet d’en limiter la portée. Dès lors, les regards se tournent vers la possibilité d’utiliser de façon à la fois efficace et asymétrique les armes N.B.C (nucléaire, biologique, chimique), et d’obtenir des résultats aussi « satisfaisants » pour leurs commanditaires que les attentats du 11 septembre 2001. Par ailleurs, des groupes terroristes peuvent-ils réellement atteindre une capacité de nuisance en matière d’armes N.B.C. sans l’aide d’un État ? Enfin, la couverture médiatique des nouvelles armes, comme les agents bactériologiques, n’a-t-elle pas pour effet de favoriser la prolifération, de fait que surestimer la puissance des armes biologiques pourrait inciter les terroristes à les acquérir ? En fait, il convient d’établir une distinction entre les armes nucléaires d’une part, et les armes chimiques et bactériologiques de l’autre, bien que toutes appartiennent à la catégorie des armes de destruction massive. Si les risques de prolifération des armes chimiques et bactériologiques sont plus importants que dans le cas des armes nucléaires, la capacité destructrice de ces dernières reste nettement supérieure, ce qui justifie une attention particulière.

 

La résolution 1540 tend vers une réduction des capacités de développement de telles armes en se procurant les matériaux nécessaires, reste l’hypothèse d’une « association de malfaiteurs » avec des États, ou des responsables dans des États ne bénéficiant pas de mesures de contrôle suffisamment strictes. C’est ici que le Pakistan est souvent montré du doigt comme un maillon faible, non pas en raison des dirigeants, mais du fait des difficultés relatives au contrôle de ses activités. En février 2004 (deux mois avant l’adoption de la résolution 1540), le Pakistan reconnaissait ainsi que le directeur de son programme nucléaire, Abdul Kader Khan, a transmis des informations à d’autres pays. Le « pays des purs », État fragile et menacé d’implosion, est sans aucun doute le maillon faible, malgré lui. Mais il ne faut pas exclure d’autres scénarios. Après tout, l’ex-U.R.S.S. fut, dans les années qui suivirent sa disparition, un territoire identifié comme à hauts risques en matière de possibilité d’accès à des matières fissiles et des composants nucléaires. Et la Corée du Nord, à l’agonie, pourrait très bien être tentée par la vente de quelques composants à des groupes terroristes transnationaux. Le risque est donc réel, il serait cependant exagéré de parler de menace pour les raisons évoquées.

 

PdA : Quels seront, à votre sens, les périls, les enjeux liés au nucléaire militaire dans les prochaines années  ?

 

B.C. : Ils sont de deux ordres, que j’estime en continuité avec la trajectoire de ces armes depuis 1945. D’abord, les risques liés à la prolifération, fut-elle horizontale (augmentation du nombre de pussances nucléaires) ou verticale (augmentation des stocks d’armes nucléaires). La possibilité de voir le nombre de puissances nucléaires augmenter reste entière, malgré des traités internationaux et des dispositifs de contrôle efficaces. Nous sommes certes très loin de la prolifération généralisée annoncée dans les années 1950, et le fait que le club des puissances nucléaires – officiellement reconnues par le Traité de non prolifération ou non – reste inférieur à dix est à mettre au crédit de ces initiatives multilatérales. Cela ne doit cependant pas nous écarter de l’impératif d’une mise en garde permanente adressée à tous les candidats potentiels, et quelles que soient leurs motivations.

 

En Asie, la question de la prolifération verticale reste d’actualité. La Chine continue d’augmenter son arsenal, et la rivalité Inde-Pakistan s’est traduite par une augmentation des arsenaux de ces deux pays. Tandis que les autres puissances nucléaires se sont engagées dans un processus de désarmement, ces trois pays continuent leur progression. La Corée du Nord est bien entendu un problème encore plus sérieux, compte-tenu des incertitudes concernant la rivalité avec le Sud et les réactions des États de la région, mais la prolifération de Pyongyang n’a, d’un point de vue légal, rien de différent de celle de New Delhi et d’Islamabad. Elle s’est effectuée au mépris du Traité de non prolifération et, quelle que soit la position que ces États aient manifesté à son égard, sa portée universelle en fait des actes de violation. Le problème nord-coréen est donc ailleurs. Si l’Inde et le Pakistan sont les principales puissances militaires en Asie du Sud, la nucléarisation de la Corée du Nord pourrait à terme entraîner celle de la Corée du Sud, du Japon, voire de Taiwan, ces trois entités disposant de la technologie et des matières fissiles (par le biais de leurs programmes civils) pouvant leur permettre de franchir le pas en l’espace de quelques mois, au point qu’on évoque parfois le principe de dissuasion virtuelle pour ces pays, à savoir des capacités indiscutables, mais sans que le seuil du nucléaire n’ait encore été franchi. C’est donc, assez logiquement, en Asie du Nord-est que les risques liés à la prolifération restent les plus sensibles, et ne sont pas forcément liés à la nature des régimes, mais à des réactions justifiées par une perception négative de leur propre sécurité.

 

L’autre risque est lié à une forme de banalisation de l’arme nucléaire, qui laisserait la porte ouverte à son emploi. Le souvenir d’Hiroshima et Nagasaki s’éloigne un peu plus de nous chaque jour, et le nombre de survivants – les fameux Hibakusha porteurs d’un message d’espoir, de tolérance mais aussi d’intransigeance face à la bombe – se réduit. Que restera-t-il de cet héritage une fois les derniers témoins disparus ? Quel regard porteront les générations futures sur un évènement appartenant au passé, et auquel se sont superposés une multitude d’autres évènements depuis ? Il est indispensable d’entretenir la mémoire des bombardements atomiques, au même titre que la mémoire de l’Holocauste, et à ce titre les efforts des municipalités d’Hiroshima et Nagasaki doivent être loués mais aussi encouragés, pour que leur drame ne soit jamais reproduit ailleurs.

 

PdA : Pour vous, le désarmement nucléaire doit-il être, à terme, un objectif ?

 

B.C. : S’il doit être un objectif, afin de s’assurer que plus jamais de telles armes ne seront utilisées ? Sans aucun doute. S’il est possible ? Je reste malheureusement très méfiant sur ce point. Les premiers appels au contrôle international des armes nucléaires ont été formulés par les scientifiques du Projet Manhattan, dès 1945, avant même la formulation de politiques de dissuasion et des pratiques proliférantes. Ces appels furent répétés un nombre incalculable de fois, mais ne reçurent qu’un faible écho, bipolarité oblige. La fin de la Guerre froide accéléra le processus de désarmement de Moscou et Washington, mais elle fut également marquée par l’intrusion de nouveaux acteurs proliférants. De fait, la prolifération ne s’est jamais si bien portée que depuis la fin de la Guerre froide, si on tient compte du fait que trois nouveaux États, l’Inde, le Pakistan et la Corée du Nord, ont procédé à des essais.

  

Le geste le plus fort, le plus symbolique aussi, en matière de désarmement nucléaire total ces dernières années est le discours de Barack Obama à Prague en avril 2009, en marge d’une tournée en Europe. Ce discours s’impose comme une mise en garde à l’attention des proliférants, mais aussi comme un appel à une réflexion considérant la possibilité de sortir du nucléaire. Le souhait de Barack Obama se heurte cependant à des limites qu’il convient de mentionner. Le principal défi vient du Congrès américain, qui pourrait contrecarrer les souhaits de ratifier le T.I.C.E., comme il l’avait fait en 1999, au grand dam de Bill Clinton, qui était alors favorable à un engagement plus net de Washington dans ce domaine. Les Républicains, pourtant nettement minoritaires, pourraient contrer les projets américains, et l’administration Obama devra convaincre de la nécessité du changement dans un domaine qui a sérieusement divisé la classe politique américaine ces dernières années. Sur la scène internationale, l’accord passé avec la Russie n’est que l’arbre qui cache une forêt touffue, et qu’il sera difficile de franchir sans encombre. Les points de désaccord restent ainsi nombreux, comme le bouclier antimissile, ou le traitement des États proliférants.

 

Mais c’est surtout sur la relation avec les États dits « voyous » que les regards se portent. Les souhaits de Barack Obama se heurtent en effet aux gesticulations de Pyongyang et Téhéran (et potentiellement d’autres États proliférants), mais également au bon vouloir de la Chine, puissance nucléaire reconnue par le T.N.P., et élève parfois dissipé de la lutte contre la prolifération nucléaire. En se replaçant sur la question du désarmement tout en gardant la main sur la lutte contre la prolifération, l’administration Obama donne de nouveaux espoirs au contrôle des armes nucléaires, et à la conférence d’examen du T.N.P., dont on craignait il y a encore peu de temps qu’elle perde en crédibilité. Mais les défis n’en demeurent pas moins importants, et à la bonne volonté de Barack Obama devra s’ajouter la complicité de l’ensemble des États, en vue de restaurer un environnement de confiance propice au désarmement et à une lutte plus efficace contre la prolifération. Un vœu aussi pieux que difficile à concrétiser, et le président américain n’est d’ailleurs jamais parvenu à transformer son discours en des actes concrets.

 

Dans l’hypothèse, pour l’heure improbable, où l’ensemble des puissances nucléaires – reconnues ou non par le T.N.P. – s’accordaient pour détruire tous les stocks, le problème ne disparaîtrait pas pour autant. L’arme nucléaire, c’est avant tout un savoir, une accumulation de techniques qui, en associant plusieurs composants, mettent au point l’arme la plus puissante jamais produite. Si les stocks disparaissent, le savoir ne s’effacera pas, et le risque de voir, pour des raisons multiples, des acteurs choisir de se lancer à nouveau dans des programmes nucléaires restera entier. On peut ainsi poser la question dans l’autre sens et se demander si les armes nucléaires ne sont finalement pas la meilleure garantie face à leur prolifération incontrôlée. La réponse à cette question serait de donner les clef du nucléaire à la communauté internationale dans son ensemble – en reprenant exactement les souhaits des scientifiques en 1945 – mais si l’espoir est permis, il convient de douter du succès d’une telle entreprise.

 

Sans doute faut-il donc se résoudre à vivre avec le nucléaire, comme nous n’avons fait depuis soixante-dix ans, et surtout s’assurer que les doctrines de dissuasion n’évoluent pas vers des doctrines d’emploi, tout en imposant un cadre multilatéral en matière de contrôle. Et partir du principe simple mais incontournable que le danger ne vient pas tant de l’arme elle-même que de celui qui la possède et pourrait être amené à l’utiliser.

 

PdA : Quels sont vos projets, Barthélémy Courmont ?

 

B.C. : En marge de mes activités universitaires, je travaille actuellement sur des projets de recherche très différents, mais qui traitent essentiellement des questions politiques et sécuritaires en Asie-Pacifique, ainsi que des stratégies des grandes puissances. Mon prochain livre, qui paraîtra en décembre, s’intitule Une guerre pacifique, et traite de la relation Pékin-Washington. J’ambitionne cependant, en vue de la célébration des soixante-dix ans du bombardement d’Hiroshima, de consacrer un nouveau travail à cette ville, portant sur une analyse du nucléaire par le biais de mes propres expériences en relation avec ce sujet pour lequel j’ai consacré ma thèse de doctorat en science politique présentée en 2005. Je proposerai un synopsis à plusieurs éditeurs, et espère pouvoir produire un petit essai invitant à un devoir de mémoire, mais aussi de réflexion sur le sens à donner à ces évènements tragiques des 6 et 9 août 1945.

 

Barthélémy Courmont

 

Merci infiniment, cher Barthélémy Courmont, pour votre investissement, pour vos réponses passionnantes. Et vous, quelle décision auriez-vous prise, à la place de Truman ? Quels seront, de votre point de vue, les périls, les enjeux liés au nucléaire militaire dans les mois, les années à venir ? Postez vos réponses - et vos réactions - en commentaire ! Nicolas alias Phil Defer

 

 

Vous pouvez retrouver Barthélémy Courmont...

 

18 octobre 2012

Obama - Romney : America decides 2012

Qui sera présenté, au matin du 7 novembre, comme le président élu des États-Unis par les médias du monde entier ? Barack Obama, le président démocrate sortant ? Mitt Romney, son challenger républicain ? Si votre serviteur n'a jamais douté, à aucun moment, de la réélection de l'incumbent, les derniers sondages semblent indiquer une remontée de l'ex-gouverneur du Massachusetts. Au départ, la base conservatrice du Grand Old Party était sceptique face à ce candidat jugé trop modéré et aux convictions chancelantes - voire changeantes - sur des sujets d'importance. Sa sélection de Paul Ryan comme running mate a rassuré dans les rangs du Tea Party et, au-delà, les franges les plus radicales de l'ex-parti de Lincoln. Le ticket républicain se veut le chantre des libertés individuelles et du small government, le gardien de l'ordre moral et des équilibres budgétaires. Obama le "dépensier" est accusé par le businessman et ses équipes d'avoir mis à mal l'activité économique et les comptes publics, pis, d'avoir engagé le pays, avec sa réforme de santé notamment, sur la voie infâme d'une social-démocratie à l'européenne. Les indépendants verront-ils les choses de cette façon ?

 

Il y a eu du mieux, ces derniers mois, sur les fronts de la croissance et de l'emploi. Le plan de sauvetage d'Obama a contribué à sauver l'industrie automobile - un enjeu majeur dans le Midwest industriel qui compte de nombreux swing states cruciaux (l'Ohio, le Michigan, l'Indiana, le Minnesota, le Missouri, le Wisconsin, l'Iowa... 81 grands électeurs sur les 270 requis pour être élu). Ben Laden est mort. Il n'y a plus de troupes combattantes en Irak. Un bilan à mettre au crédit du président quand certains ont pointé l'inexpérience du ticket républicain en matière de politique étrangère. Mais Obama, c'est aussi le retrait par Standard and Poor's du sacro-saint triple A, même si cette perte est en partie imputable aux divisions idéologiques qui minent le Congrès. Obama a certes hérité d'une crise calamiteuse, mais au final, les chiffres sont sans appel : il a présidé à une augmentation massive de la dette fédérale. Un élément que Mitt Romney, homme d'affaires à succès, et Paul Ryan, connu pour son engagement en faveur du rééquilibrage des budgets, ne se priveront pas d'utiliser. Non sans s'être assurés de laisser au placard l'encombrant fantôme de George W. Bush, figure du G.O.P. que les esprits continuent d'associer à deux guerres impopulaires et coûteuses et, à tort ou à raison, au démarrage d'un cataclysme économique. N'en déplaise au numéro quarante-trois, leur icône, c'est le quarantième président, Ronald Reagan. Un homme aux bilans social et budgétaire plus que contrastés mais qui, en période de crise, sut redonner confiance à la nation. Qui, de Barack Obama ou de Mitt Romney, saura convaincre les électeurs qu'il est celui qui remettra l'Amérique sur les rails pour en faire, de nouveau, le lieu de tous les possibles ?

 

L'an dernier, j'interrogeais un certain nombre d'Américains pour leur demander d'évoquer pour Paroles d'Actu cette élection qui démarrait, leurs espoirs et leurs perspectives pour l'avenir. Nouvelle session, à trois semaines du scrutin, davantage axée sur les candidats. À partir de là, le texte est en anglais, la langue originale de nos échanges. Quant au panel, sa constitution n'a rien de scientifique. Elle est le fruit de rencontres, d'échanges. Certains datent de l'an dernier, d'autres de quelques heures. D'autres encore de mes travaux précédents, ceux de 2004, sur Reagan ou sur le 11 septembre. Je n'ai fait aucune sélection, tous les témoignages apparaîtront ici. Tous ont quelque chose à dire, un ressenti, des convictions à exprimer. Des mots qui comptent et qui valent bien plus que les caricatures, les préjugés que l'on peut avoir "de loin". Des mots qui nous rappellent que ce choix entre deux candidats, deux partis n'est pas du goût de tous - finalement, ils s'accorderaient sur l'essentiel... Des mots bien plus intéressants que mon propre texte de présentation rapide, déjà beaucoup trop long, et qui touche - enfin ! - à son terme. Je les remercie, très chaleureusement, pour le temps qu'ils ont bien voulu m'accorder. Mon pronostic quant à la victoire finale reste inchangé. Qu'en pensent-ils, eux ? Qu'en pensez-vous ? Postez vos propres réponses en commentaire ! Merci. Une exclusivité Paroles d'Actu, par Phil Defer.  DOCUMENT

 

 

 

The text above, untranslated in English, is a general presentation for our French readers on the election and the candidates. So... Obama ? Romney ? Now, it's up to you ! Thank you so much for your participation ! And if you wanna be a part of it, please send me your own answers. Or write them as a comment to this article. And share the message ! Merci ! Amitiés de France, Nicolas alias Phil !

 

 

 

Obama - Romney

 

America decides 2012

 

Obama Romney

(Photo taken on : Save Jersey)

 

 

 

 

THE QUESTIONNAIRE

  

- Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

- What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

Sincerly...

- Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

- Do you think President Obama should be re-elected ?

- Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

- Anything else ?

 

 

 

  

THE ANSWERS 

(CHRONOLOGICAL ORDER OF RECEPTION)

 

 

 

October 16

 

 

Al M.

 

Nicolas, I am an independent voter. I believe in a strong foreign policy, the free market, and the rule of law. The same rules should apply to everyone, without breaks or favoritism to the party in power.

 

I believe that President Obama has been a failure as a President. He does not defend America's national interests abroad. He has spurned our key allies, including Britain, France, and Israel. Instead, he has gotten cozy with corrupt governments across Asia and the Middle East, including Russia. He apologizes for American values, and the values of Western Civilization, such as tolerance, free speech, and the rule of law. He has allowed the Iranian state to develop nuclear weapons, with absolutely no indication that if Iran gets the bomb, he will do anything concrete to stop it.

 

At home, Obama has promised to raise taxes in the middle of a deep recession, he forced through a 1,200 page health plan that creates a bureaucratic nightmare state, and he has spent this country onto a fiscal cliff from which it may never return. This is reckless beyond any precedent. He does not understand how a free, functioning economy works, and it shows.

 

What is needed to get America back on track is a President and a Congress who understand how the economy works, who will lower taxes and government spending, who will assert American values and interests abroad, including the possible use of deadly force, if necessary, to stop the Iranian bomb.

 

I don't think Romney is the ideal candidate, but he is several orders of magnitude better than Obama. Obama's policies are destroying America. President Romney will at least drastically slow that decay, and hopefully reverse it. Romney has my enthusiastic support. I believe that the American people have begun to reach similar conclusions, and that we are witnessing a cascade in Romney's favor in the weeks remaining before the election. I watch the polls every day -- including in the swing states of Ohio, Florida, Virginia, North Carolina, Iowa, Missouri, Colorado, Nevada, Wisconsin, Michigan, and Pennsylvania. I believe that Romney will carry all of the swing states, with the possible exception of Iowa, and that he will win in a landslide. I look forward to President Mitt Romney taking office on January 20, 2013.

 

Al M.

 

 

 

David C.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

[I work in] Video Production.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

Would rather see it between Jill Stein and Gary Johnson… but if I absolutely had to pick between just those two, Obama.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

No. Debt and foreign policy would be the current disaster continuing.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

No. Debt and foreign policy would be the current disaster continuing.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

Obama.

 

Anything else ?

 

This election is sad to watch.

 

 

 

James H.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I would like people to know that I am a Libertarian which means I lean left socially and right fiscally.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

Neither, and its a nose to nose race to the edge of oblivion when it comes to our currency and financial system.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

Absolutely Not.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

Absolutely Not.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

I believe President Obama will win a second term.

 

Anything else ?

 

Americans need to wake up and realize the flaws of a two party system... we consistently vote for the lesser of two evils instead of voting with principle and dignity.

