Xavier Mercier : « Les Douze Coups de midi, ça restera une parenthèse enchantée dans ma vie »
Il est agréable parfois, alors que l’actu n’est pas toujours rose, de s’accorder quelques plages de respiration bienvenues. J’ai plaisir, de temps en temps, à travailler à des articles qui ne font qu’effleurer la marche de l’info, et qui ne mobilisent pas un intervenant ayant "quelque chose à vendre" (même si c’est infiniment respectable). Cette année, la dixième de Paroles d’Actu, aura été une des plus riches, une des plus intenses aussi : plus de 30 articles, et ce n’est sans doute pas terminé. Elle a débuté avec l’interview-portrait rafraîchissant d’Arsène, maestro de N’oubliez pas les paroles (France 2).
C’est dans un même esprit que j’ai la joie de vous proposer, aujourd’hui, cette rencontre avec Xavier Mercier, un des plus grands champions des Douze Coups de midi (TF1) - je signale au passage qu’il célébrera son anniversaire au lendemain de cette publication, si si ! Je le remercie d’avoir accepté de sortir de sa réserve instinctive pour me faire toutes ces confidences, et pour tous nos échanges, très sympathiques. Un grand champion qui a arrêté en 2013, non sans panache et alors qu’il aurait pu sans peine monter plus haut et gagner davantage : il venait de trouver un job (le même jour, alignement des planètes ? Benoît XVI renonçait à sa charge, mais l’Histoire ne nous dit pas lequel a entraîné l’autre...) Exclu, Paroles d’Actu, par Nicolas Roche.
EXCLU - PAROLES D’ACTU
Xavier Mercier: « Les Douze Coups de midi,
ça restera une parenthèse enchantée dans ma vie »
Crédit photo : TF1.
Comment aimerais-tu, Xavier, te présenter auprès de nos lecteurs ?
présentation
C’est une très bonne question. Xavier. 31 ans. Briviste de naissance (et donc chauvin), savoyard de cœur et dionysien de résidence. Ingénieur à EDF au service de la première énergie renouvelable de France (l’hydraulique donc) depuis bientôt 10 ans. Fan de voyages et de quiz ; et très accessoirement "star" (il manque quelques centaines de guillemets à ce mot bien mal employé) des jeux TV depuis mon passage aux Douze Coups de midi en 2013.
Quel regard portes-tu, avec le recul, sur ton passage aux Douze Coups de midi (entre janvier à mars 2013) ? En-dehors de l’aspect financier, quelles en auront été les retombées, et est-ce qu’en un sens, ça a modifié un peu ta vie ?
la vie après Les Douze Coups...
Sur mon passage dans l’émission à proprement parler, cela restera une parenthèse enchantée. C’est avant tout une aventure humaine, une formidable aventure humaine ! Ce serait sans doute galvaudé de dire "l’aventure d’une vie", surtout vu mon jeune âge mais cela reste un condensé, en à peine quelques jours de tournage, de beaucoup d’émotions. Bien sûr (et il ne faut pas le négliger), il y a également l’aspect financier : je ne m’attendais pas à remporter une somme aussi importante si jeune. Mais avec le recul, c’est ce côté humain avant tout qui ressort pour moi : avec la production, avec les différents candidats et "maîtres de midi" avec lesquels des liens se sont tissés au fil des années et perdureront, j’en suis certain, bien au-delà du cadre de l’émission.
C’est difficile de dire que cela n’a pas modifié ma vie, ne serait-ce que par l’effervescence médiatique, les rencontres que j’ai pu faire et qui n’auraient jamais eu lieu, etc... Cela ne m’a pas changé moi en tout cas, du moins je l’espère.
Illustration : capture TF1.
Ça se passe comment concrètement (au moins à ton époque), les tournages des Douze Coups de midi ?
ça tourne !
Les émissions sont tournées dans les conditions du direct sous forme de sessions de plusieurs journées avec cinq émissions enregistrées par jour, quatre jours par semaine, trois semaines de suite. Un rythme très intense pour les candidats, en particulier les "maîtres de midi" enchaînant les émissions. De la fatigue physique, de rester debout toute la journée, mais également psychologique pour rester concentré sur le jeu. Un vrai marathon, où la notion d’endurance prend tout son sens, pour ceux qui ont enchaîné des dizaines, voire des centaines d’émissions.
Les équipes de production sont vraiment géniales et font tout pour chouchouter les candidats, les préparer à ce qui se passera en plateau pour ne pas être déstabilisé par ce tourbillon de caméras, de projecteurs, etc... L’ambiance en coulisses est vraiment géniale. Je conseille à tout le monde de s’inscrire, pour voir au moins une fois l’envers du décor. C’est intéressant également de voir comment est tournée une émission et les différences que l’on peut percevoir par rapport au même contenu, diffusé sur notre poste de télévision.
Qu’est-ce que cette expérience t’a appris, en bien et peut-être, en moins bien, du monde de la télé et de tous ses à-côtés ? Bosser à la télé un jour c’est quelque chose qui pourrait te tenter, ou pas tant que ça ?
le monde de la télé
Le monde de la télé est un monde à part, sans aucun doute : il faut savoir faire la part des choses entre les relations superficielles et celles plus profondes, et éviter les miroirs aux alouettes. C’est un milieu qui peut avoir ses côtés assez malsains, à broyer les gens qui y travaillent et à vouer aux gémonies très rapidement ce qui était adulé hier. Il faut savoir garder la tête sur les épaules.
Ce n’est pas forcément un milieu naturel pour moi et je n’aspire pas spécialement à travailler à la télé un jour. Mais il ne faut jamais dire jamais si des propositions intéressantes (je doute de crouler dessous 😄) se présentent un jour...
Jean-Luc Reichmann, ça restera sur la durée une des vraies belles rencontres de ta vie ?
Jean-Luc Reichmann
À titre personnel, ça reste jusqu’à maintenant une des vraies belles rencontres de ma vie, pour reprendre tes termes. Il a toujours été très prévenant avec moi, comme avec l’ensemble des "maîtres de midi" d’ailleurs. J’ai eu l’occasion de le côtoyer dans des milieux plus éloignés des plateaux TV, comme lors de ses pièces de théâtre.
Illustration : capture Twitter @JL_Reichmann
Que t’inspire le parcours de Bruno, éliminé il y a peu après être devenu, sans doute pour un moment, le plus grand des "maîtres de midi" ?
Bruno alias "Fifou Dingo"
Son palmarès parle de lui-même. Il a réalisé un parcours exceptionnel. Un immense respect d’avoir su tenir aussi longtemps, de s’être renouvelé pour perdurer plus de 200 émissions. Les records sont faits pour être battus mais ceux qu’il vient d’établir risquent de perdurer quelque temps...
J’ai eu l’occasion de le rencontrer lors des derniers Masters, il est très sympathique et a beaucoup de détachement sur tout son parcours. Bienvenue à lui dans cette grande famille des Douze Coups de midi où il s’intègrera très bien, sans aucun doute.
Tu as été un des rares champions en titre de jeux à décider de partir volontairement, en pleine "gloire", parce que tu t’apprêtais à démarrer un nouveau job, peut-être aussi parce que tu estimais avoir atteint un beau palier. Peux-tu nous raconter ce moment, avec un recul de huit ans et demi ? Tu y repenses parfois, à ce choix ? Jamais de regret ?
quitter la table
Effectivement, et on m’en parle encore très régulièrement, j’ai choisi d’arrêter l’émission à cause de contraintes professionnelles puisque je démarrais mon premier travail au même moment, et qu’il était plus que difficile de faire cohabiter les deux. Cela n’avait clairement pas pour but de s’arrêter en pleine gloire ou de partir en étant invaincu. C’était un choix très personnel mais c’est au final, une belle manière de boucler la boucle. Sans doute que d’autres personnes n’auraient pas fait le même choix mais je suis tout à fait en accord avec moi-même sur celui-ci. Et tant pis pour mon esprit de compétition (plutôt très affirmé) qui a dû ronger un peu son frein. 😄
Je n’ai pas spécialement de regrets : je venais de battre le record de participations de l’émission, j’aurai très bien pu perdre dès l’émission suivante. À l’époque, il était totalement inimaginable de faire ne serait-ce que 100 participations aux Douze Coups de midi (et je ne parle même pas des hauteurs stratosphériques désormais atteintes par Bruno, Éric ou Paul). Un jour, sans doute proche, je sortirai du top 10 des plus longs parcours aux Douze Coups de midi mais c’est le sens de l’histoire ! Alors oui, peut-être très factuellement, j’aurais pu prolonger mon parcours de quelques émissions et remporter quelques milliers (voire dizaines de milliers) d’euros supplémentaires mais je pense toujours avoir fait le bon choix. Je ne saurai jamais jusqu’où aurait pu aller mon parcours mais je vis très bien avec cette incertitude (rires).
On assiste à une vraie starification des champions de jeux télé, qu’on suit de plus en plus comme dans un feuilleton. Les règles du jeu favorisent parfois leur maintien (particulièrement dans Tout le monde veut prendre sa place, où le tenant du trône bénéficie de privilèges exorbitants : il n’entre dans l’arène que pour la dernière épreuve, choisit son thème et celui de son challenger et, cruauté suprême, peut même choisir, via les questions finales ou entre deux égalités, son challenger). Bref, champion télé, est-ce que ça n’est pas un peu devenu, bien qu’éphémère, une sorte de métier ?
des champions starifiés
Il y a en effet une mode ces dernières années, depuis la création de Tout le monde veut prendre sa place en 2006, d’avoir des jeux TV avec comme principe, un(e) champion(ne) récurrent(e) qui reste plusieurs jours, semaines ou mois. Même Questions pour un Champion s’est récemment plié à ce "diktat" du feuilletonage des jeux télévisés, avec un champion récurrent après avoir abrogé la sacro-sainte limite des cinq participations consécutives. Et comme tout (bon) feuilleton, cela fait mécaniquement augmenter les audiences avec les partisans de tels ou tel champion qui veulent suivre son parcours ou les téléspectateurs qui n’attendent que sa chute. Et par effet boule de neige, on "starifie" ces champions, qui par l’intermédiaire de la télévision, sont rentrés dans le quotidien des gens.
Je ne sais pas si champion TV est devenu un métier, on est loin des pays anglo-saxons dans ce domaine-là ; mais on voit effectivement très souvent les mêmes candidats dans les différents jeux télévisés toutes chaînes confondues. De là à en faire un métier, la marche est haute et le business plan risqué. 😄
Tu as participé à plusieurs reprises à des émissions qui font s’affronter des champions de jeux parfois très différents : Des chiffres et des lettres, Questions pour un champion, Tout le monde veut prendre sa place, N’oubliez pas les paroles, Slam, Les Douze Coups de midi... Tu connais un peu les règles, les mécanismes de chacun de ces jeux. Lequel est, à ton avis, et en tout cas pour toi, le plus redoutable ?
revue de jeux
La plus redoutable, c’est très subjectif. La mécanique des Douze Coups me convient plutôt bien avec différents types de questions : QCM, listes, rapidité, etc... Mais l’avis est forcément subjectif car c’est clairement chez moi (ce plateau, et tout) : cette émission a une place toute particulière dans mon cœur, donc dans un sens c’est très irrationnel. J’aime également énormément la mécanique de Questions pour un Champion, quasi inchangée depuis la création du jeu. Ça reste le graal en termes de jeu TV de culture générale et ses manches sont devenues "mythiques", en quelque sorte.
Tout le monde veut prendre sa place avait vraiment révolutionné les jeux TV en France à son arrivée, avec un format novateur. À voir avec Laurence Boccolini, mais je trouvais que ces dernières années le jeu était devenu une caricature de lui-même, avec une prépondérance énorme de questions cinéma et musique, quel que soit le thème de l’émission du jour.
Étant archi nul en anagramme (mais grand amateur de Scrabble, on n’arrête pas les paradoxes), j’aurais beaucoup plus de mal avec Des chiffres et des lettres par exemple, où les candidats sont pour moi de véritables extra-terrestres. Concernant N’oubliez pas les paroles, c’est un jeu différent puisqu’on sort du spectre des jeux de lettres et de culture générale. Je suis très impressionné par l’investissement et les résultats des candidats. Un exercice de mémorisation assez époustouflant pour retenir au mot près des centaines de chansons...
Parmi tes thèmes de prédilection, il y a le sport. Quels sont les athlètes, actuels et passés, les perf individuelles et collectives, que tu admires par-dessus tout ?
about sports
J’aime le côté romantique du sport, de la performance. Le panache. L’histoire du petit poucet qui renverse des montagnes. Des destins qui transcendent le côté sportif uniquement. J’ai d’ailleurs un peu parfois la même approche des jeux TV, j’aime les belles histoires et le panache au-delà du résultat brut.
J’ai donc une tendresse pour les "perdants" magnifiques, pour toutes ces grandes équipes maudites en football qui ont toujours buté sur la dernière marche et n’ont jamais été championnes du monde mais ont tout de même marqué leur époque et révolutionné ce sport comme la Hongrie de Ferenc Puskas en 1954, ou les Pays-Bas de Johan Cruyff en 1974.
Je pense d’ailleurs que je mettrais Johan Cruyff parmi les athlètes que j’admire le plus, le chantre du "football total" devenu un entraîneur à succès qui a marqué dans les deux rôles l’histoire du jeu. En dehors du football, je pense naturellement à Ayrton Senna, le talent à l’état brut fauché en pleine gloire. C’est une icône bien au-delà de son sport !
Au Grand Canyon. Photo personnelle confiée par X. Mercier.
Je prolonge un peu cette question. Si tu devais établir un panthéon perso des personnalités ou des personnes, connues ou pas, d’hier ou d’aujourd’hui, qui t’inspirent pour leurs actions ou pour leur être, qui y placerais-tu ?
panthéon personnel
C’est d’actualité (avec les 40 ans de l’abolition de la peine de mort en France), mais je pense que j’y placerais Robert Badinter, une figure morale forte de l’époque contemporaine et un homme de conviction. Une classe folle ! Il a une vie digne d’un roman et totalement captivante. Il s’est battu pour des causes que j’estime justes, contre vents et marées. C’est un peu l’incarnation des valeurs de la République française au sens large.
Je pourrais y ajouter des figures scientifiques majeures qui ont fait progresser notre connaissance et notre compréhension du monde qui nous entoure, comme Johannes Kepler ou Nikola Tesla.
Dans un autre registre, j’ai une énorme tendresse pour Winston Churchill et sa personnalité pleine d’excès et de contradictions, qui a eu une vie passionnante et un rôle clé dans un des moments les plus noirs de notre histoire.
Il y a aussi, dans tes spécialités, la géographie. Forcément, ça nous invite au voyage. Quels sont, jusqu’à présent, les coins et les lieux qui t’ont le plus fasciné, et ceux que tu rêves toujours d’aller voir ?
voyage, voyage
Les voyages sont une de mes plus grandes passions, et j’ai pu très largement en profiter ces dernières années avec ma compagne. Dur de faire des choix, j’ai eu cette (réelle) chance de voir de nombreux lieux magnifiques aux quatre coins du monde : les pyramides mayas du Yucatan, les merveilles naturelles du Sud-Ouest des États-Unis, la richesse des temples thaïlandais, etc... Depuis très petit, j’ai été fasciné par la cité de Pétra, "perdue" au milieu du désert, uniquement accessible par un étroit corridor dans la roche. J’ai eu la chance de la visiter et d’être émerveillé comme beaucoup par la découverte, au détour d’un virage, de telles merveilles gravées dans la roche. La réalité était clairement à la hauteur de mes attentes et j’espère bien avoir la chance d’y retourner un jour.
J’ai également été frappé par le Taj Mahal, si souvent vu en photos et qui, pourtant, en vrai conserve ce côté spectaculaire qui scotche le visiteur au premier regard. J’ai d’ailleurs adoré au cours de ce séjour en Inde l’ensemble des monuments moghols et leur architecture raffinée, symbiose de plusieurs cultures avec des dômes splendides et des ornements subtils.
Je suis également obligé de citer l’Île de Paques et ses mythiques moaï qui tiennent toutes leurs promesses sur ce petit confetti au milieu de l’océan Pacifique. D’autant que la visite de cet endroit a un côté unique, le temps est suspendu comme dirait Lamartine puisque, même s’il ne faut jamais dire jamais, c’est souvent un endroit où l’on n’a pas la chance de retourner dans sa vie.
Et pour finir la Patagonie, territoire méconnu que nous avons eu la chance de parcourir, avec ses glaciers splendides à portée de main comme le Perito Moreno, et d’oreille même puisque les craquements sont impressionnants ; ses vastes étendues sauvages et ses sommets enneigés, que ce soit côté argentin (le Fitz Roy par exemple) ou côté chilien (avec le parc des Torres del Paine).
Bref je pourrais parler voyages et découvertes durant des heures 🙂. Il me reste encore beaucoup de choses à découvrir. De manière anecdotique, j’aimerai bien boucler avec ma compagne le tour des "7 nouvelles merveilles du monde" avec la visite des deux qui manquent à "notre palmarès" : la Grande Muraille de Chine et le Christ Rédempteur de Rio de Janeiro. Et (j’aime décidément bien boucler des boucles) également visiter l’Ouzbékistan, avec ses magnifiques villes comme Samarcande, Boukhara ou Khiva qui évoquent les étapes de la mythique route de la Soie. Cela devait être notre voyage de noces avant que la pandémie vienne mettre notre vie à tous entre parenthèses.
El Perito Moreno. Photo personnelle confiée par X. Mercier.
Torres del Paine - Los Cuernos del Paine. Photo personnelle confiée par X. Mercier.
Voyage toujours, la minute fantaisiste de l’interview : si tu pouvais visiter une autre époque, où et quand ?
un séjour dans le temps ?
Les Grandes Découvertes, clairement ! Au Portugal ou en Espagne. Avec tous ces hommes comme Magellan ou Vasco de Gama qui partaient vers des territoires inconnus. Je pense que je serais un peu déçu par la réalité des choses, bien plus difficile que l’image romantique que j’en ai.
Ou alors, toujours en Espagne durant les grandes heures d’Al-Andalus, au carrefour de plusieurs religions et civilisations.
Petite question un peu taquine alors que se profile une élection présidentielle qui risque fort de ne pas se jouer sur des débats d’idée de haute tenue : penses-tu, toi qui travailles dans le secteur de l’énergie, que les questions énergétiques n’ont pas dans le débat public la place que peut-être, elles mériteraient ?
questions d’énergie(s)
Vaste sujet que les questions énergétiques et leur place dans le débat public. J’ai l’impression d’entendre assez régulièrement les mêmes questions (en particulier sur la transition énergétique) apparaître dans les débats mais elles sont souvent assez peu fouillées et tournent au débat assez caricatural ou démagogique. Il est important de construire une trajectoire sur la transition énergétique concrète et plausible sur le terrain. Le développement des énergies renouvelables est un enjeu actuel et des décennies à venir ; la place du nucléaire également puisque sa suppression à court terme est littéralement impossible. Je pense que ces thématiques auront une place importante dans la prochaine campagne présidentielle en espérant qu’on ne les prenne pas par le petit bout de la lorgnette.
On espère sortir, petit à petit, de cette pandémie de Covid-19 qui nous aura fait vivre, aux uns et aux autres, des choses qu’on n’aurait pas pensé connaître un jour. Comment l’as-tu vécue à titre personnel ? Dans ce flot de malheur, cette crise sanitaire aura-t-elle eu aussi, des vertus ?
crise sanitaire
Plus ou moins bien, comme tout un chacun j’imagine. J’ai eu la chance de ne pas être touché de près ou de loin par la maladie, ou par les conséquences économiques de cette pandémie, ce qui reste une réelle chance par rapport à beaucoup de Français. Ces mois n’ont pas été les plus épanouissants de ma vie. Enfin, quand même ! j’ai eu la chance de me marier avec la femme que j’aime et d’organiser le mariage auquel nous aspirions, malgré les contraintes liées à la crise sanitaire.
Les confinements, en particulier le premier, étaient quelque chose de totalement inédits et inattendus. Pour quelqu’un de ma génération, je ne pensais jamais expérimenter concrètement la notion de couvre-feu par exemple. Cela a été également la source de nombreux bouleversements professionnels en termes d’organisation et de modes de travail. Sans doute sur ce sujet, un accélérateur de transformations qui auraient mis sinon de nombreuses années à se diffuser dans la société.
J’espère que cette crise sanitaire aura permis aux gens de se recentrer sur leurs priorités et d’accorder plus d’importance à la solidarité, ainsi qu’à la chance que nous avons de vivre au quotidien. J’espère également qu’on en tirera une vraie évolution sur les priorités en matière d’investissements publics (j’avoue être assez utopique parfois) !
Quelles sont tes recettes pour nourrir tes curiosités, alimenter ta culture ? Beaucoup de lecture j’imagine ?
alimenter sa culture
Beaucoup de lecture, oui et non. Par période, je lisais beaucoup plus en étant plus jeune, que ce soient des romans (je conseille d’ailleurs à tout le monde la lecture d’Alamut de Vladimir Bartol, et de L’Ombre du vent de Carlos Ruiz Zafon), des biographies ou des ouvrages de types divers et variés. J’ai une impressionnante pile de livres en attente de temps (et d’envie parfois) pour les lire, je papillonne aussi beaucoup entre différents ouvrages.
Je n’ai clairement pas de méthode toute faite pour alimenter ma culture et ne suis pas la personne la mieux organisée sur ce point. Je ne suis pas un bon exemple. 😄 Je suis curieux de pas mal de sujets et fais énormément de quiz (sur internet, avec des amis, dans des bars) ce qui permet d’entretenir cette culture générale. L’effet pervers de tout ça, c’est qu’on retient beaucoup mieux ce qui nous intéresse, et donc qu’on renforce ses points forts sans combler ses points faibles.
Des conseils pour quelqu’un qui rêverait, comme un challenge, de devenir "maître de midi" ?
devenir "maître de midi"
Je ne sais déjà pas pourquoi j’ai été pris aux sélections, alors de là à avoir une recette pour devenir "maître de midi" 😄. Blague à part, je pense que venir en pensant gagner est une bonne stratégie pour être sûr de perdre. Les questions sont sur des thématiques très variées, portant parfois sur des faits généralistes très connus mais aussi sur des informations très anecdotiques. Dur de se préparer au mieux sur ce plan-là : une culture générale variée est bien sûr un plus. Je pense que le petit plus qui peut faire la différence réside plus dans le "psychologique" que dans les connaissances pures : être détendu, ne pas stresser outre mesure, etc... L’essentiel reste de s’amuser, de passer un bon moment et d’en profiter pleinement. 🙂
Tes projets et surtout, tes envies pour la suite ?
Reprendre mon bâton de pèlerin et reprendre la route des voyages. Mais aussi profiter de mes proches et ne pas laisser filer ce temps qui passe trop vite 🙂.
Point de vue jeux TV, pas beaucoup de projets en attente. J’ai eu la chance de faire récemment Questions pour un Super Champion même si l’aventure n’est pas forcément conclue comme je l’espérais. Si j’ai une nouvelle chance dans un futur proche ou lointain, j’essaierais de faire mieux !
Un message à adresser à quelqu’un à l’occasion de cette interview ?
Pas forcément à une personne en particulier mais plutôt à toutes les personnes qui ont cru en moi, qui m’ont permis d’arriver là où je suis aujourd’hui. À mes parents qui m’ont donné le goût de la connaissance et de la curiosité, à ma femme qui me supporte au quotidien (et ce n’est pas un vain mot), à mes amis bien sûr, etc... On est riches des rencontres que l’on peut faire au cours d’une vie qu’elles soient familiales, affectives ou amicales et il faut prendre soin de toutes ces relations.
Un dernier mot ?
Merci de m’avoir laissé l’occasion de m’exprimer sur ces sujets divers et variés. Je pense que cela transparaît un peu au travers de mes propos, mais je suis quelqu’un qui s’exprime peu et préfère l’ombre à la lumière des projecteurs. En espérant que ces quelques pages plaisent à tes lecteurs.
Et à tes fans ! Merci...
Photo personnelle confiée par X. Mercier.
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Eloge de la chanson populaire, avec Arsène (N'oubliez pas les paroles)
Peu de gens sans doute se souviendront de 2020, marquée d’une pierre noire par la pandémie de Covid-19, avec nostalgie : l’année passée, les articles Paroles d’Actu, comme ceux du monde entier, auront d’ailleurs été largement empreints de cette lourdeur. Dans ce contexte, j’ai souhaité donner la parole à quelqu’un qui lui, peut affirmer sans offenser quiconque qu’il a vécu une année 2020 formidable : Arsène, jeune Rouennais de 22 ans, a compté ces derniers mois parmi les grands Maestros de N’oubliez pas les paroles, le jeu musical que présente Nagui sur France 2. Vainqueur du tournoi des Masters de novembre après un parcours remarqué au printemps dernier, il a été une des révélations de l’année télé, côté candidats. L’échange qui suit a été réalisé entre le début du mois de décembre et la mi-janvier : c’est une rencontre, au meilleur sens du terme, avec un jeune homme ayant vécu, grâce à son travail, une aventure rare qui aura transformé son existence. Merci à toi, Arsène, pour la confiance que tu m’as accordée, et pour toutes ces confidences. Bon vent (normand évidemment) ! Une exclusivité Paroles d’Actu, plus légère donc. ;-) Par Nicolas Roche.
