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Paroles d'Actu
16 décembre 2014

Florian Bunoust-Becques : "La culture, un art made in France"

À la suite de conversations que nous avons eues autour de sujets divers et variés, politiques ou non, j'ai eu envie d'inviter Florian Bunoust-Becques, étudiant, jeune citoyen engagé dans la "vie de la cité", à écrire pour Paroles d'Actu un texte, une sorte de tribune portant sur une thématique dont je savais qu'elle lui importait et qu'elle était fortement susceptible de l'inspirer : la culture. Sa réponse m'est parvenue le 15 décembre. Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche, alias Phil Defer. EXCLU

 

PAROLES D'ACTU - LA PAROLE À...

Florian BUNOUST-BECQUES: « La culture,

un art 'made in France' »

 

Florian Bunoust-Becques

Crédits photo : Xavier Santagata.

 

   Elle est le reflet de nos songes, ceux de nos jours opaques et de nos soleils quotidiens. Si la musique « adoucit les mœurs », la culture est le reflet de nos pensées obscures et de nos joies. L'art canalise les sens, il concentre l'instant d'émotion en une matérialisation abstraite. Décoder l'art, c'est vouloir pénétrer dans l'intimité de l'artiste. Se faire le psychiatre de Picasso, Lamartine, ou Mozart... Vaste ambition. Art et culture sont indissociables et complémentaires. C'est un monde parallèle qui sommeille. Des vieilles pierres aux collages plastiques, la démarche solitaire vers la culture ne doit pas être considérée comme une fatalité. Au contraire.

   À l'heure où notre quotidien est tourné vers l'individualisme des modes d'expression et de communication, chacun détient ses propres sources d'accès au savoir. Une société qui tend vers un matérialisme exacerbé. Soit. Acceptons-le ou refusons-le, mais ne combattons pas la démarche personnelle qui consiste, un jour ou l'autre, à franchir la porte de l'un de nos 1 200 musées, à vouloir visiter une bibliothèque ou une exposition. Chercher à pousser, par des moyens maladroits, le citoyen vers des lieux concentriques est une erreur. Encourager l'accès à des lieux de rencontres et d'échanges est, je crois, préférable. C'est d'ailleurs, à mes yeux, la solution qui permettra de développer davantage l'éveil culturel, et notamment chez les plus jeunes.

   En France, contrairement aux idées reçues, et malgré un contexte économique difficile, le nombre de visiteurs des lieux touristiques et culturels a augmenté de manière significative (il sétablissait à 62 millions en 2013). Si les étrangers sont friands de la culture et du patrimoine hexagonaux, les Français eux-mêmes tendent à s'intéresser davantage à leur propre richesse culturelle. Ils sont même de plus en plus nombreux, depuis quelques années, à privilégier les séjours français par rapport aux destinations européennes. Un repli sur soi, diront certains, un choix économique et aussi... patriotique pour d'autres. Le succès du « Puy du Fou », en Vendée, classé meilleur parc au monde par le Thea Classic Award 2012, a récompensé un projet qui a su mettre en scène l’histoire par une approche ludique et familiale ; rien de mieux pour séduire petits et grands. Quoi qu'il en soit, la France attire. la France rapporte : la valeur ajoutée directement liée au tourisme était estimée, en janvier 2014, à 57,8 milliards d'euros - soit 3,2% du PIB.