 

 

 

Kate V.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

To get back on track : America needs to end these wars (bring our troops home and stop pestering other countries for our own "benefit"), we need to become more welcoming to business to improve our economy (fewer regulations, let free market dictate), we need to stop trying to legislate morality from either side (just because I don't necessarily agree with something doesn't mean I have the right to make laws regarding it, especially related to personal freedoms). Obama and Romney will do nothing to correct any of these things. Both are "bought" by the major corporations that run our country, both support NDAA and the Patriot Act, both want to continue if not expand our war activities, both support socialized healthcare and both want to continue to regulate our country into bankruptcy, just in different ways.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

No better or worse than Obama, both of which are poor options with no meaningful difference between them.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

The only reason I would like to see Obama re-elected (still not voting for him!) is that, with Obama, we're guaranteed only 4 more years. If Romney were elected, we're likely stuck with 8 years.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

Its looking more likely that Romney will be elected. Interesting how he's all of a sudden become the better speaker and conveniently saying whatever the moderates want to hear (not surprising). I sincerely feel that the "powers that be" hold elections to make us, the general masses, THINK we have any say. I'm becoming one of those crazy conspiracy theory people and, sadly, I think that might make me one of the sane/rational Americans.

 

Anything else ?

 

We NEED to end this two-party (ok, really 1 party with 2 different names) system. A majority of Americans actual align best with Libertarian beliefs but don't know it because mainstream media and the major parties down play it and won't allow the average, non-informed American to ever hear about it (i.e. Gary Johnson is on the ballot in all 50 states but is not allowed in the debates. I saw 1 study that, according only to quizzes that tell people who they align with by policies, it would be a 2 way race between Obama and Johnson with Romney losing horribly. The powers cannot have that, therefore, we're stuck with the 2 options that they want us to have).

 

Losing hope. Considering moving to another country, seriously looked up what it would take to move to Costa Rica. They have great laws but also protect employment for their citizens so not much of an option. Ugh.

 

After an exchange with Kate...

 

I totally agree that I NEVER thought Romney stood a chance yet, now it has all changed. Just makes me think even more that he's the candidate that the puppet masters have anointed as our next president. I will personally be voting for Gary Johnson. I would have written in Ron Paul but, in my state, that means my ballot would literally be thrown out counting for nothing. At least a vote for Johnson will be counted. Our political system is very screwed up and gives only the impression of freedom of choice. It's feeling more and more like a dictatorship with the major corporations in control. There isn't much we can do until enough of us get really pissed. I fear (and hope for?) another revolution/civil war, and it may get violent. I in no way support violence as a solution but it worked 200+ years ago in the formation of this once great country; at the very least we need a drastic change and we need the average citizen to care/speak up.

 

 

 

Eddie H.

 

THANKS for your reply and for your interest in our country and its government... I was raised very poor and so was my wife... Now well retired... I am 68 and she is 65...

 

We both think that OBAMA should be re-elected and at same time we MUST remove a large number of the Republicans from our Congress; not because they are Republicans but because they have made pledge of ONE TERM AT ALL COST for Obama ; totally overlooking the job they were sent to Washington to do. That job was and still is to cross over political lines and vote to do what is BEST for this country as a whole and not just the party they belong to... Romney or Ryan won't give any total complete answer to any question asked... always open-ended answer with the finishing of the last sentence being JUST TRUST US... Our Republican Congress has had a record number of filubusters and all votes for any jobs bills is always NO... I hope this will be of help to you...

 

Romney is very smart and wealthy man who will not ever be open book to anyone... I also feel that he will never give his tax records out ; not because of the votes he will lose in his own party but the Latter-Day Saints Church willl also see where he is only paying his 10% to the church from the money he has showing up in America and NOT the millions he has elsewhere in the world... This will cause him much trouble in his church and he will not be able to enter the MAIL TEMPLE, just the local area churches... ROMNEY is a man to fear...

 

THANKS. 

 

 

 

James C.

 

What should your readers know? My name is James C. and I am a high school teacher of 14-15 year old students studying World History in a typical public school in suburban Chicago, Illinois. I am a lifelong resident of Illinois having lived in many small rural towns before moving to Chicago nearly 17 years ago. I am married with no children. Politically, I consider myself to be very liberal.

 

What's needed in America right now is for us to focus on fixing our problems at home rather than attempting to solve the world's problems. We desperately need to work on developing a shared sense of community before the individual. We need to develop ways to work out our differences through the system of a republic which I believe has somewhat broken down.

 

As far as who gets closer to my ideal I would argue that President Obama has the beginnings of some solutions which will move us in the correct direction. Romney I feel would return us to policies which damaged America during the George Bush administration.

 

Mitt Romney would not be a good choice for America. I feel that his ideas about getting us involved in fighting the Syrian Civil War would be a mistake, that his rhetoric lends itself to aggression against other nations such as Iran, and that he would needlessly involve us in trade disputes with countries like China. Domestically, I think his idea of a big tax cut in marginal rates while eliminating tax deductions would have the net effect of making the income disparity between social classes worse, and I am very afraid of his proposed cuts to the social safety net. As a teacher, I think his ideas for vouchers in public education would be a disaster.

 

President Obama, while not perfect, deserves to be reelected because he has made an honest attempt to fix the damage caused by our war in Iraq. He has made a clear attempt to fix the broken war effort in Afghanistan with a clear timetable for withdrawl. And while he got involved in Libya which I thought was a mistake, he has made an effort to work closely with the world community in world affairs rather that a "go it alone" approach as was taken by the previous administration. Domestically, I believe that his policies stabilized both the domestic and world economies after the disastrous 2008 recession/depression which would have been far worse if he had done things as Republicans proposed. I am not happy with his policies on public education, but I do believe that he has made an honest attempt to explain & implement what he believes is best.

 

Who will win ? Tough call, but I believe that in the end it will be President Obama. It could still go either way, and it is still too close to call.

 

Anything else : I love France. I have been to 18 nations around the world. My fondest memory of all times was my Christmas break trip to Paris a couple of years ago. As a history teacher, I greatly enjoyed visiting the famous historical sites such as Versailles and the art at Musee du Louvre. But by far my favorite memory was going to see Swan Lake at the Opera de Paris followed by a late night visit to the food market at the Galeries Lafayette. My greatest regret is that I didn't pay more attention in French class as a teenager. Good to hear from you Nicolas. :)

 

 

 

October 17

 

 

Christian A.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I am for the constitution and am against anyone who opposes it.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

I think that this country needs neither Obama nor Romney especially at times like these. What this country needs is a strong supporter of the way America used to run, back when our fore-fathers ran this country, a man like Ron Paul (another delegate highly supported by the people, just not by the government).

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

No, Romney would not make even a decent president, he may fool some, but not me. Being a multi-millionaire, he supports those with money and really doesn't care for the lower class or even the middle class. (the US has about 5 percent multi-millionaires)

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

No, after four years of being executive in chief of our once great nation, and having power to change past errors, he did nothing. He sat their and fooled the people with his speech techniques taught to him in law school.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

Hard to say, many love Obama for his motivational speeches (true or not) but people also want a change. I would say Obama.

 

 

 

Lee H.

 

Dear Nicolas,

 

I am a transplanted Texan now living on the eastern shore of Maryland's Chesapeake shore. Actively retired.

 

Romney would be the worst possible president we could have. He would set woman's rights back 100 years while padding the pockets of the top 2%. He has little concern for the middle and none for the lowest.

 

Obama absolutely should be re-elected and the do-nothing Congress of Tea Party extremists needs to be replaced.

 

Obama is looking strongest for the next four years.

 

Thank you, Lee H.

 

 

 

Paul B.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I suppose, since regional information may help, I'll throw that out there: I'm an 18-year-old white male, currently living in the southeastern portion of the United States.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

Unfortunately, neither of the two main candidates have put forth decent offerings for the presidential position this year. I believe, at this point, the Libertarian candidate, Gary Johnson, is the best possible choice for president, but he unfortunately has been ignored for the most part.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

No. Romney's economic plan and Obama's economic plan appear to be one and the same: Spend more in order to get America back on track. Romney supports increased defense spending, an individual mandate, etc. The only thing he appears willing to cut is subsidies to PBS, which is the equivalent of owing $50,000 to a loan shark and arguing where to cut 50 cents from.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

Obama most definitely does not deserve a second term, and he appears to only be in this race at all due to the fact that Romney is quite possibly the worst presidential challenger in America's history. Obama's crowning achievement over the past 4 years is that he has created 4.5 million jobs (in reality, there's only been a net gain of 300,000 since taking office), and yet he has added 5 trillion to the national debt in that timespan. These jobs he creates are jobs being propped up by excess spending by the US government, and when the spending stops, these jobs will collapse.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

I'd be President Obama will, although Romney has a much better chance now than he did at the start of the debates. Romney just has too many toss-up states that he has to win in order to win the presidency(Ohio, Florida, NC, Virginia), and it appears that Romney will have to win every single of these states. Obama simply has to win one of these, and he's essentially got re-election guaranteed. Unfortunately, the electoral college system has yet again placed the decision of who becomes president on how people in four or so states vote.

 

Anything else ?

 

Many people have been fooled by candidates and have delt with the cold hard consequences of their mistakes, All I have to say is don't make those mistakes again.

 

 

 

Marie F.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

There's nothing particularly important.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

Gary Johnson.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

No, he will be horrible.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

No, he is horrible.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

Probably Obama unless Mitt Romney steals it like Bush did.

 

 

 

Frank M.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I decided to stay out of the race this year because, given the economy, I needed to concentrate on business and my personal finances. After running on a platform of Personal Responsibility in the 2008 election I felt it was the only honest choice I could make.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

What’s needed right now in America is a government that gets out of peoples’ way and lets them make a living. Too many people are sitting on their hands because they don’t trust what the government is going to do next. The most powerful force in America is that of our free economy and people will take full advantage up that fact if they are allowed to believe that they can do so without the government changing the rules on them at the slightest whim. We have more than enough laws in this country to protect everyone and everything so we need a breather on new laws and a true understanding of how the government is going to actually enforce those in place. Once that is known, the economy will take off once again. A Romney administration should be better for that scenario.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

Yes, his upbringing and all his background points to his being a good and decent person.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

No, he is not a President nor is he Presidential. He wants to be in charge, but takes responsibility for nothing bad and everything good – even if the good is manufactured – i.e. reduction in unemployment – only down because millions of people have given up looking for work. Someone who crows about a statistic that results from millions of people losing the will to look for work doesn’t sound like a leader any country needs.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

I am currently on the fence.  I still believe Obama will be reelected if for no other reason that the media is going to do everything in their power to ensure that he is reelected.  However, I hope it is Romney for not only the good of the United States, but quite honestly the good of the world.

 

Anything else ?

 

Look for me to start making a lot more noise about the 2016 presidential election as soon as this one is over.

 

 

 

October 19

 

 

Margarita A.

 

What's needed ? Good, unselfish people... tall order, hard to find.

 

I think four-year terms, it's not good enough. First year, the new president is learning the "ins n' outs". Second year, planning strategy so he might apply new ideas IF he is able to have everybody's cooperation... a challenge that takes time. ...On the 3rd and 4th years... he is out campaigning for a new term... a waste of time, in other words he does not have enough time to develop and implement his campaign promises.

 

Mr. Obama's timing was perfect for him. The electronic Social Media exploded within the young population. 
First time voters found Mr. Obama's a real "cool", charismatic person and voted for him, just because they could.
Yes, he found himself with a full plate of challenges. I think all incoming presidents don't know what's behind their "presidential desk".  I think he was very lucky to have Hilary Clinton on his side as the Secretary of State. She's very experienced and has been able to deal with foreign affairs with ease or so it seems to me.

 

Romney's an experienced magnate. His facts as governor speak for themselves.
The U.S. is a capitalistic country where you can make a fortune if you can, what is wrong with that?

 

I think Romney will be elected. Election day is almost here. We'll see.

 

 

 

Marianne D.

 

Romney is the way to get on track, he will make the president we need. Obama should not be re-elected but on the 6th of November, he will be re-elected to the detriment of this country.

 

 

 

October 21

 

 

Jacob P.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I live in California, I'm 20, and I graduated high school during the height of the American economic crisis. Having no job experience, and knowing that going to college would result in large debt, I had a very rough time transitioning into adulthood.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

I believe that Obama will lead America to get back on track. Things are already somewhat improving; unemployment has dropped, jobs have been created, and the welfare of many Americans has improved.

 

Many things still continue, like the wars and plutocracy, which is unfortunate, but Obama is a step in the direction I think most Americans want to go.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

I don't think he's as bad as many people make him out to be. The job of president isn't all-powerful, and he'd have a congress and senate to deal with, just as Obama has.

Romney is very aggressive and inexperienced however, and his policy of austerity is worrying for many Americans, including myself. On top of that, he may have the chance to shape our Supreme Court for years to come; if he elects any Supreme Court Justices that are Republicans during his presidency, we could see a great loss of civil rights, for women and minorities.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

As much as he's failed to do everything he said he will, I still think he should re-elected. By no means is he my ideal candidate, but as I said, he's a step in the direction I'd like to go; a very small step, but a step nonetheless. As previously mentioned, unemployment has fallen, jobs have been created, he is keen on investing in green energy, and has helped make sure Americans maintain the necessities after a great period of loss.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

Who I think will win changes every day. Some days I read the news and see a lot of public opinion that favors Obama, and that makes me hopeful. Other days, it seems like there's a real chance Romney may win, based on how other people are feeling. If I had to say right now, I'd say Obama will win, but only by a small amount.

 

Anything else ?

 

Nope !

 

 

 

Dawn R.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I am a Liberal Democrat.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

President OBAMA ! Hands down, no question about it.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

Absolutely NOT! I believe this man is a liar and that he does not represent the majority of Americans. His comment about the 47% was disgraceful. How could anyone who feels that way about half of the American population hope to represent all of us? It's not possible. Plus, this man wants to cut Medicare, privatize Social Security, go to war with Iran, doesn't believe in fair pay for women, or for abortion rights or contraception rights for women, and the list goes on... He has encouraged the CEOs of large companies and corporations to intimidate workers regarding their votes, and to threaten their jobs if they don't "vote the right way". And in turn, these CEOs have turned around and followed his requests ! The Republican party as a whole, and especially the Tea Party faction of the Republican party are such obstructionists that they have held back bill after bill that could have helped to bring back jobs and the housing market, as well as many other beneficial things to the economy, all because they agreed that their most important focus was to make President Barack Obama a one-term president at all costs. These are corrupt people who are not doing the work of the people who elected them !

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

ABSOLUTELY ! I believe that it is imperative that he be re-elected and have the opportunity to finish the job that he has begun to get done for our country. We cannot afford to turn back the clock and return to the ways of the Bush years and even worse policies.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

BARACK OBAMA.

 

Anything else ?

 

I hope that everyone who is able to will get out and VOTE on November 6th - and not let any of the attempts at the suppression stop them !

 

 

 

October 23

 

 

Andrew H.

 

[I'm a] 18-year-old first time voter, strong-minded independent.

 

The thing most needed to save America is the troops at home and a stable monetary policy. Simple solutions to immense problems. Ron Paul and Gary Johnson are the only men half way suited for the job.

 

If Romney gets elected, I doubt much will change. The both of them are bought and sold by the same corporations.

 

I don't think Obama should be reelected but I don't think Romney should be president either. A rock and a hard place, indeed.

 

And lastly, I believe that Obama will be reelected early November, and we might as well get used to the idea of four more years of Obama.

 

 

 

October 27

 

 

Lannie M.

 

Hi Nicholas,

 

I wish I knew who was going to win the election. I know that my family and I hope it is not Obama. 
Our economy is still in the trash. There are still many a business that is closed. Walking through our mall is like walking through a graveyard. Unemployment is at an all time high, gas is beyond expensive, groceries cost more and more, people's houses are being forclosed, I can go on and on. The 'Hope' that Obama promised is gone. Now, I know that we just want 'better.'

 

I live in Colorado, a swing state. We are being bombarded with ads via radio and t.v. We are beyond disagreements in politics, now just plain angry. 

 

I"d still tell you to not believe the main stream media from the USA. My family and I are not bigots, nor racists (yet those people exist) but people who want our country to be what it once was. We love our country. I don't wany my grandchildren and great grandchildren to be paying for the mistakes of today, unfortunately, that is what will happen. I know that when someone does not do a good job they are usually replaced by someone who WILL do a good job or someone who will attempt to do the job better.

 

Right now, I'm going to vote for Romney and hope he will attempt to do the president job better.

 

Regards to you,

 

Lannie

 

 

 

October 28

 

 

Tom R.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I will be very, very happy when this election is finished.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

We could use an invasion from another planet. That MIGHT get the greedy wealthy to maybe forget about amassing more and more money for a little while. It might make the political class sit up and take notice that we all must one day die, and perpetually postponing implementation of the sorts of policies the masses of people need to have a decent life is a pernicious form of neglect that diminishes us as a society.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

He would be no better, no worse than any of the other bought-and-paid-for corporate stooges that are the only people wealthy enough to occupy the office of President of the United States.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

No. He should be tried – along with George W. Bush and his 5 chief torturers – for the war crimes they’ve committed in the people’s name since 11 September 2001. If they are innocent, then they have nothing to fear from an honest trial.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

Obama.

 

Anything else ?

 

Pray for the U.S.

 

 

 

Barbara M.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I have 2 undergraduate degrees, one in medical technology and laboratory science, and one in English Literature. I also have a Masters in Adult Education (Human Resource Development). I am not ideologic, but pragmatic. I espouse any policies that show good leadership, and promote public good and individual achievement.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

What is needed is to hold elected officials accountable. We need to work hard to reform our government, tax policies, and foreign policy. America must be a good neighbor, must only give tax incentives for value created (jobs and public investment, and reward work, rather than portfolio). The general public also must become better informed, and educated as to public policy and become more involved in civic life.

 

Definitely, President Obama has come closer to having ideas for the right track, like investing in infrastructure, education, renewable energy, and tax incentives for keeping jobs local.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

No, he absolutely would not be good as President. The fact that he has been so inconsistent with policies, moderate when it suites, ultra right when it suites, is scary. He's either a liar, or too poorly informed to be President. Either way, he's listening to the wrong people and has a twisted perspective.

 

In picking Ryan as running mate, he's espoused a perverted, arrogant perspective on Ayn Rand's philosophy. They see it as a winner take all philosophy, when it is clear that accountability and recognition of ability to create value for all were part of Rand's message. They've forgotten her outcomes based approach, and perverted it to "I will pay myself what ever I want and take what ever I want because I can." They care nothing about liberty, except their liberty to exploit. This is clear in their policy on women't health issues and social issues. "Stay out of how I treat my employees, and pay my taxes, but force a woman pregnant due to rape to have the child." Ayn Rand would be rolling in her grave if she knew what they were thinking and trying to do based on her work.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

Absolutely, with gusto.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

It has been close, but realistically the odds favor Obama. His party and campaign have been good at battling voter suppression, and the fact is that if everyone who is registered to vote does vote, Obama has better than an 80% chance of victory. He HAS been a good President.

 

Anything else ?

 

Most Americans really are more reasonable than what you'd think by watching FOX news...