EXCLU PAROLES D’ACTU
Éloge de la chanson populaire,
avec
Arsène
(N’oubliez pas les paroles)
Bonjour Arsène et merci d’avoir accepté cet interview pour Paroles d’Actu. On va parler dans un instant de l’émission qui t’a fait connaître, mais avant cela, qu’aurais-tu envie que nos lecteurs sachent de toi ?
Bonjour, je m’appelle Arsène, j’ai 22 ans et je suis Rouennais. Je fais des études d’histoire à l’université de Rouen, ville où j’ai toujours vécu. Je suis actuellement en Master 2.
Il y a deux semaines, tu remportais le tournoi des Masters de N’oubliez pas les paroles. Comment as-tu vécu cette victoire ?
Je suis extrêmement fier de ma victoire aux Masters. Je me permets de le dire parce que j’ai énormément travaillé pour y arriver. Bien sûr, j’ai aussi eu de la chance, et forcément il y a une part de chance, dont certains de mes concurrents ont pu manquer.
« J’ai beaucoup travaillé pour préparer les Masters,
je suis très content que ça ait payé,
au-delà même de mes espérances. »
Je n’ai pas du tout relâché mes efforts depuis mes passages télé d’avril. J’ai continué à me préparer pour les Masters tout l’été et toute la rentrée, plusieurs heures par jour. Et je suis très content que ça ait payé, au-delà même de mes espérances : j’avais l’espoir d’arriver en demi-finales et de gagner un peu d’argent, j’ai gagné les Masters et 112.000€ (le record de gains pour des Masters). Je ne pouvais pas rêver mieux.
Cette victoire a-t-elle une saveur particulière par rapport à ton parcours dans le jeu ?
J’étais forcément un peu déçu d’avoir perdu en avril. Je ne reviendrai pas sur les polémiques autour des conditions de ma défaite, ça n’a pas lieu d’être ici, mais je pense que tous les Maestros, quels que soient leurs gains, sont déçus de perdre, et les Masters peuvent être une occasion de montrer qu’on est encore là, dans le jeu, et c’est plutôt bien.
J’ai lu que tu avais pas mal écouté Nostalgie notamment, et évidemment révisé beaucoup de chansons, avec l’humilité de dire qu’en tant qu’étudiant, c’était plus facile pour toi de dégager du temps pour cela. Mais quand même, ça a supposé une vraie discipline non ? Quelle organisation, et combien d’heures passées à mémoriser des chansons ?
Oui, cela demande pas mal de méthode, d’organisation et de temps. Ma méthode d’apprentissage s’est affinée. J’ai gagné en méthode depuis que j’ai commencé à apprendre des chansons. En tout, ça m’a pris un peu plus d’un an et demi.
J’ai commencé à apprendre des chansons par coeur une par une juste après mon deuxième casting, en 2018 (je n’avais pas été retenu). Pas mal de titres très connus comme Double je de Christophe Willem, L’Aziza de Daniel Balavoine, ou Que je t’aime de Johnny... J’ai appris à peu près 150 tubes incontournables pour, le jour où je passerais à l’émission, être assuré de marquer quelques points.
Je me suis rendu compte au fur et à mesure que j’apprenais bien, que ça restait gravé dans ma mémoire. Et je redoutais un peu de faire un score très bas dans l’émission, quelques points puis repartir. Donc je me suis dit qu’il me fallait apprendre un maximum de chansons pour réduire ce risque. Je ne pensais même pas forcément à gagner de l’argent, à ce moment-là, encore moins à devenir Maestro.
Pendant un peu plus d’un an, j’ai continué à apprendre des chansons, et c’est devenu comme une gymnastique cérébrale que j’aimais bien.
J’avais une méthode assez précise. Je téléchargeais toutes les chansons qui tombaient dans le jeu et que je ne connaissais pas. C’était, un jour sur deux, apprentissage et révisions. Le jour "apprentissage", j’écoutais deux ou trois fois la chanson que je voulais apprendre, pas plus, ensuite j’écoutais d’autres chansons que je voulais apprendre. Le lendemain, je révisais aléatoirement quelques chansons de la playlist que j’étais censé connaître. Puis je réécoutais deux ou trois fois celles écoutées l’avant-veille. Je trouvais que c’était plus efficace que d’écouter trente fois une même chanson en une journée. De cette façon, la chanson fait son chemin dans notre cerveau et s’ancre dans notre mémoire de manière presque indolore. Je voyais la liste de mes chansons apprises grossir, c’était gratifiant et encourageant.
Lors de mes premiers tournages, je suis ainsi arrivé avec 900 chansons en tête. Ca a représenté beaucoup de travail. Un an avant mes tournages, j’y passais une demi-heure à trois quarts d’heure par jour, et dans les dernières semaines avant, je ne faisais quasiment que ça de mes journées. Aujourd’hui, je connais environ 1150 chansons.
Pas mal en effet ! Qu’est-ce qui est plus compliqué, devoir apprendre des dates historiques, ou bien des paroles de chansons ? Est-ce que le fait que celles-ci soient en rythme et en musique aide aussi à la mémorisation ?
Ce n’est pas vraiment la même chose. J’ai appris quelques dates historiques à l’école ou au collège, à l’époque où on nous demande d’apprendre des dates par coeur. Aujourd’hui, quand on est à l’université, ces choses sont ancrées et on ne nous demande plus vraiment d’apprendre par coeur, sauf pour les examens de fin d’année.
« Ce qui m’a aidé à apprendre des chansons,
c’est surtout que j’adore ça. »
Ce qui m’a aidé à apprendre des chansons, c’est surtout que j’adore ça. J’écoute beaucoup de chansons depuis très longtemps. Je suis un fan de variété française. J’écoute beaucoup de CD, la radio, et j’ai une platine vinyle. J’ai donc acquis une culture musicale de base, donc avant d’apprendre des chansons pour l’émission, sans vraiment chercher à l’acquérir. Donc je n’ai pas vécu cela comme l’apprentissage d’un cours d’histoire ou d’une poésie.
Quels conseils donnerais-tu à une personne, jeune ou moins jeune d’ailleurs, qui aurait envie de se frotter sérieusement à ce jeu, qui d’ailleurs est très populaire ?
Je peux renvoyer cette personne aux conseils que je viens de te donner. Une méthode plutôt indolore. Mais évidemment, ça dépendra du temps dont elle pourra disposer.
Ce qui aide, c’est simplement aimer ça. Pour moi, au bout d’un moment, ça devenait presque une drogue. Quand je me levais le matin, j’allais faire ma balade de deux heures dans la forêt ou sur les quais de Seine à Rouen, avec mes écouteurs dans les oreilles, et j’écoutais des chansons, beaucoup de chansons. Ces apprentissages sont liés pour moi à de bons moments.
Il faut aussi être conscient qu’il y a une grosse part de chance. Le fait d’apprendre des chansons ne fait que réduire la part de la chance et augmenter celle du mérite. On peut très bien avoir appris 1500 chansons et ne tomber que sur des titres qu’on ne connaît pas. Avec, aussi, le risque de perdre ses moyens sur une chanson, de bafouiller, ce qui était vraiment mon cauchemar, surtout sur une chanson que je connaissais. J’aurais travaillé des mois pour rien.
Pour diminuer ce risque de perdre ses moyens, je conseille aux candidats de multiplier les karaokés en public (quand c’est possible !) en évitant de regarder les paroles sur le prompteur, pour se tester. En tout cas il faut y consacrer beaucoup de temps et de travail.
Il y a trois ans tout juste, on apprenait la disparition de Johnny Hallyday (question posée le 5 décembre 2020, ndlr). Est-ce qu’il fait partie de ces artistes que tu aimes et qui t’inspirent ? Et quels sont-ils, ces artistes qui ont pour toi une place particulière ?
Johnny Hallyday j’aime bien, sans plus. C’est évidemment un monstre sacré de la variété et du rock en France, une légende du fait de sa puissance vocale, de son allure, de sa beauté physique, de son charisme, de sa longévité et de sa capacité à traverser les époques et les modes. On a tendance à l’oublier, mais il a aussi connu de petits creux notamment à la fin des années 70 et dans les années 2000.
J’aime beaucoup de chansons de lui mais je ne le classerais pas parmi mes chanteurs favoris. J’ai été marqué par plusieurs chanteurs, durant des périodes successives de ma vie.
À une époque, j’aimais beaucoup Joe Dassin. Il chantait des hymnes populaires qui étaient aussi des titres de qualité, des hymnes populaires, intelligents et émouvants.
J’aime beaucoup Claude François pour sa capacité à traverser, lui aussi, les modes et les époques. Ses derniers titres disco, Alexandrie, Alexandra et Magnolias for ever sont vraiment de qualité, même les spécialistes le disent. Les orchestrations sont très recherchées, bref ce sont de bonnes chansons.
Quand j’étais ado j’aimais aussi beaucoup Hervé Vilard et Sheila, des chanteurs populaires sans prétention qu’on dénigre un peu aujourd’hui mais que j’aime bien.
Mon chanteur favori, c’est Michel Sardou. Pour moi, le plus grand chanteur français derrière Johnny, et avant Jean-Jacques Goldman. Le trio de tête.
« Je rêverais d’avoir la voix de Michel Sardou. »
Les textes de Sardou sont intelligents, les mélodies composées pour lui sont toutes très belles, et il a une voix exceptionnelle que j’aimerais bien avoir, mais je peux toujours rêver (il est ténor et je ne suis pas ténor donc ce rêve-là je peux l’enterrer). Sardou c’est le chanteur “tout court”. Il n’est ni le chanteur “rock” comme Johnny, ni le chanteur “auteur-compositeur” à la Goldman, ni le chanteur à minettes comme Patrick Juvet, ni le chanteur jazz comme Michel Jonasz, etc... C’est ça que j’aime bien. Il ne cherche pas à être spécialement original. Il fait de la chanson.
Tous ces artistes que je viens de citer, qui ont eu leur heure de gloire dans les années 70-80, ont eu cette particularité de faire des chansons populaires, des tubes qui étaient des chansons de qualité. Aujourd’hui, je trouve que c’est un peu soit l’un soit l’autre. Les chanteurs de qualité ont une audience limitée, et les chanteurs qui sont dans les tops des ventes sont moins bons à mon avis.
C’est quoi tes quelques chansons préférées, celle que tu connais depuis longtemps sans avoir eu à les apprendre et que tu chantes, pour le coup, pour le plaisir ?
Je vais t’en citer cinq, dont une en anglais. Je pense que c’est un bon choix. Ce sont vraiment des chansons que j’aime spontanément, et que je n’ai pas eu besoin comme tu l’as dit de les “travailler” spécialement pour l’émission.
La première, une des chansons que j’ai le plus écoutées dans ma vie, et en tout cas dans mon adolescence, c’est Nous (1979) de Hervé Vilard. Elle a été un énorme tube quand elle est sortie, mais, comme beaucoup de chansons de cette époque-là (je pense à Reviens, à Rêveries de Hervé Vilard, ou à certains titres de Sheila), injustement oubliée ensuite parce que très peu diffusée en radio. Même sur Nostalgie !
« Ado, j’étais un peu groupie
du Hervé Vilard des années 70. »
J’aime beaucoup Hervé Vilard. Quand j’étais ado, j’étais un peu groupie du Hervé Vilard des années 70, je le trouvais beau, bien coiffé (je rêvais d’avoir sa coupe de cheveux). Si j’avais été chanteur, il était celui que j’aurais aimé être à l’époque. Nous, c’est un peu la chanson qui a lancé sa deuxième partie de carrière, parce qu’il était déjà connu dans les années 60 avec Capri c’est fini ou encore Mourir ou vivre. Nous, c’est un slow qui parle d’une rupture amoureuse, un très beau texte de Claude Lemesle (qui a écrit notamment pour Sardou, Reggiani, Joe Dassin...) sur une mélodie de Toto Cutugno. Pour moi ce texte est vraiment poétique. Certaines mauvaises langues diront que c’est de la poésie un peu facile, “grand public”, mais c’est de la belle poésie. “C’est un cri arraché au ciel, Un rayon qui manque au soleil”. Moi ça me parle, et ça fait un ensemble assez poignant.
La deuxième, ce serait Marie-Jeanne, de Michel Sardou, en 1990. Son dernier gros tube (il en connaîtra un autre dans les années 2000 avec La rivière de notre enfance, en duo avec Garou). Cette chanson aussi est un peu oubliée aujourd’hui, parce qu’il est rare qu’elle sorte quand on demande à quelqu’un de citer trois ou quatre chansons de Sardou. Elle contient un peu tout ce que j’aime dans la chanson française, et chez Sardou en particulier : d’abord ce rythme assez dansant (j’aime la variété rythmée) même si on ne danserait pas forcément sur cette chanson, cette alliance d’une mélodie planante (notamment sur le refrain) avec une orchestration très rythmée (guitares électriques, basses, synthé, boîte à rythmes...). J’aime aussi la belle voix puissante de Michel Sardou, et ce texte sur un ton désabusé, sur le temps qui passe : “Les Marie-Laure, Les Marie-Jeanne, Dans la fumée de ma gitane, Que sont nos amours devenues ?”. Il dresse un portrait un peu acide de toutes ces femmes qui ont eu des rêves d’enfance qui ne se sont pas réalisés. Ce ton désabusé correspond assez à mon caractère.
La troisième, Elle m’oublie de Johnny Hallyday (1978). Encore une fois, un tube de Johnny mais pas son plus gros tube, pas celui qu’on citerait en premier. C’est aussi un des premiers grands succès écrits par Didier Barbelivien qui a écrit énormément de succès dans les années 70 et surtout 80, dont On va s’aimer, Méditerranéenne, etc... Ce que j’aime dans ce texte, c’est que ce sont des paroles très simples, où le narrateur imagine ce que devient une fille qu’il a connue et aimée. Il imagine qu’elle l’oublie, avec, dans les couplets, une succession de détails du quotidien écrits très simplement et qui sont assez parlants : “Demain matin, bien sûr, elle arrive à Paris, Elle retrouve les rues, ses parents, ses amis, Je lui donne trois semaines pour tomber amoureuse, Et devant son miroir, elle est déjà heureuse, elle m’oublie”. On y pense forcément quand on est dans cette situation, celle d’une rupture, ou quand on songe à quelqu’un qui s’est détaché de soi.
La quatrième, Fais-moi une place de Julien Clerc (1990). C’est la moins mal lotie des quatre déjà citées, elle a bien traversé le temps et reste très connue. Julien Clerc a composé la mélodie, et le texte est signé Françoise Hardy. Comme beaucoup de chansons de Julien Clerc, elle est très mélodieuse, et le texte colle parfaitement à la voix de l’interprète, avec son fameux vibrato. La chanson s’inscrit dans un album (“Fais-moi une place”) que je trouve très bon (bien que je ne sois pas critique), avec beaucoup de belles chansons, des mélodies un peu planantes (je pense notamment à Le verrou, à Petit Joseph ou à Le chiendent).
La cinquième, c’est une chanson en anglais mais chantée par une chanteuse française, c’est Spacer de Sheila. Avant ma période Hervé Vilard, je me suis beaucoup intéressé à la carrière de Sheila, vers mes 11 à 13 ans. J’aimais ses chansons, j’ai emprunté son best of à la médiathèque et je soûlais mes parents avec elle en partant en vacances (rires). Ce qui m’a fasciné chez Sheila, c’est sa carrière, un peu comme un conte de fées. Elle a eu une carrière très longue, même si elle est un peu dénigrée aujourd’hui parce qu’elle fait partie de ces chanteuses, comme Mireille Mathieu, Nana Mouskouri ou Michèle Torr, qu’on considère comme étant un peu “gnangnan”. Moi j’aime bien. Ce sont des chansons populaires, qui pour certaines ont peut-être un peu mal vieilli, mais avec des refrains accrocheurs, qui restent en tête, et qui sont pour la plupart bien écrites.
« J’aime Sheila, qu’on considère comme étant un peu
"gnangnan" aujourd’hui. Ce qui me passionne dans
sa carrière, c’est qu’elle a épousé toutes les modes. »
Ce qui me passionne c’est que, dans sa carrière, Sheila a épousé toutes les modes. D’abord sa carrière yéyé, avec ses couettes, puis sa coiffure bouffante, son espèce de “casque” avec son kilt, ses petits chemisiers... Ensuite, les années 70 avec ses cheveux longs, la période avec Ringo, ses costumes moulants à paillettes, ses combinaisons pattes d’éléphant, et des chansons qui se rapprochaient de plus en plus de la vague disco. Vague qu’elle embrasse clairement avec cette chanson donc, Spacer. Un nouveau départ pour elle, parce qu’elle était un peu coincée dans son registre de chansons un peu mièvres pour mères de famille des années 70. Elle part aux États-Unis et y rencontre, je crois, le producteur du groupe Chic, qui va lui faire cette chanson qui aura été un tube là-bas. Elle ne passe plus beaucoup en radio mais elle a permis de découvrir un nouveau visage de Sheila, peut-être un peu plus dans le vent. J’aime sa mélodie qui paraît tellement évidente et “tubesque”, cette belle intro au piano... J’ai beaucoup écouté ce vinyle !
Que retiendras-tu de cette expérience télé, je pense au contact avec Nagui, les équipes du jeu et aux coulisses en général ? La télé, ça t’attire ?
Je vais essayer de répondre à deux questions que me posent assez souvent les gens qui me connaissent, ou même ceux que je croise dans la rue : 1/ il est sympa Nagui ? 2/ c’est pas un milieu de requins, la télé ?
Est-ce que Nagui est sympa ? J’aurais du mal à répondre, parce que je connais assez peu. Ce n’est pas du tout un reproche que je lui fais, la plupart des Maestros sont aussi dans mon cas. C’est un homme très occupé. La plupart de nos interactions avec lui se font sur le plateau, devant les caméras. Il vient nous saluer avant qu’on arrive sur le plateau, mais on enchaîne tout de suite après sur l’émission. Il cherche la spontanéité, à nous découvrir et est sincèrement curieux des gens sur le plateau. Mais ensuite, il passe vite à autre chose. Encore une fois ce n’est pas un reproche : tout s’enchaîne très vite, il doit s’intéresser aux candidats suivants, qu’on soit Maestro ou pas d’ailleurs. Il ne reste pas en coulisses avec nous pour boire un verre ou manger avec nous, et forcément ne peut pas être très disponible.
J’ai toujours trouvé l’ambiance en coulisses très bonne, que ce soit avec les Maestros ou avec les candidats « normaux » (quand j’étais un candidat « normal »). C’est vraiment très bon enfant. On est tous préparés, briefés, en petits groupes. La production, les équipes de casting, etc... font tout pour nous chouchouter. On nous explique comment ça va se passer, comment se placer sur le plateau, comment être avec Nagui, etc... On nous maquille, on nous coiffe, on choisit nos vêtements avec la costumière. Il y a de quoi manger et de quoi boire. Quand arrivent les tournages, on attend notre tour, juste derrière le plateau. On voit Nagui et le candidat de dos, on chante en même temps que lui, on apprend à se connaître avec les autres, on compare nos connaissances musicales... J’ai de très bons souvenirs de cette ambiance, qui aide à relâcher la pression avant de monter sur le plateau. Et tout cela centré autour de la chanson française, qui nous rassemble tous.
« Me verrais-je faire de la télé ? Je ne suis pas sûr. »
De très bons souvenirs donc. Pour autant, est-ce que je ferais de la télé ? Je ne suis pas sûr. Il y a des gens qui me trouvent décontracté sur le plateau, mais c’est normal, on est des candidats, mis en valeur par Nagui qui nous pose des question et cherche à faire ressortir le meilleur de nous-mêmes. S’il sent un embarras, il passe à autre chose, etc. Je ne sais pas si je serais à l’aise à travailler vraiment à la télé.
Est-ce que ce goût de la chanson et de la musique, que tu as démontré émission après émission, te donne envie (et peut-être est-ce déjà un projet) de te créer ton propre univers musical ? D’ailleurs, est-ce que tu écris un peu, et est-ce que tu joues de la musique ?
Je peux dire qu’un de mes rêves plus ou moins assumés et précis serait d’être chanteur, mais uniquement chanteur à succès (rires), je ne me vois pas galérer pendant 15 ans dans des petites salles. Comme dans Le chanteur de Balavoine, si je pouvais faire des tubes, gagner des thunes, ce serait bien !
J’ai commencé à écrire des chansons pour la première fois quand j’avais 15 ans. J’en faisais une de temps en temps, c’était pas terrible, vraiment, mais j’essayais de m’inspirer de toutes les chansons que j’aimais bien. J’ai plus ou moins laissé tomber par la suite, puis j’ai acquis des livres de conseils pour écrire des chansons, dont L’art d’écrire une chanson de Claude Lemesle, auteur à succès que j’ai cité tout à l’heure. J’ai lu ce livre, regardé des vidéos de conseils sur internet, etc...
« Au niveau des textes que j’écris, il y a encore
du chemin à faire, mais je constate que
je m’améliore, que ça devient potable. »
En tout, j’ai dû écrire, depuis le début, une vingtaine de chansons. Sur ces vingt, quatre ou cinq doivent être correctes. Mais je remarque que, j’ai beau en écrire peu, c’est vraiment un exercice auquel on ne peut que progresser. Au départ, je faisais des trucs d’ado assez nazes, mais au fur et à mesure que j’en écrivais, j’évitais des lourdeurs, je tournais mieux mes phrases, et je constate que je ne fais que m’améliorer. Il y a encore du chemin, mais ça commence à devenir potable, si on imagine certains textes avec de vraies mélodies.
Ces projets se précisent un peu. Après mes diffusions d’avril, j’ai été contacté par un studio d’enregistrement dans l’est de la France tenu par une des Maestros, Johanna. Elle m’a contacté, avec son associé, pour me proposer de me faire un titre sur mesure (paroles, musique, éventuellement un clip) gratuitement, parce que ça leur fait de la publicité de faire une chanson pour un Maestro. À plus forte raison maintenant que j’ai gagné les Masters. J’ai accepté, mais je leur ai dit que j’avais envie d’écrire les paroles, parce qu’il y a certains textes dont je suis satisfait. À leur charge de trouver une mélodie et des arrangements. Je leur ai envoyé un texte, dont je tiens la teneur secrète pour le moment, mais je ferai un peu de pub au moment de sa sortie. Ils planchent actuellement sur l’accompagnement, sur la base de pistes que je leur ai données concernant le style que j’aimerais. J’ai écouté plusieurs de leurs chansons et je suis sûr que ce qu’ils me proposeront va donner quelque chose de bien.
Écrire une chanson, c’est vraiment un exercice difficile. C’est assez ingrat parce qu’on peut passer des heures pour pondre une ou deux lignes à peu près potables. Parfois on ne trouve rien du tout, que des trucs nuls, des rimes faciles, des choses mièvres ou au contraire beaucoup trop sophistiquées pour que ce soit bien. Et de temps en temps, presque sur un malentendu, on tombe sur une strophe bien, un couplet inspiré. Beaucoup d’auteurs le disent. Je ne prétends pas du tout être Georges Brassens pour l’instant, mais je sais qu’il passait des journées entières à rayer, à retoucher, à recommencer des textes... C’est un petit chemin de croix, mais quand on y arrive, on est content. Je ne relâche donc pas mes efforts ! Et peut-être que ça donnera quelque chose de bien à l’avenir.
Quel regard portes-tu sur cette année si particulière pour tous qui s’achève ? Est-ce qu’elle t’aura changé, toi, cette année 2020 ? Peut-être renforcé dans ta confiance en toi, et affiné tes perspectives d’avenir ?
Cette année 2020 a évidemment été bonne et même très bonne pour moi.
Déjà, financièrement parlant, avec l’argent que j’ai gagné de mes émissions d’avril et des Masters... Partir dans la vie, à 22 ans, avec plus de 300.000€ sur le compte en banque, c’est une très belle chance. Je pense acheter de l’immobilier, des maisons ou des appartements (j’ai déjà commencé à faire des visites), à les louer et à toucher les loyers. Je pourrais presque déjà en vivre. Être rentier, moi ça ne me dérangerait pas, de passer ma vie à lire des livres, à regarder des films et à me promener en forêt tout en touchant quasiment un salaire. Mais ça ne sera sans doute pas le cas, il faut de l’ambition, ou en tout cas d’exigence pour soi-même. Vouloir se réaliser en quelque chose, et ne pas vivre uniquement sur les fruits d’un travail passé (quelle que soit la taille des fruits).
