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Paroles d'Actu
18 avril 2016

« Si la Constitution m'était confiée... », par Henri Temple

Que conviendrait-il de faire pour améliorer les institutions politiques et la vie démocratique en France ? Suite de notre série d’articles et interviews sur la thématique : « Si la Constitution m’était confiée... ». Avec aujourdhui, cinq jours après la publication de la tribune-réflexion du constitutionnaliste Bertrand Mathieu sur le référendum, un nouvel apport qui à coup sûr ne manquera pas de nourrir les débats : celui d’Henri Temple. M. Temple est universitaire et avocat. Sa spécialité, parmi dautres domaines dexpertise : le droit appliqué à léconomie - consommation, concurrence, libre circulation... Ce membre du mouvement Debout la France de Nicolas Dupont-Aignan, dont il est proche, nous livre ici, en exclusivité pour Paroles dActu, létat de ses réflexions personnelles sur ces sujets - avec en tête la notion de souveraineté. Un texte qui mobilise, qui questionne et interpelle... je len remercie. Par Nicolas Roche.

 

Si la Constitution m’était confiée...

par Henri Temple

Constitution de 1958

Illustration : page des signatures de la Constitution de 1958, avec le sceau de France (Archives nationales).

 

Pour aller droit au but, nous constaterons d’emblée que même ceux qui en sont les premiers destructeurs, proclament qu’il faut améliorer le fonctionnement démocratique des cadres institutionnels où nous vivons. C’est dire à quel point ces cadres sont délabrés au regard des attentes des être humains.

Car au fond ce qui importe c’est que l’être humain soit impliqué dans la vie et dans les choix de sa collectivité. Or il ne l’est plus car les libertés fondamentales ont été érodées, tant au plan national interne qu’au plan international, alors qu’il n’est pas de bonheur personnel ni d’efficacité sociale sans liberté. Nous ferons le constat de la perte des libertés (1) en nous fondant sur quelques extraits du livre très récent de Nicolas Dupont-Aignan (France, lève-toi et marche, Fayard, mars 2016). Puis nous reviendrons aux sources et aux fondements de la vie en société (2). Avant de proposer les voies du salut public (3).

 

1) Le constat de la perte des libertés

1.1) Perte de la liberté interne

Le peuple est privé de ses libertés par une oligarchie et une classe politique qui le trahissent. Une élite formatée et incapable de se réformer (Michel Crozier, La crise de l’intelligence, 1995), quand certains pensent même que c’est délibérément qu’elles tentent d’évacuer les libertés. Le summum de la haute trahison, relevant même de la justice pénale, a été la ratification par le Parlement du Traité de Lisbonne en 2008. Tant parce que le Peuple s’était prononcé contre, trois ans auparavant, que parce qu’il s’agissait du transfert de sa souveraineté par d’autres que lui-même, à d’autres que lui-même. En quelque sorte le gouvernement du peuple, par l’élite pour l’élite.

N.D.-A., P. 45-50 : « Oui, Valéry Giscard d’Estaing, en acceptant le regroupement familial en 1976, Jacques Chirac, Lionel Jospin, en signant le Traité d’Amsterdam, Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Fillon, Manuel Valls en avalisant l’impuissance européenne, tous ont une responsabilité écrasante. » (...) « Une démocratie confisquée par une caste un régime de partis qui chassent en meute, en réseaux, en lobbies, au service d’intérêts puissants. » (...) « Nicolas Sarkozy s’est donc précipité, dès le 21 juin 2007 seulement un mois après son élection, à Bruxelles pour promouvoir un traité l’empêchant de faire ce qu’il avait promis de faire la veille... aux Français ! »

P. 69-70 : « Il est fondamental de comprendre l’enchaînement des événements qui a mené à cette dépossession (de nos pouvoirs) sans précédent depuis la guerre de Cent Ans, ou... le régime de Vichy. » (...) « Il ne peut y avoir de soumission durable à un occupant extérieur sans la collaboration active d’une partie des occupés qui y trouvent pour certains leur compte. » (...) « L’occupation... n’est plus militaire, elle est économique, culturelle et même migratoire. Quand un peuple n’est plus maître de son destin, il est... colonisé. » (...) « Il y a une oligarchie transnationale qui s’est peu à peu constituée et qui est persuadée de défendre la ’’modernité’’. Pour ces gens-là, il y a d’un côté le bien, qui mêle habilement l’internationalisme post-soixante-huitard à la défense de leurs intérêts, et, de l’autre côté, le ’’mal’’, incarné par tous ceux qui refusent leur domination. » (...) « L’Union européenne a été le cheval de Troie d’intérêts qui ont trouvé là le moyen d’échapper au contrôle populaire. »

P. 178 : l’habileté ignoble de cette oligarchie est de culpabiliser le peuple français, « En montrant toujours du doigt les supposées faiblesses congénitales du peuple français, l’oligarchie... transfère en fait sur lui sa propre responsabilité. Elle infantilise le peuple exactement comme le faisaient les occupants des territoires conquis. La destruction systématique et volontaire de l’enseignement de l’histoire à l’école participe de cette déconstruction du sentiment d’appartenance à la France. » (...) « Aucun pays n’a poussé aussi loin une telle dévalorisation collective. »

 

1.2) Perte de la liberté internationale (perte d’indépendance)

Que ce soit la finance, le budget, la monnaie, l’économie, le commerce, l’agriculture, les services publics, la protection sociale, la défense, la politique étrangère, le droit, l’immigration et les frontières : tout ce qui est l’apanage d’une nation libre et digne est désormais asservi au contrôle d’instances extérieures non élues ou même à des États étrangers...

N.D.-A., P. 62 : « Il faut quand même n’avoir aucun scrupule (c’est de Hollande qu’il s’agit)... pour prononcer le discours du Bourget (« Mon adversaire c’est le monde de la finance »)... puis faire ratifier le traité budgétaire Sarkozy-Merkel qui place sous tutelle de la Commission européenne le pouvoir budgétaire de la France (article 8 du traité signé en mars 2012). »

P. 64 : « ...surtout les intérêts des banques. Avec l’euro, elles ont la certitude de prêter aux États avec des intérêts. »

P. 174 : « Le vrai combat aujourd’hui... n’est pas entre la droite et la gauche, mais entre la finance mondiale, qui a acheté nos gouvernements d’opérette et les États-nations encore au service de leur peuple. »

 

1.3) Un système des partis servi par un système électoral destiné à maintenir les partis manipulés par les élites

N.D.-A., P. 123 : « Quatre millions de nos concitoyens ne sont plus inscrits sur les listes électorales, la moitié seulement des 44 millions d’électeurs inscrits vote. Parmi ces derniers, ceux qui votent blanc ou nul sont un nombre important (1,2 à 1,6 million)... Cela veut dire que 60% des Français en âge de voter ne se sentent plus concernés par la vie politique de notre pays… Ce sont eux qui détiennent le sort de la France entre leurs mains… Encore faudrait-il ajouter que, sur les 40% qui s’expriment, ce sont les candidats d’un des deux gros partis duopolistiques représentant au premier tour guère plus d’un quart (environ 10 % des Français ’’réels’’) qui l’emporteront. Aucune démocratie ne peut survivre à cette tragique farce. »

 

2) Retour aux sources et aux fondements de la vie en société

Il est donc vital de revenir aux sources. Au sens, à l’essence, aux fondements de la vie en société.

 

2.1) Alors que leurs sociétés étaient bien moins peuplées et beaucoup moins complexes, les Grecs antiques se posèrent très tôt la question de la vie en société. À la fois parce qu’elle est consubstantielle à la nature et au bonheur de l’homme, et parce que la solidité de la société est vitale pour le peuple.

Le plus grand philosophe de tous les temps écrivit (dans La politique) que la philosophie politique est la « philosophie première ». Car l’homme, y dit-il aussi, est par nature un animal politique [c.à d. social et civique], « et celui qui est sans Cité, naturellement et non par suite des circonstances, est ou un être dégradé ou au-delà de l’humanité… comparable à l’homme traité ignominieusement par Homère de  : sans famille, sans loi, sans foyer, apatride, tison de discorde, comparable au jeton isolé du jeu de tric trac… ».

Il faudra attendre des siècles pour que, sur ce socle puissant, la réflexion reprenne.

Le christianisme, d’abord néoplatonicien (Plotin), attribua à la vie en société soit une essence (Thomas d’Aquin) soit une finalité spirituelles (Augustin, Jean de Salisbury). L’idée selon laquelle c’est le ’’droit divin’’ qui justifie le pouvoir (Saint Bonaventure) suscita, en réaction, celle de l’existence d’un contrat social (Locke, Rousseau).

Cette idée ’’contractualiste’’ est associée à celle de nation par Renan (créateur du concept du ’’vivre-ensemble’’), mais, en France, est obscurcie par une pseudo mystique de l’État. Une idéalisation recouvrant (mal) le concept très machiavélien de la recherche de la force, celle de l’État et de son Prince. Or cette conception française déviante a prévalu dans la construction européenne initiale très inspirée - et pour cause - par les Français. Désormais le Monstre bruxellois met la domination par un super-État étouffant à la française au service d’objectifs ultra-libéraux, à l’américaine... Le résultat est tel que ce que chacun peut endurer dans sa vie personnelle ou professionnelle (ou celle de ses proches). Et peut constater aux plans diplomatique et militaire.

Face à un vrai grand besoin de panser les plaies du corps social, les ’’intellectuels modernistes’’, socialistes (ou plus), s’en prennent au concept de nation et d’identité nationale. Ils confondent en cela le débat politicien et le débat scientifique qu’ils corrompent (ils substituent - contrairement à ce que recommande Bachelard - l’assertorique à l’apodictique).

Un auteur important revient, avec une force renouvelée, au contractualisme rousseauiste : John Rawls (Théorie de la justice, 1971). Rawls soutient que les individus derrière le voile de l’ignorance choisiraient deux principes de justice : les principes de liberté et d’égalité - chaque personne a un droit égal aux libertés les plus étendues compatibles avec la liberté des autres. Notamment l’égalité des chances. C’est cette acceptation implicite qui fonde le but médian consensuel du vivre-ensemble.

 

2.2) Mais Rawls travaillait dans les années 60 à 90, avant le début des grands flux démographiques, de l’effondrement de l’URSS, des constructions politiques et économiques supranationales, des questions de mixité et d’hybridation culturelles. Comment, dès lors, préserver les principes de libertés individuelles dans des sociétés qui ne sont plus libres de leurs choix ?

C’est la raison pour laquelle il nous a paru indispensable d’étudier le concept de nation dont le sociologue Edgar Morin notait, avec regret, qu’il restait à définir. Avant ou après la Seconde Guerre mondiale, ni Mauss, ni Benda, ni Mounier n’en étaient véritablement venus à bout. Mais il n’est pas question de traiter ici ce sujet si vaste, et on pourra donc se référer à nos ouvrages sur le sujet (Théorie générale de la nation, L’Harmattan, 2014 ; Sentiment national et droit, Cahiers de psychologie politique, en ligne, juil 2014 ; Théorème du ’’nationisme’’, ibidem, juill 2015 ; Identité nationale et droits de l’Homme, La Sorbonne, 11 mars 2016, à paraître).

Désormais on ne pourra plus poser les questions de démocratie et de constitution avant d’avoir posé celle du cadre national et donc du contour du fait identitaire propre à ce cadre; ni sans avoir posé celle du contrat social avant celle du consensus national.

 

2.3) Dès lors, une fois défini le cadre national - et les conditions du maintien de sa cohérence et donc de sa cohésion - où s’exercera la démocratie, il est possible de reprendre la réflexion au sujet des principes de fonctionnement d’une société nationale.

Or la particularité de l’homme national cesse d’être nationale lorsque cet homme est immergé dans sa propre nation. Il n’est plus qu’un homme, un citoyen parmi les siens, dont les aspirations se forment selon des démarches identiques pour chaque biotope ethnologique à la surface de la planète. Toutefois si le consensus est remis en cause par un sous-groupe tout entier, c’est très grave, car le lien social ne se crée plus ou est détruit (Bosnie, Liban, Irlande…). Aristote (LÉthique...) indique que l’amitié est ce qui est le plus nécessaire pour vivre. La qualité du rapport à l’autre. En réalité ce que le plus grand des philosophes appelle amitié est le « lien entre citoyens pour le bien commun de la cité », que l’on peut traduire par solidarité, fraternité et empathie nationales. N’oublions pas qu’Athènes n’avait ni police ni armée de métier. Le ’’lien pour le bien commun’’ était condition de survie ; ou la concorde (en grec omonoia), une notion capitale pour l’unité de la cité que Jacqueline de Romilly a su repérer dans les textes très anciens.

De plus, ce consensus identitaire va générer des réactions en chaîne vertueuses : l’identité génère le consensus, le consensus crée la solidarité nationale, puis la solidarité exige la cohésion économique : « À celui qui n’a plus rien la patrie est son seul bien », « La Nation est le seul bien des pauvres » savait bien Jean Jaurès. Les solidarités nationales, hommes/femmes, adultes/enfants, jeunes/vieux, riches/pauvres, célibataires/familles, valides/malades, sont assurées par des cotisations, l’impôt ou le service militaire, l’école, l’hôpital, le chômage, les retraites, la police, l’armée, la justice… Le sentiment et le consensus nationaux sont à leur tour confortés, outre leurs réalités sociologiques, culturelles et affectives, par les nécessités politiques et économiques : se gérer ensemble, décider ensemble, car l’homme national est tributaire des nécessités socio-économiques (produire, consommer, partager, répartir).

John Rawls est donc aristotélicien quand il affirme : « La justice est la première vertu des institutions sociales comme la vérité est celle des systèmes de pensée ». (Théorie de la Justice, Seuil, 1997, p.29) En établissant explicitement une isonomie entre le principe essentiel de la pensée spéculative et celui du politique, J. Rawls fonde une théorie politique et sociale reposant sur la recherche constante de règles de justice et cherche à rendre cette quête compatible avec le plus haut niveau de liberté (une égalité effective des chances). Dans son dernier ouvrage (Libéralisme politique, 1993), Rawls résume ainsi ses premiers principes de justice sociale : « Les inégalités sociales doivent d’abord être attachées à des fonctions et à des positions ouvertes à tous, dans des conditions de juste égalité de chances ».

Toutefois Rawls non seulement ne définit pas la nation mais il ne pousse qu’assez peu ses analyses quant au système politique capable de préserver cet équilibre vertueux et fructueux entre Liberté et Justice. Or les sages hellénistiques avaient déjà compris, dès l’origine de la démocratie, qu’il est nécessaire, à tout moment, d’empêcher que la routine ou les dévoiements nés de la pratique institutionnelle n’oublient ou ne détruisent les finalités pour lesquelles ces institutions ont été installées (voir : Aristote, Constitution d’Athènes, premier ouvrage de théorie constitutionnelle, dont la pénétrante puissance laisse pantois).

 

3) Les voies du salut public

Pour bien comprendre l’importance absolue du sujet des institutions, on se référera aux préceptes des Athéniens, inventeurs d’une démocratie, si fragile, 500 ans avant le Christ, dans ce terreau de l’humanisme natif qu’était alors la Méditerranée orientale...

L’iségoria, terme qui désignait la liberté de parole de tout citoyen dans l’espace public, était l’un des piliers de la démocratie athénienne. Aucune censure n’empêchait le citoyen de parler librement. Et bien sûr la liberté de décider de tout après un débat libre. Les chasses aux sorcières qui désormais chez nous finissent devant nos tribunaux correctionnels auraient conduit les ’’veneurs’’ de ces chasses à l’homme à subir eux mêmes l’ostrakon… Puis, au IVe siècle av. J.-C., les Athéniens sentirent venir le danger d’un possible retour de la tyrannie. C’est alors qu’une loi fut votée pour éviter toute tentative de tyrannie, loi gravée dans le marbre d’une stèle placardée sur l’Agora. Son texte farouche devrait faire trembler, même aujourd’hui, les fossoyeurs de la liberté de la nation :

« Si quelqu’un s’élève contre le peuple pour installer la tyrannie ou aide à l’installation de la tyrannie, ou porte atteinte au peuple et à la démocratie des Athéniens, alors que soit honoré qui tuera celui qui aura entrepris un de ces crimes. Qu’il ne soit permis à aucun député de la boulé de l’Aréopage, si la Démocratie est détruite, de monter sur l’Aréopage, de participer à une séance, ni de prendre une décision sur aucun sujet, et si se produit quelque chose de semblable, que lui et ses descendants soient privés de leurs droits politiques, que sa fortune soit remise au peuple et que le dixième de sa fortune soit donné aux dieux. »

Or, l’impeachment, aux États-Unis, comme au Brésil* (loi de 1950), modernise ni plus ni moins que ces exhortations et fulminations attiques. Car seules des règles fermes peuvent garantir la pérennité du système démocratique, si vulnérable, et d’ailleurs d’abord vulnérable à lui-même.

 

3.1) La première règle de salut public devra être celle des souverainetés, nationale et populaire, intimement liées l’une à l’autre.

Les Traités européens, mais aussi l’OMC, seront dénoncés puis renégociés. Les souverainetés militaire, monétaire, juridique, fiscale et financière pourront certes être aménagées dans le cadre de traités internationaux, mais avec l’aval référendaire du corps électoral et dans la limite d’une préservation du principe de souveraineté nationale.

 

3.2) La deuxième règle de salut public sera de rétablir la liberté de parole et de débat.

La presse devra être indépendante (interdiction à la finance) et équitable, diffuser toute l’information sans en taire aucune. Toute rétention d’information sera considérée comme une faute engageant la responsabilité. Les partis politiques, les savants, se verront réserver dans tous les médias des espaces pour l’expression égalitaire et le débat.

Car la ’’liberté de la presse’’ n’est que la garantie de la plénitude de l’information. Pas un ’’bon vouloir’’, ni une connivence avec des intérêts économiques, politiques, philosophiques, communautaires ou étrangers.

 

3.3) La troisième règle de salut public visera à assurer une fidèle représentation du corps électoral et de ses choix et l’assainissement des mœurs politiciennes.

- les représentants ne devront pas faire de la politique un métier ; les cumuls, dans le temps et/ou dans les fonctions, seront freinés tout simplement en plafonnant le montant des indemnités cumulées. On ne doit pas faire fortune sur le dos de ses concitoyens en accomplissant les mandats confiés par eux.

- les politiciens qui commettraient des infractions pénales facilitées par leurs fonctions devraient subir des peines aggravées et fermes. Il faut rétablir le crime de haute trahison (supprimé de la Constitution en 2007) contre les politiciens, président compris, qui œuvreraient contre l’intérêt national, dont la définition figurera dans les dispositions non supprimables de la Constitution (indépendance militaire et politique, souveraineté du peuple en tous domaines).

- le mandat présidentiel est trop court : car le temps juridique, qui traduit le temps politique, est fatalement lent ; le mandat devrait être porté à 6 ans mais avec possibilité d’un impeachment populaire anticipé (comme au Brésil).

- le vote obligatoire sera établi (comme en Belgique) en même temps que la comptabilisation du vote blanc ou nul ; et les droits sociaux, professionnels ou civiques pourront être retirés en cas de fautes.

- les élections se feront à la proportionnelle pour la moitié des sièges du Parlement à pourvoir (comme en Allemagne, ce qui casse le système des partis, tout en dégageant des majorités numériques ou permettant des coalitions politiques).

- il faudra fixer dans la Constitution une liste de principes intangibles. Parmi lesquels le droit pour le peuple d’être consulté par referendum sur des sujets définis, et sur la base d’une initiative populaire.

 

3.4) La quatrième règle de salut public concernera la finance et la monnaie.

Les activités artificielles : d’émission de monnaie scripturale par les banques, de spéculation sur les marchés, seront très vigoureusement contrôlées, drastiquement restreintes, voire criminalisées et parfois même qualifiées de fausse monnaie (Maurice Allais dixit).

Les activités diplomatiques avec les pays où sont effectuées ces opérations ou qui abriteront des paradis fiscaux ou bancaires seront rompues ; les établissements concernés, les clients de ces établissements - fussent-ils des États - seront sanctionnés économiquement, administrativement (visas) ou même pénalement.

 

4) Autres principes

À propos du territoire et de l’appartenance

- les conditions de surveillance des frontières, de visa de permis de séjour, et d’acquisition ou de déchéance de la nationalité feront aussi partie des principes constitutionnels (comme dans la constitution de 1793).

- eu égard à la croissance démographique et aux déplacements migratoires de masse, le droit du sol et la naturalisation seront soumis à des conditions très strictes (stage, interdiction de service militaire à l’étranger) et la double nationalité interdite. Mais le statut de résident ou de résident privilégié sera amélioré.

À propos du système judiciaire

- les amendes pénales fixées seront proportionnelles aux revenus.

- les juges ne seront recrutés qu’après 10 ans de Barre effective, au minimum. La formation des personnels judiciaires (avocats et juges) sera identique et d’un très haut niveau technique et moral.

- la Justice (troisième pouvoir) disposera de moyens suffisants.

- le recours à un avocat devant la justice sera exonéré de TVA pour certaines questions (famille, emploi, logement, santé, retraites), car l’État de droit n’existe que si sa sanction judiciaire est accessible à tous…

- les juges seront soumis à des règles déontologiques strictes.

par Henri Temple, le 12 avril 2016

* Ndlr : Entre le temps de la rédaction du texte de M. Temple, le 12 avril, et sa mise en ligne le 18, est intervenu (le dimanche 17 avril) un vote décisif des députés brésiliens en faveur de l’impeachment de la présidente Dilma Rousseff, accusée par l’opposition de son pays non de corruption mais d’insincérité quant à l’état des comptes publics.

 

Henri Temple

Henri Temple est universitaire, avocat, expert international (sa spécialité est le droit économique : consommation, concurrence et libre circulation notamment) et, selon l’expression qu’il affectionne, « philo-politiste »...

 

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13 avril 2016

« Le référendum, ultime avatar de l'idée démocratique ? », par Bertrand Mathieu

Par cet article sera inaugurée une série que j’espère riche de tribunes et interviews ayant pour thématique la proposition suivante, déjà utilisée lors d’un article récent composé avec des jeunes engagés en politique : Si la Constitution m’était confiée... (Loi fondamentale et lois organiques : réflexions et propositions sur les règles du jeu démocratique et l’organisation des pouvoirs en France).

Pour ce premier texte, c’est un invité de choix qui m’a fait l’honneur d’accepter mon invitation : M. Bertrand Mathieu, professeur à l’École de Droit de la Sorbonne - Université Paris I et l’un des constitutionnalistes - et juristes en général - les plus éminents que compte le pays (auteur de nombreux ouvrages, il est notamment président émérite de lAssociation française de droit constitutionnel et a participé au comité de réflexion et de proposition dont les travaux ont abouti à la réforme de la loi fondamentale de 2008). Il s’exprime ici sur une question essentielle, d’après une proposition discutée et amendée avec lui : « Le referendum, ultime avatar de l’idée démocratique ? ». Un document précieux et éclairant quant à un débat d’actualité majeur, je l’en remercie... Une exclusivité Paroles d’Actu. Par Nicolas Roche.

 

Le référendum, ultime avatar de l’idée démocratique ?

par Bertrand Mathieu, professeur à l’École de Droit

de la Sorbonne - Université Paris I, le 11 avril 2016

Référendum

Source de l’illustration : article Slate.fr

 

Le referendum fait un retour notable dans la pratique politique des États européens : référendum grec sur la politique d’austérité, referendum hollandais sur le projet d’accord entre l’Union européenne et l’Ukraine, referendum britannique sur l’appartenance à l’Union européenne, referendum hongrois sur l’immigration… En France, un certain nombre de candidats à la Primaire de la droite et du centre, dont François Fillon, invoquent la nécessité de recourir au référendum pour ancrer démocratiquement les bases des grandes réformes qui devront être conduites. On peut invoquer également le projet de référendum sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, outil juridique improvisé pour tenter une sortie de crise.

« Les références répétées à l’idée de référendum

témoignent d’une défiance profonde envers le politique »

Cette utilisation, ou ces références, au référendum traduisent en fait une véritable crise de la démocratie représentative. Faute de projet politique et d’enracinement dans une histoire et des valeurs, l’Europe politique est une abstraction. Dotée d’une administration déconnectée des Peuples européens et d’un Parlement dont les membres sont à la fois élus sur des critères politiques nationaux et selon un mode de scrutin proportionnel qui ne crée aucun lien entre représentants et représentés, l’Europe n’offre qu’une image technocratique. Faute de développer un sentiment d’adhésion, les référendums dont le sujet est européen ne font que manifester la défiance des Peuples nationaux. Faut-il s’en inquiéter ? Incontestablement, oui ! Dans une période de troubles économiques et géopolitiques, la dilution de l’Europe ne fait qu’ajouter aux dangers auxquels nous sommes confrontés. Faut-il faire taire les Peuples, à la raison qu’ils sont incapables de comprendre les nécessités d’une Europe forte ? Ce serait renforcer la césure entre le Peuple et les gouvernants, souffler sur les braises d’une révolte latente. Le référendum grec, qui démontre que la voix du Peuple ne suffit pas à surmonter les contraintes économiques d’un pays gouverné par des instituions financières, démontre que la souveraineté d’un État peut ne plus être qu’une fiction juridique. Or, la démocratie implique par nature l’existence d’un souverain dans un cadre géographique déterminé. Le referendum hollandais, qui n’est que consultatif traduit une manifestation de souveraineté qui ne peut être ignorée des dirigeants de ce pays, le referendum britannique constitue une menace pour l’Europe, mais aussi une révolte contre des contraintes mal comprises ou mal acceptées, qu’elles viennent d’ailleurs de l’Union européenne ou de la Cour européenne des droits de l’Homme.

En France, les votes pour des partis se situant aux extrêmes de l’échiquier politique, s’ajoutant aux abstentionnistes, sont majoritaires. Les raisons en sont multiples, elles tiennent notamment à la déconnection entre le choix électoral et les décisions prises qui résultent en fait de contraintes externes, économiques, financières… Par ailleurs, la démocratie, qui fonctionne dans un cadre national, est concurrencée par des systèmes supranationaux. Or les unes et les autres de ces contraintes n’obéissent pas à une logique démocratique. Les décisions juridictionnelles nationales ou supranationales concurrencent le pouvoir politique. Le jeu, devenu triangulaire des forces politiques, accule les formations politiques traditionnelles à un déni de réalité. L’affrontement entre ceux qui maintiennent la fiction d’une démocratie vivante et ceux qui laissent croire que l’on pourrait, par une simple volonté politique, échapper aux contraintes externes est stérile. Il menace nos systèmes démocratiques qui sont plus fragiles que l’on peut le penser.

Faut-il alors considérer le référendum comme un danger ou comme une solution ? Il peut être l’un et l’autre. Face au déni de démocratie et de souveraineté qui se manifeste partout en Europe, utilisé comme instrument politique, il permet aux gouvernements de canaliser la colère latente des citoyens vers un repli nationaliste qui constitue une impasse. Mais continuer à faire l’impasse sur cette révolte sourde en privant le Peuple de la possibilité de s’exprimer, c’est courir le danger d’une explosion dont personne ne peut prédire les péripéties et les conséquences. Entre une destruction progressive de l’idée européenne et une fracture brutale, la troisième voie semble difficile.

« Prometteuse au niveau local, la démocratie participative

ne saurait être utilisée comme expression de la souveraineté »

Le recours à la démocratie participative développe les communautarismes et ne permet pas de légitimer les décisions au niveau national. Outil prometteur de la gestion des problèmes locaux, elle n’est pas à la dimension de la démocratie en tant qu’expression de la souveraineté. Privilégiant les groupes de pression, elle accroît la distance entre ceux qui ont les outils décisionnels et ceux qui sont privés de moyens d’expression.

Par ailleurs, il est dangereux de considérer que le droit se place au-dessus de la démocratie. La mutation de la conception représentative de la démocratie en un État de droit, impliquant la séparation des pouvoirs, les droits fondamentaux, la transparence… fait du juge un arbitre placé au dessus du Peuple (cf. B. Mathieu, Justice et politique : la déchirure ?, Lextenso, 2015), une sorte d’usurpation oligarchique au sein d’un système qui se veut démocratique.

Revivifier la démocratie c’est revenir à son sens premier, rendre la parole au peuple. Au-delà de la formule, le référendum, prévu par la Constitution est un instrument pertinent. C’est un outil de démocratie directe, dans un système qui par nature éloigne les citoyens des mécanismes de décision. C’est un moment de respiration démocratique dans un monde technicisé. C’est l’occasion d’un débat autour de la détermination des valeurs qui constituent l’identité nationale. Craint, du fait que le Peuple ne répond pas toujours à la question posée, galvaudé, par une utilisation opportuniste, le référendum reste un outil majeur de la démocratie. On dénonce le risque de dérive plébiscitaire, pourtant quoi de plus démocratique pour un responsable politique que d’engager sa responsabilité devant le Peuple qui l’a élu en cours de mandat ? On invoque le risque de dérive populiste, mais priver le peuple de la faculté de s’exprimer ne peut que favoriser les partis populistes.

Il est vrai que dans notre système juridique le principe démocratique est tempéré par un principe libéral de séparation des pouvoirs et de garantie des droits. La question se pose alors de trouver un mécanisme qui permette de redonner la parole au Peuple tout en évitant que ne soit remise en cause cette démocratie tempérée qui est le modèle de nos sociétés occidentales.

Plusieurs pistes peuvent être explorées. D’abord redonner la parole au Peuple sur des questions importantes, parmi lesquelles ces « questions de société », dont justement le Conseil constitutionnel estime qu’elles sont tellement politiques qu’il n’en contrôle pas la constitutionnalité. Faire valider les grandes lignes d’un projet économique et social de redressement… Mais sont aussi concernées les questions qui engagent l’avenir d’une Nation. La construction européenne est de celles-là. Redessiner une Europe politique et des droits et libertés ambitieuse mais respectueuse des identités nationales, économiquement puissante, unie autour de positions géostratégiques communes, d’une monnaie commune soutenue par une politique sociale et fiscale communes constitue une ambition qui pourrait réunir les Peuples européens après un véritable débat.

Mais si le referendum est un outil de la démocratie, il est aussi de par son caractère binaire, sa force et la brutalité de son résultat un outil dangereux. Par exemple, il faut aussi éviter que par la voie référendaire ne soient opérées des violations de droits et libertés, fondamentaux au sens strict du terme. Une méthode simple existe : soumettre les projets (ou les propositions) de loi référendaires au Conseil constitutionnel préalablement à leur vote par le Peuple, le juge constitutionnel pouvant apprécier, tant la clarté du texte, voire de la question, que sa conformité aux dispositions substantielles de la Constitution.

« Une des questions essentielles est celle de l’articulation

entre principe démocratique et principes libéraux »

Il ne faut pas se cacher que cette procédure interdirait au Président de la République de réviser la Constitution en en appelant directement au Peuple sans vote préalable des Assemblées parlementaires. Concernant l’Assemblée nationale, le Président pourrait toujours prononcer une dissolution suivie d’élections dont l’un des enjeux serait la révision constitutionnelle. Cette possibilité n’existe pas pour le Sénat, ainsi le Sénat pourrait s’opposer à lui seul à une révision constitutionnelle, ce qui présente l’avantage d’éviter toute révision ne faisant pas l’objet d’un consensus minimum, mais donne au Sénat un pouvoir considérable et empêcherait incidemment toute révision conduisant à modifier le rôle du Sénat. Reste à savoir si cet inconvénient est dirimant au regard de l’intérêt politique que représenterait une telle novation. Plus grave, cette procédure, si elle ne donne pas le dernier mot au juge, lui permet d’empêcher le Peuple de se prononcer. Peut être conviendrait-il de réfléchir à une intervention du juge constitutionnel, limitée à l’examen de la clarté et de l’intelligibilité de la question posée. Le débat reste ouvert. Il est fondamental, il s’agit de savoir du principe démocratique ou du principe libéral lequel doit l’emporter. En toute hypothèse aujourd’hui ce n’est pas d’excès, mais d’insuffisance de démocratie dont nous souffrons.

S’agissant de la révision de la Constitution, il conviendrait également d’associer le Peuple à toutes les révisions importantes. Aujourd’hui deux procédures peuvent être utilisées, indifféremment, par le Président de la République, en vertu de l’article 89 de la Constitution, à la suite de l’adoption du texte par les deux assemblées : un vote par le Congrès à la majorité des trois cinquièmes ou un referendum. On pourrait imaginer que soient distinguées, comme c’est le cas par exemple en Espagne, les révisions ne nécessitant que l’intervention des Assemblées, de celles faisant obligatoirement intervenir le Peuple. De ces dernières devraient relever les deux principes qui fondent notre ordre juridictionnel : la souveraineté nationale et les droits de l’Homme. Il conviendrait, peut être, d’y ajouter les principes essentiels relatifs aux compétences et aux nominations des organes de l’État, notamment le président de la République.

Une autre réflexion doit s’engager sur le referendum dit d’« initiative populaire ». Instauré par la réforme constitutionnelle de 2008, ce referendum est en réalité un référendum mixte d’initiative parlementaire (d’abord) puis de confirmation populaire (ensuite). Prudemment, le Constituant a assorti ce recours au referendum d’un contrôle du juge constitutionnel. Dans son principe, ce referendum d’initiative populaire, relève de par son imitative d’une logique de démocratie participative, de par son adoption, d’une logique de démocratie directe. Cette relative confusion des logiques participe peut-être de l’échec de cette procédure. En effet, ce referendum peut également être l’objet de manipulation de la part de groupes de pression.

Enfin, il convient de ne pas confondre le referendum local, qui pourrait être développé, y compris dans le cadre d’une initiative populaire, et qui vise des décisions locales, propices aux mécanismes de démocratie participative et les referendums nationaux, expression de la volonté du peuple.

À instaurer la confusion entre la démocratie et le respect des droits des minorités, entre les expressions communautaristes et l’intérêt général, entre les valeurs communes et les identités particulières et les désirs individuels, à oublier le rôle fondamental des frontières nationales qui ne sont pas signes d’enfermement mais base indispensable au dialogue et aux échanges, à mépriser le Peuple incapable de comprendre les enjeux de nos sociétés, on a gravement altéré le principe et la mécanique démocratiques sans avoir trouve de légitimité de substitution.