 

 

 

October 29

 

 

Chuck W.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

(...) I will be happy to give you the input of a 55-year-old who was a Republican in my 20's and switched to Democrat after the failure of the Reagan trickle down... (...) A outsourced electrical engineer that now drives a semi truck... Solid Democrat and a family man and homeowner... Also, I bet 2 people who are Republicans in 2004 and 2006 that we would be in a recession by 2008... 1 believed me and took my suggestions on how to protect himself... the other laughed in my face in 2006 and payed off his lost bet in 2008 and filed Bankrupcy in 2009... because he did it his way.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

Obama is needed with a Democratic-controlled Congress that can't be filibustered... Republicans have filibustered this recovery for 3.5 years... They claim Democrats had total control from January 2009 until January 2011... That's a lie... Democrats had 59 seats in our Senate from Jan. 2009 'til July 2009 and Jan. 2010 to Jan. 2011... Paul Ryan and Eric Cantor met on Jan. 20, 2009 with 12 other Tea Party Libertarian / Republicans and made a plan to filibuster everything Obama would try to do. And they did... As 59 seats are not filibuster-proof... and that's why this recovery is effectively stalled... Obama with Congress control would do a F.D.R. policy... The revenue from that government-funded job program would create tax revenue jobs... It would then see tax revenue on the second part from landlords and home buying as people are working... not collecting unemployment a dead drag on gov. spending... There would be a third part tax revenue from groceries sales and TVs and all non-staple fun stuff including movie attendance and amusement park attendance as people would have disposable income again...

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

Romney would be the same crud as Reagan and Bush... Both presidents raised the national debt and then said trickle down worked... All they did was deficit spending and then lied and said trickle down worked.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

Yes.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

I PRAY people are not stupid enough to put Romney in office... but if he is... I know how to profit from the Republican policies... As I did the Bush policies...

 

Anything else ?

 

My job is almost recession-proof as food must be eaten and therefore must be paid to be transported from the farmer to the store... That's my job... I own my home... I know how to play the stock market down and I have a car collection as a hedge as old cars go up in value... not down.

 

 

 

November 1

 

 

Betty G.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I want the readers to know that I believe that people should pursue their happiness and help others. Life is more that achieving personal accomplishments.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

America needs to wake up and support our President. If we help each other, we will be ok. I firmely believe that the Health Care Reform will help many. People go bankrupt in this country because of health care bills. By the way, you are lucky in that aspect, France has a fantastic Health Care System according to the World Health Organization.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

I don’t believe Mitt will be a good president. I believe Mitt has a personal agenda. For him, this is about power. I don’t believe he truly cares for our country the way President Obama does.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

Absolutely.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

President Obama will be re-elected in Nov. 6th.

 

Anything else ?

 

I hope this helps. Merci 

 

 

 

November 2

 

 

Eileen B.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I am American with dual French/US nationality and have lived in Paris for nearly 25 years. I have set up a Social Media initiative for Democrats Abroad seeking to connect with as many of the 6M+ Americans overseas and use Social Media and analytics to contact them and get them to vote and to build real communities on platforms like Twitter (@demsabroad) and Facebook that will extend well beyond this election.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

I think you know how I feel.  
Barack Obama is THE man.

 

Sincerly...

 

I think America and in many ways, the world needs a President like Barack Obama - with the leadership, values, and integrity to move America forward. Personally - he is creating a world I want to see my children grow up in.

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

Actually, really not. It actually scares me that so many Americans support the platform of the current GOP. Years ago, the Democratic and Republican parties were different, but not on a profound level. Today, this election is going to make a difference about deep-seeded issues like women's rights, equality, healthcare, immigration -- progress I watched my own parents fight to have and that the Romney/Ryan ticket has declared they will refute. I do not want us to go backwards. 

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

So much so that I have just taken 5 months of my life and dedicated myself full time to do what I can so he will be.  

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

Barack Obama.

 

Anything else ?

 

Barack Obama has moved America forward - out of the worst economic and social situation in decades the country is moving ahead - people are banding together.  Look at what happened in the face of a natural disaster this week with Sandy.  Obama brings the American people together and we are stronger together there is no doubt.  

 

Voting is a right and one that we should all exercise.  This 2012 election is so critical for major issues for the US and overseas that I hope that every single person who can will get out and vote.  

 

Two of what I think are the best videos of this election cycle that sum up what I have said above :

 

 

 

 

 

November 3

 

 

Chip S.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

I'm former Chair of Democrats Abroad France and member of its Executive Committee and served as a delegate pledged to Hillary Clinton at the 2008 Democratic National Convention. I'm a life-long Democrat and am a lawyer in Paris in my spare time.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

A clear Government policy to boost the economy, stimulate job creation, move forward on combatting climate change and overcoming terrorism. The Government should protect and empower the weak and disadvantaged and work against the division of American society into 2 tiers of very wealthy on top and declining middle class on the bottom - the policies supported and implemented by the Obama Administration during the President's first term.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

No. His agenda will be set by his extreme right-wing supporters who have financed him, and he will have little choice but to follow their dictates, regardless of whether he may have more pragmatic personal inclinations.

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

Yes.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

I think Barack Obama will be re-elected, by a clear, if narrow, margin in the popular vote and a clear margin in the Electoral College.

 

Anything else ?

 

This Election represents a critical turning point for the U.S. and perhaps the world. It will do much to shape what happens to the U.S. for the rest of the 21st century. Barack Obama was the first 21st century President. He personifies the way the 21st century will look. If he is re-elected, the U.S. will move forward in a more progressive way, toward sound economic growth and an innovation-based economy and will be a force for stability and democracy and rules-based governance internationally. If Romney and the Republicans win and do as they are promising to do, the U.S. will become a divided society, turn inward, and become defensive and perhaps belligerent to the rest of the world.

 

 

 

November 4

 

 

Jay R.

 

Hello, what would you like our readers to know about you before we go on ?

 

J'ai étudié le français quand j'étais petit, mais j'ai tout oublié. So I will continue in English. :)

 

I was a registered Democrat for 20 years, then became a Republican in 2000. I voted for Kerry in 2004, and became Independent before rejoining the GOP for the 2008 election.

 

I initially supported Herman Cain (felt he was "smeared" by political enemies), and when it looked like Rick Santorum might get the GOP nomination I again dropped party affiliation and temporarily backed Gary Johnson. I am a fiscal conservative, but socially progressive, a Buddhist (j'ai étudié le français en Thailande), so Rick Santorum's "conservative Christian" positions were troubling... I found Gary Johnson to be too much of an isolationist.

 

I was impressed with how Mitt Romney handled himself in England and Israel and decided his calm, measured style was just what we needed in a president.

 

What's needed right now so America gets back on a good track ? Obama... Romney... If anyone, who gets closer ?

 

We need to stop spending more money than we make (I have tried that in my personal life so I know it does not work! :D).

 

We should not punish those who are successful. I believe a flat income tax is fair, and that -- while no regulation at all is bad -- too much regulation is also bad.

 

Sincerly...

 

Do you think Mitt Romney would make a good, at least decent president ?

 

I think Mitt Romney will make an excellent president. That is why I created the http://MittRomneyLandslide.com website and FB page !

 

Do you think President Obama should be re-elected ?

 

No. He has failed by the standards that he himself set.

 

Who do you believe (like it or not) will be elected on Nov. the 6th ?

 

As predicted by the title of this Facebook page, I believe Mitt Romney will win by an electoral LANDSLIDE ! ("landslide" = "very large margin of electoral victory").

 

 

 

November 5

 

 

Aimee W.M.

 

I am an educated woman, mother, and wife of an American soldier. I think that we need patience with our current president's plan. He is gradually making progress to rectify the situation our previous leader has left for our country. It will take more than four years to do that. What we don't need is for the advances made in the past for women like myself to gradually be taken away. I don't need my government to make choices about my body. Mitt Romney doesn't have a good record in the state he governed... therefore, why would I feel he could do any better with my country ? I believe Obama will win... he is the right choice for mine and my daughters' future.

 

 

 

 

THE STATS

 

25 persons surveyed to date...

 

44% support (or tend to) President Obama (11/25)

20% support (or tend to) Mitt Romney (5/25)

72% think President Obama will be re-elected (18/25)

16% think Mitt Romney will be elected (4/25)

 

 

 

 

To be continued... Thank you !

Thanks to everyone above, below... plus Claudia M.

 

20 oct. : 2 surveys added, minor presentation changes

22 oct. : 2 surveys added

25 oct. : 1 survey added

28 oct. : 2 surveys added

30 oct. : 2 surveys added

3 nov. : 3 surveys added

5 nov. : 1 survey added

6 nov. : 1 survey added

8 nov. : C.S.

If you appreciate Paroles d'Actu, please "like" it on Facebook Nicolas alias Phil Defer

09 août 2012

Ronald Reagan, une passion américaine

Dans quelques jours, l'identité du colistier de Mitt Romney sera connue. Son profil pourra-t-il booster la campagne du candidat républicain à la Maison Blanche ? Il faut dire que pour l'instant, l'ex-gouverneur du Massachusetts est loin d'avoir gagné son duel avec Barack Obama... Jugé trop "liberal" par les conservateurs, pas assez crédible par les centristes, trop inconsistant par à peu près tout le monde, "Flip-flop Mitt" peine à convaincre, et en tout cas à séduire. Alors, certains se prennent à rêver, au "Grand Old Party". On rêve d'un passé glorieux, celui d'un temps où le champion s'appelait Ronald Reagan. Lors de la campagne de 80, était-il vraiment convainquant ? Après tout, celui qui allait devenir son colistier lors de la convention, le futur vice-président Bush, disait de son programme économique, lors de la campagne des primaires, qu'il tenait du "vaudou". Niveau séduction, par contre, Reagan est le maître. L'ancien acteur, que l'on surnommera bientôt "The Great communicator", s'adresse lors d'un débat avec le président sortant Carter à une Amérique frappée par l'inflation, le chômage, les échecs diplomatiques, une Amérique rongée par les doutes. "Vivez-vous mieux qu'il y a quatre ans ?" Il triomphe dans les urnes. C'est le début de la Reagan Revolution. Deux grands axes : la libération de l'économie, et le renforcement militaire. À la fin de la décennie, le blog de l'Est s'effondre. L'inflation est jugulée, l'économie semble dynamique, l'Etat en retrait. L'Amérique croit de nouveau en sa bonne étoile. La morosité des années 70 n'est plus de mise. On dirait bien qu'"America is back !" Auprès des conservateurs, le mythe Reagan est né.

J'ai réalisé ce dossier en 2004, juste après la mort de Reagan. J'avais 19 ans, à l'époque. J'étais assez intrigué, pour ne pas dire fasciné, par le personnage de Reagan, par ce qu'il incarnait. Les réponses qui suivent proviennent pour l'essentiel de témoignages de conservateurs américains, politiquement proches de l'ex-président défunt. Mes questions touchent également à la guerre d'Irak, alors que les tensions demeurent vives entre les Etats-Unis et la France. À l'élection de novembre 2004. Et, je le suggérais à l'instant, à la France. Mes conclusions de l'époque manquent sans doute un peu de distance. Je reste très intrigué par le personnage, et les trois grands points de bilan que j'ai cités plus loin sont réels. Mais les années Reagan, c'est aussi l'explosion des inégalités et des déficits publics. Deux gros points noirs devenus maladies chroniques de l'Amérique, personne ne le nierait aujourd'hui. Nous sommes en 2004. Reagan vient de mourir. Voyage dans le monde des conservateurs américains. Un document qui ne cherche pas à faire la part des choses, mais qui donne la parole, simplement, naturellement, à des hommes, à des femmes qui expriment leurs convictions sincères. Des paroles toujours d'actu et qui, au-delà des caricatures, méritent d'être entendues. J'ai volontairement omis d'y inclure le témoignage d'Eusebio A., un homme très cultivé et dont le témoignage, très long et élaboré, méritera certainement une publication, dans un autre cadre... À partir de maintenant, tout le texte est "d'époque". Bonne lecture.  Phil Defer   DOCUMENT

 

 

RONALD REAGAN

 

UNE PASSION AMERICAINE

 

RR

(Photo : Ronald Reagan Presidential Libary)

 

Le 5 juin 2004, à la veille des cérémonies commémoratives du Débarquement allié de 1944 en Normandie, le monde apprenait une triste nouvelle. Ronald Reagan, l’homme qui fut acteur à Hollywood, Gouverneur de Californie puis Président des Etats-Unis de 1980 à 1988, venait de mourir après s’être battu pendant plus de dix ans contre la maladie d’Alzheimer. Il avait 93 ans. A l’annonce de son décès, que l’on disait imminent, les leaders du monde entier ont rendu hommage au 40ème Président des Etats-Unis, sans aucun doute l’un des plus charismatiques, à l’unanimité. George W. Bush, John Kerry, George Bush Senior, Bill Clinton, Mikhaïl Gorbatchev et bien d’autres ont rendu hommage à l’ancien chef d’Etat.

 

J’ai voulu savoir ce que le peuple américain retenait du président Reagan. Pour cela, je suis allé sur un site qui lui était consacré, site où les messages de sympathie ont afflué depuis l’annonce de la mort de "Ronnie". J’en ai lu un grand nombre et j’ai contacté par mail quelques personnes dont j’ai trouvé les témoignages les plus touchants, émouvants et symboliques, auxquelles j’ai soumis un questionnaire, consacré en large partie à l’événement mais également à d’autres sujets intéressants d’un point de vue américain (pour l’essentiel). Voici les réponses de toutes celles qui ont eu la gentillesse de me répondre.

 

Les questions et les réponses ayant été rédigées en anglais, j’ai traduit toutes les réponses (à une exception), de façon donc parfois approximative mais toujours le plus fidèlement possible à ce qui représentait la réalité des témoignages d’après moi. Les traductions ont été très longues et parfois très difficiles et j’ai donc parfois dû interpréter certaines phrases, espérant qu’il s’agissait bien de ce qu’a voulu dire la personne.

 

 

 

 

QUESTIONNAIRE

 

Que représentait Ronald Reagan pour vous ? Selon vous, quel héritage a-t-il laissé à l’Amérique ?

 

Que pensez-vous de George W. Bush ? Aura-t-il votre soutien en novembre prochain ?

 

Que pensez-vous de la guerre en Irak ?

 

Qu’évoque la France pour vous ?

 

 

 

 

REACTIONS

(PAR ORDRE CHRONOLOGIQUE DE RECEPTION)

 

 

 

7 juin (2004)

 

 

Edwin C.

Retraité de la Police montée royale canadienne

Alberta, CANADA

 

(…) Je suis un citoyen canadien et je n’ai par conséquent pas le droit de vote pour les élections américaines. J’ai servi dans la Marine canadienne entre 1976 et 1980, juste avant l’élection de M. Reagan. En ce temps-là, Pierre Trudeau était le Premier ministre du Canada. Trudeau n’a jamais aimé l’armée et quoi que ce soit que l’on pouvait associer à l’aile droite.

 

A l’élection de Reagan, j’ai vu un visionnaire qui par la suite remettrait les Soviétiques à leur place, avec l’aide d’une autre visionnaire, Margaret Thatcher. J’ai souvent souhaité que l’un deux ou les deux soient Canadiens.

 

Si j’étais un citoyen américain, je soutiendrais très certainement Bush, et je soutiens de tout mon cœur la guerre en Irak.

 

Mon opinion de la France. Difficile de dire cela de façon concise. Si vous connaissez un peu le Canada, vous savez que les deux cultures fondatrices du pays, le protestantisme britannique et le catholicisme français, se battent ici depuis plus de 300 ans. Comme les membres de ma famille, des deux côtés, sont des Irlandais protestants et des Orangistes (Ordre protestant anti-catholique et anti-francophone, ndlr) de longue date, vous pouvez deviner de quel côté je me place politiquement…

 

 

 

Ryan V.

Etudiant

Caroline du Sud, U.S.A.

 

(…) Je suis divisé concernant la guerre en Irak. Je suis d’un côté heureux pour le peuple d’Irak qui a été libéré d’une dictature et a maintenant l’opportunité d’instaurer une démocratie et de s’autogérer. Mais je pense d’autre part que nous autres Américains avons été bernés par un manque d’informations. De plus, j’ai, comme le reste du monde, été dégoûté par les images récemment révélées de la prison d’Abu Graib.

 

Concernant votre question sur l’élection, à savoir si je voterai pour George W. Bush ou non, et bien j’ai tendance à pencher vers Kerry, simplement à cause de la manière déplorable dont a été gérée la guerre. Egalement, je ne me souviens pas dans l’histoire récente d’une situation où l’Amérique a été autant haïe et notre président autant décrié qu’aujourd’hui. Une réélection de Bush ne ferait que conduire à plus d’agressivité et d’agressions envers les USA. Mon espoir est que John Kerry pourra réparer quelques-uns des liens internationaux si chers aux Etats-Unis. C’est une condition cruciale au succès de l’Amérique dans le futur.

 

Le Président Reagan personnifiait un sentiment de fierté et de patriotisme en Amérique. Il nous manquera beaucoup. Je suis encouragé par votre intérêt dans la politique américaine et j’espère vous avoir éclairé sur ce qui je pense représente la majorité de l’opinion américaine.

 

 

 

Richard T.

Marine américain

Caroline du Nord, U.S.A.

 

Phil,

 

J’apprécie beaucoup l’email que vous m’avez envoyé. Ronald Reagan fut un grand Président, mais plus important encore, il fut un grand homme. Je suis heureux de voir que vous pensez tant de bien de notre ancien Président et des Etats-Unis.

 

Pour moi, le Président Reagan a représenté le calme durant une période de chaos. Il a restauré la confiance que les Américains avaient perdu durant les présidences précédentes. L’Amérique pouvait enfin être fière à nouveau. Il était l’homme parfait dans le temps et le lieu. La seule chose, je pense, que nous pouvons faire pour perpétuer l’héritage de M. Reagan, c’est de continuer à prêcher la liberté et toutes les grandes valeurs qui ont fondé l’Amérique.

 

Ce que je pense de George W. Bush ? Il est un homme décent mais il est pris dans des moments difficiles. J’espère seulement que ses intentions sont justes et qu’il se soucie vraiment des principes dont il parle continuellement dans ses discours. Je suis un Marine américain and j’ai passé quelque temps au Moyen-Orient, et je vais bientôt y retourner, ce est une très bonne raison pour laquelle je suis très attentif à sa politique, mais dans le même temps j’ai confiance dans le fait qu’il sait ce qu’il fait. Il est difficile de parler des élections de novembre. Bush est sans doute le meilleur pour le poste, cela parce que je n’ai pas confiance en Kerry.

 

A propos de la guerre en Irak, étant directement impliqué, je ne veux personnellement pas y être. La guerre avec l’Irak semblait nécessaire. Maintenant que nous sommes impliqués, il est très difficile de se sortir de la situation actuelle. Je suis troublé de savoir qu’il y a tant de gens à travers le monde qui nourrissent pour le peuple américain une haine absolue.

 

La France est un pays merveilleux. Les relations que l’Amérique entretient avec la France sont très bonne. "The French Legionnaires kick ass" !

 

 

 

Ronald L.

Retraité

Tennessee, U.S.A.

 

Je vais faire de mon mieux pour passer en revue les points fondamentaux de ma vision de l’Humanité et de notre Terre.

 

Cela est vrai, j’ai admiré Ronald Reagan depuis ma tendre enfance. Une des raisons est peut-être que nous partagions le même prénom, mais la raison principale qui m’a fait aimer cet homme fut sa capacité à surpasser les difficultés et à tenir la plupart de ses promesses. J’ai été élevé sous la règle d’or "Traite les autres comme tu aimerais que l’on te traite". Ronald Reagan n’a jamais eu à servir le peuple des Etats-Unis, mais il avait pour vision d’améliorer le mode de vie ("way of life"), pas seulement pour les Américains mais aussi pour le reste du monde. Nous savons tous les deux que toutes les espèces vivantes ont besoin de nourriture, d’eau, de protection contre l’environnement et d’un ensemble de choses nécessaires à notre survie sur Terre. Partager avec les autres conduit à une harmonie avec soi-même. L’égoïsme n’a jamais rien apporté de bon. Les ressources mondiales sont abondantes dans certaines parties de la planète, et d’autres coins souffrent du manque d’un commerce nécessaire.