Il y a aussi l’aspect fierté personnelle. Je sais que ça ne se voit pas beaucoup quand je passe à l’émission, mais je n’ai pas une grande confiance en moi. Sans trop rentrer dans des détails psy (je n’ai pas été maltraité par la vie, mes parents gagnent bien leur vie et j’ai toujours été chouchouté et protégé), disons que j’avais envie d’accomplir une grande chose. J’avais essayé de rentrer à Sciences Po après mon bac, j’avais fait une prépa pendant un an et n’avais pas été pris, ça avait été un assez gros choc parce que jusqu’alors je réussissais tout ce que j’entreprenais. Quand on est jeune, on côtoie d’autres jeunes qui semblent meilleurs que soi, avec plus d’argent, maîtrisant plus d’activités, avec davantage de projets et d’enthousiasme, un plus grand succès dans leurs relations sentimentales... Et parfois j’ai pu souffrir de cette comparaison avec d’autres, ayant un regard très sévère sur moi-même.
« J’ai souvent manqué de confiance en moi.
Ca va mieux, depuis l’émission... »
C’est sûr que, depuis le 1er avril 2020, date de ma première émission, ça va mieux, et j’en suis très heureux, parce que je sais que j’aurais été malheureux si j’avais perdu à ce moment-là. Comme un coup en plus, l’échec supplémentaire. Là ça va bien, et même très bien. J’ai un regard beaucoup plus bienveillant sur moi-même, quasiment un sentiment de plénitude parce que ça, ce défi, j’ai le sentiment de l’avoir réussi et même bien réussi. Je souhaite à n’importe qui de prouver ce qu’il peut donner après plusieurs années d’efforts acharnés (bon, ok, ça fait un peu protestant capitaliste, le rêve américain, mais ça reste vrai). Être récompensé des fruits de son travail, c’est juste merveilleux.
Est-ce que tu ambitionnes, ce serait en tout cas une des suites logiques de ton M2 en Histoire, d’enseigner l’histoire-géo, ou bien te verrais-tu davantage faire de la recherche historique ?
Comme j’ai pu te le dire, je suis en M2 Recherche en Histoire et je fais un mémoire sur un parti politique français. Ces études n’ont pas de débouché, à part enchaîner sur un doctorat, passer l’agrégation ou le Capes, mais ce n’est pas ce que je prévois de faire. Je ferai sans doute un autre master, plus professionnalisant. Je ne sais pas encore trop dans quoi, mais peut-être plus dans les sciences politiques au sens large. Et à voir, si je démarre bien dans une carrière musicale, je pourrais peut-être me contenter de cette carrière musicale. On verra bien. J’aurai en tout cas les revenus de mes loyers qui compléteront très avantageusement mes revenus musicaux, sachant que les revenus d’artistes sont souvent précaires.
L’année prochaine, je prendrai peut-être une année une année sabbatique pour réfléchir à ce que je veux faire, voyager un peu et mettre sur les rails mes investissements immobiliers.
Cette question, je la posais pas mal il y a quelques années, un peu moins maintenant mais je ne peux pas ne pas la poser à un étudiant en Histoire. Un savant un peu fou qu’on appellera Doc’ vient de mettre au point une machine à voyager dans le temps et l’espace. Tu as droit à un seul voyage, de 24h ou perpétuel si affinités. Où et quand irais-tu te promener ?
J’aimerais bien être transporté, toujours en France, mais en ces temps où la France était puissante et glorieuse. Le problème, c’est que ces époques ne coïncident que rarement avec des moments où il faisait bon vivre. Au temps de Louis XIV, la France était première en Europe mais il y avait beaucoup de guerres, les gens avaient faim et froid... Napoléon Ier, idem, la France dominait l’Europe entière et avait repoussé ses frontières, mais c’était la guerre tout le temps, on avait donc pas mal de chances de mourir sur un champ de bataille. Disons que la puissance et la gloire ne sont pas de tout repos.
Il y a eu des périodes où les dirigeants donnaient aux Français le sentiment qu’on était une grande puissance, tout en ménageant la paix et la prospérité. Je pense notamment au Second Empire, qui me fascine. J’aime ces temps où il y a un règne assez long, avec un homme à poigne (c’est mon côté bonapartiste), un Napoléon Ier, un Napoléon III ou un De Gaulle. La France a été rayonnante pendant le Second Empire, sur les plans culturel et économique. La France a peut-être été la première puissance économique mondiale à cette époque. Et elle ne remportait pas alors particulièrement de victoires militaires, mais au moins, il y avait la prospérité, avec un empereur qui a régné longtemps et avait une fibre sociale très prononcée. Sans doute croyait-il sincèrement en la démocratie, même si bien sûr il ne l’a pas vraiment appliquée.
« Pourquoi choisir ? J’aime Hervé Vilard,
et j’aime la bombe atomique ! »
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« J’ai une nostalgie pour les années De Gaulle,
Pompidou, début Giscard... La dernière période
où la France fut grande... »
Je pense aussi aux années De Gaulle et Pompidou, et au début des années Giscard. La dernière période où la France fut grande. Avant le déclin. Là, je livre totalement et sans fard le réac qui est en moi, je ne cherche même plus à le cacher (rires). De Gaulle, ce sont des institutions politiques fortes, avec un président fort qui fait finalement la synthèse entre notre histoire monarchique et nos institutions républicaines. Je pense que c’est à ce moment-là que la France a trouvé son équilibre. C’est aussi la période de la bombe atomique, et de la France puissance motrice de l’Europe. Il ne s’agissait pas vraiment du couple franco-allemand, mais plutôt du jockey français et du cheval allemand, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. C’est aussi l’époque où on avait 5% de croissance par an, où on voyait les ouvriers passer leurs vacances sur la Côte-d’Azur, où Hervé Vilard sortait son premier 45 tours, tout comme Sheila. L’époque où on pouvait être prof de lycée et avoir une maison de vacances en Savoie, un bateau à la Rochelle et un appartement dans le XVIè, et c’était normal !
Pompidou c’était pareil, il était sur la même lancée. J’ai une affection particulière pour lui.
Et avec tout ça, est-ce que tu te sens malgré tout bien dans tes baskets à notre époque ?
Je serais tenté de te dire que moi, mon époque fétiche, ce sont les années 70-80, en tout cas sur le plan musical. Je pense aussi à tout ce qui est vestimentaire, aux voitures, etc... Mais le problème c’est que, si je vivais à cette époque-là, je n’aimerais pas non plus mon époque, et je voudrais plutôt retourner dans les années 50. C’est sans fin, c’est mon dandysme inné qui fait que je me reconnais plutôt dans des temps qu’on considérerait aujourd’hui comme ringards. Me transporter dans une autre époque, ça ne suffirait pas. Donc finalement je ne suis pas si mal dans la mienne.
« Ce qui me gêne le plus aujourd’hui, c’est le poli-
tiquement correct, la bien-pensance ambiante... »
Ce qui me gêne le plus aujourd’hui, et là c’est encore un peu ma petite fibre de réac’ qui parle, c’est le politiquement correct, la bien-pensance ambiante qui fait qu’on ne peut plus dire grand chose, comme si la société n’était plus qu’une juxtaposition de communautés toutes plus fragiles, plus meurtries et plus nobles les unes que les autres, que ce soient les communautés ethniques, religieuses, sexuelles... Tout ce qui n’est pas mâle blanc, 40 ans, Français de souche, catho et hétéro... Comme si on était dans un univers de naphtaline, où tout le monde est ultra-susceptible, où tout le monde est en sucre en fait. C’est tout juste si on ose imiter Joe Dassin à la télé, parce que c’est méchant pour les gens qui louchent...
Bon, j’exagère peut-être un peu : je dois avoir l’honnêteté de reconnaître que dans mon quotidien, on est quand même libres. Je me plains pas, on n’est quand même pas en Union soviétique, ou en pleine Révolution culturelle. Mais quand même, on sent comme une lame de fond qui vient des États-Unis qui est de plus en plus présente, dans les médias, dans les universités, et chez les gens en général. De plus en plus d’écriture inclusive, de précautions sémantiques pour ne pas choquer tel ou tel segment de la population... Voilà ce qui me chagrine le plus dans notre époque. Mais à part ça, ça va !
Pour cette question, sans doute me diras-tu que tu prendras une troisième voie, qui sera la tienne, mais allez, pour le fun, à choisir, plutôt Arsène Lupin, ou Arsène Wenger ?
C’est rigolo parce que je pense vraiment que le prénom qu’on nous donne participe à nous forger une personnalité. Arsène, c’est un peu le nom du dandy gentleman et il paraît que ça me correspond assez bien. Comme par hasard, les deux autres Arsène que je connais, ceux que tu as cités, sont aussi des messieurs assez élégants. Je ne connais absolument rien au foot, mais Arsène Wenger est grand, élancé, fin et élégant, et on dit parfois que j’ai ces qualificatifs ! Arsène Lupin, évidemment, c’est le dandy gentleman par excellence. C’est aussi une étiquette à laquelle les gens m’associent assez bien. Je ne ferai donc pas de choix entre les deux. ;-)
Quelques mots pour nous donner envie, après le confinement bien sûr, de visiter ta ville de Rouen à l’occasion ? Parce que bosser dans le tourisme, ça peut très bien être une de tes perspectives d’avenir. ;-)
Je pense que Rouen est la plus belle ville du monde. Et non, je ne suis pas du tout partial en disant cela. (Rires) Bon, évidemment j’exagère...
J’aime vraiment beaucoup ma ville, depuis toujours, et je m’en rends compte de plus en plus. Je prends de plus en plus conscience de la beauté de cette ville, de ses atouts, de son caractère agréable. C’est une ville moyenne, assez normale de la grande banlieue de Paris, un peu comme Orléans, Troyes, Reims, Amiens, Tours ou Le Mans. Je pense que de toutes ces villes, Rouen est peut-être la plus indépendante, la moins « vassale » de Paris. C’est une ville portuaire et presque maritime, avec ses marées, ses mouettes, son port céréalier, un des premiers d’Europe...
Rouen est une ville plutôt grande mais qui a tous les avantages d’une ville moyenne à taille humaine. Son centre est très réduit, on peut aller d’un point à un autre à pied sans problème. C’est une ville médiévale, avec des rues à pans de bois qui font la notoriété de la ville. Elle a été en partie détruite durant la Seconde Guerre mondiale. Une partie, notamment sur les quais de Seine, est constituée d’îlots d’immeubles de trois ou quatre étages reconstruits de manière assez harmonieuse.
« Pour moi, la cathédrale de Rouen
est la plus belle du monde. »
Le clou de la ville, ça reste sa cathédrale, que j’adore. Pour moi, c’est la plus belle du monde. C’est la plus grande de France (151 mètres, par sa flèche). Elle a même été, pendant quelques années, le plus haut monument du monde – fait injustement oublié ! -, dépassée je crois dans les années 1880 par la cathédrale de Cologne. Elle est élancée, racée, élégante... un peu comme moi ! (Rires)
Rouen vaut le détour, vraiment !
La cathédrale de Rouen, par Arsène himself !
Un dernier mot ?
Je te remercie, parce que c’est rare qu’un site d’articles assez sérieux (sujets d’actu, culturels et historiques) s’intéresse à un candidat d’émission de divertissement. C’est une belle initiative qui va un peu à l’encontre du snobisme culturel. Ça montre ton ouverture d’esprit, ta curiosité, et j’ai apprécié cet échange.
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Nicolas Marié : "La politique mérite mieux que des réactions émotionnelles"
Dans la première saison des Hommes de l'ombre, la série de politique-fiction de France 2, Nicolas Marié incarnait Alain Marjorie, candidat socialiste à la présidence de la République. La seconde, dont la diffusion a débuté mercredi dernier, s'ouvre sur les scènes de liesse populaire d'une soirée de victoire - empruntées, pour l'anecdote, à celle de François Hollande en 2012. Dès la deuxième scène, on entre dans le vif du sujet. Un an après. Alain Marjorie est à l'Élysée. Et il va être confronté, bientôt, à de nombreuses, à de graves difficultés, tant aux plans politique que personnel.
Nicolas Marié est de ces acteurs dont le visage nous est familier, sans pour autant réussir toujours à lui associer un nom. J'espère que cet article contribuera à pallier cette lacune imméritée, tant l'acteur est talentueux et l'homme attachant. Il a répondu tout de suite à ma sollicitation : je tiens à le remercier pour la gentillesse dont il a fait preuve à mon égard. Il nous livre quelques confidences à propos du tournage des Hommes de l'ombre ; nous parle de son personnage, du regard - affûté - que lui-même porte sur le monde politique. Surtout, il évoque pour nous son métier, avec une passion communicative. Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche, alias Phil Defer. EXCLU
ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU
NICOLAS MARIÉ
« La politique mérite mieux
que des réactions émotionnelles »
(Source des illustrations : Les Hommes de l'ombre, France 2.
Sauf : photo n°3, tirée du site Cinéma Passion.)
Q. : 04/10/14 ; R. : 06/10/14
Paroles d'Actu : Bonjour, Nicolas Marié. Ce mercredi étaient diffusés sur France 2 les deux premiers épisodes de la deuxième saison de la série de politique-fiction Les Hommes de l'ombre. On ne se dit à aucun moment, à propos du personnage que vous y campez, le président de la République, Alain Marjorie, qu'il "sonne faux". Comment vous êtes-vous préparé pour cette interprétation ?
Nicolas Marié : Je n’ai pas eu de préparation particulière pour incarner ce Président. Il m’est arrivé dans ma vie de côtoyer assez fréquemment des hommes politiques. Ajoutez à cela le déferlement quotidien d’images sur le monde politique. Avec un texte bien écrit et suffisamment évocateur quant à l’autorité qui doit présider à ce type de rôle, il n’y avait plus qu’à se laisser porter par son instinct…
PdA : L'action se déroule un an après l'élection de votre personnage. L'état de grâce, s'il a existé, est derrière lui. Les difficultés s'accumulent. Sa majorité de coalition, précaire, vient de survivre à une motion de censure à l'issue incertaine. Surtout, deux affaires menacent de ruiner sa présidence : un scandale politico-financier et un faits-divers tragique ; la seconde ayant pour protagoniste principal son épouse (qu'interprète par Carole Bouquet) et pour dissimulateur en chef l'ex-ministre de l'Intérieur, éclaboussé par la première affaire et "démissionné" depuis.
« On ment pour protéger les siens et on ment ensuite parce qu’on a déjà menti ». Cette réplique qui fait mouche est lâchée par un Alain Marjorie manifestement désabusé. Un homme dont on ne doute pas, parce que ça se sent, qu'il est honnête et qu'il voulait faire de la politique "autrement". Cet état d'esprit s'accorde-t-il au vôtre lorsque vous considérez le monde politique ?
N.M. : Je crois qu’il y a un grand espace entre le mensonge et la trahison. On a le droit de mentir. Bien mentir est une qualité. Un bon acteur est un bon menteur. Il se sert de la couverture d’un personnage et d’un texte pour exprimer une vérité. Sa vérité. Alors le mensonge devient un outil de vérité.
Pour Marjorie, comme pour tout homme politique, le mensonge est aussi un outil. C’est un bon outil s’il est un outil nécessaire dans un objectif légitime. L’histoire regorge de mensonges d’hommes politiques ou de militaires et de stratèges (l’opération « Fortitude » aura été l’exemple même du mensonge salutaire…) qu’il ne viendrait à l’idée de personne de condamner dès lors qu’ils ont permis de gagner des guerres, de sauver des vies humaines. « Mensonge » ne veut pas forcément dire « malhonnêteté »… Ici, Marjorie prend simplement conscience des vraies difficultés de l’exercice du pouvoir. Comme il y a un grand espace entre « mensonge » et « trahison », il y a un grand espace entre « compromis » et « compromission »…
Pour ce qui me concerne, je ne me voyais pas aborder ce Président sans une haute idée de ce que doit être la politique et l’idée que s’en ferait mon Président… Je suis issue d’une famille de résistants de la 2nde Guerre mondiale qui ont été déportés en Allemagne et qui ont été sauvés grâce au courage et à la détermination de ces grands responsables politiques qui nous ont libérés de la bête immonde. Quelquefois grâce à des mensonges meurtriers, qui n’en étaient pas moins nécessaires… Je ne pouvais incarner un de ces responsables sans avoir chevillé au corps leur sens aigu du patriotisme. Cette réplique n’aura donc été que la traduction d’une interrogation légitime. Un instant d’intimité, de doute. Un constat qui ébranle mais ne remet pas en question l’objectif de grandeur.
PdA : La politique, c'est un engagement qui, dans une autre vie, aurait pu vous séduire, vous tenter... ?
N.M. : Ma réponse à la question précédente implique forcément une réponse affirmative à celle-ci. La désillusion, le désenchantement, le refuge vers les extrêmes, ne sont que réactions émotionnelles. La politique (avec un grand P) mérite mieux que cela.
PdA : Revenons à la série. Pour cette nouvelle question, c'est à une sorte de numéro d'équilibriste que j'ai envie de vous inviter. Je le disais, pour l'heure, deux épisodes sur six ont été diffusés. À la fin du deuxième épisode, le président Marjorie est pris d'un malaise dont on avait déjà pu percevoir, ici ou là, des signes avant-coureurs... Parlez-nous de la suite de l'intrigue, sans rien en révéler, évidemment ?
N.M. : Le Président, très malade, ne va pas mourir. L’exécutif va être confronté à une courte période de vacance du pouvoir, qui sera prétexte à montrer au public comment nos responsables gèrent ce type de situation extrême.
PdA : Que retiendrez-vous de cette expérience ? Quels souvenirs en garderez-vous ?
N.M. : Ces six épisodes ont été tournés en crossboarding. Ce qui signifie que, dès le premier jour, nous tournions des scènes du 6 avec des scènes du 3, du 5 et du 1. Le lendemain, des scènes du 2, du 4, du 3, du 1 et du 5… et ce pendant trente jours… C’est un exercice exaltant, mais qui demande beaucoup de travail et une grande rigueur. Il faut dès le premier jour de tournage avoir construit la ligne générale de son personnage et en fonction des péripéties auxquelles il est confronté, avoir ajusté très précisément son évolution au fil des scènes de chaque épisode. Et respecter bien entendu scrupuleusement cette évolution pendant le tournage de chaque scène de ce grand puzzle.
Carole Bouquet, Bruno Wolkovitch, Aure Atika, Philippe Magnan, Yves Pignot, Emmanuelle Bach, sont des camarades de jeu délicieux, et nous avons été encadrés par un réalisateur talentueux et imaginatif et une production exigeante et attentive. Quelles qu’aient donc été les difficultés de ce type d’exercice, j’en garde un excellent souvenir.
PdA : Quand on entreprend de regarder ce qu'a été votre parcours d'artiste jusqu'à présent, Nicolas Marié, on est impressionné, forcément. Vous êtes de ces visages, de ces voix que l'on a tous croisé au moins trois ou quatre fois, au détour d'un film, d'une série, sans forcément pouvoir mettre de nom dessus. Le nombre de pièces, de productions télé auxquelles vous avez participé force le respect. Vos voxo et filmographie noirciraient à elles seules pas mal de pages. S'agissant du cinéma, il conviendrait évidemment de citer 9 mois ferme, de votre ami Albert Dupontel, auquel on pourrait accoler 99 francs (J. Kounen), Micmacs à tire-larigot (J.-P. Jeunet), entre autres...
Quelles seraient, justement, sur l'ensemble des œuvres auxquelles vous avez collaboré, celles que vous aimeriez inviter nos lecteurs à découvrir ou redécouvrir, et pourquoi ?
N.M. : Comme une vie d’homme, la carrière d’un acteur est multiple. Je revendique cette multiplicité, elle m’a nourri au fil des années. Je l’ai encouragée, provoquée. Donc ce n’est pas une oeuvre en particulier que je mettrais en avant, mais la grande diversité des supports (théâtre, cinéma, télévision, radio, synchro..), des réalisateurs, des textes, qui a jalonné mon parcours.
PdA : Qu'est-ce qui vous rend fier, quand vous regardez dans le rétro et autour de vous ?
N.M. : Une vie d’adulte nourri d’abord par le bonheur d’aimer et d’être aimé.
PdA : Voulez-vous nous parler de vos projets ?
N.M. : Mon professeur d’art dramatique lorsque j’avais vingt ans disait toujours qu’on n’est pas sûr d’avoir le rôle tant que la dernière représentation n’est pas jouée… Les acteurs sont très superstitieux… Rares sont ceux qui dévoilent leurs projets… Je peux donc juste vous confier que mes projets sont multiples eux aussi… Dans les quatre mois qui viennent, il y a du théâtre, du cinéma, de la synchro et de la télé.
PdA : Des envies, des rêves, pour aujourd'hui ou demain ?
N.M. : Continuer de respirer à pleins poumons le grand air de la vie, en continuant de jouer avec le support du mensonge pour exprimer ma vérité…
PdA : « Au fond de moi, je n'ai pas le souvenir d'avoir voulu faire autre chose que comédien, c'est terrible ! D'une certaine manière, je n'avais pas d'autre choix ! (rires) J'ai toujours eu envie de faire ça. » Voici ce que vous déclariez lors d'une interview à Allociné, l'année dernière.
Quels conseils donneriez-vous à un(e) jeune qui se poserait aujourd'hui les mêmes questions que vous à l'époque, qui rêverait de devenir tragédien(ne) ou de jouer la comédie et, idéalement, d'en faire sa vie ?
N.M. : Un seul conseil : faire. Il n’y a que dans le « faire » qu’on apprend, crée, se grandit, vit. Faire. Faire. Faire. Un projet, aussi banal apparaît-il, sera plus fondateur pour un jeune acteur que tous les discours. S’il ressent donc l’appel de ce métier, qu’il embrasse avec avidité, avec gourmandise, tous les projets qu’il se soumet à lui-même, toutes les sollicitations qui se présentent à lui.
PdA : Un dernier mot ?
N.M. : Peter Brook termine un de ses livres (L’Espace vide) par : « Jouer sur une scène demande de gros efforts. Mais quand le travail est vécu comme un jeu, alors ce n’est plus du travail. Jouer est un jeu… ». Pour un acteur, la vie est un immense terrain de jeu. Vive la vie. Vive le jeu.
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Vous pouvez retrouver Nicolas Marié...
- Dans Les Hommes de l'ombre, série à retrouver sur France 2 et France2.fr
- En DVD, sur scène, au ciné, à la télé... Ouvrez l'oeil... et tendez l'oreille !
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Micheline Dax : "Profitez de la vie, sans remords... et sans vergogne !"
« Micheline est décédée tout à l'heure. C'est très étrange, car j'étais en train de récupérer des images de sa première apparition dans un film en 1948. On m'a appelé pour m'annoncer sa disparition alors que j'étais plongé dans mes "fouilles archéologiques", comme elle disait pour se moquer gentiment de moi. Je n'arrive pas à réaliser... » C'est par ces mots, par ce message qu'il m'a envoyé le 28 avril à 00h53 que l'ami Jean-Paul Delvor m'a appris la triste nouvelle. On la savait diminuée - elle venait de fêter ses 90 ans - mais on espérait qu'elle reprendrait le dessus, une fois de plus... Ce qu'elle laisse derrière elle est inestimable : des œuvres qui ont touché plusieurs générations d'un public qui lui est resté fidèle - en témoigne la déferlante d'hommages qui lui ont été rendus après l'annonce de son décès ; le respect et la reconnaissance que ses pairs du métiers réservent à l'une des leurs, une grande pro ; une belle famille, resserrée, élargie, une famille qu'elle aimait et qui n'a pas fini de l'aimer... Au revoir, Madame... et merci pour tout...
Le document qui suit nous laissera, forcément, un goût d'inachevé. Au début de l'année, j'avais proposé à Jean-Paul Delvor, qui gère avec amour et dévotion sa page officielle, de réaliser ensemble une seconde interview de Micheline Dax, un an après la première, qui fut publiée le jour de son 89ème anniversaire. Elle n'était plus au mieux, son moral était fluctuant : cette interview-là serait solaire... ou ne serait pas. J'ai demandé à Jean-Paul, qui a eu avec elle d'innombrables conversations, de me faire une liste de ces points de son parcours d'artiste dont elle parlait avec plaisir. Une fois la liste reçue, j'ai rédigé les questions, les ai envoyées à celui qui fut son partenaire dans Arsenic et vieilles dentelles. Il a pu lui en poser quelques unes au téléphone, pas forcément dans l'ordre. Ses dernières réponses, tantôt drôles, tantôt émouvantes, forcément précieuses, elle les a livrées autour du 3 mars, de son 90ème anniversaire. Pour le reste, Jean-Paul a pris le relais. Il a complété une bonne partie des "blancs" par l'évocation de ce que Micheline lui avait raconté, avant. Et invité quelques amis à participer, eux aussi, à cet article, à cet hommage à une dame de cœur. Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche, alias Phil Defer. EXCLU
ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU
MICHELINE DAX
« Profitez de la vie, sans remords...
et sans vergogne ! »
(Source des photos avec M. Dax : J.-P. Delvor)
Q. : 15/02/14 ; R. : jusqu'au 03/03/14 (?)
Paroles d'Actu : Bonjour, chère Micheline Dax... Je suis très heureux de vous retrouver, un an après la première, pour cette nouvelle interview réalisée pour Paroles d'Actu. Comment allez-vous ?