« Le niveau d’altération du sentiment démocratique impose

un traitement sérieux de la question du référendum »

Le recours à un usage raisonné du référendum sera peut-être jugé dépassé, c’est pourtant l’un des dernières tentatives permettant de revivifier le sentiment démocratique. Il répond à la nécessité de rendre la parole au peuple, ce qui dans un système qui se veut démocratique n’est pas si archaïque que veulent bien le penser ceux qui sont, de fait, attachés à un système oligarchique et qui exercent, à ce titre, le pouvoir intellectuel ou politique. Faute de quoi, le Peuple risque de reprendre une parcelle du pouvoir qui lui est dénié dans des conditions qui peuvent conduire à tous les débordements.

Mais, de la même manière que l’humanisme n’est peut-être pas l’horizon indépassable de l’Homme, la démocratie n’est peut-être pas l’horizon indépassable de nos sociétés politiques. Mais la société post-démocratique, comme le transhumanisme ouvrent des horizons bien obscurs.

 

Bertand Mathieu

 

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12 février 2016

« Qu'on ne me demande pas de me renier... », par P.-Y. Le Borgn', député PS

Pierre-Yves Le Borgn’, député de la Nation depuis son élection en 2012 par les Français établis en Europe centrale et dans les Balkans, a fait montre à plusieurs reprises et de manière constante, dans les paroles et dans les actes, de son malaise face au projet de réforme constitutionnelle que porte l’exécutif, pourtant socialiste comme lui. Un an et demi après la tribune engagée - et toujours actuelle - qu’il avait écrite pour Paroles d’Actu (septembre 2014), il a accepté à nouveau, et je l’en remercie, de répondre à mes questions, et il le fait avec beaucoup de franchise. On pourrait imaginer un sous-titre pour cet article : « Conscience d’un homme de gauche »... Une exclusivité Paroles d’Actu. Par Nicolas Roche.

 

ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D’ACTU

« Qu’on ne me demande pas de me renier... »

Interview de Pierre-Yves Le Borgn’

Q. : 04/02 ; R. : 11/02

 

Pierre-Yves Le Borgn'

 

Paroles d’Actu : Bonjour Pierre-Yves Le Borgn’, merci de m’accorder cet entretien. Mercredi dernier, vous avez voté contre le projet de révision constitutionnelle que porte le gouvernement, à savoir l’inclusion de l’état d’urgence dans la loi fondamentale et la possibilité de déchoir de leur nationalité celles et ceux (sentend : binationaux) qui participeraient à une entreprise terroriste - et peut-être à d’autres types d’activités malfaisantes. Comment jugez-vous globalement, en prenant un peu de recul, la teneur des discussions et débats qui ont eu cours dans la société française depuis les attentats de novembre, et dans quel état d’esprit vous trouvez-vous aujourd’hui, franchement ?

 

Pierre-Yves Le Borgn : Merci de me donner la parole sur votre blog, cher Nicolas. J’en suis un lecteur régulier et j’en apprécie la diversité des sujets traités et des personnes interviewées. J’ai été épouvanté par l’horreur des attentats du 13 novembre. C’est notre liberté et notre art de vivre qui ont été pris pour cible par des criminels terroristes. Je ne confonds aucunement l’islam, belle et grande religion de paix, prise en otage et dévoyée au nom de cette folie meurtrière, avec ces actes monstrueux. J’ai été frappé par le sentiment de peur, bien compréhensible au demeurant, qui s’est emparé de la société française dans les jours suivants le 13 novembre. Mes propres parents, vivant dans une petite ville de Bretagne, ont utilisé pour décrire leur réaction un mot que je n’avais jamais entendu dans leur bouche à ce jour : terreur. Cela m’a beaucoup marqué. Et pourtant il faut continuer à vivre, continuer à sortir, continuer à aimer la vie et ses plaisirs, continuer à le revendiquer. Faire recul sur tout cela serait comme apporter de l’eau au moulin des terroristes. Faire recul sur les libertés publiques aussi. Continuer à vivre sans rien oublier, en musclant nos services de renseignement, en développant les effectifs des forces de police et de gendarmerie, en frappant les bases de Daech à l’étranger et luttant par l’éducation contre la radicalisation.

 

Vous avez souligné ma position et mon vote sur la révision constitutionnelle. Ils expriment un doute : que la constitutionnalisation de l’état d’urgence et la déchéance de nationalité ne soient pas les réponses idoines dans la lutte contre le terrorisme. Je ne conçois pas que l’état d’urgence, d’une manière ou d’une autre (constitutionnalisation ou prolongation dans le temps) devienne peu à peu le droit commun, au détriment des libertés publiques et notamment du rôle du juge des libertés individuelles. Quant à la déchéance de nationalité, je n’ai pas aimé qu’elle tourne au procès a priori des binationaux, alimentant l’idée – diffuse dans l’opinion – que ces compatriotes seraient de moindres Français. Je vois davantage dans la révision constitutionnelle le risque d’un recul des libertés publiques et d’une rupture d’égalité entre Français que des instruments efficaces de lutte contre le terrorisme. Pour répondre à votre question, mon état d’esprit aujourd’hui, c’est la recherche de l’efficacité et des résultats, concrets et mesurables, dans la politique de lutte contre le terrorisme. Pas le suivisme à l’égard de l’opinion publique et des sondages.

 

PdA : On évoque souvent, quand on regarde ce qu’ont été et ce que sont les parcours de vie des jeunes partis faire le djihad, les notions de « quête de sens » ou d’« absolu », de recherche de « transcendance ». À l’heure de l’individualisme et de l’argent rois, à l’heure où les communautarismes sont exacerbés, il semble de plus en plus difficile de se rêver des destins collectifs, des perspectives communes à l’échelle par exemple d’une nation. La République et ses valeurs, elles, peinent à faire encore vraiment « rêver ». Est-ce que vous êtes sensible à cette question que je crois prégnante dans pas mal d’esprits, celle au fond d’une « crise de foi » peut-être plus répandue qu’on pourrait le penser ? Les attentats du 13 novembre auraient-ils, de ce point de vue, suscité une espèce de « sursaut » ?

 

PYLB : Je ne pense pas qu’une « crise de foi » traverse la société française et en son sein la jeunesse de notre pays. Une crise d’identité peut-être, une angoisse face à l’absence d’avenir plus sûrement. Notre société est bloquée par des choix aux conséquences dramatiques, opérés il y a longtemps, depuis les ghettos urbains et l’absence de moyens suffisants mis à disposition de l’école dans les zones d’éducation prioritaires jusqu’au refus de la mixité sociale entretenu dans de trop nombreuses villes. Un plafond de verre prive toute une part de la jeunesse des mêmes chances dans l’accès à l’emploi et au déroulement d’une carrière. Il est bien plus dur, disons les choses directement, d’obtenir un job à qualification équivalente quand on s’appelle Mohamed ou Rachida que quand on s’appelle Bertrand ou Élodie. Or, la France du XXIème siècle est celle de Bertrand et Mohamed, de Rachida et d’Élodie.

 

La République fait rêver lorsqu’elle donne à chacun les mêmes chances. La vérité est que ce n’est pas le cas à l’épreuve des faits. Dès lors, l’échec scolaire, l’épreuve du chômage, le manque d’avenir conduisent à l’amertume, à la révolte, au communautarisme, à la bigoterie, au rejet de la société et du pays duquel on est pourtant. Si les drames de 2015 peuvent contribuer à une prise de conscience de tout ce qu’il importe de faire pour lutter contre ces difficultés, ce serait heureux. Il faudra des années pour y arriver. Cela commande sans doute de penser à la discrimination positive : mettre la priorité de l’action publique sur certaines régions, certaines villes, certains quartiers. J’ai de ce point de vue la plus grande admiration pour ce que l’ancien directeur de l’Institut d’Études politiques de Paris, Richard Descoings, a fait, ouvrant l’accès à Science Po aux élèves de certains lycées de banlieue. De telles initiatives créent de l’espoir et s’inscrivent dans ce que la République a de meilleur.

 

PdA : Les attentats du 13 novembre vous ont-ils à titre personnel changé en quoi que ce soit ?

 

PYLB : Je ne pense pas. Comme tout Français, j’ai été épouvanté par l’horreur. J’ai un ami qui a perdu son fils dans ces attaques. Je pense souvent à ce jeune homme, réuni avec ses copains à La Belle Equipe. Il était plein de vie et de projets. Tout cela est tragique. Il faut redoubler de vigilance face au danger. Le parlementaire que je suis, davantage encore qu’auparavant, entend donner les moyens de son action à nos services de renseignements et à la police. Mais le citoyen, l’homme et le père se refuse à regarder l’autre différemment, à pratiquer la méfiance, à céder au repli. L’avenir reste pour moi dans la main tendue.

 

PdA : La démission de Christiane Taubira, garde des Sceaux et figure de la gauche progressiste, du gouvernement conduit par Manuel Valls n’a pas fini de faire parler les commentateurs politiques. Ce départ s’est fait, paraît-il, sur un « désaccord politique majeur » qui s’ajoute à d’autres départs liés à des désaccords politiques majeurs. Aujourd’hui la ligne gouvernementale est peut-être plus cohérente mais elle s’appuie sur une majorité moins large qu’au début du quinquennat. Nombre de membres de ce qu’on appelle le « peuple de gauche » se sentent de bonne foi déboussolés (pour ne pas dire autre chose) par les orientations politiques de l’exécutif, je pense notamment au discours sécuritaire, aux attitudes autoritaires de Manuel Valls et aux positionnements, disons, iconoclastes d’Emmanuel Macron sur les questions socio-économiques. Comprenez-vous ces interrogations et, d’une certaine manière, les partagez-vous ? Est-ce que, pour l’essentiel, vous retrouvez de l’esprit de la campagne de 2012, de vos idéaux progressistes dans la gestion 2016 des affaires de l’État et du pays ?

 

PYLB : J’ai regretté le départ de Christiane Taubira. Sa voix, son charisme et ses combats manqueront dans l’action de l’exécutif. Je partage les raisons qu’elle a invoquées pour expliquer sa démission. Rejetant la déchéance de nationalité, je me sens en communion avec elle. Le souci de protéger les Français a tout mon soutien. Ce que je regrette, c’est la tentation de « triangulation », non sans penser à 2017. Je n’aime pas que la gauche lie l’insécurité et la nationalité. L’an passé, j’étais l’un des orateurs du groupe socialiste dans un débat à l’Assemblée nationale sur une proposition de loi de l’UMP visant à… la déchéance de nationalité. Ma mission était de m’y opposer. Moins d’un an après, le gouvernement voudrait que je me renie et me fasse le zélateur d’une mesure à laquelle je ne crois pas. C’est hors de question.

 

Je suis attaché aux droits et libertés publiques, partageant sans doute une part de chemin de ce côté-là avec les « frondeurs ». D’un autre côté, j’ai toujours été, expérience professionnelle aidant, modéré au plan économique et ce que fait Emmanuel Macron me séduit. C’est sans doute un curieux positionnement politique au sein du groupe socialiste. C’est un peu, finalement, comme si j’y étais « non-inscrit », à l’écart de toutes les chapelles. Quant à l’esprit de la campagne de 2012, il est loin malheureusement et je le regrette. Trop de prudence, trop d’atermoiements, trop peu de communication sur l’action de l’exécutif ont installé dans l’esprit des Français l’idée que le changement, ce n’est surtout pas maintenant. Je n’aime pas l’ambiguïté dans l’action publique. Il faut afficher les objectifs, obtenir des résultats, faire des compte-rendus d’étapes, ne rien cacher des difficultés. Etre mendésiste, ma filiation politique.

 

PdA : Question liée : considérez-vous que, pour ce qui concerne l’essentiel des promesses et engagements énoncés en 2012 par le candidat Hollande, le contrat est rempli ou en passe de l’être durant l’année 2016 ?

 

PYLB : Le contrat sera partiellement rempli et j’en suis heureux. Néanmoins, certaines promesses ont été passées par pertes et profits, comme le droit de vote des étrangers aux élections locales ou bien la ratification de la Charte du Conseil de l’Europe sur les langues régionales et minoritaires. Nous aurions dû les tenir. Nous avions entre 2012 et 2014 une majorité à l’Assemblée nationale et au Sénat pour cela. Je regrette aussi que nous ayons renoncé à autoriser la procréation médicalement assistée pour les couples de femmes mariées. Au bout du compte cependant, c’est sur l’emploi que nous serons jugés et l’absence de réduction de la courbe du chômage reste à ce jour un échec, reconnaissons-le.

 

PdA : Un point de détail sur lequel François Hollande s’était engagé, une thématique qui vous concerne directement et qui peut peser lourd dans la défiance de nombre de nos compatriotes par rapport à la chose politique : le mode d’allocation des sièges à l’Assemblée nationale. François Hollande avait promis qu’il introduirait une dose de proportionnelle pour coller au mieux (ou en tout cas coller mieux) aux aspirations des citoyens. Il a annoncé après les régionales qu’il y renonçait pour ne pas favoriser une entrée trop importante de députés Front national dans l’hémicycle (sans doute aussi pour assurer la formation de groupes potentiellement alliés). Trois questions : 1/ cet argument est-il valable et cette décision juste ? 2/ ne pensez-vous pas que le débat avec le FN doive se tenir aussi à l’Assemblée nationale ? 3/ où en êtes-vous à titre personnel et dans le détail de votre réflexion sur le mode de scrutin pour les législatives ?

 

PYLB : Ma position est claire : lorsque l’on fait une promesse, on la tient. Revenir sur elle pour des considérations électorales n’est pas juste. Il n’est pas sain que des formations politiques qui pèsent lourd en voix ne soient pas représentées en sièges à l’Assemblée nationale. C’est vrai pour le Front national, que je combats de toutes mes forces. C’est vrai également pour le MoDem, que j’estime et respecte. Il est toujours infiniment meilleur pour la démocratie que le débat ait lieu dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale que dans la rue.

 

À titre personnel, l’idée d’allouer 25% des 577 sièges de l’Assemblée à la proportionnelle me conviendrait. Cela obligerait à redecouper les circonscriptions correspondant aux 75% des 577 sièges qui resteraient alloués au scrutin majoritaire uninominal à deux tours. J’ai, pour ce qui concerne la part déterminée à la proportionnelle, un attachement pour le scrutin d’arrondissement, car c’est au contact de la réalité d’un territoire qu’un parlementaire est efficace. Je ne pourrais m’imaginer député issu d’un scrutin proportionnel, sans lien avec un territoire. Je me sentirais hors sol. J’aime trop le terrain, le contact. 

 

PdA : Qu’est-ce qui, demain, devra vous singulariser sur le fond en matière d’offre politique par rapport à la droite ? Quels nouveaux horizons du « progressisme » devraient être portés par la gauche à votre avis ?

 

PYLB : Certainement le combat de l’égalité des chances dont j’ai parlé un peu plus haut dans l’interview et les bases de discrimination positive qui me semblent nécessaires pour sortir notre pays de ses ruptures territoriales et générationnelles. Lorsque vous voyez que 100% des classes bi-langues sont maintenues à Paris contre 5% seulement en Normandie, on se dit que l’égalité réelle est bien lointaine. Qu’une telle situation se produise sous un gouvernement de gauche est incompréhensible pour moi. La gauche doit aussi s’engager en soutien sincère et profond pour l’économie verte. L’avenir de la planète comme la pérennité de la croissance en dépendent. Je viens du secteur photovoltaïque et je sais tout le potentiel de cette nouvelle économie pour l’emploi et le bien-être de notre société. Je pense que la gauche doit encourager ce mouvement et lui donner les cartes d’un développement pérenne, notamment en revendiquant un meilleur traitement législatif et fiscal au bénéfice des activités favorisant la transition énergétique. 

 

PdA : Si vous deviez définir en quelques mots le sens que vous donnez à votre engagement politique ?

 

PYLB : Donner à chacun la chance de réussir sa vie. Cela passe par les moyens pour l’école, l’aide à la petite enfance, le soutien à la famille. Et se battre pour que nos enfants et petits-enfants vivent dans une société libre, reposant sur la responsabilité et la solidarité.

 

PdA : Si vous aviez un message à transmettre à François Hollande ? À Manuel Valls ?

 

PYLB : À François Hollande, ce serait de réformer notre pays jusqu’au bout de son mandat, sans se préoccuper des échéances électorales, quitte à ne pas être candidat. En politique, c’est comme au tennis : à jouer petit bras, on perd toujours. Je lui conseillerais aussi de renouer avec l’esprit et la volonté de 2012, en un mot d’oser.

 

À Manuel Valls, ce serait d’accepter la diversité de sa majorité, de se décrisper, d’entendre et de solliciter les voix critiques. De comprendre que ces voix critiques veulent autant que lui le succès du gouvernement. Je lui conseillerais aussi de sourire de temps en temps et de montrer son humanité en allant vers la jeunesse.

 

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4 novembre 2015

« Décentralisation : regard sur nos Régions », par Nicolas Mayer-Rossignol

Nicolas Mayer-Rossignol est, à 38 ans, le plus jeune de nos présidents de Région. Il dirige depuis 2013 le Conseil régional de Haute-Normandie (dont Rouen est la capitale) et conduira en décembre prochain les listes des socialistes et de leurs alliés pour la conquête d’une majorité politique nouvelle dans le cadre d’une Région Normandie reconstituée. Le président de la Région Basse-Normandie Laurent Beauvais, PS lui aussi, a concédé la tête de listes à son cadet, qu’il soutient sans réserve dans cette bataille qui, au-delà des bilans locaux, s’annonce difficile pour les socialistes du fait notamment d’un contexte politique national défavorable. En Normandie, outre celles menées par M. Mayer-Rossignol (qui ne rassemblent pas pour l’instant, loin s’en faut, la totalité des forces de gauche), les principales listes en lice lors de ces Régionales seront celles de l’union de la droite et des centres, menées par l’ex-ministre de la Défense Hervé Morin, et du FN, conduites par le secrétaire général du parti Nicolas Bay.

Dès le mois de juin, j’ai souhaité inviter M. Mayer-Rossignol à évoquer pour Paroles d’Actu l’état de ses réflexions quant à la décentralisation au point où elle se trouve, avec évidemment un accent particulier mis sur les Régions, leur rôle dans le dispositif et leurs perspectives éventuelles d’évolution : « Quelle devrait-être, de votre point de vue (dont on accepte volontiers ici quil puisse être iconoclaste et, par exemple, sappuyer sur des expériences étrangères), la place dévolue à la Région dans l'organisation politico-administrative de la nation (quelle représentation au sein du Parlement ? quels champs d'action et allocation de moyens ?) et des territoires français ? (quels rapports à éventuellement repenser entre la Région et les collectivités déchelons inférieurs dune part ; entre les Régions elles-mêmes dautre part ?) » Sa composition, très instructive et fort intéressante, m’est parvenue ce jour. Une exclusivité Paroles d’Actu, par Nicolas Roche.

 

« Décentralisation : regard sur nos Régions »

par Nicolas Mayer-Rossignol, le 4 novembre 2015

UNE EXCLUSIVITÉ PAROLES D’ACTU

 

Nicolas Mayer-Rossignol

 

« La France a eu besoin d’un pouvoir fort et centralisé pour se faire, elle a, aujourd’hui, besoin d’un pouvoir décentralisé pour ne pas se défaire ». Par cette phrase, François Mitterrand annonçait lors du Conseil des ministres du 15 juillet 1981 le point de départ d’une révolution majeure pour notre République : la décentralisation ! Si notre Constitution prévoit que la République française est décentralisée et que ce processus apparaît comme faisant partie du patrimoine commun des républicains, il ne faut pas oublier que c’est principalement la gauche – je dis principalement car je n’ignore pas les réformes de 2003-2004 du Gouvernement Raffarin - qui a fait avancer cette idée et qui a procédé aux réformes nécessaires pour qu’elle advienne.

 

Si, au début des années 1980, la commune et le département, créations révolutionnaires, existaient déjà en France, ce sont bien les lois Defferre qui, en supprimant la tutelle administrative, vont constituer l’acte de naissance des collectivités territoriales que nous connaissons aujourd’hui, et en particulier de la Région, dont l’assemblée sera dorénavant élue au suffrage universel direct.

 

Plus de trente ans après, force est de constater que la Région est l’échelon territorial qui a le plus profité de la décentralisation. Alors que, depuis plusieurs années, la réforme communale - avec la montée en puissance de l’intercommunalité - est engagée et que la suppression du département est régulièrement évoquée, la Région n’a cessé de prendre de l’ampleur et de la consistance dans le paysage politique et administratif territorial de notre pays. Ce succès des Régions, dont il nous faut expliquer les raisons (II), avant de réfléchir à leur rôle et à leur place dans l’avenir (III), ne doit pas laisser penser à nos lecteurs que cette évolution était acquise d’avance (I).

 

I) Le développement régional longtemps à l’épreuve du modèle français hérité de la Révolution française.

 

La régionalisation en France est tardive et elle ne s’est pas imposée naturellement. Elle a très souvent été appréhendée comme une menace pour l’unité nationale, pâtissant de son parfum « d’Ancien Régime » évoquant ces « anciennes » Provinces ou circonscriptions régionales (baillages, sénéchaussées, généralités) abolies au moment de la Révolution française. Chacun se souvient de la formule de Thouret, (non pas Alain Tourret député et conseiller régional radical figurant sur ma liste, mais le révolutionnaire député de Rouen), qui déclarait à la Constituante : « Craignons d’établir des corps administratifs assez forts pour entreprendre de résister au chef du pouvoir exécutif, et qui puissent se croire assez puissants pour manquer impunément de soumission à la législature » !

 

Il faudra attendre la Vème République pour que les Régions reviennent sur le devant de la scène et s’autonomisent peu à peu du Département. Rappelons en effet que l’ancêtre de la Région, l’établissement public régional (EPR), a été fondé en 1972 sur la base de la conception pompidolienne, toujours majoritaire à droite, d’une région conçue comme l’« expression concertée des Départements », et non sur la reconnaissance d’une quelconque identité régionale ou d’une entité autonome. Cette départementalisation de la Région, dont l’héritage se retrouve encore aujourd’hui au niveau du scrutin régional, bâti sur des listes départementales, faisait suite à la tentative avortée du général De Gaulle (échec du référendum d’avril 1969) de faire de la Région une collectivité territoriale pleine et entière avec des compétences relatives à l’activité économique, sociale et culturelle. Car si François Mitterrand a indéniablement permis l’émergence de la Région telle qu’on la connaît aujourd’hui, il faut également rappeler et rendre hommage à l’intuition du général De Gaulle qui avait perçu, avant beaucoup d’autres, que « les activités régionales seraient les ressorts de la puissance économique de demain ».

 

À partir des lois Defferre et jusqu’aux réformes constitutionnelles et organiques de 2003 et 2004 conduites par le Gouvernement Raffarin, la Région va voir ses compétences renforcées et va peu à peu asseoir sa légitimité dans l’organisation territoriale du pays. À rebours de la cohérence de ces deux premiers actes de la décentralisation, la loi du 16 mars 2010 portant création du conseiller territorial de M. Sarkozy va menacer un temps l’édifice bâti. Cette contre-réforme aurait, en effet, renforcé la départementalisation de la Région et signé à terme leur disparition. Elle a fort heureusement été rejetée par les élus et par la Nation, son volet sur le conseiller territorial étant abrogé par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault.

 

II) Des Régions qui réussissent !

 

Si la Région est aujourd’hui une collectivité reconnue, c’est parce qu’elle a su prouver son efficacité dans la mise en œuvre des missions confiées par l’État. Le bilan des Régions de ces vingt dernières années est exemplaire. Dès que l’Etat a confié un bloc de compétences à la Région avec des moyens, des progrès ont été enregistrés, le service rendu au public amplifié, amélioré et modernisé. Nous pouvons, entres autres, citer l’exemple des TER, des lycées ou de la formation professionnelle. De plus au regard des actions menées, la part des Régions dans le déficit public est extrêmement faible. Pour ne prendre que l’exemple de la Haute-Normandie et de la Basse-Normandie, nous avons réussi la rénovation de l’ensemble des lycées, modernisé la flotte de nos TER, financé la création de multiples équipements sportifs et culturels, investi dans le numérique et soutenu nos filières d’excellence et des milliers d’entreprises et d’associations tout en réduisant notre endettement. La Région Normandie est aujourd’hui sur le podium des régions les mieux gérées de France. Peu de collectivités peuvent se targuer d’un tel bilan.

 

Les Régions sont même allées au-delà de bon nombre de leurs compétences, usant à bon escient de la clause générale de compétence dans les domaines de la santé, de l’enseignement supérieur et de la recherche. En Normandie, nous avons participé à la création de maisons de santé, à l’installation de médecins en zones déficitaires, à aider les hôpitaux à l’acquisition d’équipements de pointe en matières de chirurgie et de lutte contre le cancer, par exemple. Nous avons investi des millions d’euros dans nos trois universités à Caen, Rouen et au Havre. Dans le domaine des grandes infrastructures, les Régions ont su mobiliser et dynamiser l’État pour accélérer la mise en œuvre des contrats de projets. Nous avons réussi à négocier, en plus du CPER (contrat de plan État-Région, ndlr), un CPIER (contrat de plan interrégional État-Régions, ndlr) pour la vallée de la Seine, qui est l’un des plus importants de France. Les Régions ont également mis en place un grand nombre de politiques innovantes dans le domaine énergétique. En Haute-Normandie nous avons été à l’avant-garde avec le chèque-Énergies, l’appel à projets Énergies, le déploiement de véhicules électriques…

 

Nos Régions, sous des exécutifs de gauche plurielle (socialistes, radicaux, écologistes et communistes), ont su dépasser leur seul rôle de financeur pour impulser de réelles dynamiques et favoriser un aménagement équilibré et durable de nos territoires. Pas un grand projet ne s’est réalisé en Normandie sans l’appui des Régions. En Haute-Normandie, la coopération « 276 » (entre la Région et les Départements de l’Eure et de la Seine-Maritime), unique en son genre et saluée pour son efficacité par de nombreux rapports, a favorisé le regroupement intercommunal, permis des mutualisations innovantes et de financer sur tous les territoires des projets structurants dont les habitants jouissent au quotidien !

 

L’autre force des Régions a été de mettre en place des coopérations interrégionales originales. Les deux Régions normandes ont ainsi développé, ensemble, de nombreuses actions en matières aéroportuaire avec Normandie Deauville, de numérique, de tourisme avec un comité régional commun, d’économie avec les pôles de compétitivité ou la création de fonds d’investissement, ou encore de prévention de l’érosion de notre littoral.

 

Enfin, cette montée en puissance des Régions a été favorisée et encouragée au plan européen. La Région est en effet, plus que d’autres, l’échelon territorial pertinent à l’échelle d’une Europe qui doit résolument se tourner vers l’investissement, la croissance et l’emploi. L’importance prise par les Régions dans notre organisation administrative territoriale ne résulte donc pas seulement de facteurs législatifs ou institutionnels mais aussi très clairement de la réussite des exécutifs régionaux !

 

III) Bâtir et réussir la Normandie, l’avenir se conjugue au présent !

 

L’heure n’est plus à se demander, « Quelles Régions pour demain ? » mais bien de considérer, avec la plus grande attention, les trois réformes majeures voulues par le président de la République, le gouvernement et la majorité qui sont actuellement en cours : loi sur le développement et le renforcement des métropoles avec la loi MAPTAM, loi relative au nouveau découpage régional et loi NOTRe sur la répartition des compétences. Ces trois réformes constituent le tant attendu Acte 3 de la décentralisation. Elles consolideront à terme l’organisation administrative territoriale de notre pays autour du couple Régions et intercommunalités, et notamment des métropoles.

 

Avec la loi NOTRe, la Région voit son rôle de stratège et de planificateur renforcé grâce au Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET), document de planification majeur et intégrateur des autres schémas régionaux (obligatoires ou facultatifs) qui revêtira un caractère prescriptif. En matière économique, les compétences régionales sont aussi affermies, la Région étant responsable du développement économique sur son territoire. Sur l’emploi, après l’importante loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale mettant en place le Service Public Régional de l’Orientation, la Région se voit enfin dotée d’un bloc de compétences cohérent en matière d’orientation, de formation et d’emploi. En matière de transport, la Région se verra confier, au 1er janvier 2017, la responsabilité des transports routiers non urbains (notamment des transports scolaires) et des transports maritimes réguliers de personnes et de biens pour la desserte des îles françaises. Il faut également rappeler que la Région est devenue, il y a peu, autorité de gestion des fonds européens.

 

Toutes ces nouvelles compétences, ces nouveaux documents stratégiques à élaborer en concertation avec les autres collectivités positionnent clairement la Région comme une collectivité incontournable chargée de la préparation de l’avenir, du développement et de l’aménagement des territoires. À ces nouvelles compétences s’ajoutent la réforme de leur périmètre géographique et les défis liés à la fusion d’anciennes régions. Avec Laurent Beauvais, nous pilotons et préparons avec nos administrations cette fusion de nos deux collectivités depuis plus d’un an et nous mesurons l’importance, les difficultés mais aussi les opportunités d’un tel projet. La priorité est donc de réaliser et de réussir cette fusion et, dans le cadre de la nouvelle répartition des compétences, d’engager le dialogue nécessaire avec l’ensemble des autres collectivités afin d’optimiser les rôles de chacun. Importance de la Région ne veut pas dire domination de celle-ci. Au contraire, il lui incombe d’instaurer les voies d’une concertation nécessaire. En ce sens, la conférence territoriale de l’action publique sera amenée à jouer un rôle important. Nous devons être à la hauteur et au rendez-vous de ces enjeux majeurs car nos concitoyens attendent un service public local et régional de qualité, efficace et le moins coûteux possible.

 

Bien que le temps ne soit pas, j’y insiste, à penser de nouvelles réformes mais à appliquer et à réussir celles en cours, tant leur portée et les défis posés sont grands, je veux conclure par deux observations :

 

La première sous forme de souhait. Il sera indispensable, à moyen terme, de repenser la fiscalité régionale notamment au regard de l’évolution de leur périmètre géographique et de leurs compétences. Je suis partisan de davantage d’autonomie financière pour les Régions car elles sont aujourd’hui encore beaucoup trop dépendantes des dotations de l’État. Le gouvernement a récemment annoncé une augmentation de la part régionale de la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, ndlr), c’est un premier pas qui va dans le bon sens. Il ne s’agit pas pour autant de plaider pour un pouvoir fiscal autonome, comme le connaissent d’autres régions en Europe en Allemagne ou en Espagne, par exemple. Nos Régions n’ont pas vocation à devenir des Länders ou des communautés autonomes. La France est et doit demeurer un État unitaire et la décentralisation à la française est un modèle original adapté à notre histoire et à nos traditions. Néanmoins, si on veut encore davantage donner aux Régions les moyens de leurs ambitions, il faudra nécessairement leur offrir de nouvelles marges de manœuvre en termes de recettes.

 

Enfin, la consultation et l’association des présidents de Région aux choix du gouvernement en matière de grands projets structurants pour la Nation est indispensable. À plusieurs reprises, j’ai pu, ainsi que mes homologues, être reçu, consulté et associé aux réformes conduites par l’État impactant nos territoires. C’est un grand progrès par rapport à ce qui se passait sous l’ère Sarkozy. Il me paraît indispensable que cette coopération puisse être identifiée par une instance dédiée à l’image de ce qui se passe en Allemagne. Certains considéreront que c’est le rôle du Sénat, mais je suis trop attaché au non-cumul des mandats parlementaire et de fonctions exécutives locales pour militer pour que notre Sénat, qui représente déjà les collectivités locales, ne se réduise à une seule chambre pour grands élus locaux et régionaux.

 

Vous comprendrez par cette tribune que je suis un authentique « Girondin » ! Le décentralisateur pas le supporter de foot, mes préférences allant au stade Malherbe ou au HAC… Je considère, en effet, que pour être efficace la prise de décision doit se faire au plus près des besoins des populations et des réalités du territoire. Pour moi, la décentralisation n’est pas seulement un mode de réflexion, c’est principalement un mode d’action ! Enfin, mon régionalisme ne sera jamais celui d’un repli identitaire, d’une défiance envers l’État et encore moins d’un hégémonisme à l’égard des autres collectivités. Il découle simplement de mon analyse de notre histoire politico-administrative et de la richesse de mon expérience à la tête de la Haute-Normandie. Malgré tout le chemin parcouru par nos Régions ces 30 dernières années, il reste encore beaucoup à faire ! C’est dans cet état d’esprit, enthousiaste et plein d’ambition pour ma région et ses habitants, que je me présente au suffrage des Normands.

  

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Et vous, quel avenir entrevoyez-vous pour nos Régions ?

 

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14 octobre 2015

Marie-Christine Arnautu : « L'idée de quitter le FN ne m'a jamais effleurée »

Marie-Christine Arnautu, conseillère municipale de Nice et eurodéputée, est depuis 2011 vice-présidente du Front national de Marine Le Pen. Elle compte aussi, depuis longtemps, parmi les proches de Jean-Marie Le Pen. Les conditions de l’exclusion par l’organe exécutif du parti - dont elle est membre - de son vieux leader historique, le 20 août dernier, n’avaient d’ailleurs pas manqué, à l’époque, de la faire réagir.

Par-delà les troubles internes au parti, déjà largement commentés (sur ce site notamment, voir : les interviews de jeunes militants FN et celle de Lorrain de Saint Affrique), j’ai eu envie d’interroger Mme Arnautu sur son engagement, ses convictions profondes et quelques points d’actualité, tant il est vrai que, toute vice-présidente du FN qu’elle est, on ne l’invite finalement qu’assez rarement dans les matinales. Ses réponses - dont je la remercie - me sont parvenues le 13 octobre sur la base de questions préparées dès la fin août. Une exclusivité Paroles d’Actu. Par Nicolas Roche.

 

ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D’ACTU

Marie-Christine Arnautu: « L’idée de quitter

le FN ne m’a jamais effleurée »

 

Marie-Christine Arnautu

 

Paroles d’Actu : Bonjour Marie-Christine Arnautu. J’ai lu que vous vous êtes attelée il y a un peu plus de deux ans au toilettage et à la retranscription informatique d’écrits de Jean-Marie Le Pen, en vue d’un projet d’autobiographie. Qu’avez-vous « appris » que vous ne sachiez déjà à son propos lors de cet exercice ? Le projet dont on parle est-il toujours, à votre connaissance, d’actualité ?