 

La démocratie américaine a été fondée par nos ancêtres. Leurs principes généraux étaient la protection, la civilisation et l’éducation du peuple. Je pense que M. Reagan a fait un excellent travail pour la Californie et les Etats-Unis en tant que notre 40ème Président. Le monde est devenu bien plus sûr, et durant son service, le calme et la paix se sont imposés. La satisfaction de voir se terminer la Guerre Froide fut célébrée dans le monde entier.

 

Certains de nos présidents héritent des fruits du travail des présidents passés. C’est un travail très dur d’être un bon président, et un plus gros travail encore d’être juste aux yeux de tous. George W. Bush a essayé de montrer une société qui se préoccupe de ce qui se passe dans le monde. Peut-être qu’une guerre ne résout rien, mais quand la diplomatie ne fonctionne pas, la guerre est parfois la seule alternative. La situation en Irak nous a échappé il y a de nombreuses années, avant même que George Bush père ne devienne président. N’est-ce pas choquant de se dire que vous et moi, nous nous levons le matin, allons travailler et rentrons ensuite le soir pour se relaxer et être en famille… Nous avons été éduqués pour essayer d’aider les autres. Et il y a les extrémistes, les radicaux… Ces gens se lèvent et étudient comment détruire les sociétés en assassinant, volant, et causant le chaos à travers la planète… Je pense que l’Amérique a fait un pas en Irak avec un fort soutien pour aider ce pays à se débarrasser de la tyrannie. La publicité faite par le traitement par certains Américains des prisonniers irakiens n’est pas l’Amérique… C’est une honte de voir que quelques uns de nos concitoyens aient pu faire cela… L’Amérique a toujours été leader mais jamais oppresseur. Si un jour nous devenions une dictature, ce serait contre-nature. Nous sommes une nation de partage, de compassion. Je suis fier d’être ici, et je me sens bien et en sécurité en Amérique.

 

Je ne sais pas grand chose de la France… Je sais que votre nation nous a donné la Statue de la Liberté, un grand symbole de paix pour chacun qui a l’honneur de la voir en personne. Vous et mois partageons sans doute les mêmes buts dans la vie. La vie est aussi bonne que nous la faisons. La rendre meilleure est bon. La rendre pire nous fait tous perdre.

 

Que Dieu vous bénisse, et Dieu bénisse votre nation.

 

 

(…)

 

 

(autre mail)

 

Je pense que les visions de M. Reagan faisaient partie des lignes que la plupart des Américains voulaient voir développer dans le monde. Une meilleure amitié avec les nations appauvries. La protection des valeurs communes de la vie pour ceux affectés par le Mur de Berlin. Il était un vrai chef, et pas un dictateur.

 

Je crois que la pire chose qui soit arrivée depuis 1969 est le terrorisme international. Les méthodes idéologiques des terroristes seront toujours contraire à la valeur du partage de la vie, au lieu de l’enlever. Evidemment, il peut y avoir une sorte de jalousie associée à leurs sentiments terroristes. J’ai été élevé en Amérique, pour apprendre sur la vie et les gens, avoir une éducation dont j’ai pu fixer moi-même les limites, travailler et avoir une vie agréable, soutenir ma famille, partager mes sentiments, suggérer, comparer, protéger, bref être tout simplement un véritable être humain aux yeux des gens… et s’il est une chose que l’Amérique valorise, c’est la liberté. Nous sommes tous ensemble dans ce monde. Pourquoi ne pas partager les informations et l’amitié ? Je me sens désolé pour les jeunes enfants terroristes. On leur apprend à haïr et à tuer. Il ne sont pas nés comme cela instinctivement. Ce n’est pas la faute des enfants mais celles des adultes qui les ont guidés à agir ainsi. Nous avons besoin de demander aux terroristes la réelle raison de leurs actions. Les Américains sont un peuple généreux, et ce qui semble tromper les autres pays à propos des Américains corrompus, égoïstes et impérialistes n’est… qu’une illusion. Notre démocratie dépend de notre capacité à travailler ensemble, même si nos idées peuvent être différentes, nous allons toujours de l’avant. Nous ne sommes pas parfait mais faisons preuve de la meilleure volonté.

 

Encore une fois, merci pour votre soutien pour notre 40ème Président, Ronald Wilson Reagan. Son esprit sera toujours avec nous…

 

 

 

Patricia G.

Mère d'un soldat américain tombé en Irak

U.S.A.

 

Phil,

 

Je pense que Ronald Reagan fut le plus grand Président de ma vie. Plus important encore, il était un homme bon. J’ai 49 ans, j’ai donc "connu" beaucoup de présidents.

 

A propos de l’Irak, c’est très difficile. J’ai beaucoup de sentiment à ce sujet, certains étant en conflit.

 

Mon fils était dans la Garde Nationale de Floride, pas dans l’armée régulière. Il était également étudiant, à l’Université du Sud de la Floride, à Tampa. Il avait 23 ans. Il était en classe un jour, puis s’est retrouvé en Irak le jour suivant. Dans une de ses lettres, il disant qu’il voyait là bas de nombreux enfants mourant de faim, parce que la nourriture était stockée et distribuée en petites quantités, une façon pour Saddam de contrôler son peuple. Il disait que si sa présence en Irak pouvait permettre qu’un enfant de moins ne meure de faim, alors cela en valait la peine.

 

Il était mon unique fils, mon bébé. Pour moi, les Irakiens ne valaient pas la vie de mon fils, lorsque l’on voit qu’un si grand nombre d’entre eux ne font rien pour s’aider eux-mêmes.

 

 

 

Patricia F.

Sans emploi

Caroline du Nord, U.S.A.

 

(…) Pour moi, Ronald Reagan représente la véritable signification des valeurs de notre pays. Il était totalement pour le peuple, il aimait l’Amérique et voulait la voir prospérer. Il fut à l’origine de la fin de la Guerre froide, et ce sans que le moindre coup de feu ne soit tiré. Il fut également à l’origine de la chute du Mur de Berlin. Il a tenu toutes les promesses qu’il avait faites lorsqu’il s’est présenté à la présidence. Aucun autre président ne s’est tenu à ses promesses. Il fut le meilleur président que notre pays ait eu. Lorsqu’il a quitté son poste, j’ai pleuré toute la journée.

 

Si je soutiendrai Bush en novembre ? Oui ! Il n’est pas responsable de ce qui est arrivé à l’économie. Si les attaques terroristes du 11 septembre 2001 n’avaient pas eu lieu, nous nous porterions très bien. Le seul problème que je retiendrai est la tendance à la délocalisation de certaines activités et donc de l’emploi. Mais Bush n’est pas responsable. Ce sont les compagnies qui font cela, pour ne plus avoir à payer de taxes.

 

Concernant l’Irak, j’ai soutenu le fait d’avoir fait quitter le pouvoir à Saddam, et la mort de ses fils, mais je pense que nous avons besoin de nous retirer maintenant, et de laisser les Irakiens gérer leur pays eux-mêmes. Ils veulent juste continuer à tuer nos hommes parce qu’ils ne veulent pas de notre présence, c’est pourquoi nous devons nous partir.

 

Je n’ai aucun problème avec la France. Je pense qu’il s’agit d’un grand pays, et je rêverais de voir la France.

 

 

 

Sandi S.

Artiste

Georgie, U.S.A.

 

(…) Bien sûr, comme vous le savez, il y a eu des tensions ces derniers temps entre les gouvernements français et américains, mais ce n’est pas la faute des peuples français et américains. Par conséquent, je n’ai aucun mauvais sentiment envers la France et son peuple, pas du tout. Nous sommes amis depuis tant d’années, n’est-ce pas ?

 

Je suis honorée que vous m’ayez choisie pour répondre à vos questions, et je vais être aussi honnête que possible.

 

Pour moi, Ronald Reagan représentait la force de l’esprit, qui a permis aux Etats-Unis de devenir ce qu’ils sont devenus. Il représentait également notre foi en tant que peuple en Dieu, et tout ce qu’un peuple peut faire avec de la foi.

 

Le plus parfait héritage serait de perpétuer sa vision pour notre pays et pour le monde.

 

Bien que M. Bush ait fait un certain nombre de choses avec lesquelles je ne suis pas d’accord, je pense qu’il est également un homme de foi et de force, et oui, je le soutiendrai en novembre, parce qu’il est la force dont nous avons besoin en temps de guerre.

 

La plupart des gens, y compris aux Etats-Unis, ne reçoivent pas les informations nécessaires pour se forger une opinion réfléchie concernant la guerre en Irak. Je suis très politisée dans mon esprit, et j’ai lu d’autres sources qui disaient que la guerre était la bonne chose à faire. Je suis triste que nous ayons dû aller en guerre, mais maintenant que nous y sommes, nous devons rester et la terminer afin que l’Irak ne retombe pas à nouveau dans de mauvaises mains. Quand les tanks nazis défilaient sur les Champs-Élysées, les Etats-Unis ont pleuré avec la France, mais nous savions que nous devions rester en Normandie pour empêcher les Nazis de prendre Paris à nouveau. Maintenant, nous sommes partis, et la France est à nouveau un grand pays. C’est ce que nous devons faire pour l’Irak.

 

Nous ne voulons pas envahir des pays. Nous devons protéger nos amis.

 

Pour moi, la France évoque les balades dans les rues de Paris, Brest, Lyon…

 

Visiter Bordeaux, aller dans un café de rue, manger des escargots avec du beurre et du vin ! Comme je l’ai dit, politiquement, je n’ai aucun problème avec le peuple français. On doit toujours faire ce qui est le meilleur pour tous, non ?

 

D’ailleurs, mon prénom français est Diane !

 

 

 

Corey T.

Conceptrice mécanique

Minnesota, U.S.A.

 

Bonjour Phil,

 

Merci pour votre gentil mail. Je suis sure que nous ressentons tous de la tristesse à cause du décès du Président Reagan. J’ai une vingtaine d’années, mais je me souviens bien de lui. J’ai été élevée dans un foyer démocrate, mais j’ai toujours respecté cet homme pour ce qu’il représentait ainsi que pour ses choix et l’exemple qu’il a instauré pour nous, les jeunes.

 

Je pense que l’Amérique va apprendre que les valeurs morales de la famille et de la décence sont toujours présentes. Cela se perd parfois dans cet âge de glamour, etc… Je pense qu’il avait une façon par la communication, un don, qui lui permettait d’atteindre des gens qui d’ordinaire ne l’auraient pas été. C’est pourquoi je pense qu’il ne sera jamais oublié.

 

Concernant le Président Bush, je pense que l’Amérique a besoin d’un changement de leadership. Il a su nous guider durant des temps obscurs, mais je pense qu’un changement sera meilleur. Je soutiendrai donc John Kerry comme nouveau président.

 

La guerre en Irak sera bientôt terminée, je l’espère comme tous les peuples du monde. Je pense qu’elle était justifiée par le terrorisme omniprésent dans notre monde et le besoin de le combattre. Je prie chaque nuit pour que cela s’arrête bientôt et que la paix soit restaurée partout sur la planète.

 

J’ai toujours voulu visiter la France. Je suis fière que la France nous ait donné la Statue de la Liberté. Le pays en lui-même paraît très beau dans les livres que j’ai lu, par l’art et les sites historiques. J’aime la façon de parler des Français, j’aimerais un jour pouvoir parler français couramment.

 

Meilleurs vœux, de paix et d’amitié.

 

 

 

Daniel T.

Vendeur, écrivain

Kentucky, U.S.A.

 

Merci pour vos gentils commentaires. Je savais que ce jour allait arriver, mais comme beaucoup, cela m’a réellement beaucoup frappé très durement (et cela continue), plus que je ne le pensais. Je serai heureux de vous répondre.

 

Pour moi, Ronald Reagan représentait le meilleur de l’Amérique. Il a commencé pauvre, avec une situation familiale pas si parfaite que cela. Pourtant, il a été capable d’avoir une éducation, puis de se frayer un chemin dans le monde de la radio. Ensuite, il y a eu les films (c’était son rêve). Vers la fin de sa carrière, il a rencontré Nancy (sa femme, ndlr), et ils sont tombés amoureux. Leur romance et leur amour continu l’un pour l’autre était extrêmement touchant, un modèle.

 

Il est devenu confiant dans ses idées du monde, et a toujours su qui il était jusqu’au jour de sa mort. Pour moi, il représentait ce qu’un homme américain devrait être : fort, charismatique ("rugged good looks", pas de certitude sur la traduction, ndlr), confiant, un homme de foi, courageux, et qui ne recule jamais devant ce qui est juste. Son héritage sera de trois ordres :

 

Il fut la force conductrice du renouveau de l’esprit de l’Amérique. Durant les deux décennies précédentes, l’Amérique (pour des raisons diverses) avait en effet perdu de son âme. M. Reagan n’acceptait pas cela. Il a remis au goût du jour l’amour de la patrie et la fierté d’être Américain, partiellement grâce à sa volonté de toujours mettre en valeur le pouvoir des individus sur celui de l’Etat.

 

Il a donné un nouveau souffle à l’économie américaine. Il a fait exactement comme JFK en son temps, en donnant aux gens plus de contrôle sur leur argent. Lorsque les gens ont plus de contrôle sur leur argent et qu’ils l’épargnent ou le dépensent, cela renforce l’économie. Pour chaque bien ou service payé, de la richesse est alors créée et un travail est sécurisé ou créé. Cela a créé un cercle vertueux, toujours croissant. Il a favorisé l’ouvertures de portes, et nous autres Américains l’avons suivi. George W. Bush a fait de même.

 

Il restera enfin dans nos mémoires pour avoir détruit l’Empire soviétique sans aucun tir. Il savait dans son cœur que l’Union soviétique était vouée à l’implosion. Vous ne pouvez pas enfermer indéfiniment les hommes et les femmes, il y a forcément un moment où ils se révoltent pour la liberté. Il croyait en la paix par la force. Les Soviétiques n’ont pas pu tenir le rythme qu’il leur a imposé (notamment concernant la course aux armement, ndlr).

 

Comme Reagan, je pense que George W. Bush restera dans l’Histoire comme un grand président. J’ai apprécié l’homme depuis qu’il est devenu pour la première fois Gouverneur du Texas. Lorsque je l’ai vu gagner sa première bataille électorale, j’ai su qu’un jour il deviendrait Président. J’ai voté pour lui en 2000 et je voterai à nouveau avec entrain pour lui en 2004. Il me rappelle énormément Reagan, et, comme l’Histoire se répète souvent, il doit faire face à nombre de défis auxquels Reagan a dû faire face : une gauche extrême (jusqu’à la trahison parfois), la guerre contre le terrorisme (à mettre en rapport avec la guerre de Reagan contre le communisme), et, comme toujours, l’économie. Comme Reagan, Bush est un homme de principes et de foi, cela ne fait aucun doute. Je désapprouve Bush sur le montant des dépenses occasionnées et sur quelques unes de ses politiques domestiques, mais il a mon soutien concernant le leadership, la guerre contre le terrorisme et l’économie.

 

Je pense que la guerre en Irak devrait avoir eu lieu environ dix ans plus tôt. (…)

 

Nous aurions dû finir le travail en 91. Je soutiens la guerre en Irak à 100%. Je crois que tous les peuples (pas seulement les riches blancs, comme la gauche le pense) ont droit à la liberté. Saddam oppressait son peuple, il avait (ou a) des armes de destruction massive (je pense que ce qu’il avait est caché en Irak, et d’autres ont été transportées en Syrie), et il était une base potentielle pour des opérations terroristes. Je pense et j’espère que ça ne s’arrêtera pas là. Pour réellement résoudre le problème du terrorisme, il va falloir s’occuper de l’Iran, de la Syrie, du Soudan. Je crois que certaines personnes ont peur d’appeler ceci tel que c’est, la 3è Guerre mondiale.

 

La France est un pays qui je crois sera toujours notre allié. Toutefois, j’ai été extrêmement déçu par le gouvernement de France, par leur implication dans le scandale du programme "pétrole contre nourriture" et le fait qu’il ne nous ait pas soutenu sur l’Irak. Je ne blâme pas les Français, mais je désapprouve les principes de votre gouvernement actuel.

 

 

 

Michael R.
Manu.
Caroline du Nord, U.S.A.

 

J’apprécie vos gentils mots et le respect que vous avez montré envers non seulement un grand Américain, mais également un grand être humain, Ronald Reagan.

 

Je serai heureux de vous répondre, de mon mieux.

 

Le Président Reagan, pour moi, représentait de toute façon, avec une absolue détermination, l’idée que les Américains devaient réaliser à quel point ils étaient chanceux de vivre dans ce grand pays, mais surtout d’être libres. Il est difficile pour moi d’exprimer par des mots, le sentiment de fierté qu’il a redonné à notre pays. Le Président Carter (prédécesseur de Reagan, de 1977 à 1981, ndlr) était sans doute un homme bon comme cela a toujours été le cas à la Maison Blanche, mais il n’était simplement pas un Président. Durant et à la fin du mandat de Jimmy Carter, le pays avait glissé dans une situation de malaise. Nous avions même un index de misère pour documenter à quel point les choses s’étaient dégradées. Notre armée avait été décimée, à la sortie du Vietnam, nous n’étions plus une armée que dans un seul domaine, plus aucune force de dissuasion conventionnelle à proprement parler, nous ne dépendions que de la Destruction mutuelle par le biais des missiles intercontinentaux et des bombardiers SAC. J’ai grandi sous le nuage d’une dizaine de milliers de têtes nucléaires soviétiques pointées sur mon pays, avec la conscience que mon pays en avait approximativement le même nombre, pointés sur l’Union soviétique. Nos destins collectifs dépendaient du moins stable de cette paire, le maillon faible pour faire une paraphrase.

 

Les Iraniens avaient pris 52 otages américains et le pays était incapable de faire quoi que ce soit à ce sujet. J’avais 12 ans en 1980, l’année où le Président Reagan a été élu pour son premier mandat. C’était drôle, nous pouvions penser qu’un homme de 69 ans lorsqu’il est entré en fonction se serait aliéné la jeunesse, mais je me souviens que nous avons parlé de lui en études sociales, et tout le monde était derrière lui. Il nous disait que les jours les plus glorieux de l’Amérique étaient devant elle, pas derrière, il nous a permis d’être fiers d’être américains à nouveau. L’Iran, craignant le "cow-boy", libéra les 52 otages retenus pendant 444 jours, immédiatement après la prise de fonction du Président Reagan. Durant les années Reagan, le patriotisme a atteint des sommets. Son épouse Nancy a rendu son prestige à la Maison Blanche, et j’ai un souvenir très particulier du 4 juillet 1986, lors de la réouverture de la Statue de la Liberté pour son 100ème anniversaire, un présent spécial de votre pays au mien. Quand il a quitté le poste, le monde était plus sûr. Le Mur de Berlin allait bientôt tomber et le Communisme s’effritait peu à peu pour ne devenir plus tard qu’une page de l’histoire. Les enfants qui grandissent aujourd’hui ne savent pas ce que cela fait de vivre dans un monde en présence d’un régime dont le leader avait revendiqué à l’ONU qu’il nous enterrerait tous (Nikita Khrouchtchev en 1956, ndlr). Je suis heureux de savoir que ma nièce n’aura pas ce souci.

 

Je pense que l’Amérique restera fidèle aux valeurs prônées et défendues par le Président Reagan.