Micheline Dax :
Paroles d'Actu : Je tiens à remercier, à nouveau, et de tout cœur, notre ami Jean-Paul Delvor. Sans lui, aucun de nos entretiens n'aurait pu avoir lieu. Il est, grâce à la belle page qu'il gère avec passion sur Facebook, comme un trait d'union entre vous et vos nombreux admirateurs. Il était votre neveu dans la version d'Arsenic et vieilles dentelles que Thierry Harcourt avait mise en scène il y a quelques années. Comment votre relation, professionnelle, au départ, s'est-elle transformée en une amitié aussi fidèle ?
Jean-Paul Delvor : Le texte qui suit est la retranscription d'un extrait de conversation datant d'il y a plusieurs années. Ce soir-là, je l'avais accompagnée au théâtre. Un peu plus tard, au resto, elle s'est mise à parler de Facebook, de ses "fans". Peu après, j'ai pris quelques notes...
« Il fait partie de ma cour ! (rires) Je suis une personne assistée, tu comprends ? (rires) J'ai du bol, ce garçon me trimballait partout. J'ai de la chance, tu sais. C'est lui qui m'a fait mon site ! Sur Facebook (!?) J'ai jamais vu, moi... ! Je n'ai pas d'ordinateur, ni d'internet, j'm'en fous... Mais les messages que je reçois ! ... Il m'en lit de temps en temps. C'est irrésistible ! Et des gens jeunes ! "Madame, je vous aime depuis que je suis tout petit", "Vous êtes un monument"... non mais, tu comprends, c'est irrésistible ! ... Parce qu'avant ce... cette... chose... moi, j'savais pas qu'il y avait des jeunes qui me connaissaient encore ! ... Tu vois c'que j'veux dire ? ... »
(Photo : J.-P. Delvor, Arsenic et vieilles dentelles, 2006)
Paroles d'Actu : J'aimerais, à l'occasion de cette interview, vous inviter à évoquer ensemble quelques dates-clés, quelques moments qui ont jalonné votre incroyable parcours... Quelques uns, évidemment, pas tous, il y en a tellement... Tout à l'heure, il y aura non pas une, mais deux surprises...
Micheline Dax : Ah, chic alors ! (Rires)
Paroles d'Actu : Nous sommes en 1954. Vous êtes sur les planches du théâtre Édouard VII pour Souviens-toi mon amour, une pièce écrite par André Birabeau et mise en scène par Pierre Dux...
Jean-Paul Delvor : Micheline m'avait demandé d'en rechercher le texte, elle souhaitait le relire, car elle avait gardé un excellent souvenir de la pièce - une très bonne pièce, selon elle - et de sa distribution - elle était très amie avec l'une de ses co-actrices. Je ne l'ai jamais trouvé...
Paroles d'Actu : En 1957, vous êtes à l'affiche de Ce joli monde, film réalisé par Carlos Rim. Darry Cowl est également de la partie...
Jean-Paul Delvor : Elle aimait me parler de Darry Cowl. Elle disait qu'il était complètement fou, délirant, insolite... Une fois, après une journée de tournage de ce film, il l'a raccompagnée chez elle. Il a fait dix fois le tour du rond-point des Champs-Élysées en lui parlant et en lui faisant la cour. Il lui racontait des blagues, des choses absurdes... Elle était écroulée de rire... Il était très adroit, au billard et au lancer de fléchettes. Micheline l'imitait très bien, la cigarette aux lèvres et, remettant ses lunettes, en train de viser une cible avec une fléchette.
Paroles d'Actu : Deux ans plus tard, en 1959, vous jouez dans Messieurs les ronds-de-cuir, d'Henri Diamant-Berger. À vos côtés, on trouve Noël-Noël, Michel Serrault, Pierre Brasseur et Jean Poiret. Je crois que vous avez une anecdote à nous raconter à propos de ce film...
Jean-Paul Delvor : Il faut savoir que Pierre Brasseur, disons... n'était pas insensible aux charmes féminins (si j'arrêtais de mettre des gants, je dirais : un "chaud lapin"). Clairement, Micheline ne le laissait pas indifférent... Un jour, Jean Poiret lui a fait une blague. Micheline était en train de se changer dans sa loge. Poiret a conduit Brasseur jusqu'à sa porte. Il la lui a ouverte. Brasseur a poussé un "Oh ! Micheline !" de surprise et de concupiscence... Et il l'a poursuivie sur le plateau pendant de longues minutes. Elle riait beaucoup quand elle me racontait ça... même si elle en a voulu à Poiret pour cette "vacherie".
Paroles d'Actu : Un peu de temps s'écoule... On est en 1967. La Vie parisienne, d'Offenbach est interprété par la compagnie Renaud-Barrault. Jean-Louis Barrault est aux commandes...
Jean-Paul Delvor : Je n'ai pu lui poser cette question, mais ce que je sais, c'est que Micheline était très fière d'avoir fait ça. Elle adorait les costumes, elle disait que c'était somptueux (elle prononçait "sompetueux", en accentuant le "p")... Elle était très admirative du couple que formaient Simone Valère et Jean Desailly, et de leur jeu...
Paroles d'Actu : La même année, vous êtes la voix du personnage éponyme de Titus, le petit lion, une série télévisée d'animation pour laquelle vous avez gardé une grande tendresse...
Micheline Dax : Ah oui alors ! J'ai fait ça avec Bodoin, qui faisait le Grand Yaka au pays de Jaimadire... (rires) C'était drôle, naïf et poétique. Je faisais la voix de Titus, et aussi de Bérénice, qui était une petite souris... et y'avait Carel, qui faisait un pingouin et un pélican ! (rires)
Paroles d'Actu : Le Francophonissime, jeu télévisé créé par Jacques Antoine et Jacques Solness, apparaît sur les écrans à la fin des années 60...
Jean-Paul Delvor : Elle en a déjà parlé dans quelques interviews. Elle aimait beaucoup cette émission, surtout la première version, avec Georges de Caunes. Et elle avait beaucoup d'admiration et d'amitié pour Jean Valton et Michel Deneriaz, dont elle parlait toujours avec tendresse.
Paroles d'Actu : Entre 1978 et 1983, vous participez aux Bubblies et jouez des rôles, disons... assez improbables. Y compris, si je ne me trompe pas... un hachis parmentier ?
Micheline Dax : C'était un truc anglais d'une connerie ! Je faisais Madame Poubelle (rires) et Gwendoline, une jeune blonde qui changeait d'apparence. Et un jour, je dois dire : "Eh bien mes amis, aujourd'hui, je serai un hachis parmentier" ! (avec la voix de Gwendoline, ndlr) Va faire le bruitage d'un hachis parmentier, toi ! (rires) Alors, j'ai fait prrrrrrr... (bruit d'une chose molle, qui s'écrase, comme une bouse, ndlr)
Paroles d'Actu : Au milieu des années 80, vous êtes de l'aventure N'écoutez pas, mesdames !, de Guitry, mise en scène par Pierre Mondy. Une expérience qui vous a laissé, je crois, un très bon souvenir...
Micheline Dax : Ah, ça, mon p'tit garçon, Guitry, c'est un tel bonheur à jouer... Qu'est-ce que tu veux, c'est tellement drôle ! et intelligent ! et c'est d'une cruauté... Et ce rôle (Valentine, ndlr), c'était pile le genre de personnage que j'avais envie de jouer à ce moment-là... Et jouer avec Pierre Dux, c'était divin ! Et je me suis beaucoup amusée, ensuite, en tournée, avec Paturel !
Paroles d'Actu : En 2004, Stephan Meldegg reprend pour le théâtre Saint-Georges Miss Daisy et son chauffeur, d'Alfred Uhry...
Ndlr : Pour évoquer cette pièce, Jean-Paul Delvor a eu l'excellente idée d'inviter M. Jean-Loup Horwitz, qui en partagea l'affiche avec Micheline Dax, à évoquer pour Paroles d'Actu cette aventure commune... (03/05/14)
Jean-Loup Horwitz : Miss Daisy et son chauffeur... Que de souvenirs. Que de rires avec Micheline, Jean-Michel Martial, le chauffeur, et moi dans le rôle du fils, Boolie ! Quel bonheur aussi de travailler avec Stephan Meldegg... C'était la première fois que Micheline et Stephan travaillaient ensemble. Il faut dire que c'étaient deux mondes différents. Quand nous avons commencé à répéter, Micheline connaissait toute la pièce par cœur, comme à son habitude. Jean-Michel et moi, pas un mot. Petit à petit le texte entrait, encore incertain. Et quand l'un de nous se trompait, Micheline tapait du pied... Ça énervait tout le monde, et surtout, cela déconcentrait Jean-Michel... Alors, ce qui devait arriver arriva : Jean-Michel s'arrête et demande à Micheline de cesser, soutenu par le metteur en scène. Micheline, renfrognée, se fait violence, et pendant quelques temps, le travail reprend... Au fil des jours, avec le travail sensible et exceptionnel de Meldegg, nous avions et le texte et l'émotion des personnages. Et là, à notre grand étonnement, c'est Micheline qui se trompait ! Il a fallu qu'elle reconstruise son personnage selon les consignes de Stéphan pour devenir l'exceptionnelle Miss Daisy quelle fut. C'était l'affrontement de deux techniques... Micheline jouait en musicienne qu'elle était. Meldegg travaillait sur l'âme des personnages. Miss Daisy, c'est aussi le début d'un changement radical : Stephan Meldegg s'est battu pour que Micheline porte une perruque blanche... Elle a trouvé que ça lui allait bien et a abandonné sa couleur noire.
Je parlerai aussi des 80 ans de Micheline. Micheline m'avait fait promettre de ne rien faire... Mais sa fille Véronique, avait convoqué au Théâtre Saint-Georges les vieux complices de sa mère... Et au dernier rappel, ce fut une avalanche de personnalités ! Micheline troublée, avait quand même trouvé le mot - « Revenez dans vingt ans ! » - pour faire rire la salle. Pour ses 81 ans, nous étions en tournée à Metz. Au dernier rideau, l'immense salle, prévenue par les ouvreuses avant le début du spectacle, s'est mise à chanter Joyeux anniversaire ! tandis que du fond de scène roulait un immense gâteau lumineux fabriqué par les machinistes du théâtre ! Quelle émotion !
Je finirai par un petit secret... Nous avions un rituel, Micheline et moi. Avant le lever de rideau, Micheline avait toujours les mains gelées par le trac. Et comme j'ai toujours les mains chaudes, Micheline tendait vers moi ses deux mains et nous restions là, tous les deux, écoutant le merveilleux bruit de la salle avant l'ouverture du rideau... En jouant Boolie, je suis devenu le presque fils de Micheline... et quand elle m'envoyait un mot, Micheline signait : "Ta presque mère" ! C'est dire le lien qui nous unissait et la tristesse qui est la mienne aujourd'hui... (05/05/14)
(Photo : agent)
Paroles d'Actu : Dans la deuxième moitié des années 2000, vous interprétez, avec d'autres femmes, les fameux Monologues du vagin. Il y en a une qui a accepté, à ma demande, de me parler de vous... Et, au travers de ce témoignage, de vous transmettre toute son affection... Voici ce que m'a dit Marie-Paule Belle...
« Dites-lui que j'ai sur mon bureau la photo de Sara Giraudeau, elle et moi prises devant le miroir de sa loge quand nous jouions Les Monologues du vagin au Théâtre de Paris !
Le 3 mars, c'est son anniversaire, et je me souviens que nous l'avions fêté au Bistro des deux théâtres, où elle avait sa table ! Nous avons souvent dîné ensemble : elle me racontait sa vie, des anecdotes sur Piaf, et d'autres... Nous avons partagé beaucoup d'émotions... et de fous rires ! Et de trac, aussi. Par exemple, à l'Olympia, pour le concert de William Sheller : elle sifflait magnifiquement un Aria écrit pour elle par William et je chantais seule au piano une très belle chanson que William m'avait écrite, L'Homme que je n'aime plus... Elle voulait s'en aller avant d'entrer en scène, tellement elle avait peur ! On se tenait la main, on s'encourageait...
Je vis maintenant dans le sud , au soleil. Elle me manque et je l'embrasse bien fort, comme ces souvenirs... »
Ndlr : Message lu par Jean-Paul Delvor à Micheline Dax le 3 mars 2014, jour de son anniversaire...
Micheline Dax : Oh que c'est gentil ! Elle m'a appelée tout à l'heure ! C'est vrai, je suis partie... On m'a rattrapée ! (rires) Elle est tellement gentille avec moi... Dis-lui que je l'embrasse fort fort fort !
(Photo : collection personnelle M.-P. Belle)
Paroles d'Actu : La seconde surprise, c'est un autre message qu'un grand nom du théâtre, qui a pour vous une grande tendresse, a tenu à vous adresser... C'est Monsieur Jean-Claude Dreyfus.
« Pour la divine Micheline : Nous qui avons partagé durant des années le même quartier, celui des Batignolles, ainsi que le même parking de l'Europe, où nous nous sommes retrouvés soudain en fourrière - celles du beauf de Tonton, face au Paris Rome. Je pense à son patron, retrouvé découpé en morceaux dans une valise au bois de Boulogne et qui, de son vivant, me harcelait pour que j'écoute des musiques militaires sorties du juke-box... Oh... comme j'aurais aimé prendre une boisson à vos côtés, et que vous me siffliez « Les feuilles mortes se ramassent à la pelle... » en sirotant un Fernet-Branca... Bref, je vous adore et vous embrasse tendrement... et amitieusement ! JcD » (02/03/14)
Micheline Dax : (Rires) C'est très gentil... Merci beaucoup...
Paroles d'Actu : Je crois savoir que vous n'avez rien perdu de votre amour du cinéma... Quels sont vos films préférés ?
Micheline Dax : Ah... J'ai une passion pour L'Aventure de Mme Muir, (J. Mankiewicz, 1947, ndlr) avec Rex Harrison et Gene Tierney - elle est d'une beauté... J'en pleure à chaque fois. Je l'ai vu un nombre incalculable de fois, tout comme Le Plaisir d'Ophüls (1952, ndlr), qui est un chef d'oeuvre... Gabin et Darrieux, magnifiques ! La scène où Gabin fait la cour à Darrieux... (rires) c'est un régal, une merveille ! ça repasse de temps en temps sur le câble, je n'en rate jamais une miette !
(...) Madame Bovary (V. Minnelli, 1949, ndlr), avec Jennifer Jones, qui était d'une beauté insolente ! Ah, la garce ! (rires) le moment où elle se voit dans le grand miroir... et la scène du bal, avec Jourdan ! (...) Le Père tranquille (R. Clément, 1946, ndlr), avec Noël-Noël ! (...) et tous les Guitry ! tous sans exception...
Jean-Paul Delvor : Micheline m'a aussi fait découvrir un film qu'elle adorait et que je lui avais retrouvé en VHS. Elle en connaissait les dialogues absolument par cœur. Elle gloussait de rire et de plaisir quand on évoquait certaines scènes. Elle connaissait aussi le nom de tous les interprètes : Elvire Popesco, Victor Boucher, - qu'elle adorait comme acteur et dont elle me parlait souvent - André Lefaur, Blier dans un tout petit rôle ! Ça s'appelle L'habit vert (R. Richebé, 1937, ndlr), une pépite...
Paroles d'Actu : Vous êtes devenue Commandeur des Arts et des Lettres en 2006, Chevalier de la Légion d'Honneur en 2012. Que vous inspirent-elles, ces distinctions ?
Jean-Paul Delvor : Un matin, Micheline, très remontée, me laisse un message sur mon répondeur :
« Bonjour mon p'tit coco, c'est Micheline... On vient de me laisser un message pour me dire que j'ai été "nommée" Chevalier de la Légion d'Honneur... mais c'est pas possible, il faut la demander ! et moi, j'ai rien demandé ! on me l'aurait proposé, je l'aurais refusé... oh, tu sais alors ! qu'est-ce que c'est que cette histoire ?! Si tu pouvais faire une enquête, ça m'arrangerait. Tu me tiens au courant, tu seras gentil... C'était aujourd'hui, ou hier soir, je ne sais pas, enfin, je suis nommée aujourd'hui... non mais quelle connerie... ! (rires) Je t'embrasse, mon garçon... »
Paroles d'Actu : Quel message souhaiteriez-vous adresser à nos lecteurs, notamment celles et ceux qui comptent parmi vos fidèles et seront heureux d'avoir de vos nouvelles, de lire vos mots ?
Micheline Dax : Je suis bienheureuse de savoir que l'on ne m'oublie pas, et je vous embrasse tous très fort...
Paroles d'Actu : Que peut-on vous souhaiter, chère Micheline ?
Micheline Dax :
Paroles d'Actu : Aimeriez-vous ajouter quelque chose avant de conclure cet entretien ?
Micheline Dax : Profitez de la vie, sans remords... et sans vergogne !
Quelques lignes...
Claire Nadeau
(Photo : agent)
(...) Bien que j'aie rencontré Micheline très tard, à l'occasion des Monologues du Vagin que nous avons joués ensemble plusieurs mois, elle a tout de suite pris une grande place , et je l'ai tout de suite aimée. Micheline et ses indignations légendaires ! Quand je la retrouvais en arrivant au théâtre, elle m'accueillait souvent par un : "Non mais, tu as vu ça, ce pauvre gosse, ce que les gens peuvent être salauds !" en référence à un quelconque fait divers (et il y en avait beaucoup). Pour la taquiner, je lui répondais : "Ah bon, tu connaissais le gamin ?", ce qui avait le don de la faire redoubler de fureur, contre les "salauds", contre moi qui ne compatissais pas autant qu'elle aurait voulu, et puis, très vite on se racontait des histoires joyeuses, et sa bonne humeur revenait, et elle descendait sur le plateau comme une jeune fille, pleine d'entrain et jubilant de jouer ces Monologues. Et, bien souvent, la soirée se poursuivait au restaurant, avec toujours une petite coupe de champagne : "Ça fait un bien fou, tu ne trouves pas ?".
Micheline qui n'aimait pas aller se coucher, qui aimait tant la vie tout en râlant contre les uns, les autres, les cons et les salauds, Micheline que je chérissais tendrement, et qui me manque... Merci à vous de perpétuer son souvenir.
Bien amicalement,
Claire Nadeau. (12/07/14)
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Et vous, quels souvenirs garderez-vous de Micheline Dax ?
Quelques liens...
- La page officielle de Micheline Dax, sur Facebook.
- L'interview Paroles d'Actu de mars 2013.
- Suivez Paroles d'Actu via Facebook et Twitter... MERCI !
13/07/14
Nathalie André : "Je me battrai toujours pour les nouveaux talents"
Elle est l'une des personnalités les plus influentes, mais aussi les plus exposées du paysage médiatique français. Son job ? La tête du département Jeux et Divertissements de France 2. La chaîne, qui a depuis peu un nouveau patron, Thierry Thuillier, doit actuellement faire face, comme ses soeurs de l'audiovisuel public, à d'importantes restrictions budgétaires. Tant bien que mal...
Nathalie André a bien voulu répondre à mon invitation. Elle évoque pour Paroles d'Actu sa conception du service public, son travail et ses coups de cœur, ses fiertés et ses regrets, ses difficultés et ses projets... Je tiens à la remercier. Pour la bienveillance avec laquelle elle a considéré ma démarche. Pour ses réponses, empreintes de sincérité. Un entretien confession. Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche, alias Phil Defer. EXCLU
ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU
NATHALIE ANDRÉ
Directrice des Jeux et Divertissements de France 2
« Je me battrai toujours
pour les nouveaux talents »
(Source de la photo : Nathalie André)
Q : 02/05/13
R : 02/11/13
Paroles d'Actu : Bonjour Nathalie André. Les budgets sont serrés, pour ne pas dire tendus, en ce moment à France Télévisions. Comment cette situation impacte-t-elle le département des Divertissements et des Jeux de France 2 ?
Nathalie André : Les budgets sont serrés, comme partout, en ce moment, et tous les animateurs, les producteurs, les techniciens font des efforts pour réussir à proposer de beaux programmes. Nous essayons de faire en sorte que le téléspectateur qui regarde France 2 ne ressente pas ces baisses de budgets. Nous proposons des prime de qualité, mais avec nos moyens !
Certes, nous n'avons pas les budgets du privé, ni la possibilité de faire des campagnes de publicité pour annoncer nos programmes, mais nous gardons le plaisir de faire ce métier, avec moins d'argent, et nous essayons de le faire partager.
PdA : Parlez-nous de votre job, de vos activités au quotidien. En quoi votre mission consiste-t-elle exactement ?
N.A. : Ma mission est de choisir les futurs programmes de jeux et divertissements qui seront mis à l'antenne, et de suivre avec mon équipe ceux qui existent déjà. Concernant les jeux, je m'appuie sur Corinne Fix, responsable des jeux depuis sept ans à la chaîne.
Je suis une passionnée qui essaie de travailler avec tout le monde de la même façon, dans la confiance. Je m'implique énormément dans les émissions dont j'ai la responsabilité. Lorsque je travaille avec des producteurs comme Michel Drucker ou Patrick Sébastien, je suis surtout un relais, l'oreille et la vision de la chaîne pour eux.
Je suis présente sur tous les enregistrements dont j'ai la responsabilité, par respect pour l'animateur et pour les producteurs. Je suis donc souvent entre les plateaux de télé, à Bry-sur-Marne, à la Plaine Saint-Denis... Un exemple : tous les jeudis soir, je suis au Moulin Rouge, et j'assiste à l'enregistrement de l'émission On n'est pas couché. Cela me permet de voir Laurent Ruquier, de partager des idées avec Catherine Barma, la productrice du programme.
Ma journée commence vers 10h, car je suis souvent très tard, la veille au soir, en plateau, sur un enregistrement ou le spectacle d'un artiste qui sera prochainement reçu dans une émission. Je passe beaucoup de temps en réunion avec mon patron, Thierry Thuillier (le nouveau directeur de France 2, ndlr), avec mes équipes, à échanger, partager des idées, proposer des projets ou réfléchir à l'avenir de mon unité de programmes, vérifier l'habillage des émissions, la musique des génériques, valider une liste d'invités ou le conducteur d'une émission que je prépare avec une production... Je consacre également beaucoup de temps aux rendez-vous avec tous les producteurs qui viennent me proposer de nouveaux concepts.
PdA : Est-il difficile de diriger des arbitrages lorsque l'on a face à soi d'influents producteurs, des poids lourds de la chaîne tels que Michel Drucker, Patrick Sébastien, Nagui, Laurent Ruquier... ? Qu'est-ce qui vous guide dans vos choix ?
N.A. : Mes choix sont d'abord guidés par le respect des téléspectateurs fidèles à France 2.
Les arbitrages sont parfois difficiles, mais tout est question de respect. Et puis, pour 80% d'entre eux, nous nous connaissions déjà, nous avions déjà travaillé ensemble, ou je les avais déjà invités sur les plateaux des émissions dont je m'occupais quand j'avais ma société (Nathalie André Organisation, ndlr). Comme Patrick Sebastien, que je connais depuis 1989. Il était animateur à RMC et, à l'époque, je dirigeais la programmation musicale de la station. J'ai ensuite programmé ses émissions avec ma société NAO, avant d'arriver à France 2.
Je respecte le professionnalisme, la carrière de mes animateurs, et leur longévité sur la chaîne. Ils me respectent aussi, je pense, et je crois que nous parlons le même langage, que nous cherchons à aller dans la même direction, à faire de belles émissions, qui marchent et qui plairont à nos téléspectateurs. Trente ans de métier, cela permet aussi de pouvoir donner un avis, faire une remarque, proposer une modification sur un programme, d'échanger entre professionnels. J'aime que cela se passe avec humour et dans l'échange, je ne sais pas tout, loin de là, mais je sais ce que je veux ! (sourire)
PdA : Je me fais, l'espace d'un instant, le messager d'une question que se posent nombre de nos compatriotes. Tous ne sont pas de bonne foi en la formulant, j'en conviens volontiers, mais après tout, elle n'est pas illégitime, France Télévisions étant d'abord financée par le contribuable. Que souhaiteriez-vous répondre, donc, à quelqu'un qui prétendrait ne pas voir de différence notable entre la programmation de France 2 et celles de chaînes privées comme TF1 ou M6 ? À cette même personne qui, forcément, ne comprendrait pas pourquoi elle doit payer une redevance d'un côté, alors qu'on lui "offre" des programmes de l'autre ?