 

Marie-Christine Arnautu : Avec Jean-Marie Le Pen, on n’en finit pas d’apprendre... J’avoue qu’en transcrivant la première partie de ses Mémoires, je me suis souvent surprise à chercher dans le dictionnaire la signification de tel ou tel mot, tant son vocabulaire est riche et précis.

 

« Les Mémoires de Jean-Marie Le Pen ?

C’est toujours d'actualité. »

 

Ce projet est plus que jamais d’actualité, même s’il reste un immense travail à faire. Je déplore le manque de temps pour m’y consacrer davantage et je vais tout faire pour y remédier. Les Mémoires de Jean-Marie Le Pen seront sans aucun doute un témoignage politique nécessaire sur toute une période de notre Histoire mais elles permettront aussi aux lecteurs d’avoir une vision de l’homme extrêmement différente de celle dépeinte dans les médias ou dans les multiples ouvrages écrits à son sujet.

 

PdA : Comment vous qualifieriez les liens qui vous unissent à cet homme, compagnon de route et de combats de longue date qui est aussi - ce n’est pas rien - le parrain de votre fille ?

 

M.-C.A. : Il m’est difficile de les résumer. Je l’ai rencontré à la veille de mes 21 ans, il fut donc pour moi un chemin de vie, une valeur d’exemple, tout comme le fut mon père, autre personnalité très forte. Ces deux personnes ont profondément contribué à mon combat viscéral pour la défense de la liberté, ils m’ont aussi inculqué, je crois, le sens de l’honneur, valeurs que j’ai essayé de transmettre à mon tour à mes enfants.

 

PdA : Plusieurs élus et militants du Front national ont fait part ces derniers temps de leur décision ou intention de rendre leur carte du parti en protestation de la sanction infligée à celui qui en est toujours, à cette heure, président d’honneur. Cette idée vous a-t-elle, ne serait-ce qu’un temps, traversé l’esprit pour ce qui vous concerne ?

Jean-Marie Le Pen a, pour sa part, clairement appelé ses partisans au sein du FN à y rester pour y peser et restaurer de son influence à votre « ligne » commune au sein du parti. Marion Maréchal-Le Pen est-elle, aujourd’hui et pour la suite, de facto, le chef de file de la ligne, disons, « traditionnelle » du Front national, celle à laquelle vous appartenez ?

 

M.-C.A. : Cette idée ne m’a jamais effleurée. Je milite pour le Front national aux côtés de Jean-Marie Le Pen depuis plus de quarante-deux ans. Le Front national est une partie importante de ma vie et j’ai toujours été d’une loyauté sans faille. Je ne m’imagine pas une seconde le quitter et je compte bien rester sur cette ligne de loyauté et de fidélité envers le Front national, envers sa présidente Marine Le Pen, envers son fondateur Jean-Marie Le Pen et, bien sûr, envers les idées nationales que le Front promeut depuis sa création et qui sont le moteur de mon engagement.

 

PdA : Je vous propose maintenant d’aborder quelques questions touchant, ici à l’actualité, là à votre parcours et au sens de vos engagements. La première de ces questions s’ancre pleinement dans une actualité décidément bien sombre. Vous vous insurgez, comme beaucoup de personnalités politiques et de nos concitoyens, contre les exactions abominables que commettent au quotidien les criminels de l’État islamique (contre les femmes, les Chiites et les Chrétiens d’Orient notamment). Comment faudrait-il s’y prendre pour les arrêter, selon vous ?

 

M.-C.A. : Il faut tout d’abord cesser les imprécations et les leçons de morale. Depuis quatre ans, la diplomatie française n’a qu’un seul mot à la bouche : le départ du président syrien Bachar el-Assad. Outre le fait que cela est d’abord le problème des Syriens, puisque la Syrie est un pays souverain, et ne concerne absolument pas la France, cela ne fait pas une politique. Nous nous en rendons bien compte aujourd’hui puisque François Hollande se retrouve absolument seul à continuer à réclamer son départ.

 

« Il faut soutenir ceux qui combattent

réellement l’État islamique »

 

Comme le réclame le Front national depuis le début du conflit, le meilleur moyen pour lutter contre l’organisation État islamique, c’est de soutenir les forces qui, sur le terrain, le combattent jour après jour, c’est à dire les armées régulières syrienne et irakienne, ainsi que les milices kurdes de ces deux pays. Plutôt que d’envoyer des armes et de l’argent à des groupes armés terroristes bien peu recommandables et toujours plus islamistes, nous ferions mieux d’envoyer cette aide à l’Armée arabe syrienne ! Et, puisque la Turquie est membre de l’OTAN, il serait temps de taper du poing sur la table pour exiger qu’elle ferme enfin sa frontière avec la Syrie afin que cesse l’afflux incessant d’armes, de combattants et d’argent aux organisations terroristes qui combattent en Syrie.

 

PdA : Il y a eu, récemment, au sein de l’Église catholique notamment, un débat quant à l’opportunité de l’organisation par des autorités ecclésiastiques d’un dialogue avec, entre autres personnalités politiques de tous bords, des membres éminents du Front national (Marion Maréchal-Le Pen, pour ne pas la citer). La question touche un peu à l’intime, j’en conviens : vos convictions politiques s’accordent-elles totalement avec votre foi telle que vous la vivez, telle que vous la ressentez ?

Je pense en particulier à la problématique de la peine capitale, à laquelle le Vatican, traditionnellement attaché par principe à la sauvegarde de la vie, paraît de plus en plus hostile ; le Front national, lui, envisage toujours de revenir sur son abolition en France ou, en tout cas d’en proposer le rétablissement par référendum...

 

M.-C.A. : Mon engagement politique est directement lié à mes convictions. À ce jour, le Front national est le seul parti qui défend véritablement la famille. Dans notre programme, nous prévoyons l’abolition de la loi Taubira ouvrant le mariage aux personnes de même sexe, contre laquelle j’ai manifesté à de nombreuses reprises. Sur la question de la protection de la vie, le Front national est le seul parti à plaider pour la mise en place d’une véritable politique familiale, avec un accompagnement et une aide pour les femmes qui souhaitent ne pas avorter. La politique actuelle est clairement un échec puisque le nombre d’avortements en France n’a jamais été aussi élevé : 225.000 l’an dernier !

 

Concernant la peine de mort, le paragraphe 2267 du Catéchisme de l'Église catholique dispose que « L’enseignement traditionnel de l’Église n’exclut pas, quand l’identité et la responsabilité du coupable sont pleinement vérifiées, le recours à la peine de mort, si celle-ci est l’unique moyen praticable pour protéger efficacement de l’injuste agresseur la vie d’êtres humains. »

 

« L’Église n’est pas par principe opposée à la peine de mort »

 

Vous le voyez, l’enseignement de l’Église n'est pas, par principe, opposé à la peine de mort. Il est vrai que le Vatican, aujourd’hui, ne l'estime ni nécessaire ni opportune mais cela n'est pas une position de principe. Je ne partage pas cette analyse, en particulier envers les personnes reconnues coupables d’acte terroriste, d’assassinat ou de viol d'enfant, ou de crime particulièrement odieux.

 

PdA : Vous êtes issue, Marie-Christine Arnautu, de racines d’Europe multiples et diverses. Vos parents ont été naturalisés français ; une identité que vous avez choisi d’embrasser pleinement, passionnément même, comme eux et comme des millions d’immigrés et descendants d’immigrés qui ont eu la volonté et la chance de devenir, eux aussi, des Français.

Je ne vous interrogerai pas sur votre définition de l’identité française, définition que vous avez du reste déjà explicitée pour un autre site ; j’aimerais en revanche que vous me disiez, partant notamment de ces origines que l’on vient d’évoquer, s’il existe à votre sens, des traits forts d’identité communs, une communauté de destin qui, de manière spécifique, rassembleraient les peuples européens ?

 

M.-C.A. : Une des grandes richesses de l’Europe est justement sa diversité, sa multitude d’identités, de cultures, de langues. L’uniformisation et le nivellement par le bas voulus par l’Europe de Bruxelles, qui applique l’idéologie cosmopolite de ses maîtres, sont un désastre culturel et identitaire. Bien évidemment, cette diversité n’exclut pas de fortes convergences : l’héritage philosophique de la Grèce et de la Rome antiques, une histoire commune faite de résistance contre les invasions et de conquêtes glorieuses, une créativité, une inventivité et une ingéniosité qu’aucune autre civilisation n’a égalées, et une religion commune, le christianisme, même si elle se décline sous diverses confessions (orthodoxie, catholicisme, protestantisme...)

 

PdA : Le message du Front national est souvent celui d’un constat fort sombre s’agissant de la situation et, a fortiori, de l’avenir de la France. Sincèrement, parvenez-vous encore à être optimiste quant à l’avenir de notre pays ?

 

M.-C.A. : Oui, je suis pleine d'espoir, sinon je ne battrais pas depuis des années pour la France. Je suis pleine d'espoir quand je vois nos militants qui travaillent sans rien exiger en retour et sans compter leur temps. Je suis pleine d'espoir quand je vois ces jeunes familles françaises qui se fondent et élèvent droitement leurs enfants. Je suis pleine d'espoir quand je vois cette jeune génération qui est descendue dans la rue à de multiples reprises pour défendre la famille traditionnelle. Je suis pleine d'espoir quand je vois, si j'en crois les sondages, que les Français prennent enfin conscience des dangers qui les menacent. Et je suis pleine d'espoir quand je vois la progression du Front national, élection après élection. Les Français en sont de plus en plus conscients : il faut porter le Front national au pouvoir afin de mettre un coup d'arrêt à cette entreprise méthodique de destruction de la France, de son peuple, de ses valeurs, de ses traditions.

 

PdA : Sur quelles thématiques entendez-vous vous mobiliser avec une conviction, une force particulières dans le cadre de vos engagements politiques - je pense notamment à votre mandat de parlementaire européen - et citoyens pour les années à venir ?

 

M.-C.A. : Je continuerai à me battre sur les thématiques qui sont les miennes depuis le début de mon engagement politique : la défense de la liberté,  la protection des plus faibles, que ce soit les plus pauvres, les enfants, les handicapés ou les personnes âgées ; la sécurité morale et physique des Français, la défense de la famille, cellule de base de la société ; la préservation de nos identités et de notre peuple car, s’ils venaient à disparaître, la France ne serait plus la France.

 

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17 septembre 2015

Institutions et vie démocratique : réflexions sur les « règles du Jeu »

« Vous comptez, notamment de par votre engagement en politique, parmi les jeunes qui entendent œuvrer activement à l’amélioration des conditions de vie et de coexistence collectives au sein de la Cité. À l’heure où des voix s’élèvent pour réclamer qu’un débat véritable se tienne quant aux termes de la structuration et de l’organisation du régime républicain français, je souhaite vous inviter, entre autres jeunes politiques de tous bords, à expliciter dans un texte de synthèse l’état actuel de votre réflexion personnelle, au-delà de toute considération partisane, s’agissant de la manière dont, dans un souci conjugué de sincérité démocratique et d’efficacité de la chose publique, la République pourrait être rénovée - voire, selon les sensibilités, refondée.

Parmi les thématiques que vous pourriez aborder, cette liste n’étant pas exhaustive et pouvant être élargie à votre discrétion : les modalités d’élection des représentants de la Nation et des territoires; l’articulation des rapports entre les pouvoirs législatif et exécutif; l’articulation des rapports entre le gouvernement, qui procède du Parlement, et la présidence de la République, dont le mode de sélection peut être discuté, au sein de l’exécutif; l’articulation des rapports entre l’État central et les collectivités décentralisées; l’articulation, enfin, à définir entre les notions de "démocratie représentative" et de "démocratie participative"...

Des questions multiples, fondamentales, auxquelles peuvent se greffer celles relatives au calendrier électoral et aux limitations des mandats ; aux interventions des citoyens, des médias et de largent dans le processus politique. En trois mots comme en cent, les "règles du jeu". Je laisse volontairement de côté la question communautaire européenne, considérant qu’elle est fonction de la volonté nationale telle qu’exprimée d’après les règles démocratiques dont il est question ici. »

Cette idée-ci, voilà longtemps que j’avais envie de la mettre sur pied. La question des institutions et, plus généralement, celle touchant au fait démocratique, m’ont toujours beaucoup intéressé. Coutumier de lexercice qui me permet régulièrement, avec bonheur, d’offrir des espaces d’expression à des jeunes engagés en politique, c’est tout naturellement que j’ai souhaité appliquer ce concept, ce format désormais traditionnel des articles « à plusieurs voix » à cette thématique-là. Dès la mi-août, jai transmis à plusieurs jeunes femmes et hommes engagés au sein de chacune des grandes « familles » politiques qui comptent (EELV, PCF, DLF et MRC compris, je le précise au passage) la proposition reproduite dans le premier paragraphe de cette introduction. Je remercie celle et ceux qui, parmi ces jeunes, sont allés au bout de l’exercice. Et suis ravi de la richesse que la variété, la qualité de leurs interventions - positionnées ici d’après un ordre chronologique - confèrent à cet article. Quelques éléments en vue de débats véritables ; je l’espère en tout cas. Une exclusivité Paroles d’Actu. Par Nicolas Roche.

 

UNE EXCLUSIVITÉ PAROLES D’ACTU

Institutions et vie démocratique

Réflexions sur les « règles du Jeu »

 

Assemblée nationale

Illustration : Assemblée nationale

 

 

La République telle qu’on la connaît a mis, depuis l’époque révolutionnaire, beaucoup de temps à se développer et n’a acquis de réelle stabilité qu’à la faveur de l’avènement de la Vè République, en 1958. La France a pendant longtemps été embourbée dans un système parlementariste (Ière République avant le Consulat, IIIè puis IVè République) qui a provoqué de l’instabilité politique et des crises multiples : les gouvernements étaient, pour certains, contraints de démissionner au bout de quelques semaines seulement, faute de majorité d’appui au Parlement.

Le Général de Gaulle, qui avait pour la France l’objectif de restaurer l’autorité de son État, a expliqué ses intentions dans son discours de Bayeux de 1946 : le Premier ministre ne doit plus procéder du Parlement ; il convient qu’il soit nommé directement par le président de la République. En proposant plusieurs mécanismes de rationalisation des institutions, il permet ainsi de sortir du régime parlementaire à proprement parler, celui-ci ayant fait montre de ses (nombreux) travers. C’est ce qui sera mis en place à partir de 1958, avec la Vè République.

Il faudra donc attendre 1958 et le retour du Général de Gaulle aux affaires pour que les principes de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen et ceux de la séparation des pouvoirs, pour que la reconnaissance du chef de l’État en tant que « capitaine » et l’introduction doutils de démocratie directe - couplés avec ceux propres à la démocratie représentative - soient mis en œuvre de concert. On a l’impression de retrouver ici ce qu’il nous manque aujourd’hui, finalement.

Nos dirigeants actuels ont les clefs en main pour éviter de se retrouver sous le joug des critiques, et pourtant, ils n’en font rien, par peur de perdre leur place. Dans un premier temps, le référendum, outil qui n’est plus utilisé depuis dix ans en France, doit être réhabilité, puisque son utilisation est prévue par la Constitution. Le Président et le Parlement ne doivent plus avoir peur du peuple, surtout s’ils veulent continuer à obtenir ses suffrages...

Le chef de l’État doit avoir l’autorité qui lui est conférée par son statut mais aussi le rôle qui est le sien dans les institutions de la République : il doit indiquer les grandes orientations, guider la politique menée par le gouvernement, bref, donner le cap. C’est aussi ce qui manque cruellement à l’heure actuelle, où lon a plutôt l’impression que les Français sont oubliés, et que le gouvernement est sourd alors même que les manifestations se font de plus en plus entendre.

D’un point de vue organique, l’État est affaibli : au départ unitaire et centralisé, l’État français devient de plus en plus décentralisé et communautaire. Il n’y a, de ce fait, plus de réelle autorité : les affaires ont tendance à transiter d’une collectivité à une autre, et cela en ralentit considérablement le traitement. Ce phénomène s’est vu généralisé par les réformes de décentralisation qui ont eu lieu dans et depuis les années 80. Il aurait plutôt fallu faire, à mon sens, davantage de réformes de déconcentration. Je crois que le problème du mille-feuille administratif pourrait être résolu en supprimant des échelons intermédiaires, tels que les communautés de communes ou les régions. De cette manière, les affaires publiques n’auraient plus à transiter qu’entre les communes, les départements et l’État. On simplifiera l’organigramme et la coopération sera en tous domaines préférée aux logiques d’intégration, peu démocratiques.

Le scrutin majoritaire, qui n’a d’intérêt que pour la constitution dune majorité pour le pouvoir exécutif, montre ses limites en ne reconnaissant pas des voix minoritaires mais pourtant souvent importantes. En France, pour plusieurs élections, et notamment les régionales, qui approchent, c’est un mode de scrutin mixte qui est mis en place : toutes les listes recueillant plus de 10% des voix sont représentées, et la liste qui arrive en tête au second tour obtient une prime majoritaire. Si lon adapte et modifie ce principe pour les élections nationales, et en particulier pour les législatives, - dont le mode de scrutin n’est pas fixé dans le marbre constitutionnel et peut de ce fait être modifié - on peut composer une assemblée élue avec une dose importante de proportionnelle. On peut considérer que le fait majoritaire est viable dès lors que la prime majoritaire est de 20 ou 25% pour la liste qui arrive en tête. Ainsi, on pourrait établir à 75 ou 80% la dose de proportionnelle pour les législatives, et assurer ainsi la représentation de la plupart des mouvements politiques, ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle. Le fait majoritaire serait préservé, la stabilité de la République également.

Le calendrier électoral, en vertu duquel le Président est élu quasiment au même moment que les députés, donne l’impression qu’au niveau national, les Français choisissent leurs représentants une fois tous les cinq ans, sans jamais voir de leur part de signe de responsabilité politique. Cela va dans le sens de Rousseau quand il disait qu’une fois ses représentants élus, le peuple est dépouillé de sa souveraineté.

La question de la limitation du nombre de mandats, directement liée à la précédente, n’est véritablement utile que s’il existe une réelle contestation populaire des représentants du peuple. Si un élu est efficace, peu de gens soutiendront la limitation du nombre de mandats. Si un président élu ne revient jamais devant le peuple durant son mandat, par un référendum par exemple, alors le peuple sera plus prompt à demander une limitation du nombre de mandats. Si un président remet en cause son mandat plus souvent, comme le faisait le Général de Gaulle lorsqu’il organisait un référendum en y associant sa propre responsabilité politique, alors son action suscitera la confiance auprès du peuple. La volonté de limiter le nombre de mandats vient de l’absence de confiance qui règne aujourd’hui entre le pouvoir et le peuple. Elle ne trouve sa justification, à mon sens, que dans le cas où les élus ne remplissent manifestement pas correctement leur fonction.

Cette confiance qui devrait exister entre les élus et le peuple est d’une certaine manière organisée par la constitution de la Vè République, qui mêle démocratie représentative et démocratie directe. Seulement, les outils de démocratie directe sont oubliés car non obligatoires ; les élus se reposent sur la démocratie représentative. Il s’agit donc ici d’un dévoiement de l’esprit de notre république, puisque, d’une démocratie semi-directe, nous sommes passés à une démocratie purement représentative. La situation politique en France rejoint de plus en plus les conclusions qu’émettait Rousseau : le peuple a l’impression d’avoir perdu sa souveraineté.

Cette impression se retrouve s’agissant de l’Union européenne. Sur ce sujet, De Gaulle, qui a un temps pratiqué la politique de la chaise vide, consistant à refuser un développement excessif de la construction européenne, a toujours considéré que ledit développement nuisait à l’indépendance de la France. Si Maastricht est passé de justesse en 1992, le résultat du référendum de 2005 s’est avéré clairement négatif, nouvelle preuve que les Français veulent préserver l’indépendance de leur pays. Et pour cause, plus personne en France ne veut être dirigé par un gouvernement non élu !

La construction européenne apparaît en fait comme un brutal retour en arrière sur le terrain de la politique. Alors que nous avons mis des années à établir une république stable, voilà que les élites de Bruxelles veulent contrôler notre budget, notre monnaie, et même nos lois : la France est punie d’une lourde amende si elle ne respecte pas les décisions de la Cour européenne des Droits de l’Homme, l’obligeant alors à modifier ses lois en conséquence !

L’Union européenne, d’ailleurs, ne respecte même pas la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, reconnue constitutionnellement par la France. Son article 3, notamment, précise que « le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la Nation » et que « nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément ».

Tous ces points tendent à un même résultat : au final, le peuple n’a plus confiance en ses élus, et il le leur fait savoir comme il le peut. Avec, chaque jour davantage, le sentiment que ces élus constituent une « élite » totalement coupée de ses préoccupations, et dont la fin serait de tirer, aux dépens du peuple, les bénéfices sociaux et financiers afférents à ces fonctions qu’ils monopolisent. Ce qui entraîne un mécontentement populaire légitime et qui va croissant. Ce mécontentement, qui nourrit une véritable crise de la citoyenneté, exige de profondes modifications institutionnelles et une véritable refondation de la République sur ses principes de 1958 et de 1962.

 

Arnaud de Rigné

« Restaurons l’autorité de l’État »

par Arnaud de Rigné, le 25 août 2015

 

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Avant d’exprimer ma vision personnelle de la République et du système idéal pour la France - et non pas celle du mouvement politique dans lequel je milite -, je vais établir un état des lieux (nécessaire) de certains fondamentaux :

« Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. » (C. de Gaulle). Un rappel sur l’identité et ses évidences : la France, depuis quinze siècles, repose sur une essence délicate et rare : le métissage des peuples blancs européens, la fusion avec la religion chrétienne et la continuité de l’héritage grec et romain. Je ne dis pas que nous sommes restés inchangés de Clovis à Saint-Louis en terminant par de Gaulle, ce serait une erreur. Je parle des fondamentaux qui structurent une civilisation. Nos trois piliers : essence charnelle, spirituelle et culturelle.

Ce ne sont pas cinquante ans d’immigration, d’américanisation, de castration et de diabolisation de ces évidences, qui feront oublier aux héritiers de la France, nos racines. Non, en aucun cas !

Concernant la République française, qui naquit de la Révolution de 1789, des miasmes des politiques libérales de Turgot aux entreprises de conquête du pouvoir de la nouvelle bourgeoisie mobilière – nourrissant une haine de l’ancien régime catholique, alors dirigé par le clergé et la noblesse – je préciserai que malgré toutes les ardeurs laïcistes et anticléricales, les seules lettres de noblesse, la seule force d’incarnation qui a nourri la République, viennent précisément de la France et de son essence chrétienne – triste ironie !

Je réduirai donc la République à ce qu’elle est, et doit être aujourd’hui : un simple régime au service de la France, et non comme cela est le cas depuis trop longtemps, une France au service de la République.

Le modèle que je présente ci-dessous est une réflexion, une vue de l’esprit - comme tous les modèles, à l’origine. Utopique, irréalisable, peu importe ! L’intérêt est la réflexion qui peut en découler. L’esquisse de cette idée d’institution se nommant « Nation Française » - Nation, pour insérer dans le marbre, ce principe national, que toutes les forces de l’établissement tentent aujourd’hui de dissiper. C’est un rappel de soi, et cela en découlera, dans sa constitution et sa loi. Commençons.

 

Projet David Berton

Schéma. Source : D. Berton.

 

Le Premier Citoyen :

Comparable au Président de la Vème République, il incarne le pouvoir exécutif, et en assume les prérogatives dans sa globalité. Le gouvernement n’est que son prolongement. Il est élu par le suffrage universel uninominal à un tour. Il nomme 1/3 des sénateurs pour 5 ans, sans possibilité de les révoquer. Droit de véto, utilisable une seule fois par an, sur toute motion du Sénat.

Le Roi :

Il est une figure symbolique, représentant l’image de la France à l’international, supplantant l’exécutif sur ce point. Il est roi par primogéniture de sang royal. Il incarne l’essence de la France et est le garant de l’identité de la France et des vertus chrétiennes. Il nomme 1/3 des sénateurs pour 5 ans, sans possibilité de les révoquer. Droit de véto, utilisable une seule fois par an, sur toute motion du Sénat.

Le Sénat :

Les sénateurs discutent, étudient et votent les lois et les budgets : ils incarnent le pouvoir législatif ; une commission annexe de sénateurs jugent de la constitutionnalité des lois. La nouveauté réside dans le mode de désignation des sénateurs, ce que je nomme la règle des trois tiers : 1/3 élus par les électeurs (scrutin uninominal à 1 tour), 1/3 nommés par le Premier Citoyen, 1/3 nommés par le Roi.

La politique et l’argent :

Toutes les indemnités des élus, du Premier Citoyen aux Conseillers des assemblées (sauf municipalités), seront établies d’après le salaire moyen en France (2 874 euros brut pour 2012 par exemple) ; chaque année l’indemnité sera adaptée selon l’évolution – je précise que l’indemnité est en brut du salaire moyen, non en net. Les indemnités des élus municipaux ne peuvent pas dépasser le salaire moyen national. Les mandats et les indemnités peuvent se cumuler, mais ne peuvent dépasser le salaire moyen national.

Il est vital, pour amener une nouvelle génération d’hommes politiques, d’enlever les appâts de l’avarice qui ornent le fronton du monde politique.

Trinité nationale du territoire :

La République française avait à son origine pour triptyque : commune, département, État ; nous aurons pour notre part, un triptyque semblable, mais plus adaptée aux nécessités géographiques et culturelles plutôt que politiques et administratives. Notre trinité sera : commune, Assemblée provinciale, Nation. Les structures intermédiaires, telles que les agglomérations, ayant pour conséquence la concentration urbaine, la centralisation des domaines de compétences, la désertification rurale, etc., sont à réduire ou à annihiler. Une coordination des communes et une coordination des provinces doivent subsister, mais uniquement d’ordre administrative et technique ; pas d’élus.

Défendre la nation, c’est défendre ses ramifications à toutes les échelles. Défendre une ramification locale allant contre le principe même de la nation, c’est se suicider. Le régionalisme promu par l’Union européenne en est un exemple.

Je ne développerai pas plus avant, voulant rester dans l’esquisse. Des systèmes de renversement, etc. seraient à développer…

 

David Berton

« Un modèle différent pour la Nation française »

par David Berton, le 26 août 2015

 

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Il y a quelques semaines, Libération publiait une étude d’une agence de Publicis, soulignant la volonté de ‘coup d’État citoyen’’ de notre classe moyenne, rejetant une vie politique ternie par les scandales, le manque de transparence et de résultats, et le storytelling à outrance. Le 11 janvier 2015, des millions de Français - musulmans, juifs, catholiques, laïques, blacks, blancs, beurs... - défilaient ensemble pour rappeler les valeurs qui font le socle de notre République. Certains parlèrent de marche citoyenne, d’autres de manifestation, et beaucoup eurent des difficultés à qualifier ce qui était en train de se passer. Jérôme Fourquet et Alain Mergier, de la Fondation Jaurès, ont dans un ouvrage récent évoqué les épisodes de janvier 2015 comme un catalyseur, amplifiant deux processus : la volonté de soulèvement populaire, qui prend ses racines dans notre histoire nationale, ainsi que l’écart entre la France silencieuse, que beaucoup ont eu pour dessein d’invoquer ces derniers mois, et la France qui se réveille et s’exprime dans la rue. Cette forme d’ébullition populaire pourrait faire écho à d’autres situations, dans d’autres pays européens où extrêmes de tous bords avancent pour prendre le pouvoir - s’ils ne l’ont déjà conquis. Le peuple crie pour se faire entendre, partout sur notre vieux continent, et les politiques s’écartent, de peur de recevoir un quelconque retour de bâton. Et ces cris ne sont que l’écho d’un problème bien ancré dans notre système politique depuis des dizaines d’années : cette triple crise démocratique dont on essaie de taire l’existence.

Une crise démocratique à l’échelon national, de prime abord, avec une difficulté des politiques à porter les convictions des citoyens qu’ils représentent, et un manque de pédagogie consternant. Peu de députés vont aujourd’hui sur le terrain pour expliquer ce qu’il se passe en Assemblée, pour justifier leurs idées et prises de position, de peur de ne pas être réélus. Sans parler des sénateurs, qui ont pour beaucoup et depuis bien longtemps oublié le sens de la mission républicaine qui leur a été confiée : le Sénat est devenu désuet, incapable de représenter les intérêts territoriaux, et enclin souvent aux intérêts purement partisans. Le Gouvernement de Manuel Valls ne porte que peu d’ambitions sur le long-terme pour notre pays, et chaque ministre, quand il a du poids politiquement parlant, s’attelle à faire des réformes qui pour la plupart sont mal ficelées, sans ligne politique claire ou, au contraire, jouant sur des clivages qui ne refondent en rien le domaine qu’il est censé porter. Emmanuel Macron, qui a pour fil directeur le déverrouillage des vieux dogmes économiques français, s’est heurté aux rouages technocratiques et corporatistes qui ont fait de sa première loi un projet certes ambitieux, mais affaibli par de nombreux intérêts particuliers qui n’ont en rien rendu service à l’intérêt général.

Ces blocages, on ne le dit pas assez, viennent non seulement de clivages archaïques, mais aussi d’une élite technocrate formée pour maintenir des blocages qui ne nous permettent pas de participer pleinement au challenge de la globalisation. Ces ‘‘verrouilleurs’’ prennent la place du peuple, censé être souverain, dans la construction de nos lois. Depuis quand n’avons nous pas eu de consultation citoyenne d’envergure, alors que des sujets cruciaux font notre actualité ? On pense à l’afflux de réfugiés vers notre vieux continent, par exemple. On en vient ici à un autre échelon qui connaît une crise démocratique sans précédent.

La chose européenne, incomprise depuis plus de dix ans, ne peut avancer tant que le dessein européen n’est pas expliqué, valorisé et repensé. Et il doit l’être par le peuple européen, pour le peuple européen. Le président de la République évoquait récemment l’idée d’un gouvernement et d’un Parlement de la zone euro, une réflexion qui n’est en rien nouvelle. Qu’il ose, comme d’autres chefs d’État européens, demander au peuple son avis ! Les différentes études d’opinion montrent que les Français, comme d’autres nations européennes, y sont pleinement favorables. L’Union Européenne du début de XXIe siècle doit être démocratique ou ne sera plus sous peu. Elle peut être ainsi fédérale, si ce projet est porté par le peuple, et pensé par nos politiques et intellectuels, qui sont là pour jouer ce rôle. Quel Victor Hugo ou Aristide Briand du XXIe osera parler à nouveau d’États-Unis d’Europe ? Oser, toujours ce mot. Encore. Parce qu’oser n’est plus le maître mot de notre vie politique. Même les Démocrates, s’ils ne sont pas jeunes et optimistes, ont perdu cette rhétorique.

A l’échelon local, enfin, ceux qui veulent oser n’ont plus les moyens de le faire. La baisse des dotations des collectivités territoriales est une des plus graves erreurs de ce quinquennat, tout bonnement parce que la vie politique locale est, de nos jours, la moins décrédibilisée et la plus audible de toutes. Les investissements sont devenus trop coûteux pour être engagés si les dépenses locales ne sont pas au préalable maîtrisées. Un nombre conséquent de municipalités utilise cette baisse comme argumentaire pour justifier de leurs inactions. C’est le cas à Grenoble, pour ne citer qu’une grande ville. Pourtant, pour faire face à cette décision de diminution des dotations, qui a permis de désigner un nouveau bouc émissaire, certaines majorités se sont montrées innovantes en ‘faisant mieux avec moins’’, comme le fait François Bayrou sur le territoire palois. Et il n’est pas le seul.

Alors, face à cette crise, que répondre  ? Sursaut démocratique.

Les règles du jeu doivent changer, avec une grande réflexion sur ce que doit être le nouveau pacte républicain, à toutes les strates. Et si la classe politique actuelle est incapable de porter cet idéal, - cette France moderne, entrant pleinement dans la globalisation pour maintenir son rang tout en créant une proximité nouvelle entre citoyens et vie politique, par le biais d’une démocratie représentative nouvelle - ce sera aux jeunes, de tous bords républicains et de toutes conditions, de le porter.

Osons parler d’une Sixième République où des règles éthiques soient mises en place, avec un fonctionnement institutionnel plus contemporain, ainsi qu’une sanctuarisation des principes qui ont marqué notre histoire nationale. Il faut, de prime abord, revoir notre organisation. Démolissons le Sénat pour le transformer en Chambre des Territoires, avec des représentants élus par le peuple pour défendre des intérêts purement locaux face aux propositions de loi qui sont soumises. Réhabilitons l’Assemblée nationale en lui redonnant son influence d’antan, inspiré du modèle outre-Rhin, avec des représentants moins importants numériquement, tout comme dans la seconde Chambre, mais représentatifs de l’ensemble des courants de pensée politique, par le biais de l’instauration du scrutin proportionnel, via le système dit de ‘‘deux voix par électeur’’.

Faisons du Premier ministre le personnage central de la vie politique nationale, avec un chef de l’État garant des institutions, et des intérêts de la nation à l’étranger. Pour une démocratie plus parlementaire, tout en restant stable. Mettons en place une justice indépendante, aux mains d’une Cour Suprême neutre, sur le modèle étatsunien. Rendons régulier l’usage du référendum, sur des sujets centraux mais qui n’aient pas vocation à diviser la France en deux ; si l’usage en est fréquent, le vote n’est plus, ou bien moins, une occasion de sanction à l’égard du Gouvernement. Attaquons-nous au cumul des mandats en interdisant la pratique de plus de deux mandats électifs, et seulement un si l’élu est maire d’une ville de plus de 50 000 habitants, ou membre voire à la tête de l’exécutif d’une grande collectivité. Sans oublier la fin d’un cumul dans le temps à outrance, avec l’interdiction de renouveler un mandat parlementaire une deuxième fois, et une troisième fois pour les mandats locaux (région, communes). Le politologue Nicolas Matyjasik soulignait récemment, dans une tribune pour le Huffington Post, la nécessité de lévaluation des politiques publiques par et pour les citoyens, via la création d’agences citoyennes indépendantes : osons non seulement la consultation préalable, à la manière des conférences des parties sur le thème de l’écologie, pour les réformes d’ampleur, mais aussi la généralisation de ce principe d’évaluation pour tendre vers l’amélioration constante. Enfin, enterrons les ors de l’État pour que les représentants du peuple soient des représentants du peuple, et non des monarques républicains.