 

La nation a créé le gouvernement fédéral, pas l’inverse. Je pense que nous réaliserons l’importance de maintenir une défense nationale forte, et par-dessus tout, l’importance de rester optimistes. J’espère qu’un jour il y aura à Washington D.-C. un monument qui lui sera dédié, à lui et à son héritage.

 

J’aime le Président Bush et j’essaie de le soutenir autant que faire se peut. Je pense qu’il a réalisé un très bon travail, en ayant eu à gérer plus de difficultés que n’importe quel autre président dans la mémoire récente. L’élection serrée de 2000 et les défis qui ont suivi avec l’incertitude des résultats ont fait tomber notre confiance à l’aube de 2001. Les choses commençaient juste à se normaliser et à s’améliorer lorsque survinrent les attaques terroristes du 11 septembre. Nous avions, en tant que pays, ainsi que nos dirigeants, ignoré le terrorisme pendant trop longtemps, et il est venu nous frapper à nouveau d’une façon sans précédent. 1993, une bombe explose au World Trade Center. Les explosions des ambassades en Afrique et contre l’U.S.S. Cole en octobre 2000. Toutes ces attaques ont été organisées par Oussama ben Laden et ses lieutenants, et toutes ces attaques n’ont eu droit qu’à des réponses très limitées de la part des Etats-Unis. Ben Laden pensait que nous étions des cibles faciles et dociles, mais il n’avait pas compté avec la détermination du Président Bush. C’est ce moment qui a défini sa présidence. La guerre contre le terrorisme continuera dans l’avenir. Et, même si nous ne pouvons pas espérer de stopper chaque nouvelle tentative d’attentat, nous pouvons tout de même dire que les Etats-Unis et le monde sont plus sûrs depuis ce qu’il s’est passé en Afghanistan et en Irak.

 

Les gens disent que la guerre en Irak était pour le pétrole, ils disent qu’elle était basée sur des renseignements défaillants concernant les ADM, ou encore que le Président Bush voulait juste faire payer à Saddam pour avoir voulu attenter à la vie de son père peu de temps après qu’il ait quitté [la Maison Blanche], en 1993. Pour moi, c’est vraiment une question d’Etat de droit. Saddam avait accepté, à la suite de l’opération Tempête du Désert, en 1991-92, de démilitariser le pays et de détruire ses ADM et autres SKUD qui avaient été tirés sur des innocents en Israël durant la guerre. Les inspecteurs de l’ONU surveillaient le respect de ces accords. Mais Saddam a essayé de cacher ces armes interdites, de tromper les inspecteurs et d’autres coups bas. L’ONU a alors passé résolution après résolution pour condamner puis autoriser l’autorisation de la force. Chaque résolution lui laissait un peu plus le champ libre. Il a finalement pensé qu’il pouvait relever la tête et a expulsé les inspecteurs d’Irak en 1998.

 

Nous avons trouvé un grand nombre d’armes interdites. Nous commençons à reparler de ces ADM et à trouver des preuves sur l’endroit où elles ont été transportées. Les combats dont vous entendez parler aux informations sont en premier lieu le fait d’étrangers affiliés à Al Qaida. Nous subissons des pertes, c’est vrai, mais ce sont eux qui prennent le gros des pertes. D’après ce que j’ai entendu de la part d’amis de retour d’Irak, le peuple irakien est très pro-américain et est très heureux d’avoir été libéré de la tyrannie de Saddam et de ses bouchers. Je pense que l’Histoire dira que c’était la bonne chose à faire.

 

Ce que la France évoque pour moi ? Question difficile ! Historiquement, la France et l’Amérique ont toujours été très proches. La République française est basée sur notre Constitution. Durant la Première guerre mondiale, les Américains ("Yanks") se sont battus aux côtés des Français et des Anglais contre les Allemands. Durant la Seconde guerre mondiale, nous avons aidé à la libération de la France et mis fin à la menace nazie. Dans les années 1950, nous avons soutenu les troupes françaises en Indochine avec de l’argent et des armes. Après le retrait français de la région, nous sommes intervenus dans les années 1960, dans ce qui s’appelait désormais Vietnam. La France a été et reste un allié loyal de l’OTAN. Elle a été en désaccord avec les USA sur l’Irak, ce qui arrive de temps en temps. Le couple le plus loyal a des désaccords de temps en temps. Je sais qu’après la décision française de ne pas s’impliquer en Irak, il était à la mode d’attaquer le peuple français. Personnellement je n’ai pas de problème avec le peuple français. Je pense que le Président Bush sait également faire la part des choses. J’espère simplement que vous serez attentifs à ce que disent les médias. Un grand nombre de choses qui sont dites par les médias américains sont des demi vérités destinées à desservir le Président Bush, simplement parce qu’ils ne sont pas d’accord avec lui.

 

 

 

Paul F.

Technicien informatique, propriétaire d'entreprise

New York, U.S.A.

 

(…) J’ai 30 ans, j’avais donc 7 ans lorsque Reagan est arrivé à la Maison Blanche en 1981. Je suis heureux de voir des Européens rendre hommage à Reagan. Si je devais faire une liste des trois plus grands présidents de tous les temps, je dirais que Reagan serait n°2, derrière George Washington, le père de mon pays. Sa mort m’a vraiment contrarié toute la journée de samedi, lorsque je l’ai apprise aux informations. Ronald Reagan a fait de moi le conservateur que je suis aujourd’hui. Mon premier souvenir de lui correspond au jour où on lui a tiré dessus. Je me souviens l’avoir regardé se lever, comme si de rien n’était, et marcher vers l’hôpital. En tant qu’enfant, je l’avais alors placé à un niveau supérieur, presque divin. Il semblait ne pas avoir été plus choqué par cela de l’évènement. L’homme qui représentait l’Amérique venait d’être pris pour cible, et s’était relevé encore plus fort ! Pour un petit garçon, cela m’a fait [symboliquement] prendre conscience que personne ne pourrait nous abattre, en tant que pays. Nous pourrions être touché mais nous resterions debout, fort et en continuant de faire ce qui doit l’être. De plus, mon père me parlait de mon grand-père que je n’avais jamais connu, qui s’était battu en tant que "Ranger landing" en Normandie. Il est mort quelques années avant ma naissance, il avait survécu à la guerre. Mon père m’avait dit que mon grand-père lui avait dit qu’il s’était battu à la guerre pour que les générations futures n’aient pas à le faire. Reagan était un peu notre grand-père à tous. Reagan, pour moi, représentait tout ce sur quoi notre nation a été bâtie… tous les idéaux de nos pères fondateurs, Washington, Jefferson, Adams, Franklin. Les idéaux que ces hommes brillants ont toujours défendu durant toutes ces années me restent toujours en mémoire, mais parmi eux, un restera toujours vrai : "Tous les Hommes ont le droit d’être libres". Ronald Reagan a basé sa présidence sur ce principe. C’est pourquoi il s’est adressé à l’Union soviétique et l’a forcée à détruire le Mur de Berlin, à quitter l’Europe de l’Est et à libérer des millions et des millions de gens de la tyrannie. Je travaille avec des personnes qui ont immigré ici grâce à Ronald Reagan et à sa façon de gérer le problème soviétique. Je travaille avec un groupe d’immigrants russes et polonais, et avec un homme qui est un Juif hongrois. Les histoires que celui-ci m’a raconté à propos de la vie sous le communisme, n’a fait que renforcer mon opinion sur la chance que j’ai eu de naître ici, aux Etats-Unis. Lorsque vous voyez tous ces gens critiquer et attaquer l’Amérique (spécialement ces imbéciles qui traitent Bush de terroriste), ce sont des gens qui sont enfants de personnes qui ont beaucoup d’argent et n’ont pas d’idée de ce que signifie la souffrance, comme l’ont vécu et le vivent encore les gens soumis à la règle communiste. Il est triste de voir que certains gosses de riches pensent savoir ce qui est juste alors qu’ils n’ont jamais eu à travailler pour rien dans leur vie.

 

L’héritage de Reagan fera partie du modèle de fabrique américain. Les baisses d’impôts qui permettent aux gens de travailler (19 millions d’emplois ont été créés grâce à ses fortes réductions d’impôts), une défense forte, une confrontation face à face avec le Mal sans jamais reculer. Voilà ce que sera son héritage.

 

Je suis un grand supporter de Bush. Je ne suis pas d’accord avec toutes les dépenses du gouvernement, mais il a fait ce qu’il avait promis de faire. Il a fait des promesses lors de la campagne et les a toutes tenues arrivé au poste suprême. Il n’est pas comme la plupart des politiciens, il se préoccupe réellement de son pays et non de son pouvoir personnel. Comme Reagan. Je voterai à nouveau pour Bush en novembre.

 

Honnêtement, nous aurions dû faire tomber Saddam et ses fils meurtriers, violeurs et gangsters, durant la 1ère Guerre du Golfe, en oubliant l’ONU. Nous avons fait ce que nous aurions dû faire il y a longtemps. Encore une fois, George W. Bush est comme Reagan. Tout le monde critique tout ce qu’il a fait, pourtant il est toujours là, en connaissance de ce qui est juste et moral. 50 millions de personnes ont été libérées de la tyrannie grâce à George W. Bush. Cela ne vous rappelle rien ? Reagan a libéré des millions de gens en Europe de l’Est alors que ses détracteurs critiquaient tout ce qu’il faisait.

 

Maintenant, la France. J’ai des cousins français, et honnêtement, je souhaite que Chirac et votre gouvernement se réveillent. Je veux dire, que faut-il, que le Louvre ou la Tour Eiffel soient détruits pour que votre gouvernement prenne conscience de l’ampleur de la menace du terrorisme global ? Ben Laden ne veut pas terre ou gloire comme Hitler, il veut simplement la mort de tout ce qui n’est pas musulman et de tous ceux qui ne sont pas musulmans. Le 11 septembre n’était pas un événement isolé. Madrid a été attaquée, ainsi que Bali en Indonésie et d’autres… Cela fait trop longtemps que ça dure. On ne peut pas capituler au Mal, il faut le détruire. Que ce soit le marxisme, le nazisme ou le terrorisme, le Mal est le Mal, et il vous coupera la tête si on lui en donne la moindre petite chance. Une partie du problème réside dans le fait que Chirac était corrompu par le pétrole de Saddam, j’ai en effet vu dans un reportage qu’il a reçu 11 millions de barils de pétrole, pour une valeur d’environ 350 millions de dollars d’argent entaché de sang. Ce que je veux dire, c’est que tout le monde savait ce que Saddam faisait à son peuple. Son fils Uday pouvait violer une vingtaine de filles en une semaine. Si elles parlaient, elles étaient tuées et leur famille torturée. J’espère qu’avec l’anniversaire du D-Day et le dîner entre Chirac et Bush, les choses vont changer. De plus, il y a aux Etats-Unis une sorte de boycott des produits français, initié par Bill O’Reilly de la chaîne d’informations Fox News. Il sera sans doute "levé" si votre gouvernement vient à l’aide en Irak. Ce qui me gêne profondément est le fait que maintenant, votre gouvernement mais aussi l’Allemagne, la Russie et la Chine veulent tous des contrats pour reconstruire l’Irak. Les pays qui ont aidés seront les premiers à être pris en considération. Je parle du Japon, de l’Italie et de la Pologne, qui ont tous perdu des hommes dans la bataille. Comme Reagan, George W. Bush fera ce qu’il sait être juste, et le peuple sera avec lui. Quand vous faites ce que vous dites, même vos adversaires vous respecteront, et feront ce que vous demandez d’eux. Bush va demander à votre gouvernement et aux autres de pardonner à l’Irak, et d’annuler ses dettes. Cela arrivera, et alors votre gouvernement et les autres pourront faire des profits par du commerce légal avec l’Irak. Une nouvelle fois, Bush fait ici preuve d’une qualité de Reagan.

 

Une dernière chose que j’ai apprise. Vendredi (11 juin, ndlr) auront lieu les obsèques de Reagan. Mikhaïl Gorbatchev sera dans l’assistance. L’homme qui s’est trouvé face à face à Reagan, avant de reculer, sachant qu’il était battu, respecte maintenant et honorera son grand adversaire d’hier. Bush sera également respecté et peut-être craint comme Reagan.

 

 

(…)

 

 

(autre mail)

 

Une partie du problème est que les journaux et les informations télévisées adaptent les informations à leurs convictions. C’est une pratique effrayante car de ce fait ils amènent les gens à penser ce qu’eux pensent, sans se faire donc leur propre opinion. Recevez-vous en France la chaîne américaine Fox News ? Cette chaîne a une vision plus neutre sur les news. Avec les médias traditionnels, vous avez une vision très libérale (comprenez "à gauche" du pdv américain, ndlr), très anti-Reagan, anti-Bush sur tous les sujets.

 

 

 

Rodney C.

Méd.

Virginie, U.S.A.

 

(…) Oui, Ronald Reagan était un grand homme. De mon opinion, il était l’un des plus grands présidents et des plus grands Américains que ce pays ait connu. Il est très mauvais cependant que des personnes comme les Clinton et leur parti (le parti démocrate, ndlr) aient essayé de détruire tout ce qui est moral et bon dans notre monde. Mais ce n’est que mon opinion j’imagine…

 

Ronald Reagan représentait pour moi un grand nombre de choses. Il m’a appris ainsi qu’à la nation à rester debout pour ce en quoi l’on croit, et à ne jamais reculer devant rien. Il représentait un bon caractère moral, une force, et une forte croyance religieuse. Il m’a également montré comment, en croyant fort à quelque chose, on peut tout accomplir.

 

L’Amérique gardera de lui en héritage la fin de la Guerre froide, une croyance en moins de gouvernement, et une plus grande puissance militaire, ainsi qu’un croyance dans le fait qu’en baissant les taxes, plus d’argent est introduit dans l’économie.

 

J’aime le Président Bush, je vois beaucoup de Ronald Reagan en lui et je voterai à nouveau pour lui en novembre.

 

Concernant la guerre en Irak, je pense que nous aurions dû la terminer lorsque nous étions en Irak en 1992. De plus, l’administration Clinton aurait dû se soucier un peu plus de l’Irak et du terrorisme au lieu de trop s’inquiéter des impeachments, et de faire voter la minorité d’une façon folle.

 

Pour moi, la France est un pays romantique avec de beaux sites.

 

 

 

8 juin

 

 

Mario H.

Etudiant

Californie, U.S.A.

 

Le Président Reagan est synonyme de grand changement pour moi. Au départ, j’étais opposé à son élection parce qu’il était un acteur et qu’avec la malhonnêteté qui régnait en politique, je ne voulais pas de quelqu’un qui allait jouer le rôle de mon président, mais quelqu’un qui serait mon président. Je me suis très vite rendu compte que je m’étais trompé à son sujet, et je n’ai pas pu attendre plus avant de voter pour lui.

 

En tant que mon président, il est devenu le symbole d’une plus grande morale et d’une plus grande intégrité. Il a mis la barre haut, si je puis dire, pour les politiciens futurs.

 

Pour maintenir son héritage, j’espère que nous établirons un jour de congé pour se souvenir de lui et l’honorer.

 

Vous m’avez également demandé mon opinion à propos de Bush. J’ai voté Bush parce que je recherchais un président avec de la poigne et avec un fort sens moral.

 

Au sujet de l’Irak… Je pense que nous avons été trop diplomates. Nous aurions dû répondre de façon plus agressive aux instabilités et retirer notre soutien financier aux pays qui se sont physiquement opposés à nous. Je sais que la presse dit de nos actions qu’elles étaient destinées à libérer le peuple irakien. Je suis d’accord avec cette partie, mais tous les peuples et pays devraient comprendre que cela a été aussi en réponse aux terroristes du 11/09 et surtout à leurs soutiens. Etre l’un, si ce n’est le pays le plus puissant du monde, fait que nous devons être attentifs à ne pas intimider les autres, mais que nous ne permettrons également jamais à d’autres entités ou pays de nous défier voire de penser, car d’une attaque contre nos citoyens ou nos intérêts résulterait une réponse forte et éventuellement, violente.

 

Dans votre dernière question, vous m’interrogez sur mes sentiments concernant la France. Je sais qu’il s’agit de votre pays, mais je dois dire que j’ai perdu pour elle beaucoup de respect. À travers l’Histoire, la France s’est appuyée sur la générosité d’autres pays pour lui assurer des aides, et notamment une protection physique. (Vous savez, si les attaques du 11/09 avaient eu lieu en France, les Etats-Unis seraient entrés en guerre contre les organisations terroristes et les pays impliqués en représailles). Ce serait injuste de ma part de présumer que tous les citoyens de France se sont opposés aux Etats-Unis et à leurs actions, mais dans son ensemble la France devrait ressentir tristesse et colère (envers son gouvernement, si j’ai bien compris, ndlr) d’être tombée ainsi en disgrâce aux yeux de l’Amérique. [pas de certitude concernant la traduction suivante] Pour être parfaitement honnête, je pense votre pays devra être dans un trouble profond à l’avenir pour avoir notre aide, sous les quelques prochaines décennies. Les politiciens ne l’admettent pas ouvertement, mais nous savons tous qu’ils refuseraient de venir en aide à la France s’il n’y a pas de nécessité absolue. Ma suggestion aux citoyens de France sera d’encourager leurs dirigeants à agir rapidement et à renforcer les forces militaires françaises.

 

 

 

Margarita A.

Chef d'entreprise dans l'imprimerie

Californie, U.S.A.

 

(…) Ce que Reagan représente à mes yeux ? Des changements positifs, avec un sourire et une bonne conversation, avec lui vous voyiez les résultats. Une personne d’action.

M. Reagan a mis en place tellement de changements positifs que mon esprit va à 100 miles à la seconde, mais je vais essayer de ralentir pour citer ceux qui me semblent les plus importants. A propos de son héritage, il a fait tellement de choses… Ce qui suit est ce dont je me souviens, et ce qui a pour moi comme vous pouvez le deviner le plus d’intérêt.

 

En Amérique, il a fait pression pour relancer le programme spatial qui avait été ralenti. Il a réduit les taxes. Il a su unir Démocrates et Républicains pour faire passer certaines lois. Il a fait élire la première femme au Pouvoir judiciaire, ce qui a eu un impact considérable sur les droits des femmes. Il a libéré des otages au Moyen-Orient.

 

Au niveau du globe, il a réussi de façon très stratégique, par le biais de conversations, à faire en sorte que le monde entier voie l’effondrement du Mur de Berlin sans aucune perte humaine. Il a eu des échanges diplomatiques avec les autres puissances, l’Angleterre, la Russie, a obtenu leur soutien, encore une fois sans intimidation et dans effusion de sang. Il a personnifié la phrase "Le Pouvoir de Chacun". Derrière ses sourires et ses plaisanteries, il y avait un homme d’affaires avec une âme. Un homme religieux sans en être pompeux pour autant, qui pensait toujours au peuple qu’il représentait. En ce temps-là, il avait confiance en l’Amérique pour le futur et les réformes qu’il a faites dans le service public seront en vigueur pour longtemps encore. Alors que sa maladie était inconnue (de lui y compris, ndlr), il a été un précurseur dans l’incitation à la recherche contre cette triste maladie [d’Alzheimer]. Maintenant qu’il est parti, je suis sûre que Mme Reagan, l’amour de sa vie, et vice-versa, va devenir le porte-parole de ceux qui en souffrent. Elle va pousser à la recherche médicale controversée qui concerne les "Cellules souches embryonnaires".

 

Il n’y a qu’en Amérique que quelqu’un d’origine modeste, peut devenir le leader du monde libre et un acteur majeur dans le monde.