N.A. : Je répondrais qu'il y a une grande différence entre le privé et le public, entre une chaîne privée coupée par des écrans publicitaires et un programme du service public qui se regarde de A à Z sans coupure. Je répondrais que, sur le service public, on peut découvrir de nouveaux talents qui seront ceux de demain, s'instruire, apprendre en s'amusant, passer d'un documentaire à une émission d'humour, d'un grand reportage à un magazine culturel, d'une grande émission de variétés à un concert de classique, voir une pièce de théâtre, un concert de rock en deuxième partie de soirée... tout ce que le privé ne propose pas forcément. Et que, lorsque France 2 offre aux téléspectateurs (unité Spectacles vivants) le grand concert classique à la Tour Eiffel, on ne pense pas à l'audience, mais au plaisir de mettre du classique en prime time. Le choix est très large sur le service public.
PdA : Lors d'une interview, réalisée il y a quelques mois, vous faisiez ce constat : aujourd'hui, « on a peur de tout », on n'ose plus. C'est souvent vrai en matière d'humour, de "chance aux talents", de diversité en général... Sur France 2, il y a On ne demande qu'à en rire et quelques vitrines positionnées hors des chantiers battus. Vous aimeriez aller plus loin, vous êtes en position de le faire... comment comptez-vous vous y prendre ?
N.A. : J'ai toujours aimé "lancer" de nouveaux talents, et je serais très malheureuse si je ne pouvais plus me battre pour un jeune humoriste auquel je crois, une chanson que je pense être un tube, un artiste auquel je crois, un concept fort... Je continuerai toujours à me battre pour ça. Pour ce faire, j'agirai comme j'ai toujours agi : je défendrai mes convictions, je chercherai à convaincre, à faire en sorte de travailler en équipe pour impliquer les différents intervenants de la chaîne, les bandes-annonces, l'info, le responsable des réseaux sociaux, bref, de travailler tous ensemble pour essayer de faire un succès.
Aujourd'hui, personne ne travaille seul. Nous partageons des idées, et c'est pour cela peut être que nous sommes plus frileux, car, à trop demander l'avis des uns et des autres, il y a toujours, à la fin, une personne pour vous décourager ou vous faire douter. Mais mon metier, c’est aussi de convaincre et de ne pas avoir peur de l’échec. Parfois on gagne, parfois on perd, c’est ainsi. Mais on se relève et on recommence, en essayant de corriger ses erreurs.
PdA : France 2 ouvre régulièrement son antenne à des spectacles vivants de qualité, diffusés en direct. Je pense à l'opéra, au théâtre... Des programmations qui peinent pourtant à séduire le grand public, qui n'y va pas spontanément. Votre Troupe d'un soir, pourtant destinée à faire découvrir le théâtre, à le rendre plus accessible, n'a pas été un grand succès. Des artistes comme Bruno Solo se sont exprimés à ce sujet. En substance : le public ne viendra pas en masse sur un tel programme, de toute façon, donc pourquoi essayer à tout prix de l'y attirer avec un show où tout va trop vite ? Si la qualité est là, les fidèles répondront présents, et quelques curieux seront comblés par la pièce, par cette expérience nouvelle. Et viendront grossir les rangs des fidèles, pour la prochaine fois. Quel est l'avenir du spectacle vivant sur France 2 ?
N.A. : Je ne peux pas répondre à cette question, il y a un directeur de l'unité Spectacles vivants, Monsieur Nicolas Auboyneau, qui propose de beaux programmes de théâtre, de classique... Ce serait à lui de vous répondre.
PdA : En filigrane, finalement, une question : quel "service au public" une chaîne comme France 2 se doit-elle de proposer ? Quelle en est votre conception ?
N.A. : La découverte, toujours. Laisser la place à la diversité, à la tolérance, au partage et à la connaissance. Et ne pas oublier de rire, de s'amuser, de chanter et de divertir.
PdA : Une Nabilla qui réussit à faire un buzz monstre - un programme culturel n'en connaîtra pas le dixième - dans les médias et la société pour des propos consternants tenus dans une émission consternante, ça vous inspire quoi ?
N.A. : Ce n'est pas du tout ma "came". Je ne ferais jamais ce type de programmes, même si je respecte les producteurs qui ont trouvé ce "filon". Ce n'est pas ma conception de la télévision, ni ce que j'aimerais proposer aux téléspectateurs de France 2.
PdA : Je considère comme acquis que vous êtes, évidemment, cliente de l'ensemble des jeux et divertissements de France 2. Quels sont, sur les autres chaînes, notamment étrangères, les programmes qui vous plaisent ? Ceux pour lesquels vous pouvez vous dire, parfois, « Tiens, l'idée n'est pas mal. On aurait pu - on pourrait - le faire sur France 2 ! » ?
N.A. : Beaucoup de programmes me séduisent ailleurs. L'amour est dans le pré (M6) aurait pu être sur France 2. C'est facile de dire ça maintenant que c'est un succès, mais cette émission nous fait découvrir le dur travail des agriculteurs et leur solitude, sans pour autant être vulgaire. Même si, sur le service public, je l'aurais peut-être fait d'une autre façon, c'est un beau programme, très humain. Ce programme démontre que l'on peut parler d'amour autrement qu'en regardant un documentaire, un film ou une télé-réalité vulgaire. Mais, si on me l'avait proposé, aurais-je osé le produire sur France 2... ? Je n'en suis pas sûre !
The Voice (TF1) est un programme magnifique, car il permet à des personnes de toutes nationalités, tous styles confondus, d'avoir leur chance. C'est un programme qui aurait pu être sur le service public car il n'y a, dans ce programme, aucune humiliation.
J'aurais adoré faire Un trésor dans votre maison (M6), qui raconte aussi l'histoire du passé, des objets, de la peinture. Clique, sur Canal +, même si le public visé est un peu différent de celui qui regarde France 2. Touche pas à mon poste, sur D8. Et toutes les émissions de Cyril Lignac. Je me souviens d'un programme passionnant qu'il avait fait sur les cantines des écoles, Vive la cantine !, je crois. Ce programme aurait pu être sur France 2.
Danse avec les stars pourrait être aussi sur France 2, d'une façon différente, mais ce programme est très bien fait. Chez moi, il y aurait eu plus d'histoire de la danse, des titres différents sur les danses, un rappel de la mémoire collective, peut-être, et certainement moins de lumières, pour des raisons de budget. (rires)
Il y a un programme que j'aime énormément, à l'étranger, il s'appelle Dragon's Den. Il mélange Incroyable talent et le monde des affaires. Comment aider de jeunes entrepreneurs à développer leur projet, leurs idées... Ils se retrouvent face à quatre grands patrons d'industrie qui vont décider de "miser" sur leur idée et les aider à la réaliser financièrement.
Il y en a tellement, des programmes que j'aime ! Mais l'émission que j'aurais adoré produire restera Mon zénith à moi, que présentait Michel Denisot sur Canal +. Elle reste mon émission préférée. Je pense aussi à Lunettes noires pour nuit blanches, de Thierry Ardisson et Catherine Barma. C'étaient encore des années où l'on pouvait tout dire, rire de tout à la télé, sans que, la minute d'après, une petite phrase, une attitude fasse un "mini scandale" sur Twitter. J'ai beaucoup d'admiration pour Thierry Ardisson, que je considère comme un talent à part.
Je voudrais également citer Les enfants de la télé d'Arthur, pour son originalité et la belle humeur de ce prime.
PdA : Quel bilan, quelles leçons tirez-vous de vos presque deux premières années et demie à la tête des divertissements et des jeux de France 2 ?
N.A. : Bientôt trois ans maintenant, en décembre. Beaucoup de choses. La première : prendre son temps pour développer un projet avant de le mettre à l'antenne. Ne pas penser "perso", mais se mettre à la place des téléspectateurs. Ne pas vouloir faire du M6 ou du TF1, le service public ne peut pas faire tous les types de programmes.
Quand je fais, par exemple, Qui sera le prochain grand pâtissier ?, avant de penser au concours, je préfère penser à mettre en valeur un métier, un talent, à traverser la France à la rencontre des grands pâtissiers français, à faire découvrir le travail de ces artisans, bien avant de penser à qui va remporter l'épreuve. Lorsque je fais Hier encore avec Charles Aznavour, je pense surtout à faire partager, grâce à Charles, les belles histoires des chansons de notre patrimoine. Et quand je fais Le Grand Show, je me régale avec ce grand divertissement, avec lequel nous faisons revenir la variété et dans lequel les artistes peuvent chanter leurs derniers titres.
PdA : De quoi êtes-vous fière, quand vous regardez le travail accompli depuis 2011 ?
N.A. : Du travail fait depuis que j'ai compris tout cela. De mon équipe. Des belles émissions que j'ai créées avec Morgane Production et Stephane Bern : Le village préféré des Français, Le jardin préféré des Français... D'avoir installé de nouveaux programmes et de remettre la variété en prime, comme avec Le Grand Show de Patrick Bruel, Le Grand Show de Laurent Gerra ou celui de Céline Dion. Tellement de choses au quotidien... de moments passionnants, que je ne pourrais tous les lister.
Je suis fière de travailler avec tous ces animateurs et producteurs que je respecte, comme Michel Drucker, avec lequel j'ai travaillé durant six ans, dans une ambiance délicieuse, et que je retrouve... De travailler aux côtés de "l'artiste", car il est artiste avant d'être animateur : Patrick Sébastien. Il a une approche très populaire de la télévision, et j'aime ces émissions populaires.
Je suis heureuse de passer du temps à faire de beaux programmes avec Stephane Bern, son humour, son érudition et sa gentillesse. De m'occuper des émissions de Laurent Ruquier et de pouvoir travailler et apprendre aux côtés de Catherine Barma qui, pour moi, est une des grandes productrices de télé.
PdA : D'autres belles rencontres ?
N.A. : François Goetghebeur, grand réalisateur, que j'ai rencontré grâce à la productrice du Gala de l'Union des artistes, Elsa Caillart. Je souhaite continuer à faire ce programme magnifique sur France 2.
Les réalisateurs de mes émissions, avec lesquels j'apprécie le travail que nous faisons ensemble, main dans la main : Tristan Carné, Gerard Pullicino, Serge Khalfon... Les grands chefs op' qui subliment les artistes : Fred Dorieux, Jean-Philippe Bourdon... Et tous ces techniciens que je connais depuis des années.
Pierre Godde, qui a fait Fort Boyard dans l'ombre pendant vingt-cinq ans. J'ai découvert un homme avec de grandes qualités. Il est, en toute discrétion, le "maître des lieux" de ce Fort, animé avec humour par Olivier Minne.
Je pense également aux jeunes producteurs pleins d'avenir de la société 64 Millièmes Productions. Je suis heureuse de leur avoir donné leur chance sur la chaîne avec Hebdo Musique Mag, car ce sont des producteurs bourrés d'idées, et avec lesquels je retravaillerai.
PdA : Deux ou trois grands moments ?
La Fête de la Musique, avec Daniela Lumbroso. Je la voulais populaire et elle a été, à Marseille, un très beau succès. Je pense que les jeunes sont dehors, les 21 juin. Ils vont voir des groupes de rock jouer dans la rue. Les téléspectateurs qui regardent La Fête de la Musique veulent chanter et danser "dans leur salon" sur des rythmes populaires... et "populaire" n'est pas un gros mot ! Ce que j'aime, c'est de pouvoir continuer à défendre la variété, la musique en général, et d'être soutenue en cela par mes patrons.
Qui sera le prochain grand pâtissier ? et, sur ce programme, notre collaboration avec Martange Production, aux côtés de ces grands chefs reconnus du monde entier.
PdA : Quelques regrets... ?
N.A. : D'avoir "planté" Un air de famille, qui était un beau programme, familial, populaire, mais qui était, pour moi, un prime et non un access. Dommage... nous avons travaillé avec des producteurs formidables, Fremantle, et trois artistes adorables, talentueux et d'une grande simplicité : Gilbert Montagné, Elisa Tovati et Mickaël Miro. Je suis triste que ce programme n'ait pas marché, par respect pour ces artistes, pour Virginie Guilhaume, pour les familles, et pour Fremantle.
Peut-être aussi d'avoir démarré mon émission de pâtisserie après M6 (rires), alors que ce projet était travaillé depuis mars 2011, même si nous n'avons pas du tout fait la même émission.
PdA : Que pouvez-vous nous révéler de vos projets pour France 2 pour les mois à venir ?
N.A. : Le retour du programme C'est votre vie, que Stephane Bern présentera, avec, comme première invitée, Céline Dion.
De nouveaux Grands Shows à venir. Les 25 ans de Fort Boyard. Les 30 ans des Francofolies de La Rochelle... La Fête de la Musique, le 21 juin, à Montpellier. Toujours avec Daniela Lumbroso.
Nous allons faire, avec un grand bonheur, le troisième Village préféré des Français, avec Stephane Bern. C'est toujours avec joie que nous assistons à la mobilisation de tous ces villages de France qui fabriquent des savons, décorent les places des villages, et, grâce à ce programme, assistent à un accroissement des visites de touristes.
Nous mettrons à nouveau, cette année encore, le jardin à l'honneur, en prime, avec Le jardin préféré des Français.
PdA : Quels sont vos rêves ? Rêves de concepts, de programmes, d'invités, rêves tout court...
N.A. : Top secret ! Mais... continuer à faire de belles émissions sur France 2, me réveiller le dimanche matin et voir que mes audiences sont belles... C'est le rêve de tous les dimanches matins, et la récompense du travail d'une équipe !
PdA : Le grand public vous connaît sans doute d'abord pour le rôle de directrice que vous teniez à la Star Ac', il y a quelques années...
N.A. : La Star Ac' est une des grandes émissions auxquelles j’ai collaboré. Huit ans, avec ma société NAO. En coulisses, sur la direction artistique. Ce fut un immense plaisir, et, surtout, une grande joie de travailler aux côtés de Nikos (Aliagas, ndlr) qui est un des animateurs avec qui je rêve de travailler à nouveau. Mais la partie "médiatique", le rôle de la "directrice" représente 10% de ma carrière. Je l'ai accepté à la demande d'Étienne Mougeotte car Alexia Laroche-Joubert a eu des soucis personnels. Sinon, je n'aurais jamais fait de télé.
PdA : Avant France 2, vous comptiez surtout parmi les producteurs les plus influents de notre pays. Quels sont vos coups de cœur du moment, ceux que vous aimeriez nous faire découvrir ?
N.A. : Vous vous trompez, je n'ai jamais été productrice. J'ai travaillé à la radio : NRJ, RMC... comme responsable de la programmation musicale, puis comme programmatrice (cela veut dire programmer les personnalités sur les plateaux de télé : humour, musique, cinéma, théâtre, sport, politique...). J'ai travaillé pour Michel Drucker, Jean-Luc Delarue, Yves Mourousi, Marie-France Brière, Dominique Cantien, Max Guazzini, Arthur (je recommence demain, tellement cet animateur est créatif et drôle), Jean-Pierre Foucault, Guillaume Durand, Patrick Sébastien... et j'ai créé la première société de programmation indépendante, NAO (Nathalie André Organisation), mais j'ai produit peu d'émissions. J'en ai assuré la direction artistique, ce n'est pas pareil ! (Les doigts de votre serviteur ont ripé sur son clavier, mais c'est heureux, finalement, cela a permis, par cette mise au point, de découvrir ce métier méconnu, ndlr)
PdA : Que peut-on vous souhaiter, chère Nathalie André ?
N.A. : De continuer à m'amuser en travaillant beaucoup, comme je le fais actuellement.
D'arriver à dîner de temps en temps avec mon fils !
De ne jamais me laisser influencer par la politique ou par les réseaux, mais uniquement par mes coups de cœur et mon intuition.
De continuer à travailler avec les professionnels qui m'entourent, car j'apprends tous les jours à leurs côtés, que ce soient les personnes qui me dirigent ou les producteurs de talents avec qui je bosse dans la confiance : Franck Saurat pour Carson, Anne Marcassus pour DMLS TV, Marie Genest pour Fremantle, Laurence Jomand pour Starling, Gérard Pont pour Morgane, Catherine Barma pour TSE, Daniela Lumbroso pour Degel Prod... Et de faire de nouvelles rencontres, de développer de nouveaux projets, de continuer à soutenir tous les artistes et de faire découvrir sans cesse de nouveaux talents.
J'aimerais aussi refaire travailler Bruno Guillon et Jérémy Michalak...
PdA : Un message pour nos lecteurs ? Pour quelqu'un en particulier ?
N.A. : Je n'aime pas cette "guerre des chaînes", et j'aime particulièrement les moments où, entre concurrents, on se souhaite bonne chance, on se félicite, sur Twitter, sur Facebook, ou par texto, pendant nos émissions, le samedi soir ou autre, sans penser aux audiences, mais juste à reconnaître la qualité du travail des uns et des autres. Il n'y a rien de plus difficile que d'aimer faire un programme et de voir qu'il n'a pas marché, que ce soit sur France 2 ou sur une autre chaîne.
Que mes "lecteurs" n'écoutent pas toujours ce qu'ils lisent sur internet et ne jugent pas trop vite sans savoir. Nous n'avons pas tous les mêmes budgets, les mêmes ambitions, les mêmes objectifs, nous essayons juste de leur faire plaisir. Je parle pour les divertissements et les jeux. Mais, tous les matins, à 9h, nous recevons les audiences, et, parfois, les jugements de personnes qui ne connaissent pas nos contraintes nous mettent en colère car nous sommes un des rares métiers où tout le monde a un avis, sans en connaître les coulisses ou, souvent, les contraintes que nous avons eues sur tel ou tel programme.
PdA : Un dernier mot ?
N.A. : Une phrase de Nelson Mandela, accrochée depuis vingt ans dans mon bureau : « Aucun de nous, en agissant seul, ne peut atteindre le succès » !
Il n'est pas de belle émission sans un bon animateur, sans tous ces techniciens formidables du spectacle qui, dans l'ombre, font des merveilles, sans le balayeur de plateau et sans le public qui nous regarde.
PdA : Merci infiniment...
N.A. : Merci à vous !
Merci pour tout, Nathalie André. Merci d'avoir joué le jeu, avec un enthousiasme communicatif ! Et vous, que pensez-vous des jeux et des divertissements proposés par France 2 ? Postez vos réponses - et vos réactions - en commentaire ! Nicolas alias Phil Defer
Vous pouvez retrouver Nathalie André...
- Sur Twitter.
- Sur France 2, bien sûr !
- Suivez Paroles d'Actu via Facebook et Twitter... MERCI !
Thomas Misrachi : "BFMTV doit devenir incontournable"
Lors de l'interview qu'il m'avait accordée il y a quelques mois, Laurent Bazin me faisait part de cette réflexion à propos de l'information en continu : "C'est (...) une forme de zapping en continu... C'est la règle du genre. Je l'ai pratiquée.". Ce sentiment n'est pas nouveau. Sur les chaînes égrenant les titres de l'actu 24/24, une info chasserait l'autre, chacune étant traitée dans le feu de l'action, sans approfondissements ni véritables prises de recul... L'image est excessivement caricaturale, elle ne correspond évidemment pas à celle qu'avait à l'esprit le patron de la matinale de RTL. BFMTV, i>Télé, LCI ne manquent pas d'excellents journalistes et reporters, couvrant l'instantané et ses conséquences à moyen ou long terme. Sur chacune de ces antennes sont diffusés au quotidien des éditos, des débats de haute tenue. Il n'empêche, le cliché est tenace... Depuis l'automne dernier, BFMTV propose "7 jours BFM", un magazine d'information et d'investigations. Un regard différent, posé, sur l'actu de la semaine. À sa tête, un journaliste de talent, un parcours à suivre, sans le moindre doute... Thomas Misrachi a accepté de répondre à mes questions. Je l'en remercie. Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche, alias Phil Defer. EXCLU
ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU
THOMAS MISRACHI
Rédacteur et animateur de "7 jours BFM", sur BFMTV
"BFMTV doit devenir incontournable"
(Photo fournie par Thomas Misrachi)
Q : 17/02/13
R : 25/02/13
Paroles d'Actu : Bonjour Thomas Misrachi. Vous êtes diplômé de Sciences Po Aix et de la London School of Economics. À cette époque, au milieu des années 90, vous vouliez déjà devenir journaliste ?
Thomas Misrachi : Non, pas nécessairement, même si j'étais intéressé par la presse et les médias, je ne me destinais pas forcément au journalisme. C'est arrivé un peu après. Un peu par hasard... Et il fait souvent bien les choses.
PdA : Vos débuts, vous les avez effectués dans des cadres assez originaux pour un journaliste français. Qu'avez-vous appris de vos expériences auprès de médias anglo-saxons tels que la BBC ou Bloomberg TV ?
T.M. : La rigueur et le travail. Dans notre métier, comme dans beaucoup d'autres, ces deux éléments sont indispensables. Chaque mot compte. Sortir ou bien comprendre une information prend du temps. De la persévérance. Et une très grande prudence.
PdA : En 2005, vous êtes de l'équipe qui lance BFMTV. Comment la rencontre s'est-elle établie ? Vous y croyez réellement, au départ ?
T.M. : Je travaillais à New York pour Bloomberg, à l'époque. Je faisais aussi les points bourses en direct du NYSE (New York Stock Exchange, la Bourse de New York, ndlr) pour BFM radio. J'ai eu l'occasion de rencontrer Alain Weill (le président du groupe NextradioTV) et Guillaume Dubois (directeur de BFMTV et à l'époque journaliste/présentateur sur BFM radio). Nous avions de bons rapports. Lorsqu'ils m'ont parlé du projet, j'ai été enthousiasmé. Malgré la présence de LCI et de i>Télé sur le PAF, il y avait, à mon sens, de la place pour un nouvel acteur, une chaîne info différente, un concept à l'anglo-saxonne en France. Je n'ai pas hésité bien longtemps. Et oui, j'y ai cru. Et j'y crois encore !
PdA : Quels sont les événements d'actualité qui vous ont marqué, que vous ayez été en leur temps journaliste ou simple téléspectateur ?
T.M. : J'étais à New York et sous les tours du World Trade Center le 11 septembre 2001. C'est quelque chose que je n'oublierai évidemment jamais.
Avant de devenir journaliste, de nombreux événements m'ont marqué. Parmi mes premiers souvenirs : l'élection de François Mitterrand, l'explosion de Challenger en 1986, la chute du mur de Berlin ou le "procès" du couple Ceausescu. Depuis, difficile de faire un choix. Je crois que récemment, les affaires DSK ou Merah ont marqué les esprits. La mort de Ben Laden et le printemps arabe sont aussi extrêmement importants à mon sens.
PdA : Quels ont été jusqu'ici, à vos yeux, les moments forts, émouvants de votre parcours ?
T.M. : Il y en a eu beaucoup, beaucoup trop pour en faire une simple liste, mais c'est précisément ce qui est formidable dans ce métier.
PdA : Quelles personnalités rêveriez-vous d'interviewer ? Quelles questions leur poseriez-vous ?
T.M. : La liste serait très, très longue ! Tous les gens qui, par leur démarche, leurs idées, leurs actes, réussissent à changer le monde, ou leur monde en tout cas. Tous les autres aussi, ceux, qui parfois, font des choses tellement terribles, tellement insensées que l'on peut se demander pourquoi. Les questions se feraient en fonction des personnes interrogées... En ce moment, je serai très curieux de savoir ce que pensent DSK ou Nicolas Sarkozy ! Je rêverais aussi d'aller interroger les preneurs d'otages du Cameroun. Mais cette réponse ne vaut que pour l'actualité de ces dernières heures !
PdA : Vous êtes à la tête de l'émission "7 jours BFM" depuis le mois d'octobre. C'est important de se poser, de s'offrir ce recul dans un monde où l'info en continu est reine ?
T.M. : 7 jours BFM est une autre façon de faire de l'info en continu. Ce qui est important à mon sens, c'est d'évoluer, de continuer a avancer dans une carrière, de ne jamais s'endormir. Depuis que je suis à BFMTV, j'ai présenté la matinale, le 12-15, le 15-18 puis, brièvement, le soir. J'ai fait du reportage et des opérations spéciales pendant près de 2 ans. Depuis octobre, 7 jours est une nouvelle aventure. J'y prends beaucoup de plaisir. J'y apprends aussi beaucoup. Mais il y a encore énormément à faire pour que cette émission soit un rendez-vous incontournable de l'actualité. Et nous y travaillons !
PdA : Accepteriez-vous de nous parler de l'élaboration de cette émission ? (votre rôle, le calendrier, ce qui motive le choix des sujets...)
T.M. : Nous travaillons le plus en amont possible, mais notre plus grande préoccupation, c'est de coller à l'actu de la semaine. Mon rôle est, principalement, un rôle de présentateur. J'écris et j'anime l'émission. Je propose aussi des thématiques de sujets sur certaines éditions. Pour le reste, il y a deux rédacteurs en chef, deux petites équipes dédiées aux 26 minutes. Pour les autres sujets, nous travaillons avec la rédaction de BFMTV.