Supprimons les départements pour laisser place à des régions fortes, ouvertes sur le monde, compétitives et proches des citoyens. Des référendums régionaux seraient possibles, un représentant régional serait désigné pour chaque département par la majorité élue, et des maisons de la Région seraient mises en place partout où cela serait nécessaire, comme intermédiaires entre l’élu et le citoyen. Maintenons les communautés de communes dans leurs prérogatives actuelles, tout en réfléchissant à de nouvelles compétences, de façon à ce que les deux échelons soient complémentaires. Rationalisons les moyens des collectivités territoriales pour qu’elles soient plus efficaces et plus lisibles, tout en favorisant la fusion de nombreuses communes, pour qu’il n’y ait plus, à terme, de villes comptant moins de 2000 habitants. Augmentons les dotations vers les collectivités territoriales pour les sanctuariser par la suite. Redonnons à l’expression ‘démocratie locale’’ son véritable sens, avec la généralisation des forums citoyens dans chaque ville, et selon la superficie, dans chaque quartier, ainsi que la possibilité de référendums locaux non pas consultatifs mais décisionnaires.

De cette manière, nous pourrons inspirer et porter un nouveau modèle européen, fédéral, libre et démocratique, muni d’un président de l’Union européenne, avec un gouvernement élu par le peuple, et un Parlement européen qui ne sera plus seulement à l’aune de directives vues par le peuple comme un lot de blocages, mais porteur de plans divers ambitieux et financièrement conséquents. Rendons là aussi possible la consultation populaire européenne lorsque des pétitions atteignent un certain nombre de voix, venant d’un certain nombre de pays de l’UE. Il en irait de même pour la strate française, lorsqu’une pétition atteindrait plus de 500 000 signatures. Ben Rattray, fondateur de Change.org, a d’ailleurs eu des mots justes à ce sujet  : ‘Ce sont les petites choses qui font changer le monde’’.

Ces idées, bien évidemment non exhaustives, pourraient redonner à la France sa crédibilité en matière de démocratie, d’humanisme et de liberté. Les Français en sont capables et n’attendent même que ça : une révolution citoyenne pacifique pour tourner une page de notre histoire et laisser place à la France et l’Europe du XXIe siècle. Aux jeunes de porter ce sursaut, et de construire cette nouvelle République !

 

Loïc Terrenes 2015

« Pour une VIe République de la jeunesse ! »

par Loïc Terrenes, le 30 août 2015

 

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On ne le dit pas assez mais la France a la chance d’avoir des institutions solides, une culture démocratique ancrée et un processus législatif qui fonctionne. Il est peut-être simpliste de le rappeler mais les réelles démocraties sont encore minoritaires dans le monde (quand ce n’est pas tout bonnement le chaos, comme en Libye ou en Syrie). Qu’on pense aux pays d’Afrique, où la quasi-totalité des régimes sont des dictatures militaires ou familiales, à l’Asie, où règnent partis uniques et corruption, à l’Amérique centrale, avec des institutions gangrenées par les cartels... l’Europe et singulièrement la France peuvent s’enorgueillir d’une stabilité démocratique depuis des décennies.

Cela étant dit, on ne peut se reposer sur l’outil de comparaison pour affirmer que, la situation étant pire ailleurs, elle n’est pas chez nous perfectible. La démocratie n’est pas une chose installée, c’est un idéal à poursuivre, vers lequel on doit tendre. Et tant qu’en France il existera des affaires de corruption, de fraude (Jérôme Cahuzac...), d’abus de biens publics (Agnès Saal...) et de tricheries électorales, on ne pourra pas s’étendre sur nos acquis et dire que le travail est terminé. Améliorer les institutions et les conditions d’organisation de la chose publique reste un combat de tous les jours.

On pourra se satisfaire du fait qu’il ne s’agit que d’épiphénomènes, que la majorité de la classe politique reste dévouée au bien-être des citoyens lambda et que les « affaires » ne concernent heureusement que quelques élus ou hauts fonctionnaires. Ce serait oublier que le diable se cache dans les détails. Pour voir (un peu) de l’intérieur comment les choses fonctionnent, pour entendre les vantardises des uns et les coups de manche des autres, il faut reconnaître qu’il demeure chez nos représentants une culture de la « chose due » qui en invite beaucoup à profiter du système, au moins par petites touches. Des banquets dans les ministères sans lien avec le portefeuille du ministre, des voitures de fonction ou une protection rapprochée pour des personnes qui pourraient tout autant bien prendre le métro (comme en Scandinavie), des notes de restaurant et de déplacement sans réel lien avec l’objet de leur mandat... Ça peut paraître peu de chose, mais à la longue ça fait beaucoup.

Premier point, il faut donc rompre avec les privilèges. Pas forcement refaire une « nuit du 4 août », mais réduire drastiquement tout ce qui bénéficie aux élus plus par tradition que nécessité. Trajets gratuits pour la famille, frais de représentation, chauffeurs pour de simples adjoints, ristournes sur des voyages pas vraiment professionnels, etc.

Second point, il faut faire promouvoir le mérite sur les accointances personnelles. Pourquoi ne pas s’inspirer des États-Unis où les ministres et dirigeants d’institutions publiques doivent passer une audition devant le Sénat, exposer leur projet et faire état de leur expérience ? On pourrait imaginer une commission bipartisane qui ne serait pas suspecte de règlements de comptes politiques et qui permettrait d’en finir avec ces nominations faites dans les couloirs feutrés des salons dorés pour récompenser untel et promouvoir les amis. De la même façon, il faudrait, comme le proposa Dominique de Villepin par le passé, inscrire dans le marbre une dizaine de portefeuilles ministériels inamovibles, ce qui permettrait d’empêcher la création de portefeuilles uniquement dévolus à caser les membres de chaque courant du parti au pouvoir (« Ministère délégué au Développement », « Ministère délégué à la Réussite éducative ») et regrouper les secrétariats d’État (Personnes âgées, Réforme administrative...) dans des directions de ministères. Et tant qu’à faire, attendre des personnalités nommées qu’elles connaissent à fond leur dossier (un universitaire à l’Éducation nationale, un président de syndicat agricole à l’Agriculture, un économiste à Bercy...) plutôt que voir à chaque valse de remaniements des titulaires qui découvrent leur poste le jour même et des apparatchiks nommés parce qu’ils hantent depuis des années les couloirs des partis, parfois sans études, en tout cas en ayant rarement, voire jamais, eu d’expérience professionnelle hors ce cadre.

Troisième point, il faut garantir la totale indépendance des médias. Non pas souhaiter que les journalistes deviennent des hyènes enragées face à des ministres obligés de démissionner car simplement soupçonnés, mais laisser à la presse la liberté de mener les enquêtes qu’elle veut, accéder aux documents et pouvoir être autre chose que des porte-parole à la déontologie douteuse, comme ces grands pontes de l’audiovisuel qui se font payer des fortunes pour animer des séminaires d’entreprise avant de dîner tous frais payés dans les palais de la République avec un membre du gouvernement dont il aura ciré les pompes dans un édito. Le journalisme, c’est « tremper la plume dans la plaie » disait Albert Londres. Ce n’est pas l’honneur de la France de voir des articles web modifiés à la suite d’appels de pression ou de journaux empêchés de sortie à la suite d’un coup de fil de ministre.

Quatrième et dernier point, assurer la pérennité de nos institutions tout en les transformant. Je ne suis pas favorable au délire de VIe République, juste exalté pour le plaisir de changer de chiffre. La France a une histoire, des habitudes politiques, et je ne pense pas qu’il serait faisable de greffer un système parlementaire à la danoise (quand bien même on peut s’en inspirer). Le retour des jeux de pouvoir façon IVe République, des micro-partis sans base électorale représentés au Parlement, l’impossibilité d’avoir une large majorité... tout cela participerait plus à la déstabilisation qu’autre chose. Mais introduire une dose de proportionnelle, instaurer des primaires locales (facilement faisable avec Internet) pour désigner les candidats au lieu de voir des parachutés imposés, faire en sorte qu’un certain seuil de vote blanc oblige à recommencer l’élection, limiter les mandats dans le temps, rajeunir, féminiser et diversifier les origines de la classe politique, alléger la procédure des référendums populaires, réduire le poids et l’influence néfaste de certains lobbys (qui osent encore aujourd’hui donner des places de concert à des députés pour qu’ils soutiennent des projets de loi), éjecter définitivement de la vie politique les élus condamnés pour faute grave, etc... tout cela concourrait à assainir le processus.

Je reste un optimiste. Sans croire à un fumeux « sens de l’Histoire », je reste convaincu qu’année après année, par petits pas plus que par esprit révolutionnaire, la vie politique française est moins sale. Les années 80 et leurs valises de billets, les journalistes qui se font dicter leurs textes, les petites peines pour les magouilleurs, tout cela se réduit et tend à disparaître. Internet, le développement des associations anti-corruption et la transparence participent à créer un environnement plus sain. Gageons que nos représentons continueront à aller en ce sens et comprendront qu’aujourd’hui plus qu’hier, les comportements inacceptables ne sont plus de l’ordre du détail, et que s’ils veulent être réélus, ils ont un devoir d’exemplarité, et pas seulement sur leurs prospectus électoraux.

 

« Vers un assainissement de notre démocratie »

par Arthur Choiseul, le 9 septembre 2015

 

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Refonder la République. Mais d’abord... pourquoi ?

Après tout, notre exécutif ne semble pas outre mesure entravé dans son action : les lois sont toujours votées – au grès parfois de quelques comédies médiatiques, mais en général, toujours votées – et nous ne connaissons pas ces phases d’instabilité gouvernementale à répétition qui caractérisait la fin de la IVe République. Au fond, la mécanique de la Ve République, renforcée par le quinquennat, semble assez bien remplir son office premier : celui de privilégier l’action d’une majorité – fusse-t-elle juste moins minoritaire que les autres – plutôt que la paralysie des institutions.

Oui mais voilà, il y a tout de même quelques symptômes qui ne trompent pas :

1. Même s’il y a déjà eu par le passé des taux d’abstention importants, on ne peut nier une tendance générale à l’augmentation de celui-ci depuis les années 90, et plus fortement encore depuis les années 2000.

2. Les électeurs sont, dans un même temps, plus nombreux à se détourner des partis qui gouvernent habituellement la France et ses échelons territoriaux, au profit de formations souvent plus extrémistes.

3. Enfin, et c’est finalement le pire de nos échecs : bien que nos majorités et nos oppositions donnent toujours l’impression d’être en mouvement, bien que les débats, les lois et les mesures se succèdent, la France est toujours incapable de se réformer sur autre chose que des détails. Au fond, à l’« esprit de la Ve République » qui préférait l’action à la paralysie, nous sommes en droit maintenant de demander : « à quoi sert l’action, si c’est celle de piétiner sur place ? »

Quand communiquer vaut mieux que répondre

Mais la cause de ce double constat de désaffection citoyenne et d’impuissance politique est-elle seulement institutionnelle ? Notre manière de faire de la politique, ou d’en parler n’est-elle pas également en cause ? Se contenter de changer les règles du jeu changerait-il le résultat final ?

À une époque où la multiplication et l’intensification des canaux d’information a imposé la communication comme nécessité d’existence politique, et les diverses côtes de popularité comme principale boussole, montrer que l’on s’attache à résoudre un problème semble être devenu plus important que de le résoudre effectivement, et répondre vite semble valoir mieux que répondre juste.

Il arrive même que la mesure ou la décision politique elle-même soit vidée de toute autre fonction que celle de « communiquer », de montrer que l’on agit. Mais au final, une fois la frénésie de l’actualité passée, qu’en reste-t-il ? La montagne accouche trop souvent d’une souris. Comment, dans ces conditions, imaginer que l’action politique soit encore perçue comme ayant l’ambition de répondre durablement – et pertinemment – aux problématiques posées  ?

Un déficit de légitimité

Pour autant, la mise en cause des pratiques politiciennes et médiatiques dans le bilan de l’impuissance républicaine ne doivent pas occulter un autre aspect du problème : celui du déficit de légitimité à la tête de l’État ! Au fond :

  • Le Président de la République, élu au suffrage universel direct, n’est jamais que le plus apprécié des deux candidats ayant obtenu les meilleurs scores au premier tour. Mais aucun n’a jamais obtenu plus d’un tiers des suffrages au premier tour ! (sur les 40 dernières années)
     
  • La composition finale de l’Assemblée nationale, désormais élue juste après le Président de la République, ne reflète pas plus la disparité des opinions exprimées au premier tour dans l’ensemble des circonscriptions de France : elle ne sert qu’à asseoir suffisamment largement la majorité du parti présidentiel, balayant même la nécessité de composer des coalitions.
     
  • Comment imaginer alors que le Gouvernement, issu de la majorité à l’Assemblée, ne soit pas inféodé à l’autorité du Président de la République nouvellement élu ou réélu, alors même que l’esprit de nos institutions instaure un « Président arbitre » et un Premier ministre menant la politique gouvernementale  ?

  • Le Sénat, enfin, n’est pas mieux loti en termes de représentation des opinions citoyennes, avec un mode de scrutin complexe qui ne favorise que l’émergence de quelques «  grosses écuries  ».

Au final, le parti gouvernemental est dispensé d’avoir à composer, discuter, négocier, avec des partenaires : il peut faire passer sans trop de mal la quasi-totalité de sa politique sans vrais risques de blocage. Il perd ainsi l’occasion de se remettre parfois en cause, et de réfléchir à l’efficacité et au bien-fondé de son action, en général comme dans les détails. Mais surtout, il perd également la légitimité nécessaire à réformer en profondeur la nation, parce qu’il ne représente jamais qu’au plus un tiers de l’opinion citoyenne, et ne peut jamais se prévaloir que de ce tiers face aux deux autres.

Ceci dit, quelles solutions  ?

     1° Encourager l’exigence citoyenne

Nous devons prendre conscience que nous avons changé d’ère en termes de communication politique et institutionnelle, à l’échelle mondiale, depuis quelques dizaines d’années. Il serait illusoire voire nocif d’imaginer changer par la loi la pertinence de la communication politique et de sa diffusion médiatique.

C’est au peuple, finalement, de choisir s’il souhaite être exigeant, et privilégier ceux qui répondent juste à ceux qui répondent vite ou fort. En la matière, le seul pouvoir qu’il nous est offert d’exercer, élus, militants, acteurs de la vie associative on institutionnelle, vecteurs d’opinion, c’est celui d’encourager nos concitoyens à être exigeants.

     2° Lutter pour la transparence et contre le mélange des intérêts

Qu’il s’agisse du pouvoir politique (législatif, exécutif, territorial), du pouvoir judiciaire, du pouvoir médiatique, ou du pouvoir économique, il est impératif de lutter contre le mélange des intérêts de tous ordres (commerciaux, personnels, corporatistes, partisans…). C’est une chose aisée à dire, et bien plus délicate à mettre en œuvre efficacement sans tomber dans l’abus. Aucune tribune ne permettrait de répondre précisément à un problème aussi épineux, sur ce sujet, nous avons besoin d’un vrai débat citoyen, large, et long si nécessaire.

Deux pistes toutefois :

Une plus grande transparence concernant le train de vie des élus permettrait certainement de mettre un terme à certains fantasmes du « tous profiteurs » d’un côté, et de lutter également de l’autre contre la corruption. Dans une République où le lien de confiance entre citoyens et élus est de plus en plus fragile, peut-être faut-il en passer par là, « montrer patte blanche » ?

Un meilleur cloisonnement – ou tout du moins contrôle – entre les responsabilités électives et les pouvoirs de nomination dans les hautes fonctions administratives, judiciaires, ou dans l’audiovisuelle publique – pour ne citer que ces 3 pouvoirs – permettraient certainement de lutter contre les innombrables tentatives de « verrouillages » partisans que l’on observe un peu à tous les échelons de la République.

     3° Fonder une VIe République

Nous devrons un jour résoudre l’équation apparemment impossible qui consiste à permettre l’action et la stabilité gouvernementale tout en respectant dans les proportions, la diversité des opinions citoyennes.

Le bicaméralisme (le fait que le parlement soit constitué de deux assemblées, aujourd’hui Assemblée nationale et Sénat) nous offre peut-être une voie… mais pas un bicaméralisme où, comme c’est le cas aujourd’hui, l’une des chambres ne soit qu’un doublon de la seconde  !

Notre gouvernement n’a besoin que d’une chambre, en vérité, pour élaborer sa politique « quotidienne », pourquoi ne pas refondre la seconde chambre pour que, via une élection à la proportionnelle intégrale (et avec un nombre restreint de sièges, pour plus de lisibilité, pourquoi pas 100 tout rond ?) cette dernière devienne le reflet le plus fidèle possible de la diversité des opinions citoyennes. À cette seconde chambre reviendrait alors les pouvoirs de décisions sur des points plus profonds ou structurels de notre organisation républicaine et de notre législation. (On constate d’ailleurs qu’une telle distinction entre différents niveaux de décisions existe déjà sous la Ve République, via notamment la distinction entre la gouvernance par décrets et la gouvernance par la loi)

On pourrait enfin imaginer confier à cette seconde chambre un plus grand pouvoir de regard ou de décision quant aux nominations et révocations aux postes clés de l’administration, de la justice, et autres organismes d’État… un moyen aussi de lutter contre le népotisme.

     4° Clarifier, simplifier, alléger l’organisation territoriale et étatique

Ce n’est pas une question aussi prioritaire que les trois points précédents. Toutefois, elle devra un jour vraiment être traitée. Nos réformes successives des collectivités territoriales n’ont fait qu’empiler de nouvelles structures, gonfler les dépenses, générer des doublons… à tel point que certains de nos concitoyens n’y voient plus là – à tort ou à raison – que des « structures pour caser les copains ».

Déplorable en terme d’image, d’efficacité, de déséquilibre des comptes publics – que l’on renfloue aujourd’hui grâce à des dettes dont nos enfants paieront demain le prix – le « mille-feuille français » n’a jamais vraiment été allégé, bien au contraire. La grande gabegie doit cesser  !

Conclusion

Réécrire les « règles du jeu » ne suffira pas à réconcilier la politique française avec les citoyens, nous avons également besoin d’exigence, l’exigence des citoyens vis-à-vis de leurs représentants et de la couverture médiatique, exigence des élus et des médias vis-à-vis d’eux-mêmes, exigence, enfin, des militants vis-à-vis des cadres de leurs partis.

Le premier pouvoir du peuple, en démocratie, est certainement celui de choisir ces représentants – ses dirigeants – mais si le peuple venait à négliger ce pouvoir qui est le sien, c’est le fonctionnement même de la démocratie qui serait remis en cause, et avec elle, la liberté qu’elle garantit et l’égalité qu’elle promeut.

 

Christophe Vasquez

« Soyons exigeants... soyez exigeants ! »

par Christophe Vasquez, le 11 septembre 2015

 

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Trop peu connaissent l’épisode historique qui faillit mener à la fusion des gouvernements britannique et français, et de leurs empires coloniaux, en 1940. Il fallait des esprits visionnaires et audacieux comme Churchill et De Gaulle, pénétrés de l’amour profondde leur patrie autant que conscients des soubresauts du monde, pour concevoir et mettre en œuvre un tel projet. Face à un péril immense et un basculement inévitable, choisir de se fondre pour évoluer et persister sous une forme nouvelle, ou risquer l’anéantissement.

Là est le cœur du débat sur les institutions, la démocratie, la société. Nous sommes dans une période de fluctuations comparable à 1940 et non pas à 1958. Ne tombons pas dans l’écueil facile et futile d’une discussion mécaniste, proposant telle réforme électorale ou révision des échelons institutionnels, telle nouvelle République, telle méthode pour remobiliser les citoyens, telle autre pour renouveler la classe politique. Ce serait être bien crédule que de considérer un traitement par feuille ou par branche quand c’est l’arbre en son entier qu’il faut soigner.

Les institutions ne sont pas ahistoriques. Elles sont, au contraire, intrinsèquement liées à une époque, aux aspirations d’une population, à l’état des savoirs. Par conséquent, elles sont changeantes et mortelles. C’est un conservatisme malsain de souhaiter leur immuabilité, au risque de les vider de leur essence fondamentale – fournir une organisation des rapports humains adaptée aux exigences du moment – et d’entraîner leur inadaptation, leur dessiccation. Pire, si ces institutions sont démocratiques, c’est livrer la démocratie inopérante et la souveraineté populaire abandonnée à quelque tyran malin.

Le constat est souvent partagé – notamment en France (voir l’ouvrage de Pierre Rosanvallon) – que l’organisation politique de notre société est dépassée, caduque. Il ne semble pas aventureux d’affirmer que la République française est un temple sacré qui n’a plus ni fondations ni colonnades, de rares sectateurs pour beaucoup de mécréants, mais qui demeure par le confort de l’habitude.

Pourtant personne ne veut pointer et nommer la cause véritable. On ne peut comprendre l’état actuel de nos institutions et penser les institutions à venir sans prendre en compte la mort de l’État-nation, sans observer les trépidations puissantes qui agitent le monde ni expliciter les défis qui s’imposent à nous.

Aborder la mort de l’État-nation, c’est s’attendre à des cris d’orfraie convenus. L’État-nation est érigé en idole. Il a les beaux atours postiches d’un modèle structurant et indépassable de nos sociétés, bien qu’il n’ait émergé que deux siècles plus tôt. La civilisation l’a précédé et nous parions que le chaos ne suivra pas sa disparition. L’État-nation est la congruence opportune de deux éléments : l’État, en tant qu’entité politique qui régente l’organisation de la société et l’exercice courant de la souveraineté ; et la nation, ce groupement qui unit les individus entre eux et les particularise par rapport à d’autres groupes d’individus.

Le succès de l’État-nation au XXème siècle est incontestable, il devient la forme dominante et quasi-exclusive, grâce à un mouvement centripète qui accompagne l’explosion des empires et légitime les revendications nationalistes. Cette parcellisation du monde a lieu avec l’assentiment des États-Unis et de l’Occident. Évidemment, toutes les revendications nationalistes ne sont pas satisfaites, le processus connaît des ratés et des États multinationaux se maintiennent. La victoire n’est pas absolue mais la tendance est nette.

Qu’en est-il aujourd’hui ? L’État-nation est toujours là mais il décline. Considérons ses parties pour juger de l’ensemble, en nous restreignant au cas de la France. La nation, tout d’abord. Toutes les analyses et toutes les définitions pour qualifier la “nation française” actuelle sont battues en brèche car les constituants objectifs et subjectifs disparaissent les uns après les autres. La religion, l’armée, l’école, la famille, l’histoire, la culture, la langue... tous ces éléments qui favorisent et entretiennent le lien sociétal – et participent donc au maintien de la nation – se trouvent affaiblis, dilués, abandonnés. L’on pourrait détailler longuement et individuellement ces éléments mais chacun saisit aisément les enjeux qu’ils sous-tendent et les polémiques qui surgissent à leur propos.

Dès lors, peut-il encore y avoir une nation lorsque les liens qui permettent de faire société et de se singulariser sont à ce point distendus ? La nation n’a plus de sens, à l’heure où les frontières physiques sont abolies, où les rapports humains sont redéfinis par la communication et le numérique. Pour preuve, le renouveau des régionalismes sans revendication d’indépendance ou du “communautarisme”, qui ne doivent pas nécessairement être perçus comme des menaces (voir les travaux de Michel Maffessoli).

La dimension nationale n’est plus pertinente car chaque individu se sent singulier, s'attache à des communautés (linguistique, ethnique, culturelle…) qui ne sont pas confondues avec la communauté nationale. D’ailleurs, ce sentiment national n’est pas inné, il ne peut exister que s’il est stimulé, et les stimuli sont rares dans la France d’aujourd’hui. À tout le moins, le lien national se réanime lors de certaines occasions, où l’émotion sert de vecteur à la cohésion (commémoration mémorielle ou attentat, définition d’un ennemi commun…). Il faut voir aussi en cela un symptôme de l’impuissance croissante de l’État, qui ne mobilise plus sa nation en dehors de ces circonstances exceptionnelles.

L’État (et en particulier l’État démocratique, par nature limité et contrôlé dans l’usage de ses moyens d’action, à l’inverse de l’État autoritaire) devient impotent face à un monde qui invente des règles permettant de se passer de lui. On ne peut ignorer que l’économie prime désormais sur le politique.

Il serait d’ailleurs intéressant d’observer le grignotage des fonds privés et mécénats sur les missions régaliennes de l’État, dans des domaines aussi divers que la recherche, la culture, l’éducation, etc. C’est un autre sujet. Quoi qu’il en soit, les véritables leviers sont économiques. La croissance, le chômage, sont des maux que le pouvoir politique ne peut endiguer seul. Le marché n’a pas de frontière, pas de visage, guère de limites et peu d’unicité, puisque les règles du capitalisme ne sont pas unifiées au niveau mondial.

L’État s’endette, s’échine à atténuer les variations économiques qui ont un impact sur la population, sans succès. L’ultime levier encore entre ses mains – qui lui permet de réaffirmer sa force et son utilité – c’est l’impératif de sécurité, primordiale pour la population autant que pour la stabilité économique. De ce point de vue, le terrorisme se révèle une calamité aux atouts opportuns, puisque l’existence de l’État est confortée et justifiée s’il se mobilise pour la protection des citoyens et des biens. Le résultat est néanmoins mitigé. C’est que même en ce domaine, l’État est faible. Le crime est mondialisé, ses sources de financement aussi, et aucune politique mondiale efficace ne vient gêner ce système.

Ainsi, le meilleur indice – et le plus terrible – de la mort de l’État-nation est peut-être la naissance de Daech. Il est par nature transnational voire international, fondant sa cohésion sur une certaine vison extrémiste de la religion musulmane. Il n’a pas d’État à proprement parler, fixe ses propres règles, défie l’équilibre mondial des frontières et des puissances, attaque tout pays sans déclaration de guerre et par “des intermédiaires” grâce à l’endoctrinement, se rétribue sur le pétrole ou le trafic d’œuvres d’art. Il n’a que faire du bien-être de sa population et de son développement. Cette entité obscurantiste est animée par le double objectif de conquérir et convertir.

Le succès de cette entreprise de terreur vient de sa “liberté”, n’étant pas restreint par un carcan et des normes inadaptés. Le péril est grand que nos États-nations ne puissent plus faire illusion longtemps et que leur déclin entraîne des régressions qui nous plongeraient dans une ère de troubles. Ce n’est certainement pas le souhait des populations. Il est donc temps de prendre acte du changement mondial.

Notre monde est traversé de courants puissants, parfois antagonistes, qui transforment irrémédiablement l’organisation des sociétés humaines. Ne sous-estimons pas la force et le triomphe de l’idée, du virtuel, sur le réel. Cela induit la création, la coexistence et bientôt la concurrence, avec un autre univers. Internet en est l’illustration la plus simple, l’individu s’y dépasse, se réinvente, les États n’y ont quasiment aucune autorité, c’est un monde illimité, instantané, aujourd’hui livré à lui-même. Et l’individu qui y pénètre est également livré à lui-même. Il doit juger les informations qu’il reçoit sans toujours en discerner la réalité, il peut enfreindre les lois de son pays en achetant drogues, armes, prestations sexuelles…

Dans un registre moins grave, la mise en réseau de tous les individus offre un potentiel de partage jamais égalé : partage de sa voiture, de sa maison, de ses compétences… Chacun a quelque chose à offrir et recherche quelque chose. Cette économie du partage, économie participative, cette “ubérisation” diront certains, redéfinit la réalité et remet en cause, par exemple, l’existence de certaines professions organisées. Certains (tel Jeremy Rifkin) vont mêmes jusqu’à théoriser l’effondrement du système industriel et la mutation du salariat. L’économie fait face à son propre bouleversement et c’est une formidable occasion pour les citoyens de se ressaisir du pouvoir perdu par le politique.

Cet autre monde, virtuel et immatériel, influence donc de manière croissante le monde physique. Le progrès technologique a pulvérisé les cadres de pensée et l’horizon des possibles est béant. Puisque l’idée devient reine, tout est réalisable, au service du plus grand bien comme des plus grandes folies. On le voit avec les inquiétudes naissantes autour de l’impression 3D, du transhumanisme, de l’intelligence artificielle. Chacun va pouvoir concevoir et obtenir ce dont il a envie, sous la forme et au moment souhaité. Le triomphe de l’idée est aussi le triomphe de l’égoïsme.

La déconstruction de l’homme ancien est à l’œuvre avec la perte de nos illusions : la fin de la perspective d’un développement infini, la fin probable du prétexte d’existence par le travail au gré des avancées technologiques… un citoyen nouveau naît, s’invente, une autre vie en quelque sorte. Sous cet angle, l’inquiétude de certains scientifiques (menés par l’astrophysicien Stephen Hawking) vis-à-vis d’une intelligence artificielle qui supplanterait l’homme, n’est pas une idiotie. Si l’on dépossède l’homme de toute utilité et de tout intérêt de vivre, si l’humanité curieuse, ambitieuse, inventive est éternellement battue par la supériorité de la machine et tombe sous son joug comme une proie, quel avenir obscur !

Dès lors, pour ce nouveau citoyen et cette nouvelle société, tout ne peut pas être acceptable, il faut établir des règles. Qui alors pour imposer une règle ? On l’aura compris, la structuration des mondes physiques et virtuels est distincte, et les schémas du réel ne peuvent être appliqués au virtuel ni réunir ces deux mondes. L’État, et plus encore l’État-nation, ne nous semble plus apte pour régenter cela.

Il faut maintenant raisonner à l’échelon supra-étatique, ce que la grande majorité des pays a commencé à faire depuis plusieurs décennies, avec des niveaux d’intégration très divers (Union européenne, ASEAN, Union africaine…). L’avenir est au regroupement et plus à l'éparpillement, à la création de nouveaux empires continentaux. Le mouvement est enclenché mais le défi est ailleurs. Les citoyens soucieux de préserver les acquis démocratiques devraient s’engager pour un fédéralisme mondial, un universalisme qui créerait des institutions mondiales réellement détentrice d’un pouvoir. En somme, un “giga-État” capable de fixer des principes planétaires.

Un “giga-État” capable d’unifier et de réguler le fonctionnement de l’économie capitaliste, de combattre la criminalité et le terrorisme, de protéger les libertés et les Droits de l’Homme, de reprendre le contrôle du monde virtuel, de définir universellement les règles que l’humanité s’impose à elle-même face à l'emballement technologique. Les institutions mondiales, comme l’ONU, nées après de grands traumatismes, sont une esquisse et une base qu’il faut améliorer et amplifier. Nous avons renoncé, depuis la seconde moitié du XXème siècle, à poursuivre véritablement cet élan universaliste.

Aux problèmes du monde actuel, il est indispensable d’apporter une réponse politique. Il ne faut pas avoir peur de la mort de l’État-nation, de la vieille société mais il faut l’accompagner, préparer la transition vers quelque chose de plus haut, de différent. Se fondre et se regrouper pour évoluer, sinon disparaître. Il ne faut pas céder au fatalisme et à l’obscurantisme, ne pas abdiquer devant la barbarie des réactionnaires et l’enthousiasme incontrôlé des progressistes.

Une voie médiane est envisageable, souhaitable. Nos sociétés plurielles, dont la cohérence et la cohésion ne sont assurées, doivent s'accepter et se dépasser. Les individus ne peuvent plus être catégorisés ni les États limités par des frontières. Il faut raisonner en termes d’humanité et plus de nationalité, d’universalité et plus de territorialité parcellaire. La contiguïté des sociétés n’existe plus, elles s’interpénètrent, s’influencent d’une manière décuplée, sont étroitement liées par la technologie. Telle catastrophe du bout du monde mobilise chez nous et telle nouveauté à la mode ici traversera demain les océans.

La recherche d’une nouvelle forme d’universalité fraternelle non uniformisatrice, voilà le vrai défi, l’unique défi du XXIème siècle. Cela doit se faire par étapes car, nonobstant la mise en réseau de l’humanité, certaines barrières mentales résistent face à l’impensé de la globalité. Sans doute la naissance d’une Europe fédérale, où les États abandonnent définitivement leurs pouvoirs, est un premier palier à atteindre, si l’on reste sur la construction déjà entamée et qui se fonde sur des critères historico-géographiques. L’on pourrait imaginer une toute autre intégration, fondée par exemple sur la francophonie, avec la création d’une entité supranationale fédéraliste mêlant la France, la Belgique, le Québec et des pays d’Afrique.

Qu’importe le lien que l’on mobilise et la justification que l’on donne, la finalité est le dépassement de l’État-nation. La religion, la couleur de peau, la nationalité, tout cela n’est plus structurant. Ce qui compte désormais est bien plus fort : ce sont les manières de vivre et de concevoir l’avenir.

Concomitamment, il faut rejeter toute tentation uniformisatrice, qui ne peut être source que de résistances violentes, l’expression d’une peur de la disparition. La conflagration contemporaine vient de cela. Le communautarisme, le terrorisme, prolifèrent par le truchement de l’incompréhension, de l’inquiétude, de l’instinct réactionnaire pour la survie de sa civilisation et de soi-même. La haine de l’Autre et le repli sur soi sont les serviteurs d’une protection désespérée.

On a laissé les identités, les sociétés, les cultures se livrer une véritable guerre, une concurrence libérale – au sens économique – où le plus offrant, le meilleur communicant, pouvait emporter la mise. Comment s’étonner alors de toutes ces identités frustrées, spoliées, ces unités nationales perdues (si tant est qu’elles aient véritablement existées). La radicalité germe quand il n’y a plus de rationalité, et le monde actuel n’est pas rationnel. Les crises qu’on laisse s’envenimer tout en sachant les solutions à mettre en œuvre, sont un aveu de folie et d’impuissance.

La situation migratoire, la criminalité... ces problèmes d’envergure appellent des réponses à grande échelle, nous le savons tous. Les frontières héritées des deux guerres mondiales et la parcellisation nationaliste – cette recherche du plus petit dénominateur commun sur un territoire donné – n’offrent plus un cadre pertinent de gestion. Comme ces clercs bornés contre Galilée, refusant obstinément de reconnaître l’évidence de la caducité de leur interprétation devant l’impérieux argument de la réalité, il faut nous aussi cesser de penser en termes de systèmes clos et exclusifs.