 

L’actuel Président Bush me fait sourire… Je ne sais pas si c’est correct de ma part de dire cela, mais je pense qu’il est un gamin chanceux mais avec de solides pistons familiaux. Je pense qu’il s’en est pris à Saddam pour venger son père. Le côté cow-boy, je ne m’en occupe pas. Je n’aurais pas aimé non plus que mon père soit menacé. Bien sûr, il y a la raison légitime : le 11 septembre. Il a été élu au bon moment, quand on voit ce qu’il est devenu. Je pense qu’il pourrait avoir quelques problèmes en ayant affaire avec la "société gay", car il est un homme de famille et croit fermement au mariage entre un homme et une femme. Je ne vois pas d’opposants crédibles des côtés démocrate et républicain. Il est et sera aussi bon que les gens qui l’entourent. Je ne pense pas qu’il avait l’expérience mais il a mûri depuis l’élection.

 

Je crois que c’est le manque d’informations provenant de la CIA et du FBI, reconnu publiquement, qui a provoqué la chaos auquel nous assistons au Moyen-Orient.

 

La France, au nom de son peuple, s’est levée dans la communauté internationale. Le président a d’abord protégé son peuple, regardez le résultat. Regardez les parents de jeunes soldats américains. Je sais que la liberté a un prix très élevé, c’est pourquoi elle doit être valorisée.

 

 

(…)

 

 

(autre mail)

 

Ce vendredi (11 juin, jour des obsèques de Reagan, ndlr), a été déclaré jour "ferié" pour pleurer et regarder à la télévision toutes les cérémonies historiques pour notre ancien président. Les bureaux municipaux et gouvernementaux, les services postaux sont donc fermés.

 

 

 

David L.

Com.

Texas, U.S.A.

 

Le Président Reagan a relevé encore le niveau de fierté de l’Amérique. Il nous a fait prendre conscience qu’il est bon d’aimer notre pays, d’être fier d’être Américain. Trop longtemps, nous avons été à l’extrémité du monde, mais nous sommes les premiers à répondre lorsque il y a un ennui et que d’autres nations ont besoin d’aide. Je pense comme John Wayne qu’il était un homme d’honneur, et vous saviez toujours ce qu’il pensait de vous. N’était-il pas quelque part divin ? Il était un grand Américain.

 

Quant à un legs ? Je pense qu’une belle statue à côté du Monument de Lincoln serait bien.

 

Je pense que Bush est également un homme qui aime notre pays, mais, plus important encore, un homme qui aime Dieu et qui recherche ses conseils, pas seulement pour sa propre vie mais pour notre pays tout entier. Je suis de ces Américains qui croient que ce pays a été fondé pour que le peuple puisse aimer Dieu, quels que soient leurs choix. Aucun Etat n’a exigé la religion, la liberté religieuse. Je ne pense pas que Dieu devrait rester hors de nos vies, mais qu’il devrait être plus dans nos vies. Et oui, je voterai pour que le Président soit réélu.

 

Par ailleurs, je dois admettre que j’ai honte d’avoir participé à des plaisanteries au sujet de l’ancien Président Clinton, alors que Dieu nous dit que nous devons prier pour nos dirigeants, et je n’ai jamais prié pour Clinton jusqu’à ses trois derniers mois de mandat, mais j’ai prié Dieu pour qu’il perde son poste. J’ai senti que Dieu m’a dit très distinctement dans Ses mots que je me devais de soutenir le Président Clinton par la prière, et que je n’avais pas pris ma part dans sa protection contre l’enfer. J’ai donc écrit au Président Clinton et lui ai demandé pardon, et j’ai prié pour lui depuis. Il en est de même pour tous les autres chefs dans notre communauté, ville, Etat, monde, afin que Dieu les amène à l’esprit.

 

Concernant l’Irak, j’ai soutenu mon Président et sa décision de partir en guerre. Je sais (en tant qu’ancien de l’US Navy moi-même) qu’il a bien plus d’informations que ce qui peut être rendu public. S’il pensait que nous devions partir en guerre, alors je soutiens sa décision. Je pense qu’un grand nombre des choses que j’ai entendues sur l’ancien dictateur (Saddam Hussein, ndlr) était vrai et qu’il a fait beaucoup de mal à son peuple, mais comme pour Hitler, [les Irakiens] avaient peur de se soulever contre lui, et ils lui ont donc permis de rester au pouvoir. J’aurais aimé voir le problème résolu et que nous puissions quitter le pays et le rendre à son peuple. Je ne veux pas aller au fond de mes pensées, parce que je crois que les religieux irakiens apprennent aux enfants à haïr l’Amérique et les Américains depuis la plus tendre enfance. C’est triste, parce que toutes les bonnes religions apprennent l’amour, pas la haine.

 

Quoique je n’aime pas le péché, quand quelqu’un s’y trouve, je ne déteste pas cette personne. Et je ne penserais jamais à faire exploser la maison de personnes que je n’ai pas vu droit dans les yeux (?).

 

Là bas, ils résolvent les problèmes en tuant, et peut-être sans procès. Nous avons vu dans la vidéo du meurtre du jeune chauffeur de camion américain le type de personnes qui sont contre les Américains là-bas, ce ne sont que des gangsters, pas des religieux ("not religions God fearing people"). Mais à la place, ils sont justes similaires au leader déchu. Mais, je vous en prie, comprenez moi, je ne crois pas que tous ces gens soient comme cela. Je ne crois pas qu’ils haïssent tous l’Amérique.

 

Mais il est triste de voir que cette zone du monde est couverte de haine et d’envie de tuer des gens comme les Juifs. Je ne vous dirai pas que je comprends tout ce qu’il y a à comprendre au sujet de ces sentiments sur les Juifs. Je sais que ma Bible, à laquelle je crois, dit qu’ils sont son peuple élu et que ceux qui sont contre eux sont contre Dieu. Et quant à moi et à ma maison, nous servirons le Seigneur.

 

La France est un bel endroit, de grand vin, de grande nourriture… Question trop large mais ce sont mes premières pensées. A propos de la France et de la Guerre en Irak, c’est une autre affaire…

 

Mon ami, que Dieu vous bénisse, vous et les vôtres.

 

 

 

Hillary L.

Mil.

U.S.A.

 

J’apprécie votre mail et voudrais vous remercier pour vos commentaires concernant les Etats-Unis. Vous m’avez posé plusieurs questions, et j’espère que je pourrai vous y répondre.

 

Je suis entrée dans l’armée lorsque Reagan était président. Il fut également le premier président pour lequel j’ai voté. Mais, au delà, j’ai vu en lui un homme d’honneur et de dignité. Il était inspirant, motivant et un homme profondément gentil. Avec beaucoup de respect, était l’un des chefs les plus exceptionnels que l’Amérique ait eu l’honneur de servir, et il nous manquera cruellement.

 

Il y a déjà des mémoriaux qui honorent la vie de Reagan. Je ne serai pas surprise d’en voir d’autres voir le jour. Ses discours et ses mots sont facilement à le disposition de qui les veut, et tout à fait honnêtement, il est déjà dans nos cœurs.

 

J’aime George W. Bush. Est-il le grand communicateur qu’était Reagan ? Non, il ne l’est pas, mais cela veut-il forcément dire qu’il n’est pas un grand homme ? A-t-il fait des erreurs ? Bien sûr, mais quel homme n’en a jamais faites ? Mais le véritable esprit d’un homme se trouve dans ses yeux, et si vous regardez dans les yeux de Bush, vous verrez une gentillesse et un esprit qui font de lui un chef. J’aime sa passion, son intégrité et son honneur pour notre pays et oui, je voterai encore pour lui en novembre.

 

Comme je l’ai dit, je suis dans l’armée. Mon opinion de la guerre est peu importante. Je suis ici pour faire un travail, et ce travail est de défendre et de protéger ce pays de tous ses ennemis intérieurs et extérieurs. Le 11 septembre a mis en lumière une nouvelle ère de guerre pour l’Amérique. L’Irak fait partie de cette guerre, et aussi longtemps que mon commandant et mon chef me demandera de servir mon pays, je le servirai. J’ai prêté serment pour cela, et je continuerai ma mission jusqu'à ce que je ne sois plus demandée. Plus important encore, nous ne pouvons pas, nous autres Américains, rester immobiles et regarder des personnes innocents être abattues sans rien faire. Ce n’est simplement pas notre façon de faire.

 

Je suis heureuse que vous m’ayez interrogée sur la France. J’ai rencontré beaucoup de gens de France dans mon travail, et j’ai toujours apprécié de les rencontrer. Durant ma mission au Kosovo, j’ai travaillé avec de nombreux soldats français et j’ai aimé travailler avec eux. Ils étaient toujours amicaux, utiles et très agréables. Je n’ai aucune rancune envers la France, et je n’en aurai jamais. Votre pays a aidé le nôtre dans les années 1800, le nôtre vous a aidé dans les années 1940. C’est ce que font les amis. Il s’aident mutuellement.

 

Quand j’entends quelqu’un soupirer, ‘La vie est dure’ , je suis toujours tenté de lui demander ‘Comparé à quoi ?’ -- Sydney J. Harris

 

 

 

James B.

Auteur compositeur

Alabama, U.S.A.

 

(…) Pour moi, [la mort de Reagan] va constituer un grand changement, comme vous avez pu le lire dans le lien que je vous ai donné, sur WAFF 48 NEWS (il est apparu à la télévision, ndlr), où je suis cité et vous pouvez lire mon hommage. J’ai rencontré Ronald Reagan une fois, devant quelques 30,000 personnes !

 

Notre héritage est vaste. Il était un homme honnête, ce qui n’est pas chose facile à un tel niveau, mais il s’y est tenu toute sa vie. Je ne suis pas du tout un homme politique, mais plutôt un philosophe/écrivain/compositeur. J’ai toutefois de forts sentiments, qui pour moi (et pour je pense la plupart des Américains) me font croire que l’ancien Président Ronald Reagan fut l’un des plus grands présidents de tous les temps. Je crois profondément que l’histoire retiendra ce fait.

 

Je ne suis pas du tout une personne partisane, je crois en notre président, mais je ne suis pas d’accord avec lui sur tous les points. Je ne suis pas suffisamment informé pour juger ses choix, mais je l’ai approuvé sur de nombreuses choses et entendu quelques discours très puissants, qui ont su changer mon opinion, du négatif au positif. Maintenant, la question se pose, suis-je positif sur des choses négatives, ou suis-je négatif sur des choses qu’il croit positives ? Je suis sûr que ça n’aide pas, mais c’est honnête.

 

Concernant l’élection, je ne sais pas encore si je vais voter pour Bush. Je sais en tous les cas que je ne voterai jamais pour Kerry.

 

Je ne suis jamais pour la guerre, lorsque elle peut être évitée. J’ai à ce sujet des sentiments extrêmement partagés, mais je soutiens complètement mon président, toujours, c’est pourquoi il est président et pas moi. Il est bien sûr mieux informé. J’aurais aimé voir toutes les nations que nous avons aidé à obtenir/retrouver la liberté nous soutenir dans ce noble effort. Il y a des périodes où il semble imprudent de croire qu’une seule puissance, quelle qu’elle soit, puisse être capable de maintenir l’ordre du monde entier. Toujours est-il qu’après l’horreur du 11 septembre ici, en Amérique, je ne peux et n’oublierai jamais cela en tant qu’individu. Le terrorisme et son potentiel mondial, doit être arrêté. Celui qui se croit en danger est soit mal informé, soit il fait l’autruche. Ces gens [les terroristes] peuvent vous faire preuve d’allégeance aujourd’hui mais ils vous tueront assurément demain !

 

Question difficile à propos de la France. Ma fille (qui parle français et souhaite grandement visiter la France) et moi aimons la France. Je n’y suis jamais allé, j’ai failli une fois, via l’Assurance vie et accident coloniale, pour qui je travaillais. Mais je n’y suis pas allé. Mon cher ami disparu Joe Hendricks et sa femme y sont allés. Je suis un romantique et en tant que tel, la pensée de la France évoque donc pour moi beaucoup de belles choses. Je suis toutefois grandement ennuyé par ses choix présents en matière de politique internationale, et je ne peux que prier pour que cela tourne au mieux.

 

Je veux sincèrement vous dire "Merci" pour vos gentils mots et votre évident sincère intérêt en nous autres Américains.

 

 

 

John K.

Pasteur

Virginie, U.S.A.

 

Cher Phil,

 

Merci pour vos gentils mots concernant notre ancien Président. Je serai heureux de répondre à vos questions. En fait, je vous remercie de m’en donner l’opportunité.

 

Ronald Reagan a été le premier Président américain pour lequel j’ai été assez âgé pour voter - donc au delà de mon admiration pour lui, ce fait l’a toujours rendu spécial à mes yeux. De mon point de vue, le Président Reagan représentait le meilleur que l’Amérique a à offrir - à son propre peuple et au monde :

 

Une force de caractère et une vision enracinée dans une foi personnelle immuable en Dieu, mais en laissant toutefois la place pour accepter affectueusement ceux d’autres milieux religieux.

 

Des normes basées sur ces mêmes convictions, devenues des "must", pour le guider dans sa politique, ses relations avec les autres dirigeants mondiaux, et (si nécessaire) dans la défense des Etats-Unis et de leurs alliés.

 

De grandes espérances du peuple, qui n’était ni délaissé ni désespéré, mais il avait les dons et les capacités de rendre notre pays grand. Contrairement aux autres politiciens que j’ai connu, Reagan a constamment mis en valeur le meilleur des gens, qu’ils aient été d’accord avec sa politique ou non.

 

Une vive conscience de ce qu’implique le fait de conduire et de bénir le reste du monde. Reagan connaissait et parlait souvent de la responsabilité des Etats-Unis dans l’utilisation de ses bénédictions (comprendre "dons de Dieu", ndlr) pour apporter la paix aux autres peuples et nations, et pour aider nos alliés de toutes les façons possibles. Je pense que c’est cela qui m’a le plus blessé, au sujet des réponses de plusieurs de nos "amis" de longue date - qui, même si les Etats-Unis sont certainement loin de la perfection, semblent n’avoir que peu de reconnaissance pour les vies et ressources américaines sacrifiées pour permettre à tant d’entre eux de rester libres.

 

Reagan était également, bien sûr, un maître en communication et en humour.

 

Concernant son héritage, je ne suis pas sûr de pouvoir parler pour le pays, très divisé politiquement (comme cela a toujours été le cas) ; cependant je sais que je continuerai (comme je l’ai toujours fait) à me tenir aux principes de liberté authentique, de responsabilité personnelle et aux normes inscrites dans les Saintes Ecritures qui font de la vie non pas une malédiction mais une bénédiction.

 

Avec ce que j’ai déjà écrit, vous pouvez voir que je suis conservateur (républicains, droite, ndlr), selon la tradition politique américaine. J’ai voté pour George W. Bush en 2000, et je voterai volontiers pour lui une nouvelle fois en novembre. Ceci dit, je ne peux pas dire que je suis d’accord avec tout ce qu’il a fait. Mais, en principe, je pense qu’il est l’homme de l’héritage de Reagan.

 

S’il vous plaît, sachez qu’il jouit de beaucoup plus de soutien dans ce pays que notre presse libérale (démocrates, gauche, ndlr) ne veut bien le montrer. En 2000, il a perdu dans beaucoup de grandes villes, mais a remporté une grande majorité du total des comtés du pays. Mises à part les villes du Nord-est et de Californie (où se situent les plus grandes zones métropolitaines), Al Gore n’a pas fait un bon score et les Démocrates le savent.

 

A propos de la guerre en Irak… Comme pour toutes les guerres, je suis très préoccupé. Ceci dit, je crois du fond du cœur que c’était et est une guerre juste. Les atrocités commises des deux côtés me rendent profondément malade, mais l’effort de guerre en lui-même a permis une incroyable libération pour le peuple d’Irak. Je connais plusieurs hommes et femmes militaires qui ont servi (ou servent encore) en Irak - certains dans ma famille - et sans exception ils continuent de dire que de nombreux Irakiens viennent vers eux dans les rues pour les remercier d’avoir renversé Saddam et de reconstruire leurs infrastructures. Malheureusement, ces faits ne sont également pas relatés dans la presse américaine.

 

Au sujet de la France ? Dans mon travail, j’ai fait beaucoup de voyages à travers le monde. Je suis allé dans la plupart des pays d’Europe de l’Ouest, où j’ai de merveilleux amis en France (Marseille et Villeneuve-sur-Lot) et en Belgique (Bruxelles et Liège). J’ai un grand amour pour le peuple français, mais j’ai été très déçu par votre gouvernement. Je n’ai aucune mauvaise volonté, mais j’aimerais voir une plus grande participation et coopération pour trouver des solutions sur l’Irak et d’autres sujets, plutôt que simplement une opposition ouverte et bruyante.

 

Que Dieu vous bénisse richement pendant que vous continuez vos recherches. Reagan est un grand exemple de ce que nous autres en Amérique aspirons à devenir.

 

Mes bénédictions.

 

 

 

Charles W.

Vidéo. d'info.

Floride, U.S.A.

 

(…)

 

M. Reagan représentait pour moi l’esprit de l’Amérique et l’optimisme en notre futur.

 

Concernant l’héritage, je ne peux pas parler aux nom de tous les Américains car nous avons tous des points de vue différents, mais le plus important pour moi est ce que je viens de citer.

 

L’Amérique est un lieu où tout est possible. J’ai assisté, dans ma vie, à la chute du Mur de Berlin, et à la chute de l’URSS. Maintenant, lorsque vous dites le mot "Russe" aux Etats-Unis, ce n’est plus avec un ton méchant. Il nous a montré que nous pouvions être amis avec le peuple russe, ce qui n’était pas chose évidente en ce temps-là.

 

Le Président Bush a eu à changer le cours de sa présidence. Le 11 septembre a alarmé toute personne un minimum sensée. Il s’est attaché à préserver et défendre la Constitution des Etats-Unis. Pour moi, la Constitution n’est pas seulement un document. Les premières lignes disent "Nous, le peuple…". Cela signifie que nous, peuple américain, sommes la Constitution. Cela fait partie du travail du Président Bush de nous protéger de la meilleure façon possible de tout ce qui pourrait protéger notre mode de vie. Certains voient en lui un homme qui veut juste prendre aux pays arabes leur pétrole. Si c’était le cas, le baril ne serait pas à 2$ chez moi. Il fait du mieux qu’il peut dans un monde différent. Du temps de Reagan, c’était le terrorisme qui menaçait notre Constitution, aujourd’hui c’est le terrorisme.

 

Oui, je le soutiendrai en novembre car il est le seul auquel je peux faire confiance. John Kerry change d’avis trop souvent. Il a fait le Vietnam mais si vous examinez son service, vous verrez quel type de soldat il a été. Il n’a passé que cinq mois au Vietnam. La plupart des soldats là bas y ont été beaucoup plus longtemps. Ses médailles sont honorables, mais aucune blessure n’a mis sa vie en danger. J’imagine qu’il est difficile de ne pas être blessé à la chair dans la jungle du Vietnam.

 

Le gouvernement irakien était cruel. On ne pouvait faire confiance à Saddam. Ses mensonges et menaces le rendaient dangereux. Il abritait des terroristes. Certains de ses hommes faisaient partie d’[Al Qaïda].

 

Libérer le peuple irakien était également nécessaire. Aucun homme, femme ou enfant ne mérite de vivre sous la menace d’être assassiné, violé ou torturé.

 

Honnêtement, la France m’a déçu l’année dernière. Je ne suis pas en colère parce que je ne sais pas ce qu’ils ont réellement à l’esprit. Je pense que dans le monde notre histoire et celle de la France ont toujours été liées. Avec la reconstruction de l’Irak sera reconstruite la relation franco-américaine. Nos relations ont déjà commencé à "guérir".