PdA : BFMTV est née en 2005, nous le rappelions tout à l'heure. Quel regard portez-vous sur les huit premières années de la chaîne ?
T.M. : BFMTV est un très beau succès. C'est la preuve qu'en France, avec du travail, du sérieux et un peu d'audace, on peut encore créer, faire et réussir. Depuis 2/3 ans, nous sommes entrés dans une nouvelle phase de développement. Nous devons devenir LA référence incontournable de l'info télé en France. Nous débordons d'idées et de projets, et j'espère que les 8 prochaines années seront aussi riches que les (bientôt) 8 dernières.
PdA : La télé, vous la regardez ?
T.M. : La télé, je la regarde peu... Je regarde BFMTV et i>Télé. Les journaux de 20h des grandes chaînes en alternance et quelque émissions politiques comme C dans l'Air ou Dimanche plus, quand je le peux... Mais j'ai peu de temps à y consacrer...
PdA : Vous avez couvert les marchés actions U.S. à New York pour Bloomberg TV entre 2001 et 2005. Vous avez également produit et réalisé "Jim Maguire, A Life on Wall Street", un documentaire relatant la vie d'un trader du NYSE avec, en toile de fond, un demi-siècle d'histoire de la finance américaine. Comment avez-vous vécu, analysé les déflagrations qui ont ébranlé l'économie mondiale à partir de la fin 2008 ? En avez-vous été surpris ?
T.M. : Je n'ai pas été très surpris par la crise de 2007. De très nombreux spécialistes avaient mis en garde. Y compris ceux qui ont contribué à l'emballement général de la machine. Une partie du monde financier a perdu le sens des réalités. Malheureusement, cette partie-là a emporté avec elle un bon morceau de l'édifice.
PdA : N'avez-vous pas tendance à penser, à propos de l'économie, qu'elle n'est pas assez enseignée en France, donc mal comprise par le public français ? Les médias pallient-ils efficacement ces insuffisances, à votre sens ?
T.M. : La formation et l'information (économique) existent. Et en France, elles sont de plutôt bonne qualité. Il suffit de s'en saisir. Faut-il en faire plus ? Peut-être... En revanche, je ne sais pas si c'est aux médias de "pallier" les lacunes éventuelles de l'enseignement en sciences économiques !
PdA : Êtes-vous optimiste quant au retour prochain d'une croissance solide et durable pour la France ? Les ingrédients sont-ils réunis pour ce faire ?
T.M. : Franchement, je n'en sais pas beaucoup plus que ce que peuvent dire la Commission européenne, le FMI, l'OCDE ou Bercy. J'espère que le plus difficile est passé. Visiblement, 2013 ne sera pas une bonne année. 2014 devrait être un peu meilleure. La situation est très compliquée. Il faut réduire les postes de dépenses (déficits, notamment... donc réduire le poids de la dette) sans pour autant peser sur la croissance. C'est un équilibre délicat, mais pas impossible. D'autres pays l'ont fait. Il faut avoir du courage politique. J'espère que nos dirigeants, présents et futurs, en feront preuve. Il faut aussi rester optimistes. Et ne pas penser que ce que l'on peut vivre est inéluctable. Il faut croire que les choses peuvent changer, s'améliorer, c'est un premier pas essentiel !
PdA : Vous coanimiez il y a quelques années une émission nommée "Aujourd'hui le monde", sur BFM TV. Quel jugement portez-vous sur celui dans lequel nous évoluons ?
T.M. : Aujourd'hui, le monde est passionnant. Les progrès techniques sont incroyables. L'humanité a tout pour réussir... Il ne reste plus qu'à se mettre d'accord... Visiblement, c'est ce qui pose problème à notre espèce. Il faut donc que chacun fasse sa part. Et espérer que les autres fassent de même !
PdA : Qu'est-ce qui, sorti de votre travail, vous détend, vous permet de décompresser ? D'ailleurs, réussissez-vous réellement à vous "déconnecter" ?
T.M. : Je sors avec des amis, vais au musée, au cinéma... Je profite de ma famille quand je peux... Bref, une vie normale... Même si j'ai un peu de mal à trop "décrocher", au bout de quelque jours, j'y arrive... C'est important de se laisser quelques plages de respiration...
PdA : Quels sont vos projets, vos rêves pour la suite ?
T.M. : Je travaille sur plusieurs projets d'émissions : qu'ils se réalisent !
PdA : Que peut-on vous souhaiter ?
T.M. : De belles rencontres... et de beaux voyages !
PdA : Aimeriez-vous adresser un message à nos lecteurs ?
T.M. : Quoi que vous fassiez, soyez passionnés !
PdA : Un mot pour conclure ? Merci infiniment !
T.M. : Longue vie à "Paroles d'actu" !
Merci à vous, cher Thomas Misrachi. À mon tour d'émettre un double souhait : que votre parcours connaisse l'évolution que vous méritez ; que vos désirs se réalisent... Phil Defer
Un commentaire, qu'il soit positif ou négatif, est toujours apprécié...
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Alain Duverne : "Les Guignols devraient aller plus loin"
Pour introduire ce nouvel entretien, je vais - une fois n'est pas coutume - laisser parler mon invité. Voici comment Monsieur Alain Duverne, concepteur en chef des Guignols depuis l'origine, avait répondu à ma sollicitation, à la fin du mois de janvier. Des mots que je ne pouvais pas ne pas inclure dans le présent document...
« J'entends des gens remercier l'école républicaine, ils disent qu'il lui doivent tout. Moi, elle a mis mon enfance dans la grisaille, mais je dois beaucoup à des gars comme Alain de Greef. Il aurait dû rester avec ses nombreux enfants, que nous avons élevés ensemble. Lui était le papa des Guignols, moi la maman. Ce n'était pas le mariage pour tous mais le mariage de l'intelligence et du fin bricolage. On marie aussi le cuivre et le zinc pour faire du bronze et je marie la sculpture d'un Guignol, avec l'écoute de livres audio, pour rendre le travail manuel aussi très intelligent. Il n'y a pas besoin d'utiliser le mot "mariage" venu des religieux au 11ème siècle pour un contrat civil d'union avec deux mêmes entités. Les responsables politiques qui tiennent à tordre ainsi le mot "mariage" touchent le fond de la démagogie chafouine... à moins que cela ne présage l'une des plus grandes conquêtes de l'histoire... ».
Le décor est posé, place à l'Artiste ; un artiste engagé, un artiste passionné et passionnant... Après celle du papa, j'ai l'honneur et la joie de vous présenter mon interview de la maman des Guignols. Une bien belle famille... Et pour moi, un rêve de gosse... Merci infiniment, cher Alain Duverne, pour ce beau cadeau. Bonne lecture ! Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche, alias Phil Defer. EXCLU
ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU
ALAIN DUVERNE
« Les Guignols devraient
aller plus loin »
(Photos fournies par Alain Duverne)
Q. : 17/02/13 ; R. : 22-25/02/13
Paroles d'Actu : Bonjour Alain Duverne. Comment allez-vous ?
Alain Duverne : Je vais à pieds, en vélo, en taxi, en métro, en bus... selon les lieux, selon les heures, selon les manifs, selon la pluie ou le beau temps. Je suis souple, je m'adapte.
PdA : C'était quoi votre vie, avant de construire des marionnettes, avant le Bébête Show ?
A.D. : Tu es une « petite nature », disait avec tendresse mon père, quand j’étais réfugié dans le giron de ma mère, pour conjurer mes chagrins scolaires. Tant qu’il y avait de l’encre dans le stylo des autorités éducatives, ces deux mots s’inscrivaient à répétition d’une année sur l’autre à travers les trimestres : « agité et bavard », « agité et bavard »... Petite nature, agité et bavard.
Après un service militaire marqué par la découverte d’un large échantillon de mes contemporains, j’ai passé quelques années en laboratoire de fiabilité de composants électroniques chez Ericsson pour travailler à l’obsolescence programmée. J’ai vite quitté ce bateau naufragé d’avance. J’ai commencé alors à vivre dans le maquis de l’existence pour apprendre à faire “ mon devoir d’être heureux ! ”.
Je découvre l’incroyable pouvoir d’expression des marionnettes de Philippe Genty. J’ai vu là les instruments qui me tombaient du ciel pour “ dire ”. Dire des réalités… Des vérités, celles qui sortent de la bouche des enfants ! Avec ces instruments, je peux m’amuser à mettre en lumière les surplus de tartuferies, construire des passerelles, échafauder des thèses… Mon luxe est caché là : par l’activité manuelle dans les fabrications, intellectuelle dans l’écriture, physique et expressive dans la mise en scène et manipulation.
La suite, en quelques mots : plus de 200 représentations des “ Œufs de Hasard ”, spectacle théâtral visuel et musical (qu'il a créé, ndlr). Sociétaire de la S.A.C.D. Nombreuses créations de marionnettes et écriture pour les programmes jeunesse de TF1 et Antenne 2. Puis le célèbre Bébête Show...
PdA : Le Bébête Show, c'est un concept très novateur pour l'époque... Une belle aventure ?
A.D. : C'était une première mondiale. Les chansonniers, humoristes... disparaissaient derrière les politiciens sculptés en mousse de polyuréthane. Depuis, une vingtaine de pays ont suivi cette comédie manipulable populaire. Je n'avais jamais fait que des marionnettes pour les enfants. Avec les playmates aux seins nus, j'étais servi, dans le programme de Stéphane Collaro ! À la télé, on acquiert la célébrité et on gagne de l'argent. J'ai pu me payer un atelier. L'estime, on la gagne au théâtre.
PdA : Dans les années 80, Français et Anglais rivalisent de bonnes idées en matière d'humour satirique. Le Bébête leur inspire Spitting Image. Le concept va intéresser un certain Alain de Greef... Les Guignols sont sur le point de naître, ou presque... Au départ, ça s'appelle Les Arènes de l'info...
A.D. : C'est le départ des Nuls qui amène Alain de Greef à tenter l'aventure des Guignols, inspirée de Spitting Image. En janvier 1988, j'ai fait les 10 premières marios, pour tourner un pilote. J'avais déjà mon équipe de manipulateurs, seulement, les auteurs entraînés au style humour anglais manquaient dans l'équipe. Les Arènes de l'info ont donc été écrites par les auteurs qui écrivaient pour les Nuls. Mais une marionnette ne sait pas jouer la finesse que pouvait faire passer la bande à Alain Chabat. L'écriture s'est améliorée par la suite pour culminer en 95 pendant les présidentielles.
PdA : Vous m'avez dit, évoquant les Guignols et Alain de Greef, « Lui était le papa, (...) moi la maman ». La suite, chacun la connaît : un couple heureux avec de beaux, de nombreux enfants. Des précurseurs ! Mais avant toute histoire d'amour, il y a une rencontre... Vous nous la racontez ?
A.D. : Ayant approché les arrogants énarques - ou équivalents - qui dirigeaient TF1 ou Antenne 2, mes premières rencontres avec Alain dans la tour Olivier-de-Serres, où l'équipe de Canal + oeuvrait à l'étroit, j'avais du mal à les prendre au sérieux. Ils ressemblaient à mes potes. Quant Alain de Greef m'apprit qu'il voulait faire Spitting Image, que je connaissais pour être allé les voir lors d'enregistrements, j'ai tout de suite dit, « Vous savez qu'un programme comme cela coûte au moins 80 000 francs la minute ? ». Il m'a répondu « oui ».
Sachant que la grosse chaîne française TF1 mégotait pour le Bébête Show, qui devait coûter dix fois moins, j'ai d'abord pensé qu'Alain s'était trompé d'un zéro ! Pas du tout, passé la porte de Canal, je changeais de pays. Pour la première fois, un dirigeant prenait la marionnette au sérieux. À l'époque, les émissions de variétés anglaises avaient quinze ans d'avance sur les françaises.
Nos enfants de caoutchouc ? Tous des fanfarons qui s'agitent dans la lumière et qui nous disent ce qu'on veut entendre. Si ce sont des présentateurs, des artistes ou des journalistes, pourquoi pas... mais les politiques sont pareils.
PdA : PPD, évidemment... Chirac... Johnny... Trois marionnettes, parmi les plus emblématiques. Leur design est-il venu naturellement ?
A.D. : En démocratie, nous sommes à peu près égaux devant la loi, mais en caricature nous ne le sommes pas du tout. Ces trois-là sont évidemment de bons clients, les présidents ou les premiers ministres de droite le sont aussi. Thatcher, Aznar en Espagne, Chirac, Sarkozy... leur dessin, je dirais que ça s'écrit comme ça se prononce. Ils ont des gueules qui marquent, une voix aussi. Il suffit de recopier en en retranchant là on il y en a le moins et en en rajoutant là où il y en a plus.
Plus ou moins, c'est pas rapport à un visage moyen, où toutes les parties sont moyennes. Si le front d'un sujet est large, il sera modelé encore plus large. Si les lèvres sont minces, elles seront encore plus minces. Si le menton est petit, il sera encore plus petit. Cela pour toutes les parties du visage. Le moindre détail qui sort de la moyenne, il faut lui faire un sort.
PdA : Sans faire de mauvais esprit... vous vous êtes arraché les cheveux, pour certaines réalisations ?
A.D. : J'ai perdu mes cheveux pendant les six ans d'un procès, au début des Guignols, suite aux manigances d'un producteur un peu trop audacieux... Et je me suis arraché ceux qui restaient avec Ségolène Royal, avec Strauss-Kahn, récemment avec Montebourg. Difficile de dire pourquoi, les stars de la caricature ont aussi des difficultés avec des têtes qui résistent et ne laissent pas montrer le bout par lequel il faut les prendre.
PdA : Je sais qu'on ne demande pas à une maman d'émettre ouvertement des préférences lorsque l'on parle de ses enfants... Quelles sont, malgré cela, les marionnettes pour lesquelles vous avez une tendresse particulière, et pourquoi ?
A.D. : Rien de très différent, comparé avec les stars reconnues par tous. Les auteurs ont su trouver des jeux fabuleux pour Jean-Paul II, une faconde craquante pour de Villiers, des dialogues dignes de Marcel Pagnol pour Papin et Cantona...
PdA : Pauvre Stallone... Il incarne, bien malgré lui, tout ce que l'Amérique, le business, la religion comptent d'excès, de cynisme éhontés. Vous n'avez pas honte ? ;-) Vous saviez à quelle sauce il allait être mangé avant de créer son Guignol ?
A.D. : Personne ne le savait, sauf que chacun tombe du côté de son penchant. C'est-à-dire que les auteurs ont la finesse de trouver le juste penchant de nos créatures.
PdA : Est-ce qu'il vous est déjà arrivé, d'ailleurs, de livrer telle ou telle marionnette avec à l'esprit, au-delà du physique, un trait de caractère, une personnalité ? "Je le vois bien comme ça, d'ailleurs j'ai accentué ce trait du visage pour souligner cet aspect du personnage". Vous êtes écouté par l'équipe, s'agissant de la vie post-création du Guignol ?
A.D. : Les auteurs n'ont pas souvent trop d'a priori, le personnage s'épure avec la voix, de sketch en sketch.
PdA : Combien de marionnettes avez-vous créées, à ce jour ?
A.D. : Je ne sais pas exactement... Entre 5 et 700. Il n'y a pas que les Guignols.
PdA : De quoi remplir un Musée des Guignols... Je vous garantis que ça marcherait ! Fantasme - assumé - de ma part... Réalisable, à votre avis ?
A.D. : Il ne s’agit ni d’une sculpture, ni d’une œuvre d’art mais d’un “ instrument de comédie ”. La musique a aussi les siens. Voir ces marionnettes immobiles, ça les tue un peu. 4 ou 5 footballeurs sont visibles au Musée des Sports.
PdA : Revenons à leur conception. Combien êtes-vous à créer les Guignols ? Vous nous parlez de votre équipe ?
A.D. : Franck Demory, au cheveu dru argenté, est devenu spécialiste des mécanismes. Il doit y avoir une trentaine de petites pièces par mécanisme des yeux - gauche, droite, et paupières. Avec ses deux bras, il fait comme s'il en avait quatre pour ajuster les iris, au dixième de millimètre près. Il est le maître de tous les accessoires et effets spéciaux qui rendent magiques les sketchs.
Bénédicte Fay, fine madone discrète au regard doux et mélancolique, fait les moules en résine stratifiée et les tirages en mousse de latex. C'est une cuisine délicate à mettre en oeuvre et à digérer.
L'énergique Alex Leseur chante et rit avec gourmandise. Elle peint à l'aérographe le maquillage avec du latex teinté. Elle a les nerfs solides, parce qu'il ne faut pas s'énerver, avec cette émanation gluante élastique, et néanmoins naturelle.
Annaïc Penon, taille mince comme un modèle haute couture et hauts talons, taille dans les perruques pour les ajuster sur des têtes patatoïdales et taille les bustes dans la mousse de polyuréthane.
L'air qui entoure la grande Sophie Coeffic n'a pas la même densité qu'ailleurs, sans qu'elle perde sa belle énergie, tous ses mouvements ondulent. Elle ne rate pas une occasion pour nous éclairer de son rire mais, a contrario, elle n'en rate pas une, cinglante, pour terroriser la bêtise et l'orgueil mal placé. Sophie est la première personne qui, arrivant ici, connaissait déjà 80% des secrets pour créer une marionnette. C'est normal, elle ondule aussi en rythmes dans l'atelier de mon maître Philippe Genty.
Laetitia Calzetta passe de Photoshop à l'imprimerie ; elle s'occupe de toutes les affiches, couvertures de presse, jaquettes de DVD guignolisés. Elle fabrique aussi tous les insolites accessoires. Elle est la dernière arrivée. Elle habite avec d'autres artistes et artisans, dans une usine en grande banlieue. Les trajets sont longs, elle organise méticuleusement son temps.
Corinne Bron est la patience, la gentillesse, la grâce et le savoir administratif qui font dormir le gérant d'Images et Mouvement comme un bébé. Elle fait aussi les mystiques feuilles de paie. Carolle et Léo sont restés plus de dix ans. Seb, Laurent aussi. Ils et elles continuent, à leur gré, notre artisanat particulier, plutôt en période de développement. Stéphane, pilote d'avion amateur, est mort d'une chute de ski... Philippe est parti dessiner des voiliers au Maroc. Christian, Sami sont les plus doués de tous. Thierry, Cyril, Véronique, Stéphane, Monique sont passés de l'atelier à la manipulation.
Tant d'autres sont passés au troisième étage de notre usine parisienne. Surtout des filles. Sur 100 CV reçus à la société, de gens venus globalement d'écoles d'Arts appliqués, plus de 95% sont des filles ! Cherchez l'erreur ou la juste conjugaison... J'ai aussi recruté une vingtaine d'autres manipulateurs, pour les Guignols.
PdA : Accepteriez-vous de nous narrer, en quelques étapes clés, la confection d'un personnage, celui de votre choix ?
A.D. : Beaucoup d’indices entrent en jeu pour dégager la vérité du personnage. Globalement, il s’agit des proportions du dessin du visage et de la disposition de chaque élément par rapport à l’ensemble. Tout ce qui se passe autour du regard est capital : la profondeur, la place et la grosseur des yeux par rapport à l’arcade sourcilière et aux joues ; l’écart entre les yeux, la grandeur de l’iris ; la position de l’axe des paupières vis-à-vis de l’iris ; la direction des lignes hautes et basses qui coupent l’iris ; l’épaisseur des paupières et des cils ; le dessin et le volume des sourcils. Chacun de ces éléments doit être chargé en fonction de leurs caractéristiques.
Pour tout le reste, c’est centimètre- cube par centimètre cube qu’il faudra négocier. Prenons le cas du nez, et de ses narines : à tout vent, auguste, timide, sec, busqué, tourmenté, dodu, pointu, poilu, aguicheur, retroussé, épais, épaté, moqueur, proéminent... ou le pilier en bas-relief du front, précieux, ornementé, strict, solide, crochu m’as-tu-vu. La nature est ainsi, son choix n’est pas si mal... le seul nez imbécile serait le nez normal.
C’est la position la plus caractéristique des lèvres pendant l’élocution qui sera choisie. Tout ce qui est poil et cheveux, quand c’est fait d’un manière très soignée, ajoute une touche très réaliste au Guignol. Les modifications apportés aux parties poussent à des corrections dans l’équilibre du tout. Si je grossis les joues et les maxillaires, le front et l’espace des yeux seront logiquement réduits. Si la bouche doit être agrandie, il faudra bien réduire l’épaisseur des joues si la mâchoire n’a pas à être élargie. Ces simples règles ont évidemment des exceptions.
Notre Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, est un épais aux petit nez tordu et petites narines. Il n'entre pas assez d'air dans ce corps rigide. Les lèvres et les joues sont plutôt petites mais épaisses aussi. C'est l'avancée du front et celle des arcades sourcilières touffues et proéminentes qui sont sa principale caractéristique. J'aurais pu en faire davantage, sur ce point. Nous sommes plutôt, aux Guignols, dans des charges caricaturales modestes.
PdA : Qu'est-ce qui différencie, techniquement parlant, les Guignols de la fin des années 80 de ceux de 2013 ?
A.D. : Tout est plus précis, plus soigné, plus sécurisé, plus solide, plus confortable pour la manipulation. Il n'y a que la mousse de latex que l'on connaît un peu mieux, mais c'est un produit naturel dont on ne maîtrise pas tous les caprices. Des têtes fonctionnent depuis quinze ans, d'autres deviennent bisquottes beaucoup plus tôt, malgré les anti-oxydants.
PdA : Êtes-vous, globalement, toujours en phase avec leur humour ? D'accord, à l'aise avec ce que les auteurs font dire à vos bébés ? ;-)
A.D. : Avec leur humour, je suis en phase. "La critique est aisée mais l'art est difficile". Ils sont bons, bûcheurs et acharnés. A contrario, c'est sur leur penchant politique que je souffre. Deux exemples :
1. Aux 9 suicides de France Télécom, il faut répondre par les 70 suicides de paysans, mais ne pas surjouer sur ce qui a été déjà dit par le PS.
2. Concernant l'eau de javel jetée sur tous les restes des cantines scolaires et des restaurants pour qu'ils ne soient pas réutilisés, il faut se révolter violemment contre ce gâchis organisé et décadent, mais les Guignols de Canal + approuvent ? J'ai bu toute mon enfance de succulents jus venant d'oranges abîmées dans des cageots que mon père, petit fonctionnaire libre d'esprit, ramenait régulièrement des Halles. Ce geste de mon père a été formateur pour la vie.
J'ai toujours pensé que le pouvoir des marionnettes autorisait, en visant juste, à blâmer les corruptions des pouvoirs mais plus encore, à dérouiller les conservatismes fâcheux des gentils mammifères humains grincheux autant acclimatés en France à la chicane qu’a la servitude volontaire, peu soucieuse de son avenir. Il n’y pas que les saillies capitalistes de l'Américain Mr Sylvestre qui coincent un pays, la lente avancée de ses propres arthroses est aussi très efficace. Nos fanfarons de caoutchouc pourraient afficher dans la rigolade ces stigmates de la décadence pour mieux les ringardiser. Mais voila, la machine Guignols, malgré son grand pouvoir pédagogique, agit comme les communicants et les chansonniers ; elle ne rebondit que sur des opinions et des croyances déjà entendus. "On peut rire de tout, mais pas avec tout le monde", c’est la loi de la séductrice TV.
N’imaginez pas pour autant qu’un directeur d’édition à Canal + censure les auteurs, les auteurs des Guignols ont le génie d’écrire et d’inventer ce que nos spectateurs veulent entendre. C’est-à-dire, rester dans le politiquement correct, forme acceptée auprès d’un large public, au risque de s’attarder un peu trop dans la pensée unique bobocrate. Notre public, ce sont les 15-30 ans. Ceux qui s’éclatent dans le théâtre bondé de l’humoriste Dieudonné-le-proscrit, sont plutôt les 20-35 ans. Déjà, en son temps, Fernand Raynaud était beaucoup plus cinglant pour tout le monde en cabaret qu'à la radio. Coluche tapait autant sur les flics, les Belges, les syndicalistes, les juifs, les chrétiens, les musulmans. Tous les biens-pensants soumis aux maîtres obscurs le jugeaient raciste.
Maintenant, les ouvriers des groupes internationaux se font licencier. Ils aimeraient bien rester en place, puisque le groupe est bénéficiaire ? En fait, ces ouvriers français voudraient bien partager les bénefs que leurs patrons font sur le dos des ouvriers des usines du tiers-monde ! Un proverbe dit : "Le receleur est pire que le voleur"... Donc aujourd'hui, motus. Quel humoriste oserait rire de cela dans les grands médias ?