Il ne s’agit pas de forcer une tribu Sioux à vivre avec et comme une tribu Inca. Mais au sein de la fraternité humaine il est possible d’établir des règles de coexistence pacifique. Il ne faudrait pas croire que le retour au village isolé et auto-suffisant, comme certains aiment à l’imaginer, soit la solution. Le monde est désormais en réseau et interdépendant. Les enjeux des décennies à venir sont donc colossaux : la gestion d’une masse de population dont on ne connaît pas encore le seuil maximal ; la préservation des espaces naturels et des ressources ; le maintien de nos conforts de vie.

On comprendra donc qu’une “refondation des institutions nationales” aux contours flous et aux résultats hypothétiques, dans une telle configuration mondiale qui subit un profond changement de paradigme, d’épistémè, n’est guère satisfaisante. Il faut une plus haute ambition, à la mesure des enjeux, pour les citoyens.

Puisque la réponse ne peut et ne doit être que politique - au sens profond et originel de ce“qui concerne les citoyens” - il faudra des dirigeants courageux et audacieux, des citoyens lucides, capables de ressentir l’intérêt général et non plus leur intérêt propre. Les premiers devront abandonner leur pouvoir à une institution qui les dépasse, les seconds exercer leur souveraineté sous une forme nouvelle, à l’aune de la démocratie participative qui s’invente sous nos yeux.

La recomposition du paysage politique français, qui s’opère actuellement, témoigne des bouleversements qui ont lieu et de l’évolution des mentalités. Un nouveau clivage émerge, celui de l’universalisme, qui divisera les partisans d’un conservatisme acharné, convaincu que la nation et l’État ne sont pas morts ; et ceux, plus éclairés, à la manière de Churchill et De Gaulle, qui se préparent à penser l’après.

 

Vincent Métivier

« Penser la rupture. Inventer un nouvel universalisme. »

par Vincent Métivier, le 13 septembre 2015

 

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Ce constat, partiellement injuste, n’exprime aucune nuance. Je le revendique en refusant de le tempérer car j’ai le sentiment qu’il faut aller à l’essentiel. Le lecteur offusqué pourra rajouter des « parfois », « un peu », « en partie » aussi souvent qu’il le souhaite ; il aura toujours raison de le faire.

Après des mois d’engagement, je ne vois plus qu’une alternative à la décrépitude de notre système politique : sa disparition.

Nous, militants, avons beau gesticuler dans nos partis, faire des enquêtes d’opinion, appeler comme des moutons à des sauts ou des sursauts démocratiques, la défiance des citoyens envers le monde politique s’aggrave.

Des deux côtés, une forme d’autisme fait rejeter la faute sur l’autre. Les élus, aveuglés par leurs ambitions, sont incapables de se remettre vraiment en question ; les électeurs, eux, votent comme des pieds en s’en lavant les mains. Personne ne se sent plus coupable de rien. Pour faire simple, notre crise institutionnelle est avant tout une crise de responsabilités.

Pour donner un nouveau souffle à notre démocratie, il est indispensable d’augmenter considérablement la représentation et le pouvoir des citoyens. Selon le principe des vases communicants, cela se fera au détriment des partis et des professionnels de la politique, mais on ne peut pas se payer le luxe d’entretenir ceux qui desservent ceux qu’ils devraient servir.

Dans cette optique, attaquons-nous d’abord au problème de représentation du peuple.

Nous serions, paraît-il, en démocratie. Pourtant, à regarder la composition de l’Assemblée nationale, le doute est permis. Les élections parlementaires répondent à la loi du plus fort et une majorité des Français ayant une opinion « minoritaire » n’y est pas représentée. Il y a là une anomalie à corriger. Un scrutin avec une bonne grosse dose de proportionnelle, du genre à dynamiter les groupes majoritaires, changerait cela. Je sais bien que la France a eu quelques mauvaises expériences de ce type par le passé. Mais ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain, certains de nos voisins européens ne s’en sortent pas trop mal (le Danemark, notamment).

Allons même plus loin. Plus loin, c’est le tirage au sort. En nous libérant des logiques électoralistes, le panachage d’un large tiers de l’Assemblée par de simples citoyens désignés par hasard – et évidemment défrayés – pourrait permettre au Parlement de retrouver une assise ainsi qu’une légitimité populaire qui lui font largement défaut aujourd’hui. Et, accessoirement, une honnêteté que ne connaissent pas nos lobbyistes actuels. Ce système, hérité de la démocratie athénienne, a notamment été utilisé pour l’Assemblée constituante islandaise de 2011.

Enfin, toujours sur la question de la représentativité, il serait bon d’améliorer l’accessibilité de tous les citoyens aux mandats électifs. Se présenter à une élection est aujourd’hui un vrai parcours du combattant. En vrac, cela requiert : du temps, de l’argent, un suicide professionnel (si on est pas fonctionnaire), un parti politique, une place à prendre à un autre candidat potentiel ou à l’élu sortant. Un Monsieur-tout-le-monde armé de son seul courage n’a donc aucune chance de se retrouver sur d’autres bancs publics que ceux du parc le plus proche. Pour changer ce paradigme, diverses mesures doivent être prises, allant du non-cumul des mandats au soutien financier et logistique du candidat indépendant.

La question de la représentation étant abordée, reste à soulever celle de la détention et de l’exercice du pouvoir, symbolique ou effectif.

Je précise symbolique ou effectif car il existe, de fait, une confusion entre les deux. Certains représentants de la Nation partent du principe qu’ils en sont d’abord une incarnation, donc qu’ils sont au-dessus des lois, de la morale et du peuple. Cette confiscation de la symbolique du pouvoir en font des demi-dieux capables, pour les députés par exemple, de voter l’impôt sans être assujetti au même régime que leurs concitoyens, ou de bénéficier d’une immunité pour profiter bien tranquillement de leur mandat et de ses largesses. Il serait bon de réformer le statut de l’élu pour l’inviter à une certaine modestie.

Cette confusion existe également au plus haut sommet de l’État, et c’est là qu’elle fait le plus de dégâts. Avoir un exécutif bicéphale sans cohabitation est une aberration, car ce régime donne tous les rôles au Président, et n’en donne plus aucun au Premier Ministre. Le chef du Gouvernement n’est désormais plus un fusible viable et le chef de l’État, normalement garant de sa continuité et de l’unité de la Nation, se fait siffler dans les stades… Comme Emmanuel Macron (Le 1 Hebdo, 08/07/15), je pense qu’il manque un roi à la France. Qu’importe qu’il soit de droit divin ou républicain, nous gagnerions, à ce niveau du pouvoir, à séparer la charge symbolique de la portée politique. Difficile d’imaginer Hollande en Reine d’Angleterre (pardon pour l’image !), mais c’est à mon sens la voie à emprunter.

Les politiques, élus ou mandatés, doivent par ailleurs être responsables de leur parole et de leurs actes. J’utilise ici la notion de responsabilité dans les deux sens.

D’une part, les gouvernements, tous échelons confondus, gagneraient à être composés d’experts dans leur domaine. D’autre part, il faudrait instaurer des contrats de gouvernance, contraignants et sanctionnables (idée empruntée à Sam Karmann, Twitter, 13/09/15). La conduite de la France ne peut plus être un chèque en blanc de la durée d’un mandat, laissé aux mains de semi-professionnels de la communication, mielleux et interchangeables.

Enfin, je suis intimement persuadé qu’il faut généraliser la pratique du référendum, d’autant que grâce aux nouvelles technologies, son recours n’est plus aussi coûteux ou fastidieux que par le passé. Toute question d’ordre sociale ou structurelle devrait y passer. Son utilisation fait peur en France, nos politiques estimant que les citoyens sont dénués de recul. C’est en partie vrai, mais à infantiliser le peuple, il reste un éternel adolescent en crise. La maturité s’acquiert par le respect et la reconnaissance. Les Suisses, exemples en la matière, décident ainsi de leur sort en conscience ; ils ont notamment refusé début 2012, via référendum, le passage de quatre à six semaines de congés payés.

Tout un programme, n’est-ce pas ? Soyez toutefois rassurés, ces propositions sont irréalisables car ceux qui pourraient les voter sont principalement ceux qu’elles limiteraient. La politique n’a jusqu’alors jamais atteint un tel degré de masochisme !

 

Vincent Fleury 2015

« Moins de politique pour plus

de démocratie (et vice versa) »

par Vincent Fleury, le 15 septembre 2015

 

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On voudrait nous faire croire que la jeunesse est désabusée et son engagement essoufflé. Elle incarne pourtant un élan nouveau, souvent incompris. Débrouillarde, elle rebat les cartes et impose de nouvelles règles du jeu. Elle forge les institutions neuves. Elle se débat en dehors des statuts qui ont protégé leurs parents et au sein desquels on raisonne encore trop souvent.

Dans un pays sans croissance et sans emploi, les jeunes sont en première ligne. Face à un taux de chômage quatre fois plus élevé qu’il y a quarante ans, face à une temporalité accélérée par la mondialisation, ils se considèrent souvent mal armés.

Le constat est simple : notre monde bouge plus vite que nos méthodes, nos structures et in fine nos institutions. Cette génération du système D plus que "Y" a donc mis en place un système parallèle, à rebours des idées reçues, en passe de devenir le système de référence.

La jeunesse modélise un système où l’engagement est tentaculaire et moins codé. L'engagement n'est pas mort. Il est même de plus en plus vivant et s'exprime sous des formes renouvelées ! On manifeste moins, on pétitionne plus. On adhère moins à un parti politique ou à un syndicat, mais on s'inscrit en ligne pour accueillir chez soi des réfugiés de guerre. On s'affranchit des appartenances politiques, mais on organise des mouvements à l'extérieur des cercles traditionnels, qu'il s'agisse des Pigeons ou de la mobilisation « Je suis Charlie » du 11 janvier.

La jeunesse est mature. Elle ne court pas après un strapontin dans la décision publique, elle œuvre déjà et en dehors des institutions. Les structures traditionnelles sont dépassées. Logique. Elles ont refusé de changer. Les règles du jeu sont écrites par celles et ceux qui en bénéficient et permettent avant tout de protéger les "insiders".

La désillusion de la jeunesse envers nos institutions n’est pas un mouvement d’humeur... Alors que leurs aînés jurent encore par l’État, les jeunes sont 80% à considérer que la politique doit favoriser l’entreprise. Plus d’un tiers des lycéens et étudiants souhaitent créer leur propre structure. Ultra-connectée, la jeunesse ne comprend plus l’inertie d’un système dépassé.

Le réferendum de 2005 sur le projet de constitution européenne en est un exemple symptomatique. Une jeunesse mobilisée sur des enjeux techniques, qui vote en masse « non » et qui, quelques années plus tard, comprend que le plan B est un passage en force du plan A. Cette désillusion marque la fin d’un espoir.

Est-il alors trop tard pour ré-enchanter les institutions actuelles et éviter leur renversement brutal ? Non. Mais devant l’urgence, il faut agir vite ! Face à la crise de légitimité du politique, la démocratie doit être plus directe, les projets politiques davantage co-construits avec les citoyens. Face à l’inefficacité des politiques publiques, ce sont non seulement des évaluations permanentes qui doivent être mises en place, mais aussi un véritable « devoir de rendre compte » des responsables qui doit être instauré.

 

Aurore Bergé     Matthieu Ellerbach

Julien Miro

« Les institutions de demain seront forgées

par une jeunesse plus engagée que jamais »

par Aurore BergéMatthieu Ellerbach

et Julien Miro, le 16 septembre 2015

 

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« La démocratie est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. » Cette citation d’Abraham Lincoln qui caractérise la démocratie est sans nul doute la définition la plus célèbre du mot « démocratie ».

À l’heure où de nombreux peuples dans le monde ne peuvent toujours pas dire qu’ils vivent sous un régime démocratique et où, en Europe notamment, les volontés des peuples sont balayées d’un revers de main par les technocrates et les financiers qui nous gouvernent, je vais essayer d’être concis pour développer ma vision de ce que devrait être les changements que je souhaite au sein de la République française.

Je me bornerai (comme il nous l’est demandé) à développer ma vision pour la France et non une vision généraliste européenne même si je reste persuadé qu’une rénovation profonde des institutions de la république doit s’accompagner du retour à une Europe des Nations libres et indépendante, dirigées par les peuples et non pas les marchés et les lobbys.

J’ai choisi de commencer mon exposé par la citation de Lincoln car j’estime qu’à l’heure actuelle la république est malade de sa démocratie qui ne représente pas (ou plus) l’idéal qu’elle devait porter.

Je n’en appellerais pas à une VIème République (effet de style plus que changement de fond) mais à une Vème République rénovée et refondée pour recentrer le citoyen au cœur de la cité, comme c’est le cas par exemple en Suisse. Les référendums d’initiative populaire sont à cet effet l’exemple le plus criant d’une démocratie « participative » - en plus de « représentative » - réussie. L’Europe a tenté elle aussi, avec ses initiatives citoyennes, d’aller sur ce terrain, mais il ne s’est agi que d’un artifice, comme nous avons pu le constater avec l’initiative sur la fin de l’expérimentation animale, qui a été sacrifiée. Il faudra instaurer en France de véritables référendums d’initiative populaire (avec un seuil fixé entre 500 000 et 1 million de signatures) que l’on soumettrait obligatoirement au vote de la population (avec, malgré tout, une limite par an).

Le régime français est semi-présidentiel (à la différence des régimes parlementaires de nombreux pays européens). S’il est nécessaire de conserver la stabilité qu’il procure, je pense qu’il faut revenir à un mandat présidentiel de sept ans, non renouvelable, afin que le président élu fasse réellement les réformes pour lesquelles il s’est fait élire, sachant bien qu’il ne pourra pas se représenter. Parallèlement, on pourra renforcer les pouvoirs du Parlement qui pourra avoir un rôle d’initiative plus important.

Le Sénat et le Conseil économique et social devraient être supprimés, mais il faudrait veiller à ce que l’Assemblée représente de manière équilibrée les élus, les territoires, et toutes les composantes de la société civile. Le mandat législatif serait toujours de cinq ans, avec une proportionnelle intégrale, non par département mais par région (les vingt-deux anciennes régions, pas les grandes régions), avec un seuil de 5% des voix pour que soient représentés tous les mouvements et en même temps garantir une juste représentation des territoires (ce que la liste unique ne fait pas forcément, favorisant souvent une élite parisienne).

Une vingtaine de sièges seraient attribués au niveau national pour permettre à tous les partis politiques ayant obtenu au niveau national entre 1 et 5% des suffrages de bénéficier d’un représentant à l’Assemblée s’ils n’en ont pas eu un seul via le scrutin à base régionale. L’obligation liée à la parité tomberait - car on doit choisir les personnes pour leurs compétences et non autre chose - mais elle serait encouragée (malus dans le financement public, désavantage dans la répartition des sièges en cas dégalité) pour inciter les femmes à s’engager en politique puisque notre pays n’a pas encore la mentalité des pays scandinaves, par exemple, en la matière.

Le cas de l’Outre-Mer serait traité à part avec un scrutin majoritaire à un tour conservé pour les circonscriptions uniques et une proportionnelle pour les autres, comme pour les Français de l’étranger. Le nombre de députés serait maintenu (compte tenu de la suppression du Sénat et du CES) mais les indemnités encadrées, diminuées et les retraites alignées (comme au gouvernement) sur le privé pour une équité, une moralité réelles. La politique deviendra l’espace qu’il devrait être : celui de servir les citoyens et non de se servir soi-même.

De même, le financement des partis devra être revu et les micro-partis interditsEnfin, le cumul des mandats devra s’appliquer strictement. Un élu national - ou membre du gouvernement - ne pourra cumuler avec la présidence d’un exécutif local (un mandat de simple élu départemental sans responsabilité ou de simple conseiller municipal ou conseiller délégué sera autorisé, de la même manière qu’un mandat d’adjoint au maire ou de maire d’une commune rurale de moins de mille habitants).

Il en serait de même au niveau des collectivités locales, avec une défense de l’héritage de la commune, des départements et de la Nation. Les Régions (actuelles) seraient des lieux de concertation où siégerait des représentants des départements et des communes. Les scrutins départementaux et municipaux seraient proportionnels eux aussi (intégralement pour le département et avec une prime de majorité pour les communes). Les intercommunalités seraient supprimées ; les collectivités garderaient la possibilité de se regrouper pour certaines compétences (les communes rurales notamment), sans institutions propres ni indemnités correspondantes.

La principale caractéristique de la République telle que je l’imagine, avant même d’en articuler les compétences, les définitions ou le mode de gouvernement : elle se doit d’être morale et exemplaire. Les nominations de responsables ou de fonctionnaires se feront sur la base du mérite et de l’exemplarité. Les frais seront contrôlés, les conflits d’intérêts interdits et nous devrons nous inspirer des modèles scandinaves sur la transparence de la vie politique et l’intégrité des élus (tout élu corrompu ou soupçonné de corruption et autre ne pourrait tout simplement plus se présenter à une élection). Les liens entre les élus et les lobbys seraient activement contrôlés et des sanctions importantes pourront être prises pour ceux qui tentent d’influencer la vie politique par des pratiques de lobbying.

Les médias devront jouir d’une totale liberté d’opinions ; toute censure ou pression sera interdite. Néanmoins, nous contrôlerons et limiterons les liens entre industriels et groupes de presse en créant de nouvelles règles liées à la détention du capital des médias.

Enfin, tout les budgets des institutions et de la vie politique seront diminués pour montrer symboliquement l’exemple aux citoyens si ceux-ci doivent aussi supporter le prix de sacrifices et d’efforts.

 

Jordan Grosse Cruciani

« Appliquons à la lettre la maxime de Lincoln »

par Jordan Grosse Cruciani, le 17 septembre 2015

 

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Une étude du Cevipof (le Centre de recherches politiques de Sciences Po, ndlr) montre que 90% des Français « considèrent que les responsables politiques ne se préoccupent peu ou pas de gens comme eux » (avril 2014). Cette nouvelle préfigurait les résultats alarmants du Front national lors des élections européennes en mai 2014. Ce parti se nourrit du rejet de la politique et de ses représentants par les Français. Indéniablement, une réflexion sur les institutions et le système politique doit être ouverte pour tenter de comprendre les motifs de cette rupture durable entraînant la montée des partis extrêmes.

     1/ Pour une réforme profonde des institutions de la République

La France compte aujourd’hui 510 000 élus pour une population de soixante-six millions d’habitants. Cela représente un élu pour 130 habitants. Paradoxalement, l’impression des Français de n’être pas représentés coïncide avec cette hausse du nombre de politiques. Ceci témoigne donc d’abord d’un grave problème institutionnel.

Au Parlement, 577 députés et 348 sénateurs siègent. Dans les IIIème et IVème Républiques les élus avaient un rôle fondamental comme dans les régimes parlementaires classiques. Ils ont voté des lois socles de nos systèmes juridiques et représentaient parfaitement la société dans le cadre du scrutin proportionnel. Avec l’avènement du régime semi-présidentiel, le parlementarisme est « rationalisé » et les élus affaiblis face à l’exécutif pour une meilleure gouvernabilité.

Ils sont connus pour être trop bien payés, trop nombreux et asservis au mass media. Leur soi-disant « impossible ubiquité » conduit certains à vouloir limiter le cumul des mandats dans le même temps, voire dans la vie (pas plus de deux mandats de député dans toute sa vie). De la même façon, le Sénat est critiqué pour son mode de scrutin et son rôle. Ainsi, la désignation par des grands électeurs serait, selon ses détracteurs, anachronique. De plus, il sur-représenterait les régions rurales, car 98% des agglomérations françaises ont moins de 9 000 habitants et 48% de la population vit dans ces dernières.

Alors que faire ? On serait tenté de céder à la facilité et la démagogie en demandant la suppression du cumul des mandats. Toutefois, avec une équipe compétente autour de soi, il est possible de traiter tous les dossiers locaux ou législatifs. De plus, cela reviendrait à empêcher les citoyens de choisir l’homme politique qu’ils désirent véritablement puisque celui-ci pourrait être constitutionnellement empêché de se présenter aux élections, ce qui est profondément antidémocratique. Le cumul des mandats permet de donner la parole à des politiciens forts, affranchis de la tutelle du Parti, qui s’expriment au nom d’un nombre important d’habitants d’une circonscription et d’une ville. Les communautés locales sont de fait mieux représentées. En plus, des parlementaires plus forts permettent de faire contrepoids à l’exécutif qui gagne en importance.

Pour pallier la crise de représentation, on peut envisager une élection de liste à prime majoritaire (au moins la moitié des sièges pour la formation politique en tête) pour garantir la gouvernabilité au niveau national et permettre à des partis non moins importants de figurer au Parlement, miroir de l’opinion des Français. En tout cas, l’enjeu principal des années à venir sera de réduire le nombre de députés pour accélérer le processus législatif tout en luttant contre l’inflation de lois. De plus, les parlementaires disposeront d’une vraie équipe dotée de moyens plus importants pour engager des réflexions de fond avec des experts et davantage de collaborateurs. L’enveloppe de 6 500 euros nets à distribuer entre tous les assistants d’un élu paraît beaucoup trop faible pour recruter des professionnels capables de répondre de façon plus méticuleuse aux attentes des Français.

L’autre Chambre est vieillissante (moyenne d’âge de 61 ans) et jugée moins utile. Le Sénat est élu au suffrage indirect, grande source d’illégitimité. Sa mission de représentation est inadaptée et incohérente. En effet, la France s’urbanise et ses campagnes se vident ; elle doit rester une République jacobine indivisible et ne peut faire de distinction entre les territoires, source de tensions sociales et montée des extrêmes. Les sénateurs ne peuvent pas prétendre être les sages de la Républiques puisque le Conseil Constitutionnel remplit déjà ce rôle. Il reste alors deux solutions : élire les sénateurs au scrutin proportionnel sans changer les compétences du Sénat pour représenter des partis plus petits mais parfois innovants ; supprimer le Sénat et confier ses missions d’analyses au Conseil Economique et Social et ainsi décomplexifier le processus législatif.

     2/ Pour que les citoyens soient (enfin) placés au cœur du projet démocratique

La participation des citoyens à la rédaction des projets locaux

Étant personnellement engagé en politique, j’ai pu me rendre compte que les citoyens avaient besoin d’être associés à l’écriture des propositions. Pour les élections municipales, j’ai milité dans le 7ème arrondissement de Paris dans lequel je vis, près de Sciences Po où j’étudie. Pour moi, l’engagement local doit primer. L’année d’avant, j’ai participé dans ma ville natale de Chalon-sur-Saône à des forums de projets citoyens dans lesquels j’ai pu faire des propositions pour la jeunesse et l’économie de la municipalité aux côtés d’acteurs de premier plan pour la liste de Gilles Platret/Sébastien Martin. Cette expérience m’a permis de comprendre que de telles concertations étaient indispensables de la part des candidats pour mieux comprendre les attentes de leurs futurs administrés. Ce travail doit venir des formations politiques qui comptent gouverner. Le citoyen doit pouvoir participer à l’écriture des programmes, et être un acteur local. Le concerter pour connaître ses préoccupations de sa vie quotidienne doit être obligatoire.

Plaidoyer pour l’utilisation du numérique pour une démocratie 2.0

Depuis ma deuxième année d’études, je travaille dans une initiative civique, Initiative Commune Connectée. Elle a pour but de doter l’ensemble des mairies de France d’une application mobile performante. Grâce à cette solution déjà mise en place dans plusieurs villes, les citoyens ont la possibilité de s’informer sur toutes les actualités de la commune, de signaler des problèmes rencontrés dans leur vie quotidienne. La démocratie participative est accrue car les habitants envoient des propositions/questions à leurs élus municipaux. Ils peuvent ainsi interpeller le maire et ses adjoints sur des problématiques qui les concernent. Ces modules sont consultables notamment sur l’application du 8ème arrondissement de Paris.

Plus ambitieux encore sont les modules de consultation et de conseils numériques. Grâce à des sondages, la ville peut consulter ses administrés sur des projets urbains, des manifestations culturelles, etc. Il s’agirait de rendre référendaire ce type de consultation, de sorte que si elle n’obtienne un nombre de voix suffisamment important sur une part élevée de citoyens, la proposition soit rejetée. Cela sous-entend bien sûr qu’une grande partie des citoyens aient accès à internet ou à des smartphones sur lesquels ce type d’outils peut être téléchargé. Or, les structures telles que Initiative Commune Connectée s’adaptent à toutes les demandes et sont capables de fournir des outils conviviaux que tous peuvent utiliser. L’outil de conseils de quartiers numériques est une plateforme interactive sur laquelle les citoyens peuvent déposer des propositions et recueillir des voix sur ces initiatives. Les plus soutenues sont portées aux oreilles des services et des élus municipaux et peuvent être mis en œuvre.

La politique locale doit être ouverte à tous. C’est un chantier majeur pour pallier le rejet des Français des représentants publics. Le numérique est une solution pour répondre à ce besoin croissant et urgent. Bien entendu, il est un outil intéressant sur les questions nationales ou supranationales.

Initiative Commune Connectée a découlé d’une démarche citoyenne, Politiclic. C’est une plateforme de débat interactif lancée au moment des élections municipales. Chaque liste candidate pouvait s’y inscrire et indiquer les thématiques détaillées qui lui étaient chères. Les citoyens pouvaient retrouver des thèmes grâce à une recherche par proposition et non par nom pour permettre à tous les acteurs d’émerger (en gommant ainsi les privilèges de notoriété). Utilisée dans plus de 5000 villes et par plus de 20 000 listes candidates, cette plateforme a été une réussite pour faire émerger de nouvelles idées et permettre aux citoyens de découvrir des nouvelles propositions car « si leur devoir est de voter, celui des candidats est d’informer » (devise de Politiclic). Cette initiative a été réutilisée lors des élections européennes, cette fois-ci dans plus de vingt-sept pays pour favoriser le rapprochement entre les candidats européens.

Il ne s’agit pas bien sûr de créer une République de démocratie participative, irréaliste car des experts sont plus compétents pour statuer sur des problématiques précises. Il ne s’agit pas non plus de revenir à une démocratie athénienne, car les représentants sont indispensables pour une population de soixante-six millions d’âmes.

Néanmoins, pensons au numérique dans les processus de prises de décisions pour inclure les citoyens isolés dans la communauté politique et mettre fin à la montée des extrêmes, cancers de la démocratie et sources d’instabilité institutionnelle et sociale...

 

Camille Chevalier

« Vers une démocratie 2.0 »

par Camille Chevalier, le 17 septembre 2015

 

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Les principaux résultats de la troisième vague de l’enquête annuelle « Fractures françaises », publiée en avril 2015 par Ipsos/Steria, sont accablants ; en particulier, 76% des sondés estiment que le système démocratique fonctionne plutôt mal en France et que leurs idées sont mal représentées, soit une progression de quatre points par rapport à 2013. Pire, 86% d’entre eux considèrent que les décideurs politiques agissent principalement pour leurs intérêts personnels. De quoi s’interroger sur la pertinence de nos institutions, sur le caractère démocratique de leur fonctionnement et sur la façon dont doit se penser l’exercice du pouvoir aujourd’hui.

Un changement de paradigme institutionnel

Le fait est que ce désenchantement du politique accompagne un changement profond de paradigme institutionnel. L’idéal démocratique français, développé au XVIIIe siècle et concrétisé à l’occasion de la Révolution de 1789, s’est d’abord articulé autour d’un modèle parlementaire, reposant sur deux principes : l’universalité de la loi et la représentativité du législateur. Par universalité de loi d’une part, il faut entendre l’établissement d’une justice véritable, impersonnelle et épargnée de toute décision arbitraire. Par représentativité du législateur d’autre part, il faut appréhender la loi en tant qu’émanation de la volonté du peuple, par le biais de députés élus par celui-ci. À cet égard, l’article 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen est formel :

« La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. »

Seulement, il semble que désormais ce règne de la loi ait pris fin. Pierre Rosanvallon, dans son essai Le Bon Gouvernement paru en août de cette année, détaille l’idée selon laquelle nous serions passés d’un régime « parlementaire-représentant » à un régime « présidentiel-gouvernant ». Ce changement, opéré définitivement en 1962 avec l’instauration de l’élection du président au suffrage universel direct, correspond à un transfert de pouvoir effectué au détriment d’une assemblée de parlementaires et en la faveur d’un homme placé à la tête de l’exécutif. Si, sous la IIIe République, la conduite de la politique de la nation revenait au président du Conseil, dépositaire d’une coalition majoritaire au sein du Parlement et donc à la merci de la défection d’une de ses composantes, elle est aujourd’hui l’apanage d’un président, choisi au détour d’un « moment démocratique », celui d’une élection ponctuelle et qui ne saurait être contestée le temps du mandat attribué.

Vers un retour au parlementarisme ?

Les problèmes suscités par ce bouleversement sont multiples. L’effacement du Parlement au profit d’une figure présidentielle pose la question de la représentativité. Dans un régime parlementaire, le pouvoir est détenu par une assemblée plurielle qui de fait peut prétendre représenter les différentes franges d’une population donnée. A contrario, il apparaît difficile pour un homme de synthétiser en sa seule personne l’ensemble des composantes d’une même société. Plus encore, l’exercice du pouvoir, plutôt que de se manifester selon un mode représentant-représenté, garanti par le régime parlementaire, se concrétise selon un rapport gouvernant-gouverné : une fois élu, le président dispose des coudées franches pour appliquer la politique de son souhait, parfois bien différente des promesses avancées lors des campagnes antérieures, sans que le peuple – prétendu souverain – ne dispose de réels moyens de contre-pouvoir. « Monarchie républicaine », « démocratie d’autorisation » : les termes ne manquent pas pour qualifier les failles démocratiques qu’entrouvre la présidentialisation de notre régime politique.

De telle sorte que la tentation d’une VIe République parlementaire, en remplacement du régime semi-présidentiel actuel, revient régulièrement au centre du débat d’idées. Jean-Luc Mélenchon en a fait son cheval de bataille lors de la campagne présidentielle de 2012, et a lancé en 2014 le réseau citoyen nommé Mouvement pour la VIe République (M6R) ; Arnaud Montebourg, créateur dès 2001 d’une Convention pour la VIe République (C6R), déplorait dans son blog lors de la primaire socialiste de 2012 un président « élu pour cinq ans et qui concentre durant cette période l'ensemble des pouvoirs sans jamais en répondre devant qui que ce soit ». Plus récemment, le think tank Allons Enfants, lancé par Rama Yade, ambitionne de doter la France d’une nouvelle République, pour faire face à « l’essoufflement du débat public » et au « discrédit des partis politiques ».

Vertus du présidentialisme

Pourtant, il est difficile d’imaginer qu’une réactualisation du parlementarisme ait réellement un impact positif sur nos pratiques démocratiques. Historiquement, un tel régime ne s’est pas porté garant de l’intégrité des élus de la République : citons, au crépuscule du XIXe siècle, le scandale des décorations à l’origine de la démission de Jules Grévy ou bien encore le soudoiement de parlementaires dans le cadre de l’affaire de Panama, parmi tant d’autres. D’autant plus que les rivalités partisanes, exacerbées au sein d’un régime parlementaire, ont ankylosé les IIIe et IVe Républiques. Charles de Gaulle le rappelle amèrement dans ses Mémoires d’espoir : entre 1946 et 1958, « dix-sept présidents du Conseil, constituant vingt-quatre ministères, campèrent tour à tour à Matignon ».

La présidentialisation de la mécanique institutionnelle a le mérite de répondre à un triple défi, identifié par Pierre Rosanvallon. Celui de l’imputation, puisqu’en tant que « clef de voûte des institutions », le président porte la responsabilité de l’exercice du pouvoir, et il est alors possible de le sanctionner par les urnes si le jugement porté à l’égard de sa politique est majoritairement négatif à l’issue de sa mandature. Celui de l’identification ensuite, dans un contexte où les grands affrontements idéologiques ne sont plus, et où c’est aujourd’hui le soutien à telle ou telle personnalité qui constitue le moyen le plus évident d’être acteur de la vie politique. Celui de la simplification enfin, puisque le suivi possible de l’actualité gouvernementale par la voix seule de la tête de l’exécutif, dont toutes les paroles sont reproduites et largement diffusées, s’oppose à un système politico-administratif jugé opaque à bien des égards. À Pierre Rosanvallon de conclure : la stature de président est perçue par les citoyens comme un vecteur possible de « réappropriation sensible du politique ».

Repenser la stature de président

En ce sens, c’est moins le système qu’il s’agit de réformer que la façon dont sont exercées actuellement les fonctions présidentielles. Le président Charles de Gaulle incarnait la théorie des « deux corps du Roi » avancée dans les années 1950 par l’historien Ernst Kantorowicz. Selon ce concept, le Roi par nature dispose de deux corps : le corps « privé » de l’individu qui est porté à la fonction royale et un corps « public », qui transcende l’être humain et le situe au niveau de l’État dont il est la personnification. Nicolas Sarkozy a marqué une rupture fondamentale en brouillant la frontière entre ces deux corps. Par la surexposition volontaire de sa vie privée, par une succession d’incidents désacralisant ses fonctions, à l’instar du « casse-toi pauv’ con », il a fossoyé cette double identité que son successeur n’est pas parvenu à recouvrir.

L’enseignement du gaullisme est essentiel, puisqu’il associe le président à une conception unitaire de la nation. Le responsable politique, selon cette vision, rassemble les Français autour de projets de société en accord avec l’intérêt supérieur national. Évidemment, Charles de Gaulle lui-même n’a pas toujours suscité le consensus autour de ses décisions, mais il a toujours su porter et incarner la voix de la République. La Ve République, intrinsèquement, ne semble pas mal adaptée aux enjeux face auxquels la société française doit faire front. Les principes édictés par la Constitution de 1958 nous ont jusqu’ici préservés des crises politiques de la IIIe République et des atermoiements de la IVe. C’est davantage ce que Pierre Rosanvallon nomme le « mal-gouvernement » qu’il s’agit de combattre. À vouloir changer d’institutions, le risque est d’oublier de s’interroger sur la qualité de celles et ceux qui sont portés à la tête de l’État.