   Pour favoriser cette démarche, plusieurs moyens s'offrent à nous, ou plutôt à ceux qui ont les pouvoirs d'engager ces grandes dynamiques : les pouvoirs publics. N’en déplaise à Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication, la politique culturelle engagée depuis de nombreuses années consiste à promouvoir les artistes modernes, au détriment de notre patrimoine historique. Dans ce domaine, c'est la part belle faite aux contemporains face aux érudits du classicisme, relégués au second rang, non faute de public, mais, ai-je envie de dire, par idéologie. Un constat que partage Ben Lewis, critique d'art et réalisateur britannique : « Je ne dis pas que l'art contemporain n'est pas de l’art. Je dis que c'est du mauvais art. Britannique et témoin direct de l'émergence de la scène anglaise, je connais nombre des artistes qui ont fait de l'art contemporain ce phénomène financier, émotionnel et envahissant. » On est saisi par ce contraste aisément perceptible entre, d'un côté, le financement d'expositions mettant à l'honneur un artiste, parfois pour plusieurs millions d'euros - bien souvent, des caprices de riches mécènes -, alors qu'au même moment, nombreuses sont les fondations, associations, galeries d'art, théâtres et compagnies artistiques qui crient famine et errent à la recherche de la moindre subvention, de quelques milliers d'euros. Oui, la politique culturelle entretient aujourd'hui un fossé extraordinaire d'inégalités des dotations et des financements de l’État et des donateurs privés. Un État qui, au même moment, tente de passer en force sur le régime des intermittents du spectacle. Un non-sens loin d'être profitable à l'image des artistes et des acteurs culturels en France. Un secteur qui, pour information, génère près de 670 000 emplois directs et contribue sept fois plus au PIB que l’industrie automobile.

   Si la dynamique ne vient pas d'en haut, elle doit venir de la base. L'échelle locale est actuellement la plus active et généreuse dans la promotion culturelle. Communes et collectivités locales ont pris depuis plusieurs années le relais de l’État sur ce sujet, notamment par la promotion et le financement de nombreux festivals, salons et fêtes thématiques associant patrimoine et terroir - du "Made in France" local apprécié à la fois par les autochtones et par les nombreux touristes de passage chez nous. Les milieux associatifs sont aujourd'hui de puissants relais, mais aussi développeurs de culture. Ce sont plusieurs dizaines de milliers de personnes qui participent à la vie des 25 000 associations culturelles qui se créent chaque année. Une tendance en sursis, compte tenu des coupes budgétaires et de la baisse des dotations envers les collectivités. De l'argent en moins qu'il va falloir économiser ailleurs. La culture en première ligne, dans l’ombre de la précarité.

   La culture n'est pas uniquement - et ce depuis longtemps - le monopole des toiles, sculptures, concerts... Elle est un mode de vie, une trace du passé et la figure de l'avenir. Elle est cette sève qui coule dans les veines d’un pays. La culture, c'est le rapprochement de la terre aux racines, à l'attachement spirituel et philosophique de l'homme avec un grand « h ». Ce qui est visible et imperceptible. Ce que, parfois, seul l'imaginaire peut transcrire… La culture vient nourrir l'art, celui du quotidien comme des grandes manifestations populaires. L'un se faisant le reflet de l’autre. Miroir chronophage de ces artistes, les « beaux-arts » ont tendance à devenir la transgression du vrai et du réel. Irriguée par des empreintes fortes, la culture française nourrit une passion dévorante pour certains, un regard dubitatif pour d’autres. Cette culture séculaire où sont brocardés, à coups de jugements tutélaires ou prohibitifs, tel ou tel témoignage de l'histoire et du temps. Une idée partagée avant l'heure par André Malraux dans La Métamorphose de Dieu : « L'œuvre surgit dans son temps et de son temps, mais elle devient œuvre d’art par ce qui lui échappe. » Autant dire que les occasions de promotion de la culture sont multiples, même si le contexte actuel n'est malheureusement pas toujours enclin à tirer celle-ci vers les sommets auxquels elle pourrait prétendre. Là où l'art s'exprime, la communauté bat son plein, les idées naissent, foisonnent et fusionnent, les projets se concrétisent, et la France s'épanouit.

 

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Commentaires
E
La culture française est celle des plus appréciées dans le monde.
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B
Je suis tout à fait d'accord avec ce jeune Florian et je pense que la pensée de MALRAUX est encore d'actualité bien que par une hégémonie du pouvoir on essaye de la bâillonner.
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