PdA : Les Guignols ont 25 ans... Quel regard portez-vous sur leur évolution depuis une génération ? Les points positifs ? Ce qui l'est un peu moins ?
A.D. : En 1973, le subtil observateur Alain Peyrefitte a écrit Quand la Chine s’éveillera… le monde tremblera. Un document des archives de l’INA montre, la même année, un autre ministre de Pompidou, Michel Debré, expliquer, suite au “ premier choc pétrolier ”, à quel point utiliser le terme de crise était un contre-sens. Car, par définition, une crise connaît une montée, un pic paroxysmique puis, un retour à la normale. Mais, cette fois, le monde entier, dit-il, entre dans une “ guerre économique sans fin ”.
Plus le peuple découvre les quarante ans de mensonges politiques, plus il comprend l'état de décadence du pays... Les Guignols, eux, continuent d'avancer sur des oeufs... ils n'osent pas.
Le mariage pour tous est une extravagante mine d'humour. L’objectif est clair, il mettra sur le marché le futur bébé garanti par l’État et produit en utérus d’élastomère, bébé pour tous et pour toutes les bourses des papas pédés. Après « Tu n’accoucheras plus dans la douleur », qui rayait de la Bible « Tu accoucheras dans la douleur », et pour faire vraiment la nique aux catholiques, le bouquet de la mariée arrive ; « Tu n’accoucheras plus du tout, la techno-science s’occupera de ta ligne ». Les industriels sont bien sûr partants pour concrétiser cette utopie, les jeunes que j’ai interrogés dans la manif du mariage pour tous aussi et, à terme, beaucoup de femmes seront intéressées. Le marché de l'embryogénie du bébé est là.
Ce qui est positif, dans les Guignols comme dans mon atelier, c'est d'avoir toujours plus de perfectionnements techniques ; je pense aux costumes, aux lumières, aux perruques, aux trucages, aux réalisations des petits films... Les voix sont parfaites depuis le début, le plus-que-parfait n'existe pas chez nous. Le “ plus-que-parfait ” n'est qu'une bêtise qui emmerde les enfants à l'école, alors qu'avant 5 ans, ils ont déjà instinctivement intégré la grammaire.
En philosophie politique, je dirais que les Guignols, comme nos spectacles, sont du divertissement d'avant-guerre. C'est ainsi. Mais dormez tranquilles, il n'y aura pas de guerre, seulement un long carême venue de l'économie ; cette fois, la religion n'est pas dans le coup.
PdA : Quels sont, sur toutes ces années, vos grands moments avec les Guignols ; en coulisses comme en tant que spectateur ?
A.D. : En coulisses, les fêtes de l'époque d'Alain de Greef. En tant que spectateur, Le monsieur te demande... et Mangez des pommes (la campagne de J. Chirac pour 95, ndlr). Le couple Papin-Cantona...
PdA : Quels secrets, quels scoops pourriez-vous nous dévoiler à propos des Guignols ? Quelque chose qui n'aurait jamais été révélé au public... ?
A.D. : Une marionnette de Chirac a été volée... une de Stallone perdue. Pour le détail.
Pour beaucoup plus gros : Canal + a dû verser 3 millions de francs à un producteur, celui avec qui j'ai été longtemps en procès. Cet escroc avait déposé le projet du programme des Guignols, à son nom, à une société de protection industrielle. Il pouvait faire chanter Canal + en disant, "Vous faites mon programme". Canal + a payé, ne voulant pas être éclaboussée par un procès.
À cette époque, Mitterrand disait à ses ministres, "N'allez jamais en justice, surtout si vous n'êtes pas dans votre tort !". La maison de production a pris ses 3 millions de francs, et plus personne n'a jamais entendu parler d'elle. Elle était sur liste noire pour toutes les chaînes françaises et d'Europe.
PdA : Revoyez-vous toujours Alain de Greef ? Les "historiques" de Canal ? Êtes-vous, vous aussi, nostalgique d'un certain esprit dont on a dit qu'il avait animé la chaîne à ses débuts ?
A.D. : Depuis que j'ai l'imail d'Alain, je vais reprendre contact. Philippe Genty et lui sont mes deux mentors. Je ne suis pas nostalgique d'un certain esprit, mais plus d'une volonté collective de faire des choses avec amour pour une bonne cause. Faire des marios pour une TV tunisienne qui pense amener, grâce à elles, de la laïcité au Maghreb... ça, ça a de la gueule !
PdA : Quels programmes aimez-vous regarder, sur Canal ou ailleurs ? Quel jugement de téléspectateur portez-vous sur la télé d'aujourd'hui ?
A.D. : Parfois Paris Première, le soir. Les chaînes d'info en continu, LCP, en particulier, avec Bibliothèque Médicis. Des films sur le bouquet Canal +, des chaînes thématiques sur la nature... Le gros du reste me fait penser au mot anglais “ entertainement ”, traduit par divertir, ou distraire.
Ce flot ininterrompu de gens en couleurs, agités et bavards, semble maintenir en survie une moitié de France en léthargie. Si ça s'éteint, j'imagine cette demi-France s'avachir sur elle-même, en compote sur les canapés. Mais l'autre moitié de la France est en pleine santé. Il y a toujours deux France qui se regardent en chien de faïence, depuis Jeanne d'Arc, depuis l'édit de Nantes, depuis la Révolution, depuis la dernière guerre. Quand je vote, je vote Bayrou.
PdA : Quelles sont vos autres passions, celles que l'on ne connaît pas forcément de vous ?
A.D. : Mon paradis est de modeler un Guignol en écoutant un livre audio ; le dernier, c'était Ayrault au modelage, et Chagrin d'école, de Daniel Pennac, à l'écoute.
PdA : Vos grandes fiertés ?
A.D. : Ma fierté, c'est d'avoir regroupé dans mon atelier des gens qui s'aiment, qui aiment travailler ensemble et partent en vacances ensemble.
PdA : Des sentiments d'échec ?
A.D. : Ce que j'ai raté, magistralement, c'est de n'avoir pas su défendre, à Canal +, l'intégrité de l'activité liée à la marionnette face aux corporatismes, potentiellement virulents à la TV. Les voix sont faites par d'excellents comédiennes et comédiens-imitateurs. Leurs talents contribuent étroitement aux succès des Guignols. J'aurais voulu former une grande équipe de marionnettistes pouvant passer de la fabrication à la manipulation des marios. Les auteurs de Spitting Image s'amusaient à manipuler. Les manipulateurs que j'ai recrutés ou qui sortent de mon atelier n'ont donc qu'à suivre les voix des comédiens-imitateurs. Mais face à des producteurs délégués lambda de la TV... Ils ont réussi à installer une mini-corporation d'“ artistes-interprètes ”, payés le double des gens - beaucoup plus longs à former - qui travaillent dans mon atelier.
C'est ma honte, parce ce que, ce que je reproche le plus au diplodocus éducatif, c'est sa faculté à classer les humains en deux infirmités : les manuels et les intellectuels. J’affirme que se résigner à ces deux “ infirmités ” est une calamité pour le genre humain, et cette dislocation est très vivace dans les traditions culturelles françaises. Ces “ mutilations ” sont souvent subies, mais aussi très souvent choisies. Car on ne peut pas ignorer le fait que les postes enviés de pouvoirs, petits et grands, et les postes administratifs qui servent ces pouvoirs, sont concentrés principalement dans les “ mains maladroites ” de ceux qui se sont laissés enfermer étroitement dans le moule de l’intelligence d’adaptation au microcosme scolaire.
PdA : Quels sont vos projets, vos rêves pour la suite ?
A.D. : J'ai écrit un film, aidé des frères Ringer, producteur et réalisateur, et j'ai créé une trentaine de personnages d'animaux humanoïdes pour ce film. Il s'agissait de démontrer que la décadence de notre démocratie n'est pas due qu'aux saillies capitalistes... Mais que la lente avancée de ses propres arthroses, inhérentes à sa culture de monoglote orthographeur assisté, plus cigale que fourmi dans sa non-anticipation, est aussi très efficace. Ce film est en stand-by pour l'instant, j'écris un livre audio pour le remplacer.
PdA : Aimeriez-vous adresser un message à nos lecteurs ?
A.D. : Pour vos enfants : n'attendez surtout pas grand chose de l'école, qui fait ce qu'elle peut, mais pensez bien que "c'est un devoir d'être heureux". C'est surtout valable pour les enfants qui n'ont pas une prédisposition naturelle pour le microcosme scolaire.
PdA : Un message... pour quelqu'un en particulier ?
A.D. : Pour Rodolphe Belmer, directeur de la chaîne Canal + :
Pourquoi ne pas faire un module de “ Guignols bis ” ? (plus tard dans la soirée, sur Canal Décalé, ou en rubrique spéciale dans les Guignols, avec éventuellement d’autres auteurs : “ La face cachée des Guignols ” ? “ L’antichambre des Guignols ” ?...)
Sous la forme d’une caméra cachée, dans des réunions privées. On y verrait, autour d’une table ronde (dans une cave à vin ?), autour d'un monsieur ou d'une madame tout-le-monde en latex, les hommes et les femmes politiques, chefs de partis et présidentiables, défaits de leur apparence publique, préparant un gouvernement d’union nationale. Ils chercheraient maladroitement les idées pour sortir par le haut des déclins du futur et chercher à refonder réellement la salle de classe.
Même si c'est faux, enfin montrer une capacité d'anticipation et d'innovation à la France...
PdA : Que peut-on vous souhaiter, cher Alain Duverne ?
A.D. : D'avoir moins mal aux genoux !
PdA : Quelque chose à ajouter avant de conclure ? Merci infiniment !
A.D. : Dario Fo sortirait, "Nous sommes dans la merde jusqu’aux narines, que personne ne fasse de vagues !"...
MERCI, merci encore, cher Alain Duverne, pour ce témoignage exceptionnel, pour votre enthousiasme hors du commun. Continuez, avec votre merveilleuse équipe, à nous faire rêver. En espérant que les Guignols prendront le parti de nous faire, à l'avenir, davantage réfléchir. Phil Defer. Un commentaire ?
Les Guignols : le site web
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Présentation remaniée : 04/11/14.
Véronique de Villèle : "Davina, c'est ma soeur"
Il y a quatre mois, Madame Véronique de Villèle, dont chacun garde en mémoire le duo "tonic" qu'elle forma avec Davina, avait accepté de répondre à mes questions pour Paroles d'Actu. Je l'avais notamment interrogée sur son combat, au sein de la Fondation pour la Recherche sur Alzheimer, contre cette effroyable maladie neurodégénérative qui frappe tant de familles...
En ce mois de janvier, j'ai souhaité que nous réitérions l'exercice, emballé par la chaleur de notre premier échange. Elle m'a suivi tout de suite, avec la générosité et l'enthousiasme qui la caractérisent. L'interview a été réalisée en live sur la base d'un questionnaire que j'ai rédigé le 25 janvier. Merci pour tout, chère Véronique. Une dernière fois, je souhaite à toutes et à tous de vivre une belle et heureuse année 2013, qu'elle vous soit douce, pour vous, pour vos proches. Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche, alias Phil Defer. EXCLU
ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU
VÉRONIQUE DE VILLÈLE
Membre d'honneur de la Fondation pour la Recherche sur Alzheimer
Membre du Comité d'organisation de la Fondation
« Davina, c'est ma soeur »
(Photos fournies à ma demande par Madame Véronique de Villèle)
Entretien : 27/01/13
Paroles d'Actu : Bonjour Véronique de Villèle, comment allez-vous ?
Véronique de Villèle : Magnifique, et vous ?
PdA : Bien, je vous remercie. Heureux de vous retrouver pour une nouvelle interview Paroles d'Actu.
V.d.V. : Je suis ravie.
PdA : Lors de notre premier entretien, réalisé au mois de septembre, nous avions longuement évoqué votre engagement contre ce fléau qu'est la maladie d'Alzheimer. En 2013, j'imagine que vous répondrez également présente ?
V.d.V. : Bien sûr que oui. Nous avons notre première réunion avec le Comité d'organisation demain (le 28 janvier, ndlr) !
PdA : Le 29 septembre, Véro trouve tout n'était pas encore sorti. Cette actualité, nous l'avions à peine effleurée. Près de quatre mois après sa parution, quel bilan tirez-vous de cette aventure ?
V.d.V. : Je crois que ma maison d'édition, Hachette - Le Chêne, est très contente !
PdA : Que vous ont dit les gens qui ont apprécié ce livre ? Les retours les plus enthousiasmants, les plus touchants ?
V.d.V. : Il y en a beaucoup. On m'en parle dans mes cours, dans les magasins, dans la rue, mais ce qui est amusant, ce sont les gens qui ont essayé une adresse et qui me disent « merci ».
PdA : Qu'aimeriez-vous dire à celles et ceux qui ne l'ont pas encore acheté, lu, je pense notamment aux non-Parisiens, pour leur donner envie de le faire ?
V.d.V. : Que ce livre est un petit guide pour rendre service, et qu'il plaira aussi aux gens qui n'habitent pas Paris.
Il y a aussi plein de petits trucs et combines pour les Parisiens. La moto-taxi, géniale. La petite couturière rapide et pas chère. Une manucure en 20 minutes pour 8 €. Un salon de coiffure anti-déprime, tant l'ambiance de ce salon est top, chez Patrick Rolland, avec Rena, la meilleure coloriste de Paris. Acheter un scooter moins cher qu'ailleurs, "Rue du Scooter"... Se faire livrer un plateau de fruits de mer sublime et pas cher, etc, etc, etc...
PdA : Vous me faisiez part, la dernière fois, de votre espoir de décliner le concept à d'autres villes que vous connaissez bien. Une suite est-elle en bonne voie pour 2013 ?
V.d.V. : Nous attendons de voir ce que dira l'éditeur, mais il en est question.
PdA : Quelles seraient les villes retenues ?
V.d.V. : J'aimerais Véro trouve tout à New York... Ou à Marseille, pourquoi pas ?
PdA : Bonne idée ! Revenons maintenant, si vous le voulez bien sur quelques étapes clés de votre vie.
Tout d'abord, la collaboration qui vous a valu ce fameux surnom, "Véro trouve tout". Avant Darc-Delon, il y a eu Mireille Darc. Vous vous souvenez de votre rencontre... ?
V.d.V. : Oui, parfaitement bien. J'avais 17 ans. J'étais hôtesse d'accueil dans un grand salon de coiffure très en vogue, à Paris Carita... J'y ai rencontré beaucoup de têtes couronnées et d'actrices célèbres, dont Mireille. Un jour, elle m'a dit, « Je cherche une assistante débrouillarde avec ton énergie. C'est urgent, je pars tourner au Liban dans une semaine ». J'ai répondu, « J'en connais une, c'est moi ! ».
PdA : Belle histoire. Et vous l'avez suivie au Liban ?
V.d.V. : Après avoir eu un grand rendez-vous avec mes parents. L'examen de passage réussi, j'ai ensuite convaincu les soeurs Carita qu'il fallait que je parte... Et je suis partie à Beyrouth, sur le tournage de La Grande sauterelle, avec Hardy Krüger, Francis Blanche, etc...
PdA : Et c'était parti... Une question un peu taquine, maintenant. Alain Delon n'a pas pour réputation d'avoir le plus facile des caractères. Alors, mythe ou réalité ? ;-)
V.d.V. : C'est quelqu'un avec une forte personnalité, avec beaucoup de cœur. Il a le culte de l'amitié comme personne. Je l'adore depuis plus de 40 ans !
PdA : À quoi votre vie avec ces deux grandes vedettes ressemblait-elle ? Avez-vous à l'esprit quelques anecdotes que vous souhaiteriez partager avec nous ?
V.d.V. : J'en ai 1 000, mais mon quotidien avec eux était magique. Sur les tournages, avec Jean Gabin ou Lino Ventura... Avec Michel Audiard, chez qui j'allais en week end... ou a la campagne, tout simplement. J'ai participé à l'entraînement de (Carlos, ndlr) Monzon pour le championnat du monde de boxe organisé par Alain Delon. Je courais et nageais avec les boxeurs partenaires !
PdA : Que de belles images en tête, j'imagine... Et vous me fournissez une excellente transition pour ma question suivante. Vous vous êtes essayée à votre tour au cinéma, à plusieurs reprises. C'est un exercice qui vous plaît ?
V.d.V. : J'adore. Mon premier "petit" rôle était dans La Grande sauterelle...
PdA : Quel était votre rôle ? Vous avez de bons souvenirs de ce premier tournage ?
V.d.V. : Très bon souvenir. C'était sur une plage. Hardy Krüger cherchait partout Mireille, jusque sur cette plage où une fille (moi) était avec un jeune homme. Il arrive en fureur et decouvre que ça n'est pas elle ! Puis d'autres scènes, où je danse...
PdA : D'autres expériences ont suivi. Quels types de personnages rêveriez-vous d'incarner aujourd'hui ? Avec qui ? Delon, Darc, Max, votre talentueux filleul ?
V.d.V. : Non, je n'ai pas de préférences. Mais j'aimerais tourner avec Lelouch, car il laisse aux acteurs une part d'improvisation. Et j'aime improviser !
PdA : J'espère qu'il lira cet entretien, que l'idée le séduira ! D'ailleurs, quels genres de films recueillent vos faveurs ? Vos incontournables ?
V.d.V. : Les films d'aventures, les jolies histoires à la Claude Sautet, les histoires de sagas familiales, les histoires sur l'amitié...
PdA : Je profite de cette escapade dans le monde du 7ème art pour évoquer un autre de ses monstres sacrés, également cher à votre cœur, - il apparaît d'ailleurs dans votre ouvrage - je pense évidemment à Gérard Depardieu. Pas mal de gens lui sont tombés dessus ces derniers temps... Ces attaques vous ont fait mal ?
V.d.V. : Non, car Gérard est grand, très intelligent. Il a des ressources pour se défendre. En revanche, je deteste que l'on tombe sur quelqu'un de faible.
PdA : Diriez-vous que l'on paie trop d'impôts en France ? Pourriez-vous avoir, vous aussi, la tentation de partir ?
V.d.V. : Non. Je reste, car j'adore la France. Et je suis loin, tres loin des gros salaires dont on parle !
PdA : Sans transition... un autre moment fort de votre vie. Votre duo avec Davina. Comment vous êtes-vous rencontrées ? C'est une amie très chère, quasiment une soeur pour vous ?
V.d.V. : C'est ma soeur. Nous nous sommes rencontrées dans un cours de danse classique à Paris. Notre amitié est sans faille depuis 35 ans !
PdA : Comment êtes-vous passées de ce cours de danse classique à Gym Tonic ?
V.d.V. : Après avoir obtenu un prix dans un concours de chorégraphie et dansé sur plusieurs scènes, dont l'opéra de Toulouse, nous avons donné des cours dans un sous-sol à Paris, emmenagé en salle de danse. Tout le quartier parlait de nous... un monde de folie. Puis, la visite d'une journaliste du magazine Vital... Presque un numéro special sur nous, avec un joli titre, « Véronique et Davina, elles inventent l'énergie beauté ». Ce magazine est tombé sur le bureau d'une productrice, Pascale Breugnot. Elle vient nous voir, et nous engage sur le champ à Antenne 2 (la future France 2) !
PdA : Très belle histoire ! Une authentique success story ! Vous reconnaît-on souvent dans la rue ? Ça fait quel effet, de rester aussi populaire après tant d'années ?
V.d.V. : Oui, on nous reconnaît assez souvent, mais ce qui est le plus drôle, c'est lorsque je suis dans un magasin ou une station d'essence et que j'entends, « Regarde, regarde, c'est Véronique et Davina ! ». Alors que je suis seule !
PdA : Vous avez récemment participé à Danse avec les stars en tant que coach d'Amel Bent. Cette même chaîne, TF1, vous a posé un lapin il y a quelques jours, pour une émission...
V.d.V. : Oui, ils sont spécialistes ! Je ne le regrette absolument pas... Je devais être trop sportive, ou pas assez blonde ! C'est peut-être un mal pour un bien. Je ferai autre chose de mieux, sûrement ?
PdA : Qu'est-ce que vous aimez dans la télé d'aujourd'hui ?
V.d.V. : Les émissions de grands reportages comme Thalassa, Des Racines et des ailes, les émissions politiques, les sujets de Mireille Dumas... Les classiques, comme les émissions de Drucker... il est respectueux de ses invités, les lumières sont belles...
PdA : Ce que vous aimez moins ?
V.d.V. : La télé-réalité. Tout ce qui est navrant pour les gens... Tout ce qui ridiculise, qui manque de finesse et d'intelligence...
PdA : Si demain, un producteur vous voulait à la tête d'une émission, pour le concept de votre choix, quel serait-il ?
V.d.V. : J'ai plusieurs idées, je ne vais pas vous les donner ! Mais je me verrais bien dans une émission interactive qui rendrait service aux gens, je suis sûre que ça marcherait à fond... J'ai 2 000 idées !
PdA : C'est tout le mal que je vous souhaite, qu'un producteur prenne cette initiative de vous contacter !
V.d.V. : Alors, qu'il lise Paroles d'Actu !
PdA : Une question inspirée par mon ami Cédric Anderegg et qui nous renvoie à Gym Tonic. Quel regard portez-vous sur l'évolution des cours de fitness depuis l'émission ?
V.d.V. : Je trouve que c'est formidable, car ça incite les gens a se remuer... Mais attention ! Regardez, testez, choisissez le bon coach avant de vous inscrire dans un club.
PdA : Gym Tonic, c'était aussi une époque, les années 80. On sent qu'il y a chez certaines personnes une nostalgie pour ces années-là. C'est votre cas ?
V.d.V. : Pas du tout, mais j'adore l'idée d'aimer à nouveau quelque chose que l'on a aimé...
PdA : Revenons à Davina... Elle vit aujourd'hui dans un monastère, en harmonie avec les principes bouddhistes qu'elle a embrassés. Est-elle une source d'inspiration pour vous ?
V.d.V. : Non. En revanche, j'ai une immense admiration pour ce qu'elle fait, pour ce qu'elle est devenue. Alors, quelquefois, je me dis, « Que ferait Davina ? », « Que dirait Davina ? » dans telle ou telle situation... et je m'en inspire.
PdA : La spiritualité, la foi sont-elles importantes dans votre vie ?
V.d.V. : Je suis catholique, croyante. J'ai la foi, voilà. Mais sans débordements.
Le petit bracelet des medailles miraculeuses de "Sur la terre comme au ciel", une des adresses de mon livre...
PdA : Votre foi vous aide-t-elle à mieux accepter le départ de votre maman en mai dernier ?
V.d.V. : Oui... mais je sais qu'elle ne doit pas être très loin de moi. En tout cas, je le souhaite et l'espère de tout mon cœur...
PdA : J'en suis persuadé... Quelques évocations, avant de conclure... Je pense à Henri Salvador. Le copain au grand cœur, le camarade de pétanque...
V.d.V. : Henri était élegant. Élegant physiquement, certes, mais élegant dans son cœur. Courtois avec les femmes, généreux... C'était un ami que j'aimais beaucoup. Je garde 1 000 souvenirs merveilleux avec lui et Catherine, sa femme.
PdA : Et puis Johnny, l'éternel phénix, qui renaît toujours de ses cendres...
V.d.V. : Un être à part. Il est magique. C'est aussi quelqu'un de généreux et de simple dans la vie. J'ai passé des moments extraordinaires avec lui, Laeticia et leur famille. Je les aime.
PdA : Allez... une question d'actu que je n'avais pas prévue mais que je ne peux pas ne pas poser en ce jour. Il y a tout juste trente ans, l'immense Louis de Funès rejoignait le paradis des acteurs. C'est quelqu'un que vous aimez ? Peut-être l'avez-vous rencontré ?
V.d.V. : Génial, fabuleux... Quel acteur... Oui, je l'ai croisé un jour, aux studios de Boulogne. Il m'a dit, « Mademoiselle, vous avez de jolis yeux bleus ». Tout le monde m'a dit, ensuite, « Tu as de la chance, il est timide, ses paroles sont rares ! ».
PdA : Vous me disiez avoir une affection particulière pour le musée Rodin, à Paris. Quelles sont vos autres passions, celles que l'on ne vous connaît pas forcément ?
V.d.V. : J'aime les marchés à Paris et en province. J'aime les églises où l'on peut mettre un cierge. Je peux rester deux heures dans un magasin de papeterie ou dans une quincaillerie ! J'aime le Musée d'Art Moderne de Paris et le MoMa (Museum of Modern Art, ndlr) de New York. J'aime les bons bistrots avec des amis. J'aime la mer, le soleil et l'eau...
PdA : Au fond, comment voudriez-vous que le public vous voie, au-delà de l'éternelle Véro de Véronique et Davina ?
V.d.V. : Comme une femme banale, qui est naturelle et sur qui on peut compter !
PdA : Quels sont vos projets, vos rêves ?