 

« Le président est mort, vive le président ! »

par Nicolas Germain, le 17 septembre 2015

 

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S’essayer à l’exercice que me propose Nicolas peut paraître prétentieux. Il le serait si je souhaitais apporter un modèle type idéal de l’organisation démocratique de notre société, de surcroît si je le faisais en m’absolvant de toutes considérations partisanes. Il est surtout utile, car j’ai la conviction que c’est à ma génération qu’il reviendra de trouver des réponses durables.

Cela nécessite d’abord de s’attarder un peu sur la manière dont se formule le débat autour de notre démocratie. De là uniquement peuvent émerger une vision d’ensemble, et un certain nombre de préconisations futures.

La première interrogation porte ainsi sur les causes et la nature réelle de la « crise  politique » que nous vivons et qui raffole des qualificatifs (de « confiance » envers les politiques, de la « représentation », « démocratique »...). Problème d’efficacité de l’action publique, déficit de leadership, démocratie supplantée par la technocratie, représentants corrompus…  ? Les réponses existantes sont multiples et variées.

Commençons par les symptômes. Le premier d’entre eux est l’abstention qui remet en cause la légitimité des représentants. Mais il y a aussi la réduction du nombre d’adhérents des grands partis qui remet en question les formes d’action politique traditionnelles. La baisse du nombre de salariés syndiqués qui affaiblit le rôle de l’action syndicale. Tout porte à croire qu’il s’agit d’une crise des pratiques et de la représentation politique.

Ce n’est pas tout. La confiance envers plusieurs institutions comme la justice ou l’éducation nationale est en baisse selon de récents sondages d’opinion. L’impôt, fondement du consentement à l’État démocratique, est aussi largement contesté dans les enquêtes. La perception selon laquelle la démocratie fonctionnerait de plus en plus mal est présente. Il y a certainement une remise en cause plus globale de la démocratie. S’agit-il pour autant d’une remise en cause de l’idée démocratique  ? Je ne pense pas.

Il est nécessaire pour préciser le diagnostic, de sortir du cadre national et d’adopter une vision plus large. Je partage l’idée que le monde traverse une crise « systémique », à la fois économique, sociale, écologique et politique. En d’autres termes une crise globale de nos modèles d’organisation sociale et de leurs institutions, régis en premier lieu par le capitalisme.

La capitalisme n’a cessé de creuser les inégalités en exploitant dans un même élan les Hommes et la nature, jusqu’à ce que les inégalités soient trop fortes et jusqu’à ce que les ressources naturelles aient atteint leurs limites pour qu’il se retrouve dans l’incapacité de se renouveler en faisant croître les profits par la croissance de la production.

De la même façon, le capitalisme organise la concentration et l’accumulation des pouvoirs aux mains d’une minorité. Avec le néolibéralisme, le pouvoir des forces économiques et financières s’est considérablement accru depuis les années 1980. De même, ceux qu’on appelle les « experts » ont acquis eux aussi un pouvoir véritable. Certains parlent même de technocratie (la tyrannie des experts).

L’écologie politique apporte un regard complémentaire sur nos sociétés capitalistes. Notamment à travers un courant particulier qui émerge depuis les années 1970 : l’écosocialisme. Celui-ci reprend la dialectique kantienne de l’hétéronomie et de l’autonomie. Nos sociétés sont décrites comme étant hétéronomes. C’est à dire qu’elles confèrent l’autorité à une instance extra-sociale : divin, lois naturelles, supériorité de l'économie (main invisible de la concurrence, domination des marchés financiers et de la technoscience, idée que le travail ne peut avoir d’autre forme que sa forme d’aliénation actuelle, etc.).

Pour Cornélius Castoriadis, penseur écosocialiste que j’affectionne, il faut reconnaître que les institutions de la société sont de type « auto-institution », c'est-à-dire une œuvre humaine, non quelque chose appartenant à des "ancêtres", à l'Histoire, à Dieu... Castoriadis s’oppose ainsi au système de représentation politique irrévocable, car les représentants aliéneraient la souveraineté des représentés qui ne seraient « libres qu’un jour tous les cinq ans » (référence aux élections présidentielles en France qui dirigent la vie politique du pays). C’est donc par la démocratie directe ou la plus locale possible, et l’autogestion des secteurs sociaux que la société accèdera à une pleine autonomie démocratique.

Depuis les années 1980, l’altermondialisme est le mouvement social mondial qui porte cette critique du capitalisme et qui a par là même cherche à s’organiser en réseau au fonctionnement horizontal.

Ces dernières années il y a eu aussi Maïdan, Tahrir, 15 de Mayo, Occupy Wall Street, etc… des mouvements sociaux qui sont apparus dans des contextes différents mais qui présentent néanmoins des similitudes importantes : ils mobilisent une grande majorité de jeunes et recherchent tous une forme d’organisation horizontale.

Certains se structurent aujourd’hui en mouvements politiques, à l’image de Podemos en Espagne (issu du mouvement 15 de Mayo), qui acquiert l’adhésion des masses dans un pays où la crise ravage la cohésion sociale et territoriale, où la classe politique est touchée par de nombreux cas de corruption et perçue comme une oligarchie à part entière et où la monarchie reste un pouvoir symbolique. Podemos surfe sur les dysfonctionnements du système politique espagnol pour transformer son modèle. Son leader, Pablo Iglesias, théorise en effet le remplacement du clivage gauche-droite traditionnel par un clivage peuple-oligarchie. Il y a la volonté de faire évoluer la représentation pour aller vers davantage de démocratie.

La crise « systémique » que nous traversons n’a donc pas mené à un rejet de l’idée de démocratie mais plutôt à une remise en cause de ses formes d’organisation.

Revenons-en à la France. Je le disais précédemment, la perception selon laquelle notre démocratie fonctionnerait mal est très présente. Elle l’est d’autant plus pour les électeurs de gauche, comme le démontrent plusieurs sondages. L’exercice du pouvoir par la gauche semble provoquer des déceptions majeures pour son camp. Cette situation est-elle pour autant immuable ? Je pense que la gauche, a fortiori parce qu’elle est au pouvoir, doit questionner notre démocratie, revenir aux racines et aux principes de la chose démocratique pour lui donner du sens et de l’espérance.

À l’origine de la démocratie il y a le peuple, entité concrète, à l’inverse de la nation, notion abstraite qui transcende le peuple, l’associe à un territoire et à un ensemble de valeurs, de rites, d’institutions... Le peuple est une association politique d’individus. Le droit fonde le peuple.

La gauche au pouvoir doit se ressaisir de la question du peuple. Elle doit être capable de mieux le définir dans la globalisation, mieux comprendre par là même ses réalités et son rapport à la démocratie représentative.

Face au marché qui n’a cessé de s’étendre, le peuple tend à s’effacer. L’extension de la sphère marchande apporte toujours plus de concurrence entre les individus, le citoyen est supplanté par le consommateur. Les inégalités entre les individus ne cessent de croître. Elles favorisent ainsi plus facilement les égoïsmes sociaux. Elles affaiblissent par là même le contrat social qui fonde le peuple.

Pour redonner de la substance au « peuple » je reprendrais la distinction faite par le sociologue Robert Castel entre les différentes formes de citoyenneté. La citoyenneté politique s’accompagne d’une citoyenneté sociale pour former les « socles » d’une citoyenneté démocratique, explique-t-il. « La citoyenneté sociale est le fait de pouvoir disposer d’un minimum de ressources et de droits indispensables pour pouvoir s’assurer une certaine indépendance sociale. (…) C’est la question de l’indépendance minimale dont on peut disposer pour être maître de ses choix », selon Robert Castel. En d’autres termes, la citoyenneté nécessite de s’interroger sur les conditions qui rendent possible ou impossible la participation des individus aux décisions qui engagent leur destin politique. D’après Castel, au fondement de la citoyenneté sociale en France, il y a l’accès à l’emploi et les conditions salariales. Force est de constater que le chômage de masse et la précarité croissante du salariat ont mené un nombre toujours plus grand d’individus à perdre ces conditions. Agir pour l’emploi et la dignité seraient donc des priorités pour renforcer la citoyenneté.

Au lendemain des attentats de janvier dernier, celles et ceux qui n’étaient pas « Charlie » (j’entends, ceux qui ne se retrouvaient pas dans la perception républicaine de la communauté nationale) sont surtout celles et ceux qui ont perdu les conditions de cette citoyenneté car exclus du droit commun : droit à l’emploi, au logement, à l’éducation ou encore à la santé. Ces personnes se définissent dès lors en contradiction vis à vis de cette république qui ne veut plus d’eux. Ils se définissent contre la nation et davantage par rapport à leur lieu de vie ou leur religion.

Rappelons maintenant que le ralliement du socialisme à la démocratie s’est historiquement accompagné de la consolidation de la citoyenneté politique par l’affirmation d’une citoyenneté sociale. Jaurès le théorisait au début du siècle dernier.

La gauche au pouvoir, qui souhaite reconquérir les esprits et les voix qu’elle a perdus, doit donc retrouver un imaginaire démocratique fondé sur le peuple. Le peuple qui existe concrètement par l’acquisition de la citoyenneté sociale pour le plus grand nombre. Le combat pour la dignité et, au-delà de l’accès à l’emploi, l’égalité en sont les conditions.

Force est de constater que le compromis social-démocrate échoue parce qu’il a cessé de poursuivre ce combat. Aujourd’hui, la poursuite de règles budgétaires absurdes, notamment par les sociaux-démocrates, dirige l’action politique. Si l’on ne peut s’en dissocier totalement, il faut savoir contester l’idéologie néolibérale qui les formule et remettre en cause les dogmes qui leur sont associés. Car cette situation affaiblit tout espoir dans le progrès collectif qui a toujours fondé l’adhésion au projet socialiste.

Elle participe aussi au repli et aux égoïsmes sociaux qui font l’apanage du vote réactionnaire. Le discours réactionnaire progresse en France. Il défend une forme de radicalisme au sens étymologique du terme  (revenir aux fondamentaux). Il propose de revenir aux institutions passées.

Et c’est le Front national qui incarne le mieux ce discours. Il s’imposa en suscitant l’indignation et la polémique. Avec cela il réussit à imposer ses thèmes à la sphère politico-médiatique. Il participa grandement à formuler les termes du débat politique, notamment sur la question de l’immigration, question sur laquelle il parvint à multiplier les amalgames et les stéréotypes. Il a compris qu’il fallait se battre sur le terrain des mots, ce qu’Antonio Gramsci appelait la « bataille culturelle ».

À lheure de nouvelles menaces qui attisent les peurs et les haines - à l’instar du terrorisme islamiste -, à l’heure de la domination des discours identitaires - à l’image du « choc des civilisations » -, il est temps que la gauche se souvienne des mots du Premier ministre norvégien, Jens Stoltenberg, au lendemain de la tuerie d’Utoya en 2011 où soixante-neuf jeunes travaillistes furent assassinés par un fanatique d’extrême droite : «  Nous allons répondre à la terreur par plus de démocratie, plus d’ouverture et plus de tolérance ». Face à la réaction et à la droitisation de la société, la gauche doit s’organiser et mener la bataille culturelle pour la dignité et l’égalité.

Mais, au-delà du peuple, de la dignité et de l’égalité, la démocratie doit intervenir plus concrètement dans le quotidien des Français. Cela passe par un rapprochement entre les institutions et les citoyens, en les intégrant davantage à la prise de décision au quotidien. La mise en place de budgets participatifs est un très bon outil qui émerge dans certaines grandes agglomérations, à l’instar de la Ville de Paris. Les villes sont précurseurs dans ce domaine et doivent être accompagnées pour inventer une démocratie locale plus directe et participative. Attention cependant à ne pas se limiter à de la concertation. De multiples outils sont à créer pour favoriser l’initiative citoyenne et le partage des savoirs qui permettra au plus grand nombre de participer.

Les progrès proviendront surtout d’en bas. Cependant il faut aussi penser à l’exécutif national, dont l’élection donne le « la » de la vie politique française.

Dans la Vème République, les pouvoirs sont concentrés dans les mains d’un seul dirigeant, le Président, qui nomme et révoque le gouvernement, alors même que la Constitution dans son article 20 stipule que c’est le gouvernement qui conduit et détermine la politique de la nation.

Une nouvelle république doit accompagner les transformations de la démocratie locale. Une république sociale permettant une réelle reconquête démocratique. Je soutiens à ce titre l’instauration d’une VIème République parlementaire et primo-ministérielle où le Parlement, au-delà de faire et de voter la loi, aurait un réel pouvoir de contrôle sur l’exécutif représenté par un Premier ministre détenant son pouvoir du Parlement. Pour éviter toute instabilité, des procédures pourraient être mises en place pour obliger les députés votant une motion de censure contre un Premier ministre à s’accorder sur le nom de son remplaçant. Mais la priorité réside dans le renouvellement et la représentativité du Parlement. Les règles de parité y participent mais la possibilité pour chacun d’exercer la démocratie passe par le non-cumul des mandats. Je suis personnellement favorable au mandat parlementaire unique, au non-cumul des fonctions exécutives et au non-cumul dans le temps. Le statut de l’élu local est aussi un outil intéressant pour permettre à tous d’exercer un mandat politique tout en retrouvant un emploi à la sortie. Voilà les mesures phares concernant l’évolution de nos institutions représentatives.

La VIème République passe aussi par la décentralisation pour approfondir la démocratie locale. Elle est un échelon nécessaire pour soutenir le développement de la démocratie dans toutes les sphères économiques et sociales à côté de l’État, du modèle coopératif à l’économie sociale et solidaire. Pour exister les ressources des collectivités doivent être pérennisées, à la fois par le biais de la fiscalité mais aussi de la solidarité entre collectivités.

Avec le processus de décentralisation doit être assumée une certaine vision de la République laïque, le « nous sommes différents donc nous sommes égaux ». Cela passe par la reconnaissance des langues régionales dans la Constitution, engagée par le gouvernement. Cela passe aussi par reconnaissance de toutes les mémoires de la France, notamment de ses diverses vagues d’immigration.

Ces mesures sont loin d’être exhaustives. Je n’ai pas parlé des partis politiques ou des syndicats, ni du numérique qui constitue une véritable opportunité pour la démocratie. Je préfère en rester à ces mesures qui posent, selon moi, les bases d’une réforme institutionnelle nécessaire pour la France - et pour la gauche.

Nous sommes en état de faire ces choix aujourd’hui. Nous avons la possibilité d’inventer les mots et les institutions d’un nouveau modèle démocratique écosocialiste. Nous avons la possibilité de redonner de l’espoir dans le projet démocratique socialiste. Après avoir permis plusieurs progrès tels que le non-cumul des mandats ou l’amélioration des règles déontologiques, le gouvernement peut et doit prendre cette direction.

 

LucasTrotouin 2015

« Le socialisme c’est la démocratie jusqu’au bout ! »

par Lucas Trotouin, le 24 septembre 2015

 

 

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16 septembre 2015

« Actualité et perspectives du message gaulliste », par Charles Aslangul

Le 10 juillet, suite à l’annonce par deux jeunes conseillers nationaux Les Républicains, Charles Aslangul, chef de l’opposition municipale à Bry-sur-Marne, et Pierre Gentillet, président des Jeunes de la Droite populaire, de la fondation du « cercle de réflexion souverainiste » qu’ils ont nommé « Les Républicains patriotes », j’ai souhaité proposer à l’un d’eux, Charles Aslangul, fidèle de Paroles d’Actu, d’écrire un texte sur la thématique suivante: « Actualité et perspectives du message gaulliste ». Tout un programme... Son texte, dont je le remercie, m’est parvenu le 16 septembre, jour de la mise en ligne du présent article. Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche.

 

 

« Actualité et perspectives du message gaulliste », par Charles Aslangul

 

Jamais la France n’a compté autant de gaullistes… Vous me direz, l’Histoire a jugé et l’Histoire a, naturellement, érigé Charles de Gaulle en géant national. Géant dont la figure tutélaire fait encore, un peu, rayonner la France et écrase, beaucoup, la classe politique incapable de s’extraire de sa bassesse. De la gauche à la droite en passant par le centre ou l’extrême droite, tout le monde se réclame du grand Charles avec plus ou moins de légitimité, plus ou moins de sincérité et, pire, plus ou moins de cohérence.

Il est profondément lassant de voir ce gaullisme dévoyé servir de caution à des politiciens indignes de son héritage. Je n’aborderais pas toutes les « affaires » qui pourrissent l’action politique mais elles illustrent, à elles seules, le fossé abyssal qui sépare la classe politique actuelle du général de Gaulle qui, lui, posait un compteur EDF dans ses appartements privés de l’Élysée pour payer personnellement sa facture et refusait de percevoir sa retraite d’ex-chef d’État après 1969.

En réalité, le plus frustrant pour tous les gaullistes sincères est de voir trop de politiques qui se réclament de Charles de Gaulle mais qui trahissent son immense legs.

Les exemples sont trop nombreux pour tous les exposer, et je sais nos lecteurs assez lucides pour percevoir cette supercherie contemporaine dans laquelle se vautrent nos pseudo-gaullistes qui tentent d’endosser la gabardine, beaucoup trop grande pour leurs petites épaules. Alors, je ne prendrais qu’un exemple qui répondra à votre thème, tant il est d’actualité : le souverainisme.

Le gaullisme, c’est aussi et surtout la grandeur de la France (« La France ne peut être la France sans la grandeur »). Et la grandeur de la France passe inéluctablement par la capacité de ses dirigeants à la défendre, la développer et la faire prospérer. Cela s’appelle l’indépendance ou, terme plus actuel, le souverainisme.

Le Général a toujours incarné cette farouche volonté d’indépendance nationale pour compter parmi les nations d’une part et rester maître chez soi d’autre part. Se réclamer de Charles de Gaulle c’est bien, l’avoir compris c’est mieux. Encore faut-il l’avoir lu :

« L’essentiel, pour jouer un rôle international c’est d’exister par soi-même, en soi-même, chez soi. Il n’y a pas de réalité internationale qui ne soit d’abord une réalité nationale ». Ou, dans ses Mémoires d’espoir : « À quelle profondeur d’illusion ou de parti pris faudrait-il plonger, en effet, pour croire que les nations européennes, forgées au long des siècles par des efforts et des douleurs sans nombre, ayant chacun sa géographie, son histoire, sa langue, ses traditions, ses institutions, pourraient cesser d’être elles-mêmes et n’en plus former qu’une seule ? »

Le gaullisme c’est donc, disions-nous, l’idée de souveraineté nationale qui refuse toutes formes de subordination de la nation aux puissances étrangères. On pense à la sortie de l’OTAN par exemple, ou à la politique de la chaise vide en 1965, quand deux visions européennes s’affrontaient : l’Europe des nations du Général contre le fédéralisme européen des « pères de l’Europe », dont l’agent américain Jean Monnet.

 

Charles de Gaulle

Charles de Gaulle. Source : Britannica.com

 

Ainsi, être gaulliste en 2015, c’est rester attacher à la souveraineté de la France pour tenter de restaurer la grandeur qui fut la sienne. Concrètement, c’est refuser l’Union européenne de Bruxelles. C’est refuser de voir des technocrates étrangers nous imposer leur politique. Aucune grande nation digne de ce nom ne peut accepter ce transfert de compétence qui nie l’avis de son peuple. Rappelons-le, en France, le souverain est le peuple. En laissant Bruxelles décider pour la France, on bafoue la souveraineté nationale et on piétine le droit du peuple de France à disposer de lui-même.

Aucune grande nation digne de ce nom ne peut tolérer de voir une superstructure oligarchique imposer à son peuple une politique qui, en plus de ne pas avoir été voulue par lui, accroît, en son sein, les difficultés. Je pense, par exemple, aux travailleurs détachés européens qui créent une concurrence déloyale pour le travailleur français, à l’espace Schengen qui prive la France d’un véritable contrôle de son territoire en pleine crise migratoire ou encore aux normes qui tuent l’agriculture française.

Et quand la France assume le peu de souveraineté qui lui reste en votant des lois, l’UE la lui nie et lui impose sa vision par la toute puissance de ses juges et de la Cour européenne des Droits de l’Homme (sur la gestation pour autrui par exemple).

Bref, être gaulliste en 2015, c’est défendre une France libre et souveraine. Je souligne que cela n’empêche pas la coopération entre nations européennes dans une politique intelligente d’équilibre entre intérêt communautaire et respect des particularismes et intérêts nationaux : l’Europe des nations. Là encore, voir des « euro-gaga » demander toujours plus d’UE et s’autoproclamer gaullistes, ça ne manque pas de sel…

Bien sûr, en dissertant sur le gaullisme et notre époque, nous aurions beaucoup à dire sur d’autres sujets tels que l’ordre républicain bafoué, l’identité nationale reniée, la politique étrangère atlantiste, l’Éducation nationale dévaluée, la justice sociale, la culture décadente, etc. Mais pour ne pas être trop long et ennuyeux pour nos lecteurs et pour résumer ce qu’il est urgent de faire pour enfin s’inscrire dans une gouvernance nationale fidèle au gaullisme, alors je plaide sans hésitation pour un retour à une politique souverainiste. D’abord en reprendre le contrôle pour, ensuite, conduire la France vers les sommets qu’elle n’aurait jamais dû quitter. Voilà à mon sens, la doctrine et les perspectives qui doivent animer les gaullistes authentiques en 2015.

Dans cette idée, nous avons crée avec Pierre Gentillet (président des Jeunes de la Droite populaire) le cercle de réflexion souverainiste « Les Républicains Patriotes ». Un cercle totalement libre et indépendant des partis politiques qui lancera dans les semaines à venir son activité consistant à faire intervenir des intellectuels, de droite comme de gauche, pour penser la France de demain à l’aune de l’idéal souverainiste, de l’idéal gaullien. Tous les patriotes, d’où qu’ils viennent, y sont les bienvenus.

 

Chevènement ? Villepin ? Guaino ? Dupont-Aignan ? Philippot ? Quelles sont, parmi les personnalités politiques d'importance aujourd'hui, celles que vous considérez dignes de lhéritage, de la pensée gaulliste ?

 

Premièrement, le gaullisme n’est pas la propriété d’un camp. Cela étant dit, le parti directement héritier des formations gaulliennes est l’ex-UMP, Les Républicains. C’est un fait historique. Cela ne veut pas dire que notre parti est toujours le plus fidèle à cet héritage et il serait malhonnête de nier que Debout La France est une formation gaullienne ou que le FN tente de faire oublier son passé pétainiste, OAS et anti-gaulliste au profit d’une nouvelle ligne « Philippot » se réclamant du gaullisme.

Pour Les Républicains, je citerai Henri Guaino, dont je recommande d’ailleurs l’ouvrage De Gaulle au présent. Henri Guaino est un pur gaulliste, il l’a d’ailleurs démontré lors des élections européennes en refusant de voter pour le candidat européiste de l’UMP. Il y a aussi Thierry Mariani, avec l’ensemble de son courant « Droite populaire », qui s’inscrit pleinement dans l’héritage gaullien. Et plus modestement, il y a de très nombreux jeunes, dont je suis, pour qui le gaullisme est encore une boussole idéologique à l’origine de leur engagement politique. Voilà je crois une belle source d’espérance pour les années à venir.

 

Charles Aslangul

 

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Pour aller plus loin...

9 septembre 2015

Lorrain de Saint Affrique : « Marine Le Pen n’a pas l’étoffe de la charge à laquelle elle prétend »

Lorrain de Saint Affrique fut, entre 1984 et 1994, le conseiller en communication de Jean-Marie Le Pen, alors président et leader incontesté du Front national. Il a accepté, sur la base de questions que je lui ai transmises à la mi-mai, de commenter l’actualité brûlante, en interne, du FN. Ses réponses, qui sont sans concession ni fioriture - je l’en remercie -, me sont parvenues le 9 septembre, soit, trois semaines après l’exclusion de M. Le Pen par le bureau exécutif du parti. Un entretien-synthèse... Une exclusivité Paroles d’Actu. Par Nicolas Roche.

 

ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D’ACTU

Lorrain de Saint Affrique: « Marine

Le Pen n’a pas l’étoffe de la charge

à laquelle elle prétend »

 

Marine et JM Le Pen

Illustration : AFP/Alain Jocard.

 

Paroles d’Actu : Bonjour Lorrain de Saint Affrique. Voulez-vous évoquer pour nous, avant d’aller plus loin, les raisons qui, à un moment de votre vie, vous avaient incité à adhérer au Front national ; celles qui, par-delà votre exclusion de 1994, vous poussèrent, sur le fond, à vous en éloigner ?

Lorrain de Saint Affrique : Il n’y a pas eu, au départ, d’adhésion, au sens formel : mon rôle de conseil auprès de Jean-Marie Le Pen s’est institutionnalisé au fil de conversations de plus en plus fréquentes, m’impliquant toujours davantage dans la « défense et illustration » de ses intérêts médiatiques à lui, qui n’étaient pas toujours en harmonie avec ceux de l’appareil FN. Des années durant, au même titre que le PS, le RPR ou l’UDF, le Front national figurait, dans mon activité, une entité politique parmi les autres, avec des nuances, dans le jeu personnel de Le Pen. Cette position à part dans le dispositif, avec ses phases occultes de nature, ne tenant qu’à la volonté de poursuivre de Le Pen était peu comprise, peu admise en interne. Les choses ont changé d’abord en 1990, quand il m’a nommé secrétaire départemental dans le Gard, puis en 1992 avec mon élection au Conseil régional de Languedoc-Roussillon.

 

« Le Pen exclu, c’est une clé

de voûte qu’on descelle »

 

Cependant, j’ai toujours été dans une position originale, distanciée, vis-à-vis des personnes comme des idées. J’ai peu de dispositions pour ce qui concerne la culture d’appareil. Quant à l’exclusion, elle fut une sorte de gage donné à l’époque à un Bruno Mégret en pleine ascension. À un tout autre niveau, voilà que Marine Le Pen donne des gages, elle aussi, à de puissants seconds, Philippot, Collard, et d’autres. Sauf que moi, j’étais une modeste pierre de l’édifice, un médicament de confort auprès d’un dirigeant particulièrement doué ; rien à voir avec la clé de voûte qu’elle vient de desceller. Je naviguais entre l’officiel et l’officieux. Aujourd’hui, il s’agit d’enjeux autrement lourds de conséquences, sur fond de parricide, dans une société désorientée.

 

PdA : Les récentes sorties de Jean-Marie Le Pen, qui ont provoqué tant de remous au sein du parti, m’ont fait penser à une phrase qui m’avait sidéré lors de la diffusion dun documentaire sur le Front national, il y a quelques années : au journaliste qui lui demandait ce qu’il entendait entreprendre s’il arrivait au pouvoir, Le Pen répondit, dans un grand éclat de rire : « Dieu m’en préserve ! » Vous avez émis une théorie intéressante à l’occasion d’une émission de radio diffusée début mai : Le Pen n’agirait pas par malveillance ou crise d’égo mal placée envers sa fille, il s’évertuerait à maintenir au-dessus du FN un « plafond de verre », tout cela procédant d’une conscience aiguë de sa part de l’impréparation du parti à tenir, en l’état, les rênes du pouvoir. Voulez-vous développer cette idée ?

Deux questions complémentaires : Jean-Marie Le Pen a-t-il eu jamais, à votre avis, sérieusement, sincèrement, l’ambition d’accéder à quelque responsabilité exécutive - dont, a fortiori, la première de l’État ? Ce point ne constitue-t-il pas, et de loin, sa principale divergence d’avec Marine Le Pen ?

 

L.S.A. : Vous avez noté comment, par dérision pour les éléments de langage frontistes, Le Pen appelle sa fille : « la-femme-d’État-aux-portes-du-pouvoir » ? En un seul mot !

 

Faisons simple : il y a un avant et un après 13 septembre 1987, « Le Détail », et ses multiples rebonds. Les ricochets médiatiques et politiques de l’affaire, interminablement réactualisés, ont mené Jean-Marie Le Pen à une stratégie en rupture avec ses ambitions antérieures. Jean-Marie Le Pen avait-il la stature, la carrure, la puissance d’incarnation, la densité humaine, culturelle d’un premier rôle ? Sans aucun doute à mes yeux ! Lui même ne se reconnaît qu’une seule erreur : ne pas avoir été le candidat de la droite nationale en 1965, contre Charles de Gaulle et François Mitterrand, au lieu d’aller chercher puis d’imposer Jean-Louis Tixier-Vignancour et d’en orchestrer la campagne.

 

« Le Pen a réalisé trop tard que

sa fille, née en 1968, était également

née de 1968 »

 

Quelle est la situation d’aujourd’hui ? Rien n’est plus absurde que de peindre Jean-Marie Le Pen en vieillard aigri ne supportant pas de voir ses successeurs réussir mieux que lui ; c’est oublier l’énergie qu’il a déployée pour ouvrir la route de sa fille, aplanissant devant elle les obstacles de toute nature, au prix des amitiés les plus anciennes. Comme on dit, il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre. Certes, depuis quelques semaines, Marine Le Pen orchestre l’exclusion en rafale des proches de son père, mais sur qui prend-elle modèle ? Demandez donc à Carl Lang, Jean-Claude Martinez, Roger Holleindre, Martine Lehideux, Fernand Le Rachinel, tous immolés sur l’autel mariniste, ce qu’ils pensent maintenant du parricide en cours d’exécution.

 

La question du pouvoir n’est pas en cause dans la détérioration des rapports entre Jean-Marie et Marine Le Pen : le patriarche, de droite, réalise seulement et un peu tard que sa fille a en tête un projet de gauche. Née en 1968, née de 1968 ! Plus grave, s’il lui concède ces qualités qui font les stars de la télé-réalité, il voit bien l’insoutenable légèreté de l’être, le bachotage laborieux pour nourrir l’illusion de la compétence, le vide structurel, la vacuité, la méchanceté dans certaines attitudes…

 

PdA : Vous avez côtoyé Jean-Marie Le Pen au plus près dix années durant lorsque, de 1984 à 1994, vous fûtes son conseiller en communication. Quels souvenirs gardez-vous de cette collaboration ?

 

L.S.A. : Ce furent des années passionnantes, qui certes m’auront été fatales sur un plan personnel et professionnel, mais au sujet desquelles j’ai peu de regrets. S’il n’y avait pas de place pour quelqu’un comme moi au sein du FN, je crois en revanche à une forme de complémentarité créative qui avait du sens auprès de Jean-Marie Le Pen.

 

Marseille Legislatives 1988

Sur cette photo qui date des législatives de 1988, L. de Saint Affrique

apparaît à la gauche de J.-M. Le Pen.

 

PdA : Quelle image vous êtes-vous forgée de Jean-Marie Le Pen, finalement ? Avez le sentiment, quelque part, d’être en mesure d’extraire de son parcours tel que vous l’avez vécu et observé, de ses prises de position telles que vous les recevez, l’esquisse d’une cohérence intellectuelle que vous expliciteriez pour nous ? Cette dernière, si elle existe à vos yeux, entre-t-elle en contradiction avec les vues des tenants actuels de la direction du Front national ?

 

L.S.A. : Un orateur exceptionnel, une personnalité rebelle à toute forme de pression culturelle ou sociale, un homme de culture et d’action aux défauts très répandus, mais aux qualités très rares. Il y a plus de dix ans, dans un livre, (Dans l’ombre de Le Pen, paru en 1998 aux éd. Hachette, ndlr) j’ai beaucoup nuancé mon enthousiasme, et pourtant, au final, si c’était à refaire comme on dit, les mêmes motifs aboutiraient sans doute aux mêmes réflexes de ma part. Ceux qui, au sein du Front national, mènent la danse contre lui, ne veulent voir que ce qui dérangerait, croient-ils, leurs spéculations de carrière : la place de leur cible dans l’histoire politique française contemporaine : ça leur arracherait le cœur de l’admettre, et plus encore de se laisser gagner par un sentiment de respect.

 

PdA : Vous avez pu observer à la fin des années 90, de l’extérieur du parti, la violence de la rupture entre ses deux leaders d’alors, Jean-Marie Le Pen et Bruno Mégret. Sur des questions essentiellement tactiques. La coexistence au sein du FN de deux pôles puissants et apparemment contradictoires parfois (le sont-ils vraiment ?) - disons, pour faire simple, les souverainistes entraînés par Florian Philippot et les « tradi » qui voient désormais Marion Maréchal-Le Pen comme leur championne - est-elle potentiellement porteuse de troubles qui, pour l’instant, demeureraient contenus grâce à la personnalité de la présidente du parti, Marine Le Pen, qui incarne volontiers et assez habilement une ligne de « synthèse » ?

 

« Au FN, paroles et musique

dépendent des sondages »

 

L.S.A. : Ligne de synthèse, vous êtes sûr ? À droite toute, depuis quinze jours, au rythme des images de colonnes de « migrants » ; à Hénin-Beaumont, bientôt, vous entendrez une autre chanson. Paroles et musique dépendront des sondages tels que Florian Philippot en tirera la substantifique moelle et les mettra en bouche de l’une et des autres.

 

Vous me demandez un pronostic électoral sur les régionales ? Intuitivement, je ne vois de chance de succès pour le FN que dans le Sud-Est, sur le fil.

 

PdA : Au regard des forces en présence, au-dedans et à l’extérieur du parti, quelle évolution vous risqueriez-vous à prédire au Front national pour les quelques années à venir ?

 

L.S.A. : Intuitivement toujours, s’agissant du FN tel qu’il est maintenant, j’imagine les Français l’utilisant comme instrument provisoire de « déstabilisation du système » dans une phase peu paisible de la vie civile, et rien d’autre. Un détonateur !

 

PdA : Jean-Marie Le Pen considérerait, c’est votre sentiment en tout cas, que sa fille n’aurait pas l’étoffe d’un chef d’État. Quel est votre avis sur cette question ?

 

L.S.A. : Si telle était l’opinion de Jean-Marie Le Pen, je dirais que je la partage, en l’amplifiant.

 

Lorrain de Saint Affrique s

 

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17 juillet 2015

Jeunes FN - Lignes de Front (?)