 

 

 

Antonio L.

ITALIE

 

Le Président Reagan a donné à l’Amérique de nouvelles énergies, un nouvel esprit pour une nouvelle ascension après la crise des années 70. Sa contribution à la fin du communisme (l’une des pires dictatures jamais connues) a été totale.

 

Je ne crois pas que M. Bush Jr. soit l’héritier du Président Reagan, il n’a pas la bonne personnalité. J’espère qu’en novembre, l’Amérique changera de cap.

 

Je soutiens la guerre contre le terrorisme, mais je ne suis pas totalement convaincu au sujet de la guerre en Irak.

 

La France ? Je vis en Italie, donc très près de la France, et j’y ai voyagé de nombreuses fois. Elle évoque pour moi charme et fort sentiment de fierté nationale, notamment de part votre longue et riche histoire.

 

Comme vous, j’ai toujours aimé et j’aime toujours l’Amérique. Je me sens plus proche de sa tradition et de ses valeurs que de celles de l’Europe.

 

 

 

Chris B.

Fin.

Floride, U.S.A.

 

J’apprécie sincèrement les sentiments que vous avez exprimé concernant le Président Reagan et mes commentaires.

 

M. Reagan a sorti les USA de la nuit noire issue du Vietnam, du Watergate et de Jimmy Carter. Le mal qui rongeait mon pays en 1980 menaçait de le renverser de son statut de superpuissance. M. Reagan nous a rappelé que, en tant qu’Américains, nous sommes capables de tout ce que nous avons à l’esprit. Il a rendu bon à nouveau le fait d’être Américain, et nous a montré de quoi nous étions capables en tant que peuple.

 

Sans doute, nous nous souviendrons de lui comme de l’homme qui s’est assuré que la menace de Nikita Khrouchtchev de nous "enterrer" ne se réaliserait jamais.

 

Je pense que George W. Bush est un homme honorable pris dans une présidence si exigeante qu’elle peut être impossible à continuer. Je soutiens mon président et je crois fermement qu’il sera soutenu sur ses actions en Irak et en Afghanistan. Je voterai pour lui en novembre.

 

La guerre en Irak aurait dû être terminée en 1991. Cependant, George H.W. (le père de l’actuel président, ndlr) a concédé à l’ONU de s’arrêter avant la vraie victoire. L’ONU s’est avérée à maintes reprises être un corps d’épiciers plutôt que de justiciers. Par cela, je veux dire qu’en temps de famine, l’ONU fait du bon travail pour s’assurer que les peuples aient de la nourriture. Mais toutefois quand viennent les décisions difficiles à prendre, cette institution mondiale est impuissante.

 

Je ne suis jamais allé [en France] mais je prévois de réaliser un jour une excursion sur le chemin suivi par nos troupes, à travers la France, à partir de Carentan en passant par la Hollande et l’Allemagne. J’ai rencontré très peu de Français, je ne peux donc tirer sur eux aucune conclusion. Cependant, je me demande si le gouvernement français représente de façon correcte son peuple. Il a donné une image, au moins dans ce pays [aux USA], d’un pays constamment opposé à l’Ouest. Je ne sais pas si c’est par peur de l’énorme population musulmane dans votre pays, mais quelque chose semble pousser Chirac à regarder plutôt à l’Est. Aujourd’hui même, Chirac a snobé ce pays en décidant de ne pas assister aux funérailles d’Etat de M. Reagan. Il n’était cependant pas le seul. Poutine de Russie et Fox du Mexique ont fait de même. Dans une période où nous devrions réparer les dégâts, ces chefs choisissent [de boycotter] les funérailles d’un autre leader pour montrer leur désapprobation de la politique actuelle. Cela va entraîner dans l’avenir des mauvais sentiments dans la population américaine au sujet de ces pays, ce qui n’est jamais bon. J’espère que ces amitiés peuvent être réparées, pour maintenant et dans le futur.

 

 

 

11 juin

 

 

Clifford W.

Shérif, officier

New Jersey, U.S.A.

 

Ronald Reagan représentait le commandement intense et l’esprit de tous les Américains, il était également mon Commandant en Chef lorsque j’étais à Beyrouth avec les Marines, j’ai d’ailleurs apprécié la compagnie de Français de la Légion étrangère là-bas, des mecs biens !

 

Son héritage sera de l’optimisme dans les temps pessimistes, un héritage de faire que les choses soient faites, et l’élimination de la menace communiste de la face du monde.

 

George Bush est un président capable, mais ne peut être comparé à Reagan. Il est un homme très bon et qui se débrouille très bien, mais il est parfois trop bridé par le "politiquement correct", ce dont Reagan ne se préoccupait pas.

 

Oui je le soutiendrai en novembre.

 

La guerre en Irak, je crois qu’elle était sur le point d’arriver, tôt ou tard. Le fou Hussein allait menacer le reste du monde très bientôt, donc il est bon que nous ayons fait ce que nous avons fait, quand nous l’avons fait. Concernant les armes de destruction massive, je ne sais pas où elles sont, et personne ne le sait d’ailleurs, je pourrais penser qu’elles ont été transférées en Syrie avant la guerre.

 

Je n’ai pas de problème avec le peuple français. Le politiquement correct qui envahit le reste du monde est très présent en France, prenons à titre d’exemple la condamnation récente de Brigitte Bardot pour ses déclarations sur les Musulmans.

 

Nos deux pays sont liés pour toujours dans le feu et la révolution. Depuis notre Indépendance jusqu’aux plages de Normandie, la France et l’Amérique se sont données la main à travers la mer.

 

J’ai appris un peu de Français en étant à Beyrouth.

 

 

 

Patricia C.

Serv. rep.

Alabama, U.S.A.

 

(…) J’apprécie votre curiosité intellectuelle au sujet de mon pays et de ses politiques.

 

Pour moi, Ronald Reagan représentait un chef qui combinait une grande détermination avec une vision optimiste de l’Amérique et du monde. Il avait compris qu’il ne fallait pas s’accomoder du communisme, mais l’éradiquer. Sur le front domestique, il voulait moins de taxes et moins d’intrusion du gouvernement dans la vie des Américains. Ce sont les principales choses qu’il a faites quand il s’est installé en tant que président, et il a réussi les deux.

 

Son héritage est de deux ordres : le fait que durant les années 80-90 les Etats-Unis aient connu leur plus forte croissance économique en temps de paix, et un monde qui n’a plus à craindre la menace de l’Union soviétique.

 

Je pense que Bush est un bon président. J’ai voté pour lui en 2000, et je voterai pour lui cette année. Le point sur lequel je l’approuve le plus est probablement la guerre contre le terrorisme. Je pense que sa guerre aux terroristes et aux nations qui les soutiennent est la meilleure ligne de conduite possible. Je ne pense pas en revanche que Bush a fait un bon travail en ce qui concerne les dépenses gouvernementales. Il a augmenté les dépenses dans des domaines où il n’est pas nécessaire ni approprié que le gouvernement soit impliqué. Avec notre système bipartite, la seule alternative sera John Kerry, qui est un Démocrate, et en tant que tel va très certainement augmenter les dépenses de l’Etat bien davantage que Bush ne l’a fait. Sur ce sujet, Bush est un moindre mal.

 

Quelles que soient les quantités d’ADM trouvées, je pense qu’envahir l’Irak était la meilleure décision à prendre à ce moment là. Les services secrets américains, comme d’autres de nombreuses nations, étaient certains de la production d’ADM par Saddam Hussein. À la lumière des évênements du 11 septembre 2001, la pensée d’organisations terroristes comme Al Qaïda qui pourraient obtenir des ADM était trop horrible à imaginer. Ils avaient déjà tué plus de 3,000 personnes avec 4 avions de lignes. Imaginez ce qu’ils pourraient faire avec des ADM. Je crois qu’il y avait des liens entre Saddam Hussein et Oussama ben Laden. Ils ne se sont peut-être pas rencontrés en tête à tête, mais ils voulaient tous les deux faire du mal aux Etats-Unis, et des preuves montrent qu’ils étaient secrètement en contact. Récemment, de petites quantités d’ADM comme du gaz sarin ont été trouvées en Irak. Je crois qu’un plus grand nombre existe, probablement à l’intérieur du pays, ou cachés en dehors avant le début de la guerre. Je pense que les Irakiens devraient pouvoir reprendre le contrôle de leur gouvernement aussi tôt que possible.

 

Dans l’histoire récente, je n’ai pas été en accord avec le gouvernement français sur la guerre en Irak. Je comprends que le gouvernement français, le Président Chirac inclut, doive faire ce qui est dans le meilleur intérêt du peuple français. Cependant, j’ai été en colère par le fait que la France ne s’est pas contentée de s’opposer à la guerre, mais qu’elle a en plus activement fait campagne pour que d’autres pays s’opposent aux USA sur ce sujet. J’ai ressenti cela comme si le gouvernement français essayait de nier à mon pays l’opportunité de se protéger après une attaque non-provoquée par des terroristes.

 

Historiquement, je n’ai rien contre le France et son peuple, si ce n’est du respect. Les Français ont aidé les Etats-Unis pendant notre révolution, il y a plus de 200 ans. La France et les USA se sont battus côte à côte durant les Premiere et la Seconde guerres mondiales. Nous nous sommes également soutenus durant la Guerre froide contre l’Union soviétique. Le symbole le plus célèbre de l’Amérique, la Statue de la Liberté, était un cadeau de la France. Je pense que les Français sont à juste titre fiers de leur culture unique. La beauté des campagnes françaises, comme les rues historiques de Paris, sont bien connues ici. Sur le long terme, je ne crois pas que le désaccord qu’ont eu nos gouvernements sera durable. Nous avons besoin de nous serrer les coudes pour confronter les nouveaux défis du monde d’aujourd’hui.

 

 

 

Timothy K.

Comptable

New York, U.S.A.

 

(…) Je viens de rentrer de Washington où j’ai rendu hommage à Ronald Reagan. Ce fut un honneur de faire 500 miles et de faire la queue pendant trois heures et demi pour une visite d’une minute et demi, au Capitole. J’ai été très ému et ragaillardi par cette expérience. Mon fils et moi ne l’oublierons jamais.

 

 

 

Poème de James BRANDES, écrit juste après les funérailles de Reagan

 

Here is the poem, Hope you like it. I spent the day watching all the elements of FORMER PRESIDENT, RONALD W. REAGAN'S FUNERAL, this is what resulted:

 

"SO, SO"

 

Written while viewing the funeral of:

 

RONALD W. REAGAN

 

11 June 2004

 

At: 9:28 am to the funeral end

 

Viewing WAFF Channel 48 NEWS and FOX NEWS NETWORK

 

By: James A. Brandes

 

Pilgrim & Stranger to this world

 

1.

 

My mission is accomplished

 

I’ve done all I know to do

 

For this WONDERFUL FORMER PRESIDENT

 

Whom I only briefly knew

 

2.

 

Just now a beautiful dove,

 

Launches from my window sill

 

As Nancy is seen standing

 

Stately, calm, and still

 

3.

 

As the Honor Guard descend stairs,

 

While Ronald Reagan is ascending higher

 

To a final resting place

 

To which we all aspire

 

4.

 

Slowly the procession moves

 

To the sound of the Navy Hymn

 

As PRESIDENT RONALD REAGAN is forever free

 

Of sickness, suffering,… all effects of sin

 

5.

 

I can hardly contain my thoughts

 

Or see to write such words

 

For tears of sorrow are interspersed

 

With tears of joy for what I’ve heard

 

6.

 

THE VOICE of GOD Who speaks just now

 

As in my feeble way I attempt to write

 

All the things He’s telling me

 

On this dark day, soon to become a darker night

 

7.

 

The hearse moves on from a flag at half-mast

 

As the world too is now reposed

 

Many I’m sure thinking in their hearts and minds,

 

"Where in truth does one really go?"

 

8.

 

In "THE TRUTH" my friends is the answer still

 

If only man would see

 

THEE only ONE above all creation

 

Able to set us FREE

 

9.

 

Christ Yahshua, known to most

 

In a name not really true

 

For only in less than six-hundred years

 

Could anyone the name of Jesus, knew

 

10.

 

We see the route, the last and final trip

 

For the shell once known as him

 

As the very misty tears of GOD

 

Continue to fall at the thought of sin

 

11.

 

A Cathedral chime, a misty line

 

Proceed at a very slow pace

 

While Ronald Reagan no doubt is there

 

Viewing our Saviour’s face

 

12.

 

As Brit Hume, a man of honor to me

 

Speaks in reverent tears and awe

 

Attempting to relay the facts he knows

 

As these chimes are heard by all

 

13.

 

I can’t wait to hear the angels sing

 

As Ronald Reagan is doing, no doubt now

 

To me, it sounds as good as can be

 

Until I view my Saviour’s thorn pierced brow

 

14.

 

I see Prince Charles, standing there

 

And know Prince William too

 

Or am told has also come with him

 

So he could this funeral view

 

15.

 

I’m forced to remember

 

Princess Diana, for whom also I have written

 

Foretelling at Prince William’s beginning of life

 

Of a crown he to one day will be committing

 

16.

 

To a crown unlike that of the: "KING of KINGS"

 

As Brit Hume recites: "GOD’S" words

 

He that truly believes in Christ

 

"Will never die", is what I heard

 

17.

 

The arrival of the last remains

 

Of what soon will go into history

 

As our President and his Wife enter to: "Amazing Grace"

 

For the entire world to see

 

18.

 

Oh, how true is this fact Newton’s hymn proclaims

 

That all the world might hear

 

The reality of which GRACE can truly be

 

As thousands upon thousands are in tears

 

20.

 

I’m glad "HE" paid this price for we

 

That eternally we shall know

 

Something all of us can obtain

 

If to the foot of the cross we go

 

21.

 

Freedom beyond, what even Ronald Reagan knew

 

And tried to the world, impart

 

For he too had loved us more than we know

 

As He and Nancy shared with us their hearts

 

22.

 

I couldn’t hold my tears of joy

 

To see them both embrace

 

At the foot of simple aircraft stairs

 

Displaying deep love as they met face to face

 

23.

 

Just think of the joy yet to be

 

For they both know the foot of: "THE CROSS"

 

Both willing to pay a price we really can’t know

 

Which comes with being President,… what an awesome cost

 

24.

 

For once again they shall kiss and embrace

 

On the very best of final days

 

As all will come: "Face to Face" with HIM

 

Just beyond life’s grave

 

26.

 

There Nancy stands as with a slight jilt she attempts

 

Her best posture to employ

 

As we’re called to attention for our beloved President

 

Nancy’s, Ronnie Boy

 

27.

 

For our departure is only a short time away

 

I tell you this is true

 

For like the umbrella I see, sheltering Nancy now

 

GOD will shelter HIS, through and through

 

28

 

Scripture is now heard,

 

Which is both powerful and true

 

No man lives unto himself,

 

Something, Ronald Reagan knew

 

29.

 

As President Bush seats Nancy

 

Where she is soon to hear

 

America is a: "City upon the Hill"

 

A truth, which to Ronald Reagan was clear

 

30.

 

Oh’ Nancy, what joy, at thoughts of your Ronnie Boy

 

And all he really means to me

 

As once again the AMERICA, I knew

 

Today the entire world can see

 

31.

 

I now see another person, dear to me

 

As Lady Thatcher shall always be

 

For England has never known such grace

 

And is not likely soon again to see

 

32.

 

She elegantly speaks of the humor we know

 

Ronald Reagan’s crowning joy

 

And how His used this humor we heard

 

For which he had reason to employ

 

33.

 

Dear Margaret Thatcher, we all love you so

 

Just as I have always loved your QUEEN

 

For She is "The Crown Jewel" as once I said

 

A person for which I hold GREAT ESTEEM

 

34.

 

I’ve never been honored enough to meet you both

 

But believe one day it will become a reality

 

For sure we’ll one day meet, on the streets

 

In our future Eternity

 

35.

 

I now hear uttered those wonderful words

 

"GOD BLESS AMERICA", which is our request

 

And truly HE has answered this prayer

 

With Ronald Reagan, GOD gave us HIS BEST

 

36.

 

I’m tired and know my flesh must stop

 

But before I go I want to say

 

To the Reagan children whom I never knew

 

My love is with you all and I shall pray

 

37.

 

That one-day you find REAL peace of mind

 

Wherein SCRIPTURE one can truly learn

 

Nothing is exactly as we’ve been told

 

And each of you Eternity, in self can never earn

 

38.

 

Everything happens for a reason

 

It matters not that men refuse to acknowledge or see

 

I leave with Ronald Reagan’s own words

 

Which mean all the world to me

 

39.

 

I do not fear what men think of what I write

 

All I’ll say as now I go

 

Life has always been, in the simplest of words

 

RONALD REAGAN’S WORDS

 

 

 

"SO, SO"

 

 

 

CONCLUSION

 

Je tiens à remercier très chaleureusement et amicalement toutes les personnes qui m’ont répondu avec tant de gentillesse et de respect. Ils sont tous cités ici, à l’exception d’un nombre très minoritaire (2 personnes) qui n’ont fait que critiquer la France, l’un sur toute son histoire, et l’autre sur le fait que Jacques Chirac n’ait pas participé aux funérailles du Président Reagan.

 

Sur le fond, j’ai appris par ce dossier à connaître Ronald Reagan. Ce grand homme d’Etat américain était incontestablement aimé et respecté, pour des qualités et des actions qui reviennent souvent dans les différents témoignages.

 

Au sujet de la France, une tendance très nette revient : les personnes interrogées sont très souvent en désaccord avec le gouvernement mais aiment dans le fond profondément ce pays et ses habitants, de par notre histoire commune.

 

George Bush est quant à lui très largement soutenu, il est souvent comparé à Ronald Reagan. Il y a de plus un soutien très majoritaire à la guerre en Irak. Ces témoins sont, il faut le rappeler, en majorité républicains.

 

Merci pour votre lecture, et merci d’avance pour vos commentaires, pour ce dossier qui m’a pris beaucoup de temps, mais qui a été extrêmement intéressant à réaliser.