V.d.V. : Un peu moins de guerres, un peu moins d'histoires, un peu moins d'impôts... Une vie calme et sereine pour tout le monde, ça, c'est pour les rêves... Et avoir une émission de radio ou de télé. Je ne crois pas, je suis sûre que ça marcherait !
PdA : En cette période de voeux, que peut-on vous souhaiter pour 2013, chère Véronique ?
V.d.V. : D'avoir une bonne santé et la même énergie, pour que je puisse continuer de la communiquer à ceux qui en ont besoin. Et que les gens pensent à et aident la Fondation pour la Recherche sur la maladie d'Alzheimer, auprès de laquelle je suis engagée depuis plus de 10 ans !
PdA : Un message pour nos lecteurs ?
V.d.V. : Qu'ils mettent un peu de soleil dans leurs cœurs, car la vie est belle malgré tout...
PdA : En voilà un beau message... En avez-vous un autre pour quelqu'un en particulier ?
V.d.V. : Non, je ne vois pas...
PdA : Un dernier mot ? Merci infiniment !
V.d.V. : Merci Nicolas pour ce moment avec vous.
Merci Véronique, merci pour tout ! Phil Defer. Un commentaire ?
Quelques liens...
- Le site de la Fondation pour la Recherche sur Alzheimer (ifrad)
- Le site officiel de Véronique et Davina
- L'ouvrage Véro trouve tout ainsi que sa page Facebook
- Suivez Paroles d'Actu via Facebook et Twitter... MERCI !
Présentation remaniée : 07/11/13.
Jean-François Derec : "Je suis né un siècle trop tard"
Avant d'aller plus loin dans la lecture de cet article, je vous invite, sans plus tarder, à cliquer sur le lien qui va suivre... Revenez après, ce serait sympa... Sisi, je vous assure, vous rateriez quelque chose... Voici donc le fameux lien. Ce sketch, vous le connaissez peut-être. Son interprète, sans aucun doute...
Jean-François Derec est depuis de nombreuses années une figure familière des Français. À la télé, à la radio, il a fait partie pendant longtemps de la joyeuse "Bande à Ruquier". Comédien populaire, il a joué dans une soixantaine de pièces de théâtre, films, téléfilms. À la ville, il compte parmi les ambassadeurs de l'association La voix de l'enfant. Un engagement généreux, discret car ne recherchant pas forcément les caméras. À son image. Et puis il y a, donc, l'humoriste, l'auteur. Il a écrit une grosse demi-douzaine de livres. Créé plusieurs one-man shows dans lesquels il s'amuse souvent, sans méchanceté mais avec malice, des petits travers de nos vies quotidiennes. L'homme au bonnet rouge est actuellement à l'affiche de Gérard Bouchard, le retour !, son nouveau spectacle.
Aussi sympathique sur le net qu'à l'écran (enfin, les autres écrans, vous m'avez compris !), il a accepté, avec une grande gentillesse et beaucoup d'humour, de se livrer au jeu des questions-réponses pour Paroles d'Actu. Merci pour tout ! Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Phil Defer. EXCLU
ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU
JEAN-FRANÇOIS DEREC
« Je suis né un siècle trop tard »
(Photo : SIPA. Celle en fin d'entretien est proposée par Jean-François Derec.)
Q : 28/09/12
R : 19/11/12
Paroles d'Actu : Bonjour, Jean-François Derec, comment allez-vous ?
Jean-François Derec : Ça baigne.
PdA : Alors comme ça, vous êtes le roi du couscous ? Pas trop déçu de n'être jamais devenu « éplucheur-chef » ?
J.-F.D. : On fait pas ce qu’on veut, on fait ce qu’on peut.
PdA : Comment se porte Gérard Bouchard ? Il y a quelques années, il avait un peu de mal à trouver son bonheur avec le téléphone rose. Ça va mieux avec internet ?
J.-F.D. : De pire en pire ! On dirait que toutes les nouvelles technologies se sont liguées contre lui pour lui pourrir la vie !
PdA : On ne vous voit plus beaucoup à la télé depuis l'arrêt de l'émission de Laurent Ruquier, On a tout essayé. Perso, ça me manque. Le petit écran vous attire moins qu'avant ?
J.-F.D. : Venez donc me voir sur scène ! Je suis un acteur et un auteur. J’ai fait de la télé par effraction, ce n’est pas ma vie.
PdA : Pendant qu'on y est... qu'est-ce que vous aimez à la télé ? Quels sont vos programmes favoris ?
J.-F.D. : Les trucs les plus cons : Confessions intimes, Enquêtes exclusives, une mine pour les comiques ! La culture à la télé, c’est un oxymore !
PdA : Vous avez joué dans pas mal de films et de téléfilms, dont La Septième compagnie au clair de lune du regretté Robert Lamoureux, avec les non moins regrettés Jean Lefebvre, Pierre Mondy et André Pousse, chef de la milice locale (dans le film !), dont vous interprétez l'un des adjoints. C'est un film que j'ai beaucoup aimé et que je regarde toujours avec plaisir, comme toute la série d'ailleurs. Vous voulez nous parler un peu de ce tournage ?
J.-F.D. : En effet je me souviens d'un gifle magistrale qu'André Pousse devait me donner. J'étais très impressionné, j'arrivais de Grenoble et André Pousse me donne une gifle. On a dû faire 10 prises. Je vous dis pas l'état de ma machoire…
PdA : Quels sont les films et les téléfilms qui vous laissent les meilleurs souvenirs ? Ceux dont vous êtes le plus fier (et que vous aimeriez inviter nos lecteurs à découvrir ou redécouvrir !) ?
J.-F.D. : J’ai aimé Marche à l’ombre et, à la télé, Clochemerle et un autre téléfilm dont j’ai oublié le nom mais où je jouais Voltaire. (Jeanne Poisson, marquise de Pompadour, ndlr)
PdA : Vous avez aussi beaucoup joué au théâtre. Quels sont les rôles que l'on vous propose, en général ?
J.-F.D. : Des rôles d’abrutis, normal pour les comiques. On nous propose souvent des photocopies de ce qu’on fait dans nos sketchs.
PdA : Quel genre de rôles aimeriez-vous jouer ?
J.-F.D. : J’aime bien jouer les abrutis.
PdA : Allons plus loin dans l'idée... Imaginons un instant que la DeLorean du Doc de Retour vers le futur existe réellement. Et que vous ayez la possibilité d'aller où vous voulez, à l'époque de votre choix. Une destination unique, un aller-retour, ou bien simplement un aller, à vous de voir... Que choisissez-vous, et pourquoi ?
J.-F.D. : Début du XXème à Hollywood, les débuts du cinéma burlesque ! Laurel et Hardy, Keaton, Chaplin ! Je suis malheureusement né cent ans trop tard !
PdA : Retour vers le futur... Transition toute trouvée pour parler ciné. Quels sont vos films préférés ?
J.-F.D. : Le mécano de la General, Les lumières de la ville, Le pigeon, Le cave se rebiffe. Le Parrain, comme tout le monde. Les westerns de Sergio Leone, bien meilleurs que tous les westerns américains.
PdA : Votre art, vous aimez aussi le coucher sur papier. En début d'année, vous sortiez La vie de famille - Chronique (presque) vraie d'une famille (presque) normale, regard amusé et amusant sur la famille présidentielle de l'époque, les Sarkozy. Depuis, on a retrouvé un "président normal". Il vous inspire quoi ?
J.-F.D. : À la base, il était moins inspirant pour les humoristes politiques (dont je ne suis pas), mais au final, mine de rien, il est assez comique avec ses deux femmes ! Moins avec sa politique. Mais la politique du dernier ne m’emballait pas non plus...
PdA : Il y a quelques années, vous écriviez votre guide, un essentiel, De la survie en milieu hostile. Internet en est un, peut-être faudra-t-il le dire à Gérard Bouchard avant qu'il n'essaie d'y trouver l'amour. Quels conseils pourriez-vous lui donner pour que ça se passe au mieux ?
J.-F.D. : Qu’il arrête de chercher l’amour sur internet et qu’il aille plus dans les bistrots ! L’imprévu, y'a que ça ! Sur internet, trop de choix tue le choix !
PdA : Bon... on va peut-être arrêter de parler de lui, vous n'en avez pas marre de lui ? Il vous suit partout. Il est pas un peu collant, ce type ?
J.-F.D. : Pas du tout ! C’est grâce à lui que j’ai payé tous mes crédits !
PdA : Dans Mes pensées à moi, vous partagez avec le lecteur... bah... quelques unes de vos pensées. Parmi elles : « Le prince Charles, c'est pas un bon exemple pour les jeunes. A 58 ans, il vit encore chez sa mère et il n'a toujours pas de boulot. Ce gars-là, il sera à la retraite avant d'avoir commencé à bosser. » À bientôt 64 ans, toujours rien... Quelques missions temporaires par-ci, par-là, la présentation de la météo, par exemple... Enfin, pas de vrai boulot... La crise, elle vous inquiète, ou bien elle vous passe au dessus du bonnet ?
J.-F.D. : Même si je dois avouer qu’elle ne me touche pas trop personnellement, je ne vis pas dans une tour d’ivoire. Un artiste a justement la capacité de s’identifier à d’autres. Et je m’identifie totalement à ceux qui souffrent, des licenciements boursiers notamment.
PdA : Votre bonnet rouge d'ailleurs, comment va-t-il ? Une vraie star lui aussi, il n'a pas trop pris la grosse tête ?
J.-F.D. : Lui un peu, il se la pète, mais moi, ça va.
PdA : Dans Le jour où j'ai appris que j'étais juif, vous revenez sur vos origines juives, que vos parents vous avaient cachées et vous ont révélées sur le tard. Quant à Derec, ça n'est pas un nom breton, comme on pourrait le croire, mais bien polonais. Que signifient ces origines pour vous, aujourd'hui ?
J.-F.D. : Ouh là ! J’ai écrit tout un livre là-dessus ! Ces origines font que je suis toujours le cul entre deux chaises. Et je comprends parfaitement ceux qui ont du mal à s’intégrer totalement. On peut avoir des papiers français, mais se sentir totalement français... c’est une autre paire de manche.
PdA : Voilà pour le récapitulatif. Votre actualité, c'est votre nouveau spectacle, Sketch(s) (Gérard Bouchard, le retour !), que vous jouez au théâtre du boulevard Saint-Martin, depuis le 14 septembre et jusqu'à la fin de l'année... Voulez-vous nous en parler ?
J.-F.D. : Vous savez, le comique, plus on en parle, plus c’est chiant ! Je préfère que les spectateurs en parlent ! (Ils le font ici, et plutôt en bien... ;), ndlr)
PdA : Qu'aimeriez-vous dire à nos lecteurs pour les convaincre que vraiment, c'est un bon spectacle, et qu'il faut y aller ?
J.-F.D. : Rien, je ne suis pas un vendeur de cuisines équipées ! Cela dit, ils peuvent aller voir 2 sketches sur Youtube :
http://www.youtube.com/watch?v=CmQ5DXXGFEE&feature=youtu.be
et
http://www.youtube.com/watch?v=YQ9io8AzMlw&feature=youtu.be
PdA : Je suis de Lyon moi, il y aura une tournée ?
J.-F.D. : J’adore Lyon, j’y ai habité quand j’étais petit, (Boulevard des Brotteaux) et je passerai bien sûr à Lyon pour ma tournée !
PdA : Qu'est-ce qui vous inspire, pour vos spectacles, et dans la vie ?
J.-F.D. : Tout et rien. Parfois, un petit détail qui passe inaperçu suffit pour faire un sketch. Il faut observer donc toujours se sentir un peu en dehors.
PdA : Quels sont, parmi vos collègues, ceux qui vous font franchement rire ?
J.-F.D. : Tous ! Je vais quand même par dire du mal de mes collègues de bureau que je peux croiser n’importe quand !
PdA : J'imagine que vous aimez rire... mais à part ça, quelles sont vos passions ?
J.-F.D. : La drogue, le sexe, et la poterie le dimanche.
PdA : Quels sont vos projets pour la suite ?
J.-F.D. : Un film comique un peu special... mais je ne peux pas en dire plus !
PdA : Que peut-on vous souhaiter, cher Jean-François Derec ?
J.-F.D. : D’avoir encore de l’inspiration !
PdA : Voudriez-vous adresser un message à nos lecteurs ? À quelqu'un en particulier ?
J.-F.D. : À tous, sans les flatter, je crois que c’est les meilleurs lecteurs que j’ai eus depuis longtemps !
PdA : Un petit scoop peut-être, en exclu pour mon p'tit blog Paroles d'Actu ? ^^
J.-F.D. : Un scoop : dans un minute, je vais boire le meilleur chocolat du monde... celui de ma femme !
PdA : Un dernier mot ? Enfin, un ou plusieurs hein, vous avez compris l'idée... c'est pour conclure comme vous le souhaiterez cette belle interview. Merci de tout coeur !!!
J.-F.D. : Ouf ! Dis donc, avec toi, on en a pour son argent dans les interviews !
Merci encore pour votre générosité, cher Jean-François Derec ! Tous mes voeux de succès... Phil Defer. Un commentaire ?
Pour retrouver Jean-François Derec...
- Gérard Bouchard, le retour !
- Sa vie, son oeuvre, ses livres...
- L'association La voix de l'enfant
- Suivez Paroles d'Actu via Facebook et Twitter... MERCI !
Présentation remaniée : 11/11/13.
Gilles Verlant : "Fier de ce travail avec Michel Drucker"
Cet article commencera, une fois n'est pas coutume, par un mea culpa. À l'occasion de mon interview d'Alain de Greef, il y a quelques semaines, j'avais notamment fait mention de son ouvrage "Vous regardez trop la publicité". Oubliant un peu rapidement d'indiquer qu'il y avait un coauteur. Non des moindres... Gilles Verlant, né à Bruxelles en 1957, est un mordu de musique, de rock en particulier. Depuis le début des années 70, il a enchaîné sans temps mort les participations - souvent en tant qu'animateur - à des émissions de radio, de télévision. Auteur prolifique, il a écrit avec brio la bio de Gainsbourg, qu'il a beaucoup côtoyé vers la fin de la vie de l'artiste. Le rock n'est pas en reste, il en publie dans son dernier opus la "scandaleuse histoire", précieux recueil d'anecdotes qui fait écho à son émission quotidienne sur France Bleu - Radio France. Et puis il y a le petit écran. Outre l'ouvrage évoqué au début, je citerai simplement "Les 500 émissions mythiques de la télévision française", coécrit avec Michel Drucker. Une véritable encyclopédie, richement détaillée et illustrée, la transmission par deux illustres passeurs d'une mémoire passionnée, passionnante, celle d'un demi-siècle de PAF. Voici donc un panorama rapide et loin d'être exhaustif du parcours de Gilles Verlant (pour en savoir plus, voir son site). Il a accepté de répondre à mes questions pour Paroles d'Actu. Je tiens à le remercier ici pour la gentillesse dont il a fait preuve à mon égard. J'ai été frappé, durant notre échange, par la modestie, le besoin de reconnaissance de cet homme qui a déjà, pourtant, tant accompli. Et je suis heureux de pouvoir réparer d'une aussi belle manière mon omission. Merci, Monsieur ! Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Phil Defer. EXCLU
ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU
GILLES VERLANT
Auteur
Homme de radio et de télévision
"Fier de ce travail avec Michel Drucker"
(Photo fournie par Gilles Verlant)
Q : 10/11/12
R : 13/11/12
Paroles d'Actu : Bonjour Gilles Verlant. Votre ouvrage sur "Les 500 émissions mythiques de la télévision française" (Flammarion), coécrit avec Michel Drucker, est disponible depuis quelques semaines dans toutes les bonnes librairies. Quelle est l'histoire de ce projet au départ très ambitieux ?
Gilles Verlant : À l'origine, c'est une idée de Flammarion, notre éditeur. Question : "Combien d'émissions mythiques ?" Question subsidiaire : "Avec qui pourrais-tu écrire le livre, une personnalité qui symbolise l'histoire de la télévision ?" J'ai appelé Michel Drucker, avec qui j'avais déjà travaillé et qui a apprécié mon travail sur Gainsbourg. Il m'a donné son accord en 2 minutes. Ensuite, 2 ans et demi de boulot... et de plaisir ! Sauf que Flammarion s'attendait pas à ce qu'il y en ait 500, des émissions... ni que le livre nécessite un an de travail en plus !
PdA : Comment vous êtes-vous organisés pour l'élaboration du livre ? Qui a fait quoi ? À la fin, c'était plutôt le soulagement de l'avoir terminé, la tristesse de voir une belle aventure s'achever... ? Les deux, j'imagine ?
G.V. : Élaboration des listes, entretiens avec Michel, retranscription de ceux-ci, recherches (parfois infernales), écriture. À la fin, surtout un soulagement. Le travail a été très long, notamment pour donner les bonnes infos "techniques" sur les émissions : date de début, de fin, périodicité, etc. Tous les livres antérieurs étaient truffés d'erreurs. Nous avons, Michel et moi, signé un ouvrage de référence, je le dis sans forfanterie ! Ce livre, incroyable mais vrai, n'existait pas !
PdA : Ces dernières semaines, il y a eu pas mal de promo pour votre livre, notamment à la télévision. Mais bien souvent, celle-ci était assurée par Michel Drucker seul. Certes, vous me direz sans doute qu'il a été une locomotive formidable pour votre travail collectif. Malgré cela, franchement, est-ce que ça ne vous a pas un peu agacé de ne pas être sollicité autant que lui pour défendre votre enfant commun ? Ou peut-être est-ce vous qui avez préféré rester en retrait... ?
G.V. : Il est naturel que Michel soit sollicité plutôt que moi, il est porteur du projet autant que moi et il a une notoriété aussi considérable que méritée. Ce qui m'agacerait, c'est qu'on ne salue pas le travail qui a été effectué, ou qu'on me bombarde de mails en relevant des erreurs factuelles. Or, 6 semaines après la sortie du livre, pas un seul mail... et des articles flatteurs sur le sérieux du projet.
PdA : Quelles ont été, à vos yeux, les meilleures émissions de la télé française ? Celles qui vous ont le plus marqué ?
G.V. : Les 500 qui figurent dans le livre... Non, j'exagère. Mais je me suis aperçu, étant né en 1957, que j'avais des souvenirs assez précis des émissions à partir de, disons, 1966-67 ; certains choix, validés par Michel, sont très personnels !
PdA : Petit décrochage... qui va nous permettre d'aborder, au travers d'une image télé marquante, une autre de vos passions. La musique. Serge Gainsbourg. 1986, Champs Élysées. La toute jeune Whitney Houston rencontre celui qui glisse de plus en plus vers son avatar obscur, Gainsbarre. Immense artiste que vous avez bien connu, surtout à cette époque. Il est parti il y a un peu plus de vingt ans... Que ressentez-vous, en pensant à lui ? Qu'aimeriez-vous dire aux jeunes qui ne le connaissent pas forcément bien pour les inciter à s'intéresser à son oeuvre ?
G.V. : De ne pas s'arrêter à Gainsbarre, de lire ma bio, disponible en poche pour 10 €. D'abord parce que c'est un livre dont je suis fier, très fier, et qu'il raconte une histoire fantastique. En le lisant, je conseille d'écouter TOUTES les chansons dont je parle. Parce que Serge fait partie de notre ADN, de ce que nous sommes aujourd'hui... même si certains n'en sont pas conscients !
PdA : Champs Élysées... Michel Drucker, évidemment. Il est comment dans la vie ? Aussi sympa qu'à l'écran ? En quatrième de couv', il qualifie votre livre de "bible pour tous ceux qui s'intéressent à l'histoire de la télévision en France". Ça fait quoi, d'ailleurs, de côtoyer ainsi le Pape de la télé ? ;-)
G.V. : Ce fut un régal de travailler avec lui et j'espère bien qu'il y aura des prolongations. Je crois que le connais bien, j'aime ses qualités (professionnalisme, humour, disponibilité, enthousiasme) et ses défauts (son côté hypocondriaque, ses inquiétudes infondées). C'est un garçon fidèle, respectueux du travail bien fait, on se ressemble beaucoup, malgré notre (petite) différence d'âge : 15 ans seulement !
PdA : Quel regard portez-vous sur la télé d'aujourd'hui ? Êtes-vous de ceux qui la trouvent plus lisse qu'avant ? Peut-être plus prompte à faire dans la fausse provoc', le fond en moins ? Un commentaire sur le CSA, peut-être ?
G.V. : Je n'en peux plus des émissions où on passe plus de temps à voir des gens applaudir à n'importe quoi, sur commande. Faudrait qu'un jour quelqu'un calcule le temps qu'on passe à subir des "applauses"... Ça et le faux suspense de merde de "Masterchef". Et Carole Rousseau en général.
PdA : Quels programmes actuels - pas forcément français ni même à la télé française - trouvent grâce à vos yeux ?
G.V. : C à vous, Le Petit Journal, Les Sophie au Grand Journal, "Bref" l'an dernier. Norman fait des vidéos. "Funny Or Die".
PdA : Vous êtes fan de musique, nous allons y revenir dans un instant... Est-ce que vous rejetez sur le principe les émissions de "télé-crochets" ? Si tel n'est pas le cas, que manque-t-il pour qu'elles soient vraiment de qualité ?
G.V. : Rejet total. Parce qu'on nous impose des ersatz de chansons qui n'en ont pas besoin. Je crois au circuit normal, légitime, du parcours d'un artiste.
PdA : "La scandaleuse histoire du rock", c'est le nom de votre émission sur le réseau France Bleu. C'est aussi depuis le mois dernier l'ouvrage que vous avez coécrit avec Jean-Éric Perrin. Voulez-vous nous en parler ? En quoi est-il, pour les amoureux du rock comme pour les amateurs de musique, une référence à découvrir ?
G.V. : Parce que j'aime bien raconter des histoires et que je crois que je les raconte bien... J'en veux pour preuve les records de podcasts... Ecoutez quelques chroniques sur le site de France Bleu ou sur la page Facebook dédiée et si ça vous botte... achetez le livre !
PdA : Quels albums, quels artistes - connus ou qui gagnent à l'être - aimeriez-vous conseiller à nos lecteurs ? Votre top 5 ou 10 ?
G.V. : À la date du 13 novembre, 19h 30 : The Allah La's, Broken Note, The Fresh & Onlys, le nouveau Donald Fagen, le nouveau Neil Young, le nouveau Biolay... J'ai publié une "Discothèque parfaite de l'Odyssée du Rock" qui propose 300 albums et 3000 chansons... Commencez par là et donnez-moi de vos nouvelles !
PdA : Retour à la télé... Parlons de nouveau des "500 émissions mythiques de la télévision française"... Parmi les éléments ayant contribué à en faire parler, dans la presse et les médias, il y a notamment les "gentilles vacheries" glissées par Michel Drucker sur certains confrères. Et vous ? Avez-vous des commentaires à faire sur certaines figures du petit écran ?
G.V. : J'ai montré ma gueule à la télé à partir de l'âge de 15 ans, je sais ce que "ça fait". Et c'est un piège. Et je vois dans le regard de certains animateurs le désespoir de celui qui veut à tout prix se montrer. Hey, les gars (et les filles), ce n'est QUE DE LA TÉLÉ ! Ni du cinéma, ni du spectacle vivant... Autrement dit, pas grand chose, une notoriété bâtie sur du sable... Célèbre (faussement) un jour, oublié demain : ne vous accrochez pas désespérément à l'objectif de la caméra...
PdA : Que pouvez-vous dire à nos lecteurs pour leur donner envie d'acheter le livre ?
G.V. : Vous aimez la télé ? Ce livre est la meilleure façon de la regarder SANS L'ALLUMER ! c'est magique, non ? ET quelque part, en filigrane, ça raconte nos vies, que vous soyez né en 1950, 60, 70, 80 ou 90 !
PdA : Que peut-on vous souhaiter, Gilles Verlant ?
G.V. : Un best-seller, je le dis franchement. Que je ne sois pas connu seulement comme "le biographe de Serge Gainsbourg", même si cela me flatte au-delà de ce que vous pouvez imaginer. J'aimerais que mon travail de fourmi soit reconnu à sa vraie valeur : personne ne s'était lancé dans une histoire de la télé comme celle-ci. Je suis fier d'avoir pu effectuer ce travail avec Michel Drucker, j'aimerais que quelqu'un se réveille un jour et se dise "oh putain, ce Verlant, finalement, il a fait des choses valab' !"
Ce best-seller, cher Gilles Verlant, je vous le souhaite de tout coeur. Merci encore pour tout ! Phil Defer
Merci
Pour retrouver Gilles Verlant...
Sur France Bleu - Radio France : "La scandaleuse histoire du rock" (du lundi au vendredi)
Sur Facebook : "La scandaleuse histoire du rock"
L'ouvrage "La scandaleuse histoire du rock"
L'ouvrage "La discothèque parfaite de l'odyssée du rock"
L'ouvrage "Les 500 émissions mythiques de la télévision française"
"Gainsbourg", par Gilles Verlant