Le 28 juin, j’entrepris de composer un nouvel article à « plusieurs voix » visant à donner la parole à des jeunes du Front national, à l’image du document « choral » réalisé en novembre dernier. L’ambiance au sein du parti frontiste a singulièrement changé depuis cette époque pas très lointaine, depuis le congrès de Lyon. Linterview controversée qu’a accordée Jean-Marie Le Pen, président d’honneur du FN, à Rivarol au mois davril, a semble-t-il achevé d’exacerber les tensions qui couvaient entre la direction nationale du parti et son fondateur. Début juin, le bureau politique du FN s’est prononcé pour la suppression de la dignité de « président d’honneur » des statuts du parti, une question qui a été soumise, entre autres sujets, au vote-courrier des adhérents. Les résultats de ce référendum interne étaient prévus pour le 10 juillet. « Étaient prévues », puisque la justice, saisie par lui sur la question de la régularité dun tel congrès « postal », a donné raison à Jean-Marie Le Pen et annulé la consultation sous cette forme. La présidente du Front national, Marie Le Pen, a aussitôt interjeté appel de cette décision. Voilà, à cette heure, pour la situation en interne.

La thématique sur laquelle j’ai souhaité interroger quelques membres du Front national de la Jeunesse (FNJ) effleure bien sûr les questions de personnes, omniprésentes dans les esprits. Mais cela va bien plus loin. Je n’y reviens pas ici, la proposition qui leur a été soumise est retranscrite dans les deux derniers paragraphes d’introduction. Le panel retenu n’est pas composé d’après une méthode scientifique. Je me suis refusé à toute synthétisation ou mise en perspective de ces témoignages ; pris bout à bout, ils constituent un reflet dune part de la pensée de jeunes militants du Front national. Car il est bon, je crois, d’écouter et d’entendre ce que disent, ce que veulent ces jeunes du FN auxquels on ne donne finalement que peu la parole. Je remercie celles et ceux  d’entre eux qui ont pris la peine d’au moins répondre à mes sollicitations et, parfois, de m’accorder un peu de leur temps pour élaborer une réponse. Celles et ceux qui, à un moment donné, en ont eu l’envie - ou l’auraient eue dans des circonstances autres que celles du moment ; ces circonstances dont j’ai souvent constaté qu’elles provoquaient chez nombre de jeunes un sentiment réel de malaise.

« La série récente d’escarmouches opposant l’actuelle direction du Front national et le clan resserré de Jean-Marie Le Pen semble participer, au-delà des griefs invoqués de part et d’autre, d’un mouvement plus profond visant la détermination de la doctrine d’un parti qui se veut aux portes du pouvoir. Nonobstant l’évidente différence des stratégies et tactiques adoptées, les divergences fondamentales paraissent réelles entre les tenants d’une ligne souveraino-étatiste relativement modérée sur les questions sociétales, tendance incarnée par Florian Philippot et soutenue pour l’essentiel par Marine Le Pen, et ceux qui se réclament d’une lecture plus traditionnelle de la société et du monde, dont, au premier chef, après son grand-père, la députée Marion Maréchal Le Pen. »

« Vous avez fait du chemin aux côtés du Front national et du Front national de la Jeunesse. J’aimerais vous demander d’évoquer pour nos lecteurs votre parcours de vie et les éléments qui ont contribué à forger votre conscience citoyenne et vos engagements ; de vous exprimer quant à la place qu’a pu tenir Jean-Marie Le Pen dans votre militantisme et aux questions qui le concernent directement aujourd’hui ; surtout, d’expliciter, sur la base de vos idées profondes et des conceptions que vous croyez les bonnes, votre positionnement relativement à la ligne qui, d’après vous, devrait être celle du FN. » Voilà pour la proposition. À eux la parole, maintenant. Par Nicolas Roche.

 

UNE EXCLUSIVITÉ PAROLES D’ACTU

Jeunes FN Lignes de Front (?)

 

FN

Illustration : LCHAM/SIPA (2014)

 

 

Le nom de Le Pen est associé à mon premier souvenir politique. Le soir du 21 avril 2002 en effet, j’avais dix ans et j’observais mes parents éberlués découvrir à la télé le résultat du premier tour de l’élection présidentielle. Ils avaient beau avoir voté pour Chirac, il leur semblait contraire à l’ordre naturel des choses que le candidat qui devait l’affronter en duel fût Jean-Marie Le Pen. Pourtant, dix années plus tard, lorsque j’eus enfin l’âge de voter, je donnai ma voix à un autre Le Pen : Marine. Aurais-je pu voter pour son père ? Je n’en sais rien, je ne crois pas, mais la question n’a pas beaucoup d’importance puisque lorsque je devins majeure, Marine avait déjà repris le flambeau du Front national pour y imprimer sa marque propre. Ma voix fut donc pour ce parti lors des présidentielles et des législatives de 2012, des municipales et des européennes de 2014, et, enfin, des départementales de mars 2015. Depuis, je décidai de m’encarter et de rejoindre le Front national de la Jeunesse. Puisqu’il s’agit d’expliquer ici les origines et les attentes de cet engagement – encore récent, il faut bien l’avouer –, commençons sans plus de préambule.

Née en 1992, je suis une enfant de Maastricht. Aussi suis-je de cette fameuse « génération Y », que l’on dit dépolitisée et désabusée, ainsi que peu portée à se laisser encadrer par les repères traditionnels que sont la famille ou la nation. Je ne me suis jamais reconnue dans ce portrait de la jeunesse occidentale que l’on dresse souvent à la télé. Grâce à l’éducation que j’ai reçue, ou par la nature de mon tempérament, je n’ai jamais eu l’envie d’être une blasée. Je veux croire qu’il existe des valeurs immuables. Les identités ne sont pas des prisons. Bien au contraire, un être dénué de ses caractéristiques culturelles, religieuses ou sexuelles ne serait qu’une substance abstraite, prisonnière du vide, réduite à l’état de simple consommateur. Un tube qui avale et défèque, le nouvel esclave de la société mondialisée ultra-libérale. Qu’on le veuille ou non, la famille et la patrie constituent des organes de protection et de solidarité naturels des individus contre le capitalisme sauvage. Or l’une et l’autre sont gravement menacées aujourd’hui : ce sont des constats criants d’évidence sur lesquels il n’est guère utile de s’appesantir ici. L’Union européenne qui la dilue, et le communautarisme qui la fragmente auront bientôt raison de la France si rien n’est fait urgemment. De ce fait, l’angoisse identitaire fut, naturellement, le moteur premier de mon adhésion au Front national.

Un sentiment, l’angoisse, donc. Mais pas que. Les électeurs du Front ne sont pas, comme certains médias et nos adversaires politiques aiment à les présenter, des animaux qui grognent, aveuglés par leurs émotions. S’ils sont en colère, et s’ils ont peur, c’est que leurs peurs et leur colère sont fondées. Nous ne votons pas seulement par rejet de l’UMPS, désormais « R-PS », nous votons aussi par adhésion au programme global du Front national, qui recouvre des thématiques variées pour chaque pan de la société. Aussi le vote FN est-il rationnel, et il serait malhonnête de prétendre le contraire. En mûrissant, j’ai pu apprécier la doctrine souverainiste que le Front propose afin de redonner à l’État français le pouvoir de prendre en main sa destinée. Une France étatiste, sociale et identitaire : voici notre idéal ! Il s’agit là, somme toute, d’un triptyque cohérent, dans lequel chaque donnée est la condition des deux autres.

Trop de commentateurs semblent s’étonner que nous proposions tantôt des mesures dites « de droite », tantôt « de gauche ». Mais nous ne sommes plus au temps de la Guerre froide ! Le clivage gauche/droite me semble révolu, et celui de mondialistes/antimondialistes m’apparaît plus pertinent. Quant à cette analyse mille fois ressassée, qui voudrait qu’un « FN de droite », incarné par Marion Maréchal-Le Pen, soit en conflit larvé avec un « FN de gauche », représenté par Florian Philippot, elle me semble bien superficielle. Marion Maréchal-Le Pen et Florian Philippot sont deux jeunes politiciens très talentueux au service d’une même cause, la cause nationale. Si le discours de l’un insiste sur des points différents par rapport au discours de l’autre, chacun reste en accord avec le programme général du parti. Ils ne sont donc pas adversaires mais complémentaires. Ensemble, ils parviennent à toucher un large spectre de l’opinion publique.

Les Français ont trop souvent vu les prédictions du Front national se réaliser pour que ce dernier ne pût continuer d’exister que grâce aux polémiques. À l’heure où la société n’est déjà que trop divisée, lancer telles des grenades des controverses aussi inutiles qu’anachroniques est une stratégie qui laisse perplexe d’incompréhension. J’espère profondément que le Front national saura guérir les blessures qu’a causées le départ de Jean-Marie Le Pen, afin que tous, nous restions unis derrière Marine, notre présidente, qu’il faudra faire parvenir à l’Élysée en 2017. Il en va de la survie de notre si beau pays.

Rien, absolument rien ne nous sera épargné. Nos adversaires dresseront tous les obstacles possibles et imaginables au travers de notre chemin. Face au Front national, ils jugeront légitime de recourir aux pires extrémités. Les chances de gagner sont minimes. Mais s’il en existe une, nous devons tout faire pour la saisir. C’est un impératif catégorique. Marine Le Pen, dans son discours du 1er mai 2015, avait cité cette phrase de Georges Bernanos : « l’espérance est un risque à courir ». L’espérance : voici pourquoi je suis partie pour le Front. Que la victoire soit ou non au rendez-vous, nous pourrons dire plus tard que nous nous serons battus. Et que notre combat aura été historique.

 

Manon C

Manon C. (29 juin 2015)

 

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Après un court passage par l’UMP, en tant que sympathisant, j’ai décidé de rejoindre le rassemblement patriote mené par Marine Le Pen. Nicolas Sarkozy, qui s’était fait élire en 2007 sur des points très précis (consultation des Français concernant l’Europe, réforme de Schengen, limitation du taux d’immigration, application du « Kärcher », etc…) n’a rien fait de son quinquennat, et cela a été une véritable catastrophe. Le fameux coup de Kärcher, lui, n’a été qu’un simple coup de vaporisateur.

La France se meurt, nous sommes abandonnés. Nos gouvernements successifs encouragent l’immigration massive, l’insécurité, et vendent notre indépendance à Bruxelles. Notre culture est détruite, notre patrimoine est effacé, notre histoire est piétinée. Nous ne sommes plus respectés, nous n’avons plus aucun droit. C’est principalement pour ces raisons-là que j’ai rejoint le Front national, car moi, je crois en la France.

Mes multiples expériences au sein du Front national m’ont enrichi, tant sur le plan des relations humaines que sur le plan intellectuel. J’ai pu voir, vivre, et partager de nouvelles choses. J’ai pu rencontrer des personnes, discuter, et débattre. Je suis heureux et fier de dire aujourd’hui que je vote Front national. Nous devons et nous pouvons être fiers de nos convictions, nous n’avons rien à envier à ceux qui ont détruit notre pays depuis tant d’années.

Aujourd’hui au sein de Front national, j’ai trouvé mes repères, et des personnes qui préfèrent l’action au « blabla ».

En ce qui concerne le récent conflit entre Jean-Marie Le Pen et la direction du Front national, je soutiens Marine à 100% ; c’est pourquoi j’ai voté pour la modification des statuts du parti, ce qui supprimera la fonction de président d’honneur.

Je trouve important de souligner que, pour ce qui me concerne, je n’aurais jamais pris ma carte dans ce parti si Jean-Marie Le Pen en avait encore été président. Ses dérapages réguliers, ses prises de position, qui ne représentaient que lui, ne me plaisaient pas.

Aujourd’hui, au Front national, nous n’avons qu’une seule ligne, un seul leader, et un seul programme. Nous devons et nous allons tous aller vers la même direction, suivre le chemin qui mènera Marine Le Pen à l’Elysée en 2017.

 

Victor Catteau

Victor Catteau (5-14 juillet 2015)

 

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« Qui ne dit mot consent » ai-je souvent entendu… Ne pouvant supporter de n’être qu’une spectatrice de la déliquescence laxiste, progressiste et mondialiste de notre société, la fibre militante est née en moi il y a désormais plus de cinq ans, suite aux blocus lycéens. Je n’ai réellement commencé à militer pour le Front national qu’au moment des élections européennes de 2014, après avoir participé activement à de nombreux rassemblements pour la famille - aux côtés de la Manif pour Tous - puis pour la Syrie.

En 2002 et 2007, bien que fort jeune, je voyais déjà en Jean-Marie Le Pen une figure de l’Histoire, un candidat incomparablement plus honorable que les Bayrou ou les Ségolène. En grandissant, cette perception s’est accentuée ; quand on essaie de rejoindre les FFL à seize ans et qu’on quitte son siège de député pour prendre les armes et défendre son drapeau, on n’est pas un simple politicard mais bel et bien un héros de la Nation. Hors toutes considérations partisanes. Le fondateur du Front national demeure - je pense - la figure politique patriote française par excellence au 20e siècle, un ancien combattant à qui nous devons le respect, un homme libre de ses actes et de ses paroles qui a créé ce dont nous sommes les héritiers. Je ne me permettrais évidemment pas de juger cet Homme avec un grand H auquel je n’arrive pas à la cheville. Toutefois, à 85 ans passés, il est probablement plus que temps de mettre un terme à la politique politicienne… On aurait d’ailleurs pu espérer le voir se retirer avec dignité plutôt que de charger politiquement et désormais judiciairement le FN.

In fine, je soutiens totalement Marine dans sa décision de confier la tête de liste de la Région PACA à Marion Maréchal Le Pen.

Vouloir absolument distinguer deux « lignes » au sein du mouvement patriote est assez manichéen. Des partisans des libertés économiques nationales, sur le plan micro-économique, ne pourraient-ils être modérés sur les questions sociétales ? Des partisans d’une « lecture traditionnelle de la société » ne pourraient-ils être, sur le plan macro-économique, en faveur d’un certain souveraino-étatisme ? Les parcours de chacun d’entre nous nous font nous engager pour et nous intéresser davantage à telle ou telle thématique, mais nous sommes tous pour l’arrêt de l’immigration, la priorité nationale, la défense de la famille, la baisse des impôts ou encore la fermeté pénale.

Si je prends mon cas en exemple, je me sens, sur les questions sociétales, très proche de la benjamine du palais Bourbon ; sur les questions géopolitiques, totalement en phase avec mon député, Aymeric Chauprade. Mais je suis également sensible aux questions de souveraineté, du fait notamment de mes études en droit franco-allemand, tout en étant portée sur la défense du secteur public et de l’État fort, me rapprochant en cela de la pensée de Florian Philippot…

Il ne s’agit à vrai dire pas réellement de divergences ou de divisions, mais davantage de choix de communication et de thèmes plus ou moins mis en avant ; qu’aucun ne prédomine sur les autres au point de les occulter, voilà un point essentiel. Marine, en tant que présidente de parti, se doit d’incarner - et elle incarne - une synthèse des différentes personnalités et sensibilités ; après tout, « le FN n’est pas un parti stalinien » !

Les questions sociétales, migratoires et géopolitiques sont non-négociables dans mon engagement ; j’espère donc que mon parti ne tiédira pas sur ces thématiques, mais je pense que nos cadres et nos élus sauront se focaliser sur les vrais combats d’aujourd’hui : l’islamisme, la mondialisation, l’immigration, la marchandisation du corps humain, la crise grecque, l’asphyxie économique de nos entrepreneurs, ou encore l’Ukraine et la loi renseignement.

Les fondamentaux du FN demeurent, mais les combats d’hier, qui appartiennent désormais à l’Histoire plus qu’à la politique, ne suffiront pas (voire même nous affaibliraient s’ils devaient être de nouveau débattus) pour mener le mouvement patriote aux responsabilités… Le premier des objectifs, c’est le pouvoir, afin de mettre en œuvre nos propositions, pour le bien de la France et des Français ! « Unis, les Français (et les frontistes) sont invincibles. »

 

Euryanthe Mercier

Euryanthe Mercier (5-7 juillet 2015)

 

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L’engagement du militant implique la plupart du temps l’effacement individuel au service d’idées qui le transcendent. Évoquer mon parcours personnel est de fait un exercice très inhabituel pour moi.

Je n’ai pas grandi dans un milieu propice au militantisme, et moins encore au patriotisme. Comme beaucoup de Français, mes parents évitent les conversations politiques, et votent sans grande conviction, à droite ou à gauche. C’est de fait dans un constat personnel que se trouve la source de mon engagement. Ce constat, il fut celui d’un monde moderne qui m’apparaissait naturellement comme n’étant qu’une anomalie, faite d’une humanité destructrice de sa propre planète, reniant ses racines et ses traditions, renonçant progressivement à sa liberté pour jouir de ses tentations, et surtout bien consciente que son monde court à la catastrophe mais ne s’en inquiétant guère, et bien superficiellement.

Si ce constat peut sembler fort malheureux voire déprimant, ma conviction n’en est pourtant pas moins optimiste. Car je n’ai jamais cru l’homme fondamentalement mauvais. L’homme moderne l’est, ou plutôt on lui a appris à l’être, mais de la même manière que l’état médical normal d’un individu est la pleine santé, ma foi se trouve dans l’idée que l’état normal d’une société est la civilisation, au sein de laquelle les hommes peuvent se faire grands d’une spiritualité, d’une culture et d’une identité qui permettent de vivre heureux, en harmonie avec les lois de la nature.

La décadence moderne, mondialiste et dominée par des logiques financières, n’est pas une fatalité. Elle est seulement acceptée par des individus qui renoncent à leurs responsabilités, et ne sont ainsi plus des hommes ni des femmes à part entière.

J’ai donc lâché ma télécommande, ma manette de PlayStation et ma souris pour aller à la rencontre d’autres personnes qui savaient s’organiser collectivement, dans le but de réaliser ce changement qui devra arriver un jour. J’ai découvert des gens pour qui le combat était avant tout culturel, pour d’autres il est spirituel, pour d’autres encore il est avant tout médiatique, et parfois, certains l’imaginent politique. Je crois quant à moi que chaque forme que prend ce combat a son importance, mais on ne peut pas tout faire, et c’est en politique que mon engagement personnel s’est concrétisé.

On me demande dans cet article de commenter les « divergences » entre les uns et les autres au Front national. Mais ce serait une erreur que de croire que Marion Maréchal Le Pen incarnerait un courant fondamentalement opposé à Florian Philippot, comme le suggère la question qui m’est posée. Aujourd’hui le combat est avant tout national, de lui dépendent la liberté et la souveraineté de la France, ainsi que sa liberté à s’auto-gérer et à se gouverner elle-même, par son peuple.

C’est ainsi, et pas autrement, qu’elle pourra se protéger des lois que lui impose le monde de la finance internationale, ces règles qui enrichissent une poignée d’hommes tout en appauvrissant les peuples. C’est ainsi qu’elle pourra aussi libérer le travail des Français, et permettre à l’initiative individuelle de prospérer au sein d’une économie nationale plus juste. Mais pour en arriver là, il faudra sortir de l’Union européenne, et retrouver le contrôle de notre propre monnaie.

C’est ce combat, pour la Patrie, qui ne s’occupe pas des orientations que certains classent tantôt à « droite » ou à « gauche », sur des critères souvent obscurs, que se battent aujourd’hui des gens comme Florian Philippot ou Marion Maréchal Le Pen. Et c’est uni, avec des personnalités sans aucun doute différentes, mais surtout complémentaires, que le Front national pourra continuer à être le seul parti crédible dans cette bataille, pour véritablement faire « front », à l’échelle de toute une nation, au service d’un bien commun objectif.

Mais il me semble aussi important de ne jamais oublier ce qu’est la politique. Son champ d’action est limité d’une part, et surtout, elle se pratique selon des règles qui lui sont propres. Si certains estiment que ces règles sont difficiles à supporter, ou qu’elles sont contraignantes, je le comprends. Mais, dans ce cas, la meilleure chose à faire est de changer d’activité afin de donner une autre forme au combat que l’on souhaite mener. Si certains, au sein du Front national, s’entêtent à ne pas respecter les règles de ce jeu, je ne trouve pas anormal qu’ils soient écartés.

Aujourd’hui, force est de constater que Marine Le Pen a su rendre son parti efficace au service d’idées nationales que nous partageons tous. Je suis donc fier de la soutenir, à mon humble niveau.

 

Sylvain Marcelli

Sylvain Marcelli (6 juillet 2015)

 

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En tant que militante du Front national depuis maintenant trois ans, je me retrouve comme de nombreux autres adhérents confrontée aux « histoires de la famille Le Pen ». Cependant je ne pense pas que celles-ci doivent entacher en quoi que ce soit notre amour de la France et le dynamisme que nous ne cessons de déployer pour la sauver. Il est évident que Marine Le Pen, comme Jean Marie Le Pen à son époque, se bat pour son pays et pour les Français. Cette affaire de famille ultra-médiatisée tend à insinuer la dissension au sein du parti. Bien sûr, Jean Marie Le Pen est le père fondateur du parti, et nous lui sommes reconnaissants de son dévouement. Mais Marine en est aujourd’hui la présidente, les temps ont changé, les problèmes à résoudre aussi.

Marine s’est fait élire sur un programme. Son père a créé le parti. Elle travaille à l’améliorer, à réinventer nos propositions en prenant en compte les priorités des Français, et ils le savent. L’acharnement médiatique, je le pense, est vain. De fait, ces histoires, avec leurs apparences de contradictions, n’ont fait démissionner personne, et tout le monde reste uni autour dun seul but : la défense des intérêts de la France et des Français.

Quant à mon parcours de vie, puisque c’est la question d’introduction, je dirais, pour rebondir sur mon développement précédent, que mes convictions sont orientées vers l’avenir de mon pays. Les valeurs de la France et son identité sont mises à mal chaque jour. L’UMPS a, depuis quarante ans, déconstruit notre société : l’immigration massive est devenue insupportable, la fiscalité étouffe les entreprises, l’Europe impose ses diktats et les lois anti-famille achèvent la décomposition de notre société.

Mais c’est parce qu’il n’est jamais trop tard que je me suis engagée au FN et au FNJ.

Nous sommes dans un pays démocratique. Dans un état de droit, c’est des urnes que sortira le chef d’État capable de mettre en pratique son programme. Or Marine Le Pen est la seule capable aujourd’hui de sauver la France. En tant que jeunes, il s’agit de mettre notre espoir dans le parti qui servira le pays et de travailler à son unité. « Unis les Français sont invincibles ».

Voyons plutôt l’avenir de notre pays, et laissons les petites querelles de côté. Il est déjà bien tard pour le sauvetage complet de notre pays, mais nous devons mobiliser tous les Français patriotes pour éviter le pire. Il s’agit de conserver, au sein même du Front, ces sensibilités différentes qui font la richesse de la réflexion et nous aideront à avancer.

Marine sera la future présidente de la République et, tous ensemble, nous devons travailler sur les sujets qui préoccupent les Français (limmigration, le chômage, l’insécurité, lEurope…) afin d’aider nos concitoyens dans leur vie quotidienne, rendue sans espoir par ceux de l’UMPS.

 

Manon J. (8 juillet 2015)

 

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Alsacienne âgée de vingt et un ans, je suis adhérente au Front National depuis 2012. J’ai décidé de prendre ma carte à l’aune de mes dix-huit ans, révoltée par le paysage politique français en désuétude, meurtri par des années de bipartisme n’ayant que peu à faire de la res publica.

Mon engagement politique s’inscrit tout à la fois dans la continuité de mon parcours universitaire, étant licenciée en droit, ainsi que dans l’affirmation des valeurs qui me sont chères, telles que l’identité nationale et le respect de notre culture, de nos traditions.

Pour mener à bien ce combat qui me tient assurément à cœur, je me suis présentée aux élections municipales en 2014, dans mon village natal, à savoir Rustenhart, sur la liste menée par Jean-François Bintz. J’ai renouvelé cette expérience en me portant candidate aux côtés de José San Juan, lors des dernières élections départementales dans le canton d’Ensisheim. Nous formons un trio politique incarnant trois générations, ce qui favorise - avantage indéniable ! - la prise de décisions pondérées et aide à garder les pieds sur Terre. Cette coordination nous assure une solidarité sans faille.

J’ai compris que, pour me réaliser, il fallait que j’affirme ce en quoi je croyais vraiment et, autant que possible, dialoguer avec les gens pour les amener vers un déclic, une prise de conscience.

Concernant les propos tenus par Jean-Marie Le Pen, je pense que le Front national a pris les mesures qui s’imposaient. Il est aberrant de vouloir détruire ce qu’on a créé. Il fallait prendre des mesures ; il en allait de l’intérêt supérieur du parti. Cela dit, je respecte cet homme. Pour la richesse de son parcours ; pour son esprit visionnaire : il a osé aborder des questions aussi sensibles que l’immigration et l’insécurité très tôt, dès les années soixante-dix. Pour autant, Jean-Marie Le Pen n’a pas réellement joué de rôle dans mon militantisme, j’ai davantage été saisie par la femme charismatique qu’incarne Marine Le Pen.

Au delà d’une querelle politique, il ne faut pas oublier que cette discorde a également un retentissement familial. Je suis outrée par l’utilisation que les médias peuvent faire de ces divergences. Souvent, ils vulgarisent cette affaire, à l’image dun mauvais feuilleton.

Quoi qu’il en soit, nous, patriotes, devons rester unis malgré ces évènements, nonobstant le soutien de chacun à différentes personnalités. Des millions de Français souhaitent être gouvernés par le Front national et qu’ainsi les idées patriotes soient appliquées. Nous devons accomplir notre devoir pour sauver les valeurs de notre république, là prend tout le sens de notre engagement.

 

Cassandra Rotily

Cassandra Rotily (13 juillet)

 

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Je suis adhérent au Front national depuis un an et demi. Voyant la situation de mon pays se dégrader, il me semblait important de m’engager dans le parti politique qui, selon moi, comprend le mieux la situation de la France actuellement et apporte les solutions les plus pertinentes, à savoir, donc, le Front national. D’après moi, la jeunesse a un devoir moral de s’impliquer dans la vie politique de son pays. Il est important que les jeunes puissent décider de leur avenir. Ainsi, logiquement, ils se doivent de tenir une place prépondérante sur la scène politique.

Mon engagement au Front national est né du déclin, chaque année plus important, de la puissance de notre pays, ainsi que de sa souveraineté. Seule Marine Le Pen propose des solutions claires et cohérentes par rapport à la situation actuelle. Contrairement aux autres partis, de droite comme de gauche, le Front national a toujours été honnête avec ses électeurs et les Français. À chaque élection, lorsqu’on vote FN, on vote effectivement pour un candidat FN, alors que, du côté des Républicains, au Parti socialiste, ainsi que chez tous les autres partis satellites, les appels à tel ou tel vote fusent, ce en fonction du candidat qui est opposé au candidat du Front national. Ne nous étonnons donc plus de voir le PS voter pour les Républicains, ou bien les Républicains voter pour le PS. Tout ceci est absolument scandaleux, et clairement anti-démocratique, le choix du peuple se trouvant bafoué dans la grande majorité des cas par cette caste « RPS ». L’alternative pour la France est donc bien dans les mains du Front National et de Marine Le Pen. 

Le « Menhir » Jean-Marie Le Pen est le fondateur du Front national. Il a, pendant quarante ans, construit les fondations du parti. Rien que pour cela, déjà, nous lui devons tous le plus grand respect. Aucun de nous ne serait au Front national sans Jean-Marie Le Pen. Je pense que sil avait été davantage écouté dans les années 80-90 sur plusieurs thèmes, comme l’immigration, ou bien l’insécurité, de nombreux problèmes actuels auraient pu être évités. Sur ces points-là, il a été un visionnaire.

De mon côté, je milite pour Marine Le Pen au niveau national, et pour Marine Le Pen et Florian Philippot dans l’est de la France. Jean-Marie Le Pen reste une icône du Front national, mais la présidente du parti est Marine Le Pen, et la personne à suivre est donc Marine, et non Jean-Marie.

Nous avons aujourd’hui atteint des scores inimaginables pour le Front national il y a encore quelques années, et cela est le fruit du travail effectué par Marine Le Pen et Florian Philippot. Retrouver notre souveraineté, retrouver une monnaie nationale, rétablir nos frontières, stopper l’immigration massive, autant des points du programme qui permettront à la France de briller à nouveau. La ligne du Front national est toujours la même : elle privilégie un État fort plutôt qu’une entité supranationale qui n’a aucun sens, l’avènement dun franc nouveau qui relancerait notre économie et permettrait à la France de redevenir compétitive ; elle vise la suppression de Schengen, afin de pouvoir contrôler qui et ce qui entre et sort de notre territoire, ce qui, au passage, nous protégera également beaucoup mieux de la menace terroriste.

Marine Le Pen est aux portes du pouvoir, et nous misons tout notre espoir en elle. Dans quelques années, après son élection à la présidence de la République, je souhaite pouvoir dire, « Nous avons tellement eu raison d’y croire... », et voir la France briller à nouveau.

 

Pierre-Henri Eisenschmidt

Pierre-Henri Eisenschmidt (13 juillet)

 

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Comme une grande partie des jeunes adhérents du Front national, je me suis intéressé dès l’adolescence à la politique, car comprendre le monde qui m’entoure et agir pour l’intérêt général apparaissait déjà pour moi comme quelque chose de fondamental.

Et, comme beaucoup d’électeurs, j’ai été influencé par le charisme de Nicolas Sarkozy, et très vite déçu par le fossé entre les promesses faites et celles qui ont été réellement mises en œuvre.

Plus que de simples promesses non réalisées, ces propositions non suivies ont fragilisé la croyance des citoyens français dans la capacité des hommes politiques à répondre à l’appel des Français et, plus largement, dans la capacité des institutions de la République à résoudre les problèmes posés.

Étudiant en quatrième année de Droit, je suis imprégné des notions de rigueur, de justice, d’écoute par rapport au monde qui m’entoure. Ce parcours juridique n’est pas un hasard ; il s’inscrit dans une volonté de défendre une conception de la société en conformité avec les valeurs de la République française, qui sont les miennes. Alors, passer des idées aux actions me paraissait évident, car pour faire bouger les choses, il faut d’abord se mobiliser soi-même. Mon adhésion au Front national est venue naturellement, puisque c’est le parti qui répondait le mieux à mes convictions personnelles, celle d’une France forte, souveraine, unie et protectrice de ses citoyens.

Je ne me considère ni de gauche, ni de droite. Si je considère que le capitalisme est le système le moins imparfait, la manière dont il se dévoile aujourd’hui dans ses plus grandes inégalités me semble être une dérive, une dérive cautionnée par une pseudo Union européenne des droits de l’Homme qui n’hésite pas à exploiter tout un peuple, tel que le peuple grec, pour satisfaire les créanciers. Il apparaît alors comme fondamental de prendre les mesures nécessaires pour réguler ce capitalisme et revenir sur une situation d’équilibre, avec un meilleur partage des richesses, tout en valorisant les entrepreneurs dynamiques.

À ces fins, il convient de redonner au peuple français le pouvoir de décider de son propre destin, tant en matière économique que sociale, juridique et culturelle. Cela passera sans nul doute par une sortie de l’Union européenne, qui a pour projet de faire des États souverains d’Europe un bloc homogène, sans identité ni racine. En effet, un peuple sans repère ni identité est un peuple disposé à se déplacer plus facilement pour satisfaire à la volonté des grandes entreprises ; autrement dit, les peuples européens seraient une force de production malléable au cœur d’une Europe des grands capitalistes, à laquelle je suis fermement opposé. Je suis en revanche en faveur d’une Europe des Nations, une conception qui n’est pas incompatible avec le Traité de Rome de 1957 qui établit une Europe économique respectueuse de la volonté des États souverains.

Sur le plan juridique et sociétal, m’engager auprès du Front national était un moyen de dire « stop » à tout ce laxisme en matière d’éducation et de justice. Je suis consterné de voir qu’aujourd’hui le système transforme trop souvent les victimes en coupables et les coupables en victimes. Les droits profitent davantage aux délinquants qu’aux victimes innocentes. Quelle logique ? Quelles valeurs pour demain ? Il faut répondre fermement à la délinquance quand les actes sont établis et remettre clairement l’accent sur l’éducation et l’apprentissage des valeurs morales dans notre pays, en redonnant aux parents, aux enseignants et aux forces de l’ordre, les moyens pour répondre aux missions qui sont les leurs.

Ces valeurs et principes que je défends sont ceux défendus par le Front national, qui ose remettre les priorités dans le bon sens, ce face au lobbying du politiquement correct, qui détruit chaque jour un peu plus l’unité nationale.

Si, en effet, apparaissent, chez les cadres du Front national, différentes sensibilités que vous avez rappelées, à savoir, l’attachement de Marion Maréchal Le Pen (députée du Vaucluse) à une société plus traditionnelle, conservatrice et libérale, et, chez M. Philippot (député européen et conseiller de Marine Le Pen), une sensibilité qui va davantage à l’interventionnisme étatique, ainsi qu’à certaines mesures sociales, il n’en demeure pas moins que l’objectif qui nous réunit tous est l’avenir de la Nation. Le Front national dépasse les sensibilités politiques et les égos de chacun pour répondre à l’appel des millions de Français qui voient dans le Front national, une alternative, un espoir.

C’est dans cette logique que, face aux derniers évènements internes du parti, ma position est à la modification des statuts concernant la présidence d’honneur.

Si Jean-Marie Le Pen est le cofondateur du parti et, à la fois, un homme brillant, son statut ne lui donne pas tous les droits. La ligne du parti et celle que je supporte est celle de Marine le Pen. Jean-Marie le Pen a certes permis au parti de voir le jour, mais c’est bien par le travail de l’actuelle présidente et de ses proches collaborateurs que le parti prend toute son importance sur la scène politique française. Je respecte Jean-Marie le Pen pour ce qu’il a fait. Cependant, je ne partage pas toutes ses idées. Et je pense qu’il faut savoir se retirer au bon moment, et faire preuve de sagesse.

 

J. Capelli (13 juillet)

 

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Je suis le produit de la France. Nous le sommes tous. Descendant d’une ligne paternelle de Français de la terre peut-être aussi vieille que la France, et d’une ligne maternelle d’enfants perdus d’Europe, d’orphelins adoptés tant symboliquement que réellement par la France, je suis fier de mon pays. Ce pays est celui des Philippe-Auguste, des Saint-Louis, des Colbert, des De Gaulle tant que celui des Mazarin, des Bonaparte, des Senghor et des Manouchian. Ma famille comporte des Justes, des résistants communistes, des soldats qui défendirent le sol de France. Elle comporte aussi des ouvriers, des paysans, des gens « lambda » qui ne durent leur quiétude qu’à leur sueur et leur sang, mais à aucun esclavage, pillage ou apartheid. Quand bien même mes racines auraient-elles été plus sombres, je ne crois pas l’erreur héréditaire, ni qu’il existe une culpabilité par héritage, comme certains voudraient nous le faire penser. D’une famille et d’une éducation de gauche, je me suis longtemps cru socialiste. 