 

Phil Defer

 

 

 

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Times New Roman > Georgia : 30/09/12

03 février 2012

Georges Sarre : "Sarkozy, c'est la rupture de la France avec elle-même"

En 2006, j'interrogeais Monsieur Georges Sarre au sujet de François Mitterrand, à l'occasion du dixième anniversaire de la mort de celui dont il fut ministre. Quelques mois s'écoulent... Le premier tour de l'élection présidentielle vient d'avoir lieu. Nicolas Sarkozy (UMP) affrontera Ségolène Royal (PS). L'un des deux sera élu à la présidence de la République le 6 mai 2007. Georges Sarre, lui, en sa qualité de Premier secrétaire du Mouvement républicain et citoyen, de camarade, d'ami, est un fidèle de Jean-Pierre Chevènement. Son champion n'est pas au second tour. Il n'était même pas au premier, ayant décidé de retirer sa candidature et de soutenir Ségolène Royal. J'ai souhaité interroger de nouveau Monsieur Sarre durant cette période déterminante de la vie politique française. Il avait alors accepté de me répondre, avec une grande générosité et une implication remarquable. Je ne lui serai jamais assez reconnaissant pour cela. Cet entretien - qui n'est autre qu'un document d'archive - est certainement l'un de ceux dont je suis le plus fier. Je suis fier, surtout, d'avoir pu avoir de tels contacts avec cet homme que j'estime beaucoup. J'espère que la lecture de ce texte vous intéressera. Nombre de questions traitées restent d'actualité aujourd'hui alors que Jean-Pierre Chevènement, de nouveau candidat en 2012 "pour faire bouger les lignes" et "mettre la gauche et la France à la hauteur des défis qu'elles doivent relever", vient une nouvelle fois de retirer sa candidature. Quel soutien apporté ? À quelles conditions ? Quel regard porté sur Nicolas Sarkozy ? Nous sommes le premier mai 2007. Dans cinq jours, la France élira son président. Une exclusivité F21-PdA, par Phil Defer. DOCUMENT

 

 

ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU

GEORGES SARRE

Ancien Ministre sous la présidence de François Mitterrand
Ancien Maire du 11è arrondissement de Paris


"Sarkozy, c'est la rupture

 

de la France avec elle-même"

 

https://p1.storage.canalblog.com/18/43/871067/76999453.png

(Photo de G. Sarre : http://www.georges-sarre.net)

 

 

Q : ??/04/07

R : 01/05/07

 

 

 

Note de Phil Defer : J'ai choisi, pour illustrer ce texte, une belle photo de Monsieur Sarre aux côtés de Madame Danielle Mitterrand. Il avait rendu hommage à l'ancienne première dame en 2006 lors de notre entretien présent sur le blog sous l'intitulé Georges Sarre raconte François Mitterrand comme suit : "J'ai aussi une estime profonde pour Danielle Mitterrand, qui, encore aujourd'hui, mène un beau combat pour un monde plus juste, pour la souveraineté et la coopération des peuples... En plus de partager avec elle beaucoup d'analyses, sur la mondialisation et sur l'Europe notamment, j'admire son courage hors du commun." Il réagira au décès de celle-ci, cinq ans plus tard, par ces mots : Les yeux braves et pétillants de Danielle Mitterrand se sont fermés...

 

 

Paroles d'Actu : Après que Jean-Pierre Chevènement se soit retiré de la course à la présidentielle, votre soutien à Ségolène Royal s'est-il fait naturellement ?

 

Georges Sarre : C’est précisément parce que nous avons trouvé un accord politique sur le fond que Jean-Pierre Chevènement a décidé de soutenir Ségolène ROYAL et que le MRC s’est engagé en sa faveur.

 

 

PdA : Mme Royal a soutenu le "oui" au traité constitutionnel européen, ce qui n'était pas du tout votre position. Ne craignez-vous pas que vos électeurs s'y perdent ?

 

G.S. : Je vais vous répondre franchement. Nous étions face à une alternative. Pour donner une suite au NON du 29 mai 2007, il y avait deux possibilités. Première possibilité : une candidature unitaire du NON, en tous cas du NON de gauche, sur des bases claires, non seulement d’opposition, mais de propositions. Cette candidature n’a pas vu le jour ; d’une part parce que les socialistes qui avaient appelé à voter NON ont rejoint ceux qui avaient appelé à voter OUI dans la synthèse du Mans, et d’autre part du fait de l’émiettement, et parfois l’incohérence de la « gauche de la gauche ». Restait donc la deuxième possibilité : s’appuyer sur le NON, les exigences qu’il portait, pour orienter convenablement le projet du candidat de gauche (la candidate en l’espèce) à vocation majoritaire. Ségolène ROYAL, en tenant compte du NON du 29 mai, et en faisant ainsi des propositions telles que la remise en cause de l’indépendance de la BCE et de la politique commerciale de « concurrence libre et non faussée », a permis cette suite positive au NON du 29 mai 2005. C’est ce que les électrices et les électeurs doivent comprendre. Peut-être le MRC perd-il en lisibilité, mais ce qui nous importe le plus, c’est que la gauche dans son ensemble progresse vers la prise en considération des aspirations populaires.

 

 

PdA : À la vue des résultats du premier tour de l'élection présidentielle, pensez-vous que la décision de M. Chevènement de ne pas être candidat était la bonne ?

 

G.S. : C’était la plus raisonnable. Encore une fois parce que Ségolène ROYAL a fait des avancées programmatiques tout à fait considérables par rapport au bilan de la gauche plurielle, en prenant en compte les exigences des Français exprimées le 29 mai, que ce soit sur les services publics, la politique monétaire, les délocalisations… Le succès du premier tour, permis notamment par le soutien de Jean-Pierre CHEVENEMENT et du MRC, est la conséquence de cet axe programmatique nouveau.

 

 

PdA : Que vous inspirent les résultats de ce premier tour, et notamment le très faible niveau des voix de gauche (36,44%) ?

 

G.S. : On ne peut pas raisonner comme ça. Tout laisse penser que plus de la moitié des électeurs de François BAYROU sont des électeurs de gauche. Ils ne se sont pas prononcés en faveur du contenu, libéral, euro-fédéraliste, du programme UDF. Ils ont utilisé le bulletin de vote François BAYROU pour faire entendre un message d’exigence de renouvellement démocratique. A tort ou à raison, ils ont considéré que François BAYROU incarnait un certain renouvellement des pratiques politiques.

 

J’irai même plus loin. Quand on voit que 25% des ouvriers votent Jean-Marie LE PEN, on ne peut pas croire naïvement que les 11% d’électeurs de LE PEN sont tous des gens d’extrême droite. Il y a là aussi un électorat populaire. Il utilise le bulletin de vote LE PEN pour dire les cinq lettres au « système ». C’est un choix que je déplore, compte tenu de certaines positions nauséabondes de Jean-Marie LE PEN, mais qu’on doit prendre pour ce que c’est : un cri de ras-le-bol.

 

Alors bien sûr, tout ceci se fait au détriment de votes tels que le vote PS pour l’électorat de François BAYROU, ou le vote PC pour une partie de l’électorat ouvrier de Jean-Marie LE PEN.

 

Mais plus la gauche expliquera qu’elle porte le projet démocratique et social attendu par les classes populaires, plus ces électorats égarés reviendront vers elle. J’espère que ce sera le cas dès le second tour.

 

 

PdA : Les signaux répétés de Mme Royal en faveur du très européen François Bayrou vous inquiètent-ils, ou bien considérez-vous l'idée d'une majorité présidentielle plus large intéressante ?

 

G.S. : D’abord, le principe de réalité oblige Ségolène ROYAL à tenir compte des résultats du 1er tour, et à rassembler pour faire barrage au danger SARKOZY. Ensuite, j’observe qu’elle le fait avec intelligence, en soulignant les points de convergence qui sont les nôtres avec François BAYROU sur un nécessaire renouvellement de la démocratie, qu’il s’agisse des référendums plus fréquents, le cas échéant d’initiative populaire, de l’accroissement des pouvoirs du Parlement, élu en partie à la proportionnelle, de la transparence dans les nominations, de la réforme du dialogue social etc. Elle ne lâche rien pour autant sur son programme économique et social, et elle a raison, car il est plus conforme aux intérêts du peuple que celui de M. BAYROU. Quant à l’Europe, tout le monde convient de la nécessité de « relancer l’Europe ». La question est de savoir sur quelles bases. A ce sujet, « l’Europe par la preuve », c’est-à-dire par des coopérations sur des projets précis (industriels, infrastructurels, scientifiques, etc.) que prône depuis plusieurs mois Ségolène ROYAL me semble la bonne démarche. Et l’accord MRC / PS est très précis : de la remise en cause de l’indépendance de la BCE en passant par un changement de politique commerciale pour stopper les délocalisations, ou encore la défense des Services Publics, nous avons pris des engagements communs. Nous les ferons respecter, avec l’aide de la majorité de Français qui a voté NON le 29 mai, et de ceux qui, comme Ségolène ROYAL, et bien qu’ils aient voté OUI, partagent notre volonté de réorienter l’Europe.

 

 

PdA : Pourquoi Nicolas Sarkozy doit-il, d'après vous, être battu le 6 mai prochain ?

 

G.S. : Parce qu’il est communautariste (il a naguère appelé à une remise en cause de la loi de 1905 et défend la « discrimination positive », insulte envers ceux qui sont censés en bénéficier) ; parce qu’il est atlantiste (il est naguère allé s’excuser auprès de BUSH de la position de la France et de Jacques CHIRAC sur la deuxième guerre du Golfe et mettra la politique étrangère et de défense française à la remorque de l’impérialisme états-unien) ; parce qu’il est ultra-libéral (il veut alléger la fiscalité pour les plus riches, privatiser les services publics, favoriser la financiarisation de l’économie, remettre en cause la sécurité sociale et le droit du travail).

 

Communautarisme, atlantiste, ultra-libéral : Sarkozy est symétriquement opposé à tout ce qui a fait la République française et son contrat social depuis des décennies, et qui a rassemblé, depuis le CNR, la gauche, mais aussi une droite gaulliste, patriote, républicaine et sociale.

 

Sarkozy, c’est la rupture de la France avec elle-même. Les populations et les territoires les plus fragiles seront laissés au bord de la route. Sarkozy, c’est « U.S.A. today » !

 

 

PdA : En quoi Ségolène Royal vous paraît-elle être le successeur de François Mitterrand ?

 

G.S. : Elle incarne la France, ce subtile mélange d’une part de conservatisme sur les principes qui méritent d’être défendus, d’ordre républicain (pas l’ordre social), et d’autre part de progressisme, tant sur le plan social que démocratique et sociétal, qui a toujours marqué la France depuis la Révolution française et jusqu’à 1981, en passant par le Front Populaire ou la Libération. En cela, elle ressemble à François MITTERRAND, le charentais conservateur… et leader de la gauche laïque socialiste !

 

 

PdA : Que diriez-vous à un(e) électeur(rice) indécis(e) pour le(a) convaincre de voter Ségolène Royal au second tour ?

 

G.S. : Qu’entre d’une part le vote Ségolène ROYAL, vote en faveur d’une France apaisée, qui va de l’avant (même avec des aléas et des imperfections), et d’autre part le vote SARKOZY, vote pour la grande régression démocratique et sociale, dans un climat de tension, il n’y a pas photo ! Et qu’à trop hésiter, on se réveille avec la gueule de bois !

 

 

PdA : Sur quels sujets le Mouvement Républicain et Citoyen compte-t-il infléchir la position de la future présidente ?

 

G.S. : Je l’ai dit : nous entendons faire respecter les engagements pris en commun sur la réorientation de la Construction Européenne, le niveau de l’Euro, la politique commerciale, les Services Publics. Car là sont les clés pour répondre au grave problème du chômage et de l’explosion des inégalités sociales et territoriales. Nous ferons aussi entendre l’exigence républicaine et citoyenne dans des politiques concernant l’Ecole, la diplomatie, la mémoire nationale. Nous sommes républicains et patriotes, comme la gauche de JAURES, et garants de cette continuité.

 

 

PdA : Certains ont expliqué le retrait de M. Chevènement par des "tractations électoralistes" avec le Parti socialiste en vue des législatives notamment. Que leur répondez-vous, et qu'en est il réellement ?

 

G.S. : Si la motivation principale était électoraliste, alors nous ne serions pas des champions, puisque nous n’aurons le soutien du PS que dans 10 circonscriptions, pour la plus part très difficiles ! Non, nous avons agi au contraire avec une certaine abnégation sur ce plan. Nous l’avons fait pour donner toutes ses chances à l’union et à la victoire de Ségolène ROYAL sur une base programmatique nouvelle, saine, à laquelle nous avons apporté notre pierre. Ce que nous n’avons jamais cessé de rechercher depuis 1971, c’est de faire en sorte que le logiciel républicain que nous portons soit l’axe d’une candidature majoritaire et de la politique conduite.

 

 

PdA : Je vous avais interrogé lors de ma première interview sur le bilan que vous faisiez de la présidence Mitterrand. À l'heure où Jacques Chirac s'apprête à quitter l'Elysée, comment jugez-vous son action en tant que chef de l'Etat ?

 

G.S. : Je souhaite que la fin du mandat de Jacques CHIRAC et les années qui suivront soient sereines. C’est l’intérêt de la France. J’ai eu l’occasion de m’exprimer des dizaines de fois pendant les douze dernières années pour exprimer mon opposition forte à la plupart des politiques menées par ses gouvernements. La France est en panne économique, démocratique et sociale. Ce n’est pas directement la faute de Jacques CHIRAC, soyons clairs : c’est le fait des engagements européens qu’il a poursuivis et amplifiés, de la fuite en avant dans l’abandon de la souveraineté française, et donc de notre capacité à défendre, moderniser, améliorer notre économie et notre modèle républicain et social. Mais je retiendrai néanmoins le succès de sa politique de sécurité routière, des avancées –insuffisantes- pour les personnes handicapées, le renforcement de la laïcité qu’il a opéré avec raison via la loi de 2004, et sa prise de position, particulièrement juste, sur la deuxième guerre du Golfe. A ce sujet, il a non seulement eu raison, mais n’a de surcroît pas manqué de panache. Je veux le souligner, en dépit de mon opposition.

 

Vous l’aurez compris, le bilan que je tire des années CHIRAC n’est pas très positif… mais quand je pense à ce que serait la politique de Nicolas SARKOZY, je crains que, dans l’hypothèse de sa victoire, nous ne regrettions ses prédécesseurs !

 

 

PdA : La République est un thème très présent pour vous et votre parti. De quoi est-elle malade aujourd'hui, et comment peut-on la guérir ?

 

G.S. : La République est malade du communautarisme, qu’on guérit par la laïcité et la défense du bien commun. La République souffre de ne pas avoir d’horizon, et c’est pourquoi il faut redonner un grand dessein collectif à la Nation. La République souffre d’une crise de l’intégration, qu’il faut soigner en cassant les ghettos, en renforçant l’apprentissage du français, la diffusion de la culture. La République souffre de l’affaiblissement international de la France, qu’il faut enrayer en reprenant la tête d’une grande coalition pour réorienter la construction européenne et la mondialisation. La République souffre, surtout, du chômage de masse, de la précarité, de l’explosion des inégalités, de la corruption des valeurs et des relations sociales par une financiarisation détestable de l’économie et de toute la société. Il faut y répondre par une nouvelle donne économique et sociale à l’échelle européenne et nationale, dont j’ai tracé les pistes dans mes précédentes réponses.

 

La République souffre, enfin, de ce que les élites qui nous dirigent ne croient plus en la France, n’aiment plus leur pays. Nicolas SARKOZY se cache derrière des déclarations du genre « la France, tu l’aimes ou tu la quittes », pour stigmatiser les nouveaux arrivants. Mais tout son projet de société est aux antipodes de ce qui a toujours fait France, de notre contrat républicain et social. Il prétend aimer la France mais veut en saper tous les fondements et la diluer dans la globalisation nord-américaine et financière ! Il n’aime donc pas la France. Dès lors, je ne lui demande pas de la quitter, mais de quitter le pouvoir !

 

 

PdA : Pourquoi la question de l'identité nationale doit-elle être, selon vous, un des enjeux majeurs de cette campagne ?

 

G.S. : Je récuse le concept d’identité nationale française. L’identité, c’est quelque chose de global, de figé, dont on hérite. La France n’est pas une identité. C’est une nation citoyenne, faite de la volonté collective de construire un avenir commun. Bien sûr, pour cela, il faut des références culturelles ; il faut se parler, et donc parler le français. Il faut aussi jouir de certaines conditions matérielles pour exercer pleinement sa citoyenneté. Mais la France, moyennant ces conditions d’exercice de la citoyenneté, est faite de la volonté commune de chacun et de chacune des citoyens qui la compose. D’où l’importance de la laïcité, pour ne pas nous fractionner en communauté. D’où l’importance des solidarités sociales, pour la cohésion nationale. D’où l’importance de la langue et de l’Ecole, pour le débat et la morale publics. Ce sont toutes ces sources de citoyenneté qu’il faut renforcer, contrairement à ce que propose SARKOZY. Et non pas poser l’identité de la France comme une donnée figée, pour en exclure certains.

 

 

PdA : Quelle est aujourd'hui votre position au regard de la situation en Irak et de la crise du nucléaire iranien ?

 

G.S. : Le fiasco irakien confirme jusqu’à la nausée la justesse de la position de la France en 2003 et l’erreur majeure de BUSH. Non seulement parce que les soldats américains meurent. Mais aussi parce que des civils sont massacrés, que le chaos règne, et qu’on assiste, avec l’affaiblissement du nationalisme arabe laïque dans ce pays, à l’explosion des intégrismes islamistes et à leur violente opposition. Il me paraît urgent de favoriser par la diplomatie et le co-développement des solutions laïques et démocratiques dans cette région du monde, en respectant l’unité et la souveraineté des Etats.

 

La situation en Iran est en effet préoccupante. Je suis opposé à ce que l’Iran se dote de l’arme nucléaire. J’entends dire parfois que l’Iran a le droit, au même titre que d’autres pays, de se doter de l’arme atomique. C’est une erreur de jugement : en effet, la question n’est pas de savoir si tel ou tel pays a plus le droit qu’un autre à tel ou tel attribut de souveraineté militaire. Tous les pays sont souverains et doivent pouvoir se défendre. Mais l’arme nucléaire, qui dans certaines conditions peut permettre la dissuasion des conflits mondiaux, peut aussi, a contrario, les accélérer si l’équilibre de la peur qui prévaut depuis une cinquantaine d’années cède la place à la course à l’armement et à une prolifération nucléaire désordonnée. C’est cette analyse qui a conduit à l’élaboration, sous l’égide de l’ONU, en 1968, du Traité de Non Prolifération (TNP). L’Iran l’a signé et doit le respecter.

 

C’est pourquoi Ségolène ROYAL a raison de dire qu’il ne faut pas accepter que l’Iran se dote de l’arme nucléaire. Elle a raison aussi de dire qu’il n’y a qu’un pas du nucléaire civile au nucléaire militaire, puisque c’est une simple question de degré d’enrichissement de l’uranium. Toutefois, la seule façon d’aller vers un monde équilibré, c’est d’établir et de respecter le droit international. En l’espèce, il y a le traité de non prolifération. Il faut s’y tenir : l’Iran a donc droit au nucléaire civile, à condition de ne pas aller vers le nucléaire militaire. C’est ce que stipule clairement le traité, puisque les signataires « affirment le principe selon lequel les avantages des applications pacifiques de la technologie nucléaire, y compris tous les sous-produits technologiques que les États dotés d’armes nucléaires pourraient obtenir par la mise au point de dispositifs nucléaires explosifs, devraient être accessibles, à des fins pacifiques, à toutes les Parties au Traité, qu’il s’agisse d’États dotés ou non dotés d’armes nucléaires ». Ma position est donc simple : un monde multipolaire est bâti sur le droit international, négocié entre pays souverains ; il faut donc appliquer le droit, tout le droit, rien que le droit. Si non, « la raison du plus fort sera la meilleure »… Et nul ne sait qui sera le plus fort… ni même qui est le plus légitime !

 

 

PdA : Au fond, quelle gauche souhaitez-vous voir diriger la France après les élections de 2007, forte de quelles expériences et de quelles leçons tirées ?

 

G.S. : Une gauche républicaine, laïque et sociale. Une gauche qui réoriente la construction européenne pour et par les peuples. Une gauche qui renforce l’Ecole de la République et conforte la laïcité. Une gauche qui fasse passer l’économie d’une économie de rente vers une économie de l’emploi et corrige les inégalités. Une gauche qui relance la croissance durable, l’industrie, aménage le territoire, valorise la ruralité, remplace les ghettos par des territoires équilibrés. Une gauche qui fasse respecter l’ordre républicain à l’intérieur, et promeuve à l’extérieur un monde multipolaire équilibré.

 

 

 

Encore une fois, un immense MERCI à Monsieur Sarre ainsi qu'à ses collaborateurs.

 

 

 

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Modification de la présentation de l'article le 26 juin 2012

 

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