En fait, je ne suis que français, un « étatiste gaulois », un colbertiste et un Gaulois, avec tout ce que cela comporte d’anarchisme anti-totalitaire et de fierté anti-fédéraliste. Ainsi, ni de droite ni de gauche, je découvrais le Front national au moment où Marine Le Pen en prenait la tête, en 2011. Ayant déjà aperçu les limites de l’UMP comme du PS, j'ai voulu approfondir ma connaissance de ce parti qui m’était alors quasi inconnu. Mû par ma raison autant que par la sensation étrange d'y trouver, dans ce monde d’Alésia, un peu de Gergovie, je résolus de m'y engager pleinement. 

Nous voici, aujourd’hui. En ce 14 juillet 2015, je suis le secrétaire départemental du FNJ Rhône. Mon parti m’a permis de rencontrer et de me lier à des personnes de grande qualité, de tous les âges, professions et catégories socioculturelles. Si Jean-Marie Le Pen n’est pas notre préoccupation principale, nous ne ferons honneur à son combat pour la France, par-delà les polémiques, qu'en le continuant. Nos élites ont été contaminées par le projet de destruction de l’héritage français, notamment celui de De Gaulle. Il ne fut pas compliqué de les convaincre, la comparaison avec ce père spirituel qui serait « tellement déçu » étant si peu flatteuse. Tels Robert Fischer Junior dans le film Inception, leurs épaules étaient de toute façon trop frêles. Marine Le Pen n’est pas tombée dans ce piège. Elle sait que poursuivre une œuvre aussi importante que le Front national lui permettra de redresser le pays, allant ainsi plus loin que le simple entretien d’un héritage paternel. Car la dédiabolisation ne consiste pas à cacher les ombres de lhistoire sous le tapis, mais à les éclairer afin qu’elles soient enfin comprises dans leur justesse. 

Il n’y a qu’une ligne au Front national, mais une ligne subtile en ce qu’elle est concrète et composite. Les médias sont souvent réducteurs alors que le programme, par rapport auquel les militants et les sympathisants se déterminent, est très complet. Il propose une synthèse d'autorité et de liberté, de culture de l’État et d'initiatives. Certes, le programme a évolué, devenant plus étatiste, à mesure que l'État français se désengageait de l'économie, laissant le pays en proie à l'ultralibéralisme. Mais cette évolution du programme impulsée par Marine Le Pen lui a permis, en réalité, de rester fidèle à l’idée du FN : redresser la France par tous les moyens. Sur les sujets sociétaux, il me semble que la parole du peuple doit prédominer, avec le recours aux référendums. Pour ce qui est des déboires familiaux du Front national, je me permettrai un seul commentaire, « tuer le père » symboliquement aurait suffi, le « tuer » politiquement aurait sans doute pu être évité.

 

Timothée Courberand

Timothée Courberand (14 juillet)

 

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Je suis né à Fréjus, ville de 53 000 habitants, aujourd’hui gérée par le Front national. J’y ai grandi, fait ma scolarité et mes études avant de partir pour Nice, pour le travail, puis d’y revenir.

Étant blanc et blond aux yeux bleus, j’ai rapidement connu le racisme, l’injustice, la violence, la haine de la différence et le choc des cultures. Mon premier souvenir politique remonte au 21 avril 2002, une date importante de mon engagement actuel. J’avais douze ans. Je ne comprenais pas l’acharnement, la peur et la diabolisation de cet homme, Jean-Marie Le Pen, qui pourtant disait des choses évidentes, et me posais les questions suivantes : pourquoi avoir peur d’une justice ferme ? pourquoi la notion de « France française » est-elle devenue quasiment injurieuse ? pourquoi les autres personnalités politiques, sans cesse critiquées, ne perdent-elles jamais leurs places ?

Plus tard, j’ai été conquis par le discours de Nicolas Sarkozy sur les banlieues et le Kärcher qu’il devait y passer, mais jai déchanté bien vite. Alors, j’écoutai avec attention les discours de chacun, avec cette envie que les choses changent mais, je l’avoue, avec le doute que cela soit possible, tant le Front national peinait à acquérir des succès électoraux. Et puis, mon parcours de vie personnelle se faisant, j’ai rencontré David Rachline en 2014. Rapidement, il m’a convaincu d’aller sur le terrain, convaincu puis prouvé que les choses pouvaient changer. Depuis la détermination de prendre le pouvoir pour redresser notre pays m’habite.

Aujourd’hui, le mouvement avance à grands pas ; malgré quelques tourmentes, l’objectif ne doit pas être perdu de vue.

Jean-Marie Le Pen est un véritable résistant, celui qui, avant les autres, a vu et dit la vérité. Celui qui, depuis toujours, défend la France. Celui qui, pour toujours, se battra pour la France. Et, en cela, il mérite un respect sans faille. Cependant, le monde évolue et, de ce fait, le programme et la stratégie doivent suivre. Jamais le Front national n’a été aussi fort que depuis 2011, la nouvelle direction tient pour elle un bilan de réussite qui doit lui permettre de pouvoir continuer sereinement son travail. Je suis de ceux qui pensent que le linge sale se lave en famille, et non pas sur la place public. Par conséquent, les acteurs des polémiques récentes devraient, d’un côté comme de l’autre, mesurer leurs propos. Quand on voit une France qui décline autant, et que nous souhaitons accéder au pouvoir pour la redresser, nous nous devons de présenter une image à la hauteur de l’enjeu.

Concernant le fond de la ligne politique, les nuances d’opinions sont saines et se doivent d’être constructives. À l’heure de la confrontation des projets pour les échéances présidentielles de 2017, les Français seront face à des choix cruciaux. Dans la configuration dans laquelle nous sommes aujourd’hui, je prône l’équilibre sur la question économique. La voie libérale n’est pas une mauvaise voie en soi, au contraire, mais elle doit être complétée dans certains domaines par une intervention de l’État, afin que la création de richesses profite au plus grand nombre. La liberté d’entreprendre et l’émergence de fortes richesses pour quelques-uns ne sont pas antagonistes à l’enrichissement modéré et équilibré pour tous. Au milieu de cette globalisation sauvage, il faut pouvoir se protéger et protéger les intérêts de la France. Il faut que l’État insuffle au pays une vision économique, une orientation stratégique, une dynamique de grands travaux. Par conséquent, une part d’interventionnisme est nécessaire.

Quant aux questions sociétales, je suis un fervent conservateur des symboles de notre société. La décadence croissante de celle-ci, aggravée par un libéralisme à outrance, ne doit pas pervertir nos lois en se justifiant par une simple existence. Ce que certains pensent être une avancée de la société n’est en fait que l’effet pervers d’une économie qui asservit les masses pour ouvrir des marchés supplémentaires. Je défends donc avec fermeté la conservation de nos structures traditionnelles.

Voilà donc ma nuance personnelle. Jean-Marie Le Pen restera à jamais le premier homme à avoir dit la vérité et à avoir montré le chemin. Désormais, place à ceux qui, en adéquation avec le monde d’aujourd’hui, exécuteront un programme efficace pour le redressement de la France.

 

Florent Erard

Florent Erard (16 juillet)

 

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Étudiant en master d’architecture à Strasbourg, je suis adhérent au Front national depuis l’âge de dix-neuf ans. Originaire de la région lyonnaise, c’est en Alsace que je poursuis mes études. Bien avant mon engagement politique, je partageais les constats et les solutions de Jean-Marie Le Pen ; par la suite ceux de sa fille. Ma pensée politique s’est forgée relativement tôt. Je suis issu d’une de ces nombreuses familles de droite qui affectionnent le combat mené par Jean-Marie Le Pen. Ma conscience a toujours été nationaliste. Il m’a toujours semblé évident que la Nation est le fondement social indispensable. Que sommes-nous sans une nation qui tire dans ses racines le sens de son identité ?

Si j’ai voulu m’investir au Front national, c’est pour plusieurs raisons. La première étant évidemment de vouloir agir pour mes convictions. Mais agir pour ses idées nécessite aussi un environnement militant structuré. C’est donc dans la perspective de construire une cellule locale que je mène mon combat. À Strasbourg, nous étions orphelins d’une direction structurée. Les élections municipales ont été un élément déclencheur pour la mise en place de nouveaux cadres dynamiques, chose primordiale. Et tout cela a été rendu possible par l’implication de Marine Le Pen.

Je n’ai que vingt-deux ans, alors que le Front national existe depuis quarante-trois années. C’est donc avec un œil nouveau que je juge ce qu’il se passe dans notre formation. On m’a posé cette question des dizaines de fois : « Auriez-vous rejoint le FN sous Jean-Marie Le Pen ? » Ma réponse est certaine : OUI.

Je crois qu’il a toujours existé plusieurs lignes politiques au FN. Avec des différences assez minimes, rien de comparable avec ce que l’on peut voir aujourd’hui. Mais, paradoxalement, je n’ai pas l’impression de voir actuellement deux lignes politiques en opposition. Il me semble plus juste de voir au sein du Front national une bulle dans laquelle évoluent des personnes aux aspirations plus étatistes, qui se définissent souvent par le sobriquet de « national-républicain ». Il est évident pour quelqu’un comme Florian Philippot, un énarque, de proposer une politique étatiste. C’est un positionnement qui découle de sa formation. Son action s’agissant de la ligne politique n’est certainement pas négligeable dans la progression qu’a enregistrée le FN aux dernières élections. C’est l’apport d’un programme social qu’on peut voir en décalage face à l’héritage plutôt poujadiste de Jean-Marie Le Pen.

J’ai le plus profond respect pour la personne de Jean-Marie Le Pen. Il s’est battu avec convictions au fil des années et des élections, et a mis sur pied une force politique importante. Sans lui quel serait le paysage politique français ? Quand je regarde les débats, les discours qu’il a pu mener depuis des décennies, je suis admiratif. Le discours d’Arras de 2009 sur la mondialisation reste pour moi le plus marquant de tous.

Je crois qu’il faut distinguer deux périodes dans les derniers rebondissements. La première se résumant à la position attentiste de Jean-Marie Le Pen, durant laquelle s’est joué l’emballement médiatique, ainsi que celui du bureau politique. La sanction à l’encontre de Jean-Marie Le Pen me semble disproportionnée. On peut tout à fait critiquer le fait de donner une interview au journal Rivarol. Il n’était pas donné meilleure occasion aux ennemis de Marine Le Pen pour semer le trouble. M. Spieler (ex-FN puis ex-MNR), en recueillant cette interview, a réussi un coup médiatique qui doit encore le faire jubiler.

La deuxième partie de cet évènement débute à mon sens lorsque riposte Jean-Marie Le Pen. Et, en la matière, on peut dire que le Menhir reste fidèle à lui-même. On ne va pas le changer à quatre-vingt-sept ans. On a le sentiment qu’aucune sortie de crise n’est souhaitée. C’est regrettable et triste. Mais beaucoup de choses devraient encore se passer, ne tirons pas de conclusions trop hâtives.

Cependant, j’émets une critique de l’image qu’a pu donner le parti. Le Front national a des valeurs de droite. Dans ces valeurs, nombreuses, il faut voir le respect de la famille, des aïeux. Et lorsque je vois le père fondateur se faire traiter en renégat, je crois que beaucoup de monde, notamment de droite, est choqué par le traitement dont est victime Jean-Marie Le Pen. Nous ne devons pas oublier que nous sommes un parti avec des valeurs que d’autres ont piétinées, et nous nous devons de rester fidèle à ces valeurs.

C’est un épisode qui fait les choux gras des médias. Voir une dissension à l’intérieur d’un parti politique est toujours savoureux pour ces gens-là. D’autant plus quand il s’agit du Front national. Il n’y a pas meilleure occasion pour masquer les préoccupations cruciales des Français. La situation n’a que peu d’impact en réalité. C’est un conflit de personnes comme il y en a tant d’autres. Nous devons, en tant que militants, comme éveillés, ne pas nous laisser distraire par de tels évènements. Notre combat se place au-dessus de ces histoires personnelles, aussi désagréables soient-elles. Alors, serrons les rangs, et en avant !

 

Lionel Charrin

Lionel Charrin (16 juillet)

 

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Né en Russie, je m’installe dans la Drôme en 2005. Je suis naturalisé Français en juillet 2011. J’adhère au Front national en avril 2012, dans la foulée du meeting de Marine Le Pen à Lyon. Je participe à la campagne des élections législatives en tant que simple militant, aux côtés de Richard Fritz. En septembre de la même année, je rencontre Julien Rochedy, alors directeur national du FNJ, à l’université d’été de La Baule. L’année suivante, je participe à la refondation du FNJ en région Rhône-Alpes. Au cours de la campagne municipale, je m’engage sur la liste de Valence tout en militant avec Julien Rochedy à Montélimar. À cette occasion, il me nomme chargé de mission FNJ de Valence. En juin 2014, je présente ma candidature au Comité central du Front national. Durant l’année 2015, je milite pour les  élections départementales et régionales.

Il y a une seule ligne au sein du Front national, et ce depuis sa création. Il a toujours été un parti trans-courant dont l’ambition était, au-delà d’une simple victoire électorale, un bouleversement profond de la société française. Au sein du parti, il y a des différences d’approches car les parcours, les époques sont différents. Ces approches ne sont pas contradictoires mais complémentaires. Ainsi, lorsque l’on oppose libéraux-conservateurs aux nationaux-républicains, on oublie que l’on peut être à la fois conservateur sur le plan politique, et social sur le plan de l’économie. De même, la liberté d’entreprendre n’implique pas le libéralisme : on peut à la fois soutenir la petite entreprise et lutter contre la finance internationale.

Le Front national doit conserver son caractère anti-système qui n’attire pas seulement un vote protestataire, mais qui appelle une alternative au libéralisme de droite (libre circulation des capitaux) et de gauche (libre circulation des personnes). Ce qui est en jeu, ce n’est pas tant l’arrivée au pouvoir qu’une révolution sociale, un changement de consciences et de modes de vie. Cette révolution ne pourra pas se faire sans contrôle de la production, même avec le soutien du système médiatico-politique. C’est pourquoi il est fondamental que le FN puisse compter dans ses rangs des chefs d’entreprises moyennes (en cela le collectif Audace est une initiative à soutenir), et que chaque adhérent s’efforce de produire de la richesse économique pour échapper au salariat.

Certains pensent que le Front national devrait délaisser son projet social pour plaire à l’électorat de droite. Or, le parti a raison sur son programme économique, mais il est nécessaire d’insister sur des aspects microéconomiques pour tenir compte de la porosité entre sympathisants FN et UMP. Le changement de système monétaire est une nécessité, mais il ne suffira pas de supprimer l’euro et rétablir un système qui a pu exister par le passé pour mettre fin à l’injustice sociale. Il faut repenser de fond en comble notre vision du monde et de la nature. La population doit être réduite notamment par le retour au pays de nombreux immigrés non assimilés. L’économie sera relocalisée au plus près des lieux de vie. L’usure sera de nouveau prohibée et les banques nationales financeront les États sans percevoir d’intérêts.

L’émergence d’un pôle européen ne doit pas se faire au détriment de la Russie. Actuellement, ce sont les États-Unis qui poussent l’UE à l’affrontement contre les Russes, particulièrement en Ukraine. Or, la Russie ne menace pas l’indépendance des pays européens, contrairement à l’OTAN qui colonise militairement l’Europe et cherche à s’élargir vers l’Est. L’avenir est au dialogue entre partis patriotes pour une Europe des peuples, reconnaissant la liberté de chacun de ses membres et portant un projet commun de civilisation. Le Front national l’a compris en promouvant à la fois une coopération avec la Russie (comme lors du référendum en Crimée) et la création d’un groupe au parlement européen (Europe des Nations et des Libertés).

 

Vladimir Berezovski

Vladimir Berezovski (16 juillet)

 

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J’ai adhéré au Front national en 2010, à l’âge de vingt ans. Je me suis toujours intéressé à la politique depuis mon adolescence. Vivant dans le Val-de-Marne (le dernier département communiste de France) depuis toujours, j’ai toujours pu observer de près les conséquences néfastes de l’immigration sauvage en France.

Évidemment, cela a participé à ma prise de conscience. Quand on est témoin quotidiennement d’une substitution de population, on a le choix entre l’indifférence et la réaction. J’ai choisi. Voilà pourquoi, dès mon premier vote, lors des régionales du printemps 2010, j’ai voté pour Marie-Christine Arnautu (FN). Je n’ai d’ailleurs jamais voté autre chose que FN.

Cela étant, un vote me paraissait un engagement bien faible. J’ai donc décidé de m’encarter au FN. J’ai participé à toutes les campagnes électorales, en militant d’abord, puis en 2014 j’ai décidé de « monter » une liste dans ma ville, à Ormesson-sur-Marne, où j’ai été élu conseiller municipal (seul élu FN). Lors des dernières élections départementales, j’ai également été candidat dans mon canton (regroupant des villes UMP, PCF…), lors desquelles je me suis qualifié pour le second tour, après avoir éliminé le conseiller général sortant PCF au premier tour.

La figure de Jean-Marie Le Pen a naturellement été une des raisons principales de mon engagement.

Ayant toujours été admiratif devant Le Pen, son combat, seul contre tous depuis des décennies, a été comme un modèle, qui me faisait comprendre que mes risques et mon engagement n’étaient pas grand-chose à côté de la vie de Jean-Marie Le Pen. Son refus du politiquement correct, son refus de soumission face à la pensée unique, son franc-parler m’ont toujours fasciné.

Voilà pourquoi je me sentirai éternellement redevable envers Le Pen. Il m’a poussé à me former politiquement, idéologiquement. Sans Le Pen, je ne pense pas qu’un mouvement patriote aurait pu atteindre de tels scores en France, et que, par conséquent, nous en serions là aujourd’hui. Il suffit de regarder certains pays voisins, comme l’Espagne ou l’Allemagne, pour nous rendre compte que, sans figure politique charismatique, les mouvements patriotes ou de droite nationale n’ont eu que peu de succès.

Je n’ai pas envie d’avoir le choix entre une ligne souveraino-souverainiste et une simple ligne identitaire luttant contre l’islamisme.

Elles sont selon moi complémentaires. Je pourrais reprocher aux « nat-rep » un manque de profondeur. D’après moi, retrouver notre souveraineté nationale n’est qu’une étape, et non une fin en soi. À quoi sert d’être souverainiste si l’on souhaite appliquer, par la suite, une politique non identitaire ?

Je souhaite que la France, et les pays européens, retrouvent leur souveraineté afin d’être totalement libres de se défendre face au mondialisme. Cela implique donc, par la suite, une lutte contre l’immigration, pour la survie de nos peuples, mais également une politique qui soit un rempart face à l’idéologie progressiste, qui est l’arme idéologique du mondialisme.

Je pourrais également reprocher aux « identitaires », ou du moins à ceux pour qui l’islamisme (par ailleurs totalement soutenu par les mondialistes, la situation en Syrie l’a démontré) est le problème principal, un manque de perspicacité. S’attaquer à l’islamisme est, selon moi, s’attaquer à des conséquences, et non à des causes. De plus, l’islamisme en France n’est pas né du néant, il est évidemment lié à la forte immigration africaine depuis des décennies. Que je sache, il n’y a pas de problème d’islamisme en Amérique du Sud. Et pour cause, il n’y a pas de populations provenant de pays de culture islamique. Cette immigration en Europe, elle a été encouragée, organisée. Subie par les Français, mais organisée par l’oligarchie. Nous devons donc identifier les responsables, qui sont les véritables ennemis.

Par ailleurs, je serais tenté de dire que j’ai plutôt de l’admiration envers les individus qui placent le spirituel avant l’individualisme occidental actuel, tout en ayant conscience que, dans le cas des gens issus de l’immigration africaine et maghrébine, il s’agit plus d’un réflexe identitaire que d’une réelle croyance, et tout en ayant conscience qu’il ne s’agit pas non plus d’une population ayant majoritairement une vocation pacifiste sur notre sol européen, et une folle envie de sy assimiler (les évènements d'actes de terrorisme ou de défiance de notre culture, particulièrement chez moi, dans le 94, le prouvent régulièrement). Je crois que le spirituel est surtout ce qui fait défaut aux Européens d’aujourd’hui, qui sont totalement néo-occidentalisés. Entre un musulman intégriste en France et un Européen « de souche » baignant dans le progressisme, je ne vois aucun « ami ».

En revanche, s’attaquer à l’implantation de mosquées, ou au nombre de burqas, ne me paraît absolument pas primordial. Si, demain, tous les descendants de l’immigration extra-européenne se convertissent au catholicisme, ou mieux encore (pour l’establishment), au laïcisme, je ne serais pas satisfait pour autant, bien au contraire. Ils deviendraient simplement de bons produits occidentalisés, et se mêleraient définitivement au sein de nos peuples. Je comprends tout à fait, au contraire, les réflexes identitaires, quels qu’ils soient. Ainsi, voilà pourquoi je ne peux pas reprocher aux musulmans ou aux extra-européens de penser et d’agir en tant que communautés. Cependant, la France étant un pays européen, je souhaite évidemment qu’à terme, nous cessions de vivre dans un melting-pot culturel et de peuple, et que nous retrouvions notre identité naturelle.

Voilà pourquoi je pense qu’il faut lutter contre la mondialisation, en reprenant le contrôle de nos institutions, mais en gardant bien à l’esprit que cela doive servir à la protection de notre identité, aujourd’hui indéniablement en péril.

Au sein du Front national, il est évident que ces deux lignes existent (et d’autres encore), et je pense que cela est une force. Plusieurs courants ont toujours existé, cela est naturel, et il est important pour la survie du mouvement de ne pas vouloir imposer un modèle unique à tous les adhérents ou militants, la liberté d’esprit et d’opinion étant un des socles du Front national, me semble-t-il.

Pour finir, et étant présent sur le « terrain » depuis plusieurs années, je peux affirmer sans aucun problème que les électeurs du Front national, qu’ils viennent de droite comme de gauche, ont le sentiment avant toute chose de voir disparaître leur pays et leur identité. Il s’agit là de la raison principale de la forte adhésion de la population à notre mouvement, et il est évident que les Français sont de plus en plus réceptifs à un discours radical (pas extrémiste, mais radical) concernant notre identité ; ce n’est donc pas le moment de nous laisser dépasser par les discours de marketing de la droite pro-UE et mondialiste française.

 

Alexandre Pallares

Alexandre Pallares (17 juillet)

 

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Tout est parti d’un petit rien, d’une envie qui était et est toujours ancrée en moi, l’envie de changer les choses, d’apporter un regard nouveau, de donner mon avis, j’avais alors à l’époque tout juste dix-sept ans lorsque j’ai décidé d’adhérer au Front national.

Étant jeune et relativement peu informé du fonctionnement interne des partis, je pensais devoir atteindre ma majorité pour pouvoir rejoindre un parti politique, mais un soir, alors que je participais à un énième débat sur Facebook quant à l’importance des valeurs françaises et patriotes, un ami m’a envoyé un message qui a changé cette donne ; à partir de là, de ce contact, j’ai su que je pouvais agir.

Nous prîmes alors rendez-vous avec le responsable local du Front national afin de, premièrement, voir si cela correspondait à mes attentes, mais également dobtenir ce fameux sésame, la carte qui ferait de moi un membre à part entière de cette faction.

Je ne m’étais pas trompé. Peu de temps après, je recevai ma première carte et, surtout, j’ai milité pour la première fois. Un grand moment. Ce fut l’occasion pour moi de rencontrer d’autres jeunes qui avaient les mêmes affinités que moi, mais également de montrer ma détermination et ma motivation. J’avoue qu’en y repensant j’étais très anxieux à l’époque, j’étais empli de l’image véhiculée par les médias et je me demandais comment les gens allaient réagir à ce tract politique que je venais distribuer ; au final ce fut une agréable surprise, les gens ont réservé un très bon accueil au groupe de jeunes patriotes que nous formions.

Le temps à passé. Je m’investissais davantage à chaque réunion, chaque action, chaque meeting, j’étais photographe, graphiste, je donnais des coups de main, à gauche, à droite, l’idée était de rendre service autant que possible !

Puis vint le premier mai. Un moment magique. En parler me fait encore frissonner. Cette ambiance... La première rencontre avec Marine, avec Jean-Marie, avec Florian Philippot, puis avec d’autres cadres, les liens qui se tissaient avec les autres militants.

Entre deux évènements du parti, j’ai également lancé une initiative populaire, basée sur une page Facebook et un slogan, « Touche pas à l’Alsace », qui servait de cheval de bataille afin d’enrayer la réforme territoriale, la fusion des Régions, que la majorité des Alsaciens trouvaient stupides.

En septembre 2014, j’ai eu l’occasion d’aller aux universités d’été du Front national de la Jeunesse à Frejus, cela a eu pour conséquence de renforcer mes contacts avec les collègues d’autres départements, mais également de me confronter à la presse. En novembre, je me suis rendu au congrès et ai, par la même occasion, été chargé par le nouveau président du FNJ, Gaëtan Dussaussaye, de gérer les jeunes dans le département du Haut-Rhin. Ce fut en quelque sorte la récompense à mes deux ans de militantisme, la chance de pouvoir donner une nouvelle impulsion au parti chez les jeunes près de chez moi !

J’ai également été investi candidat dans le canton de Colmar-1 lors des dernières élections départementales, une chance pour moi de faire mes preuves sur le terrain. Ce fut extrêmement enrichissant. J’ai beaucoup appris de cette expérience, autant des autres candidats que des gens rencontrés au fil des tractages sur le marché. Je n’ai pas gagné, mais mon but était de donner une alternative au vote habituellement de droite dans le canton. Le Front, qui n’y était plus implanté depuis plus de dix ans, y étant arrivé, ma satisfaction fut complète.

J’ai été inspiré, au fil du temps, par de nombreuses personnalités politiques. Néanmoins, si l’on restreint ce nombre à celles qui sont au Front national, il est clair que je suis arrivé au parti pour Marine Le Pen. En tant que militant, on ne peut qu’espérer une victoire en 2017. Mais ma position quant à la ligne du Front national est toute relative, je considère qu’il n’y a qu’une ligne à suivre, celle de notre présidente. Il peut m’arriver d’avoir quelques discordances avec cette dernière, mais nous devons nous réunir derrière elle. Après, je suis partisan de la multiplicité des annexes qui découlent de cette ligne, celle de Marion et Jean-Marie, plus identitaire, ou celle de Florian Philippot, beaucoup plus gaullienne.

À ce propos, une définition, pour nos lecteurs : « Le terme "gaullien" fait référence à la personnalité même du Général de Gaulle, aux postures liées très directement à sa personne, à son tempérament, à sa manière de parler alors que le terme de "gaulliste" renvoie lui aux conceptions politiques, à l’idéologie qui au fil des années, pendant et après le Général, ont et continuent d’irriguer la vie politique française. »

Je possède cette part identitaire, mais également cette part gaulienne ; je pense qu’il faut puiser dans tous les courants et les idées qui nous entourent pour réaliser les meilleurs choix, mais également pour diversifier notre champ de vision ! Pour moi, tout est une question de bon sens, bien que ce dernier varie beaucoup selon l’appartenance politique.

Quant à savoir si Jean-Marie le Pen a influencé ma façon de militer, c’est avec assurance et confiance que je répond OUI ! Ce grand monsieur incarne énormément de valeurs aujourd’hui perdues, il représente la résistance, la ténacité, le combat, il est notre « Menhir », l’homme sans qui le parti n’existerait pas, et il occupe effectivement une belle place dans mon esprit militant. Bien que je ne cautionne pas ses récents propos dans Rivarol, ce quotidien d’extrême droite, je pense qu’il ne devrait pas être mis à la porte d’une façon aussi violente. Jean-Marie est un homme passionné, un homme amoureux de son pays et de ses valeurs, il est encore apprécié par nombre de jeunes et c’est bien mieux ainsi, il est un peu notre grand-père à tous !

Et même si les récents évènements nous ont montré dispersés, désunis, au final nous finissons tous par nous réunir pour un même idéal, car dans le fond, nous cherchons tous la même chose, changer les choses, rendre la France meilleure et nous nous battrons pour elle, quoi qu’il en coûte ! La jeunesse de France se mobilise et montre clairement son amour de la nation, Vive la France !

 

Romain Thomann

Romain Thomann (17 juillet)

 

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C’est avec prudence que j’avance ici être né dans une « famille de droite », non que je doute de leurs convictions, mais plutôt parce que j’évite de leur coller une étiquette, d’autant plus que le clivage gauche/droite ne veut plus rien dire depuis longtemps.

Aux présidentielles de 2007, la « tradition familiale » (terme que je n’aime pas, mais qui montre bien ma conscience politique limitée d’alors) aurait logiquement dû m’amener à voter pour Sarkozy.

Qu’a-t-il bien pu se passer pour que, quelques années après son élection, j’en arrive à envoyer mon courrier d’adhésion à Nanterre alors que le système scolaire m’avait bien appris à repousser la soi-disant menace fasciste lepéniste ? Je dirais que c’est l’explosion de la dette, la création du CFCM, sa trahison daprès le référendum de 2005 ajoutés à son atlantisme carabiné qui m’ont convaincu de la nocivité des orientations UMPistes.

C’est en lisant le programme du FN, qui s’avère être en réalité un ensemble de propositions d’une cohérence remarquable, que j’ai eu envie de le défendre, d’où mon engagement en 2013, puis en 2014, pour les municipales. Nous avons, le candidat tête de liste et moi, réussi à monter une liste de cinquante-trois personnes à Créteil et avons obtenu trois élus au conseil municipal, dont je fais maintenant partie.

Pourquoi le Front national, me demanderez-vous ? Tout simplement parce qu’il me paraît être le seul mouvement qui n’ait pas trahi la France et les Français. Le mondialisme n’est-il pas une réalité, l’hégémonie américaine une évidence ? L’abdication de nos élites étant actée depuis des décennies, seul le FN a maintenu et maintient toujours cette flamme de l’espoir national face à la décadence.

Quand la gauche internationaliste prétend défendre le peuple, alors qu’elle n’est en réalité que la caution humaniste du système, la droite ultra-libérale, elle, ne cache pas sa volonté d’imposer un nouvel ordre mondial. J’ai choisi de ne pas être l’idiot utile de ceux qui rêvent de tuer la France.

Notons que leur « bel aujourd’hui » est en train de nous faire gagner le combat des idées. Un retour aux valeurs, à la morale et au bon sens est maintenant souhaité par une majorité de nos compatriotes.

En ce qui concerne les querelles internes, je pense qu’à long terme elles nous seront profitables. Elles ont le mérite de mettre en lumière différentes sensibilités, qui je le pense augmenteront l’ampleur du report de voix. Un Front en pointe sur le combat anti-immigration (axe identitaire qui, je le crois, sera capable de rassembler la droite au-delà des différends en matière d’économie) et un Front présent sur le social, donc en pointe sur le combat contre l’euro et pour la souveraineté.

Tous ces éléments me confortent dans l’idée que la stratégie « ni droite ni gauche » est la bonne, et que le Front national est plus que jamais notre seul espoir.

 

Raphaël Quinart

Raphaël Quinart (18 juillet)

 

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La politique est avant tout pour moi une passion. Le débat, la prise de parole, le combat, la compétition, la confrontation… la politique est une arène, et nous en sommes les gladiateurs.

Avant même d’avoir eu des convictions, j’ai toujours été attiré par ce monde politique. Avant de vivre dans une atmosphère paisible en Seine-et-Marne, j’ai vécu dix ans à Fleury-Mérogis, ville connue pour… sa prison, la plus grande d’Europe. Je n’ai jamais été agressé ou racketté, mais j’ai vu des vols, une crèche brûlée aux cocktails Molotov, des agressions, des bagarres de gangs… bref, une insécurité chronique. Insécurité qui poussa mes parents à déménager.

Dans le contraste de l’atmosphère de cette ville du 91, mes parents m’ont inculqué les valeurs du respect, du travail, du patriotisme, et de la famille. De par léducation qu’ils m’ont transmise, ils m’ont indirectement mené sur la route du Front national.

C’est en 2012 que j’ai véritablement commencé à m’intéresser au discours du FN. J’avais quatorze ans, j’étais en quatrième, et je découvrais ce parti que je connaissais jusqu’alors comme celui du « diable de la République ». Mes parents ne m’ont pas inculqué de convictions politiques (tout du moins pas directement). De Nicolas Sarkozy à Philippe de Villiers, mes parents n’ont pas toujours été des « frontistes convaincus » ; ils n’ont voté pour le Front national pour la première fois qu’en 2012. Niveau politique, je suis donc un « autodidacte ».

Très vite, le discours de Marine Le Pen m’a séduit. Ses références, son vocabulaire, son dialecte, son charisme… tout. Mais je voulais en savoir plus. Plus sur son parcours, sur son programme, sur l’histoire de ce parti. De reportage en reportage, de documentaire en documentaire, j’ai commencé à entamer un véritable travail de recherche sur le Front national. J’ai découvert le Front à ses débuts, sa traversée du désert, ses premiers succès électoraux, sa scission, ses déboires, ses polémiques, et surtout… son menhir, Jean-Marie Le Pen.

Cet homme qui pourrait être mon arrière-grand-père me fascine, m’intrigue. C’est un homme politique comme on n’en fait plus, un « vieux de la vieille », qui s’est construit tout seul. Marin pêcheur, soldat en Algérie puis en Indochine, chef d’entreprise, puis chef de parti, cet homme qui a eu mille et une vie devient très vite un modèle pour moi, une référence.

En m’intéressant à l’histoire, à l’actualité, à certains grands économistes, je me suis construit de véritables opinions. Dès mes quinze ans, je suis passé d’un engagement basé exclusivement sur des valeurs (la patrie, le travail, la famille…) à un engagement plus complexe, plus « politique ». Une Europe des Nations souveraines, une réforme structurelle de notre fiscalité et de notre système social, une revalorisation de la France sur la scène internationale, une justice plus autoritaire, une éducation tournée vers les valeurs fondamentales : le respect, l’autorité, la hiérarchie, et la valorisation des filières techniques… ma vision de la société française et du monde était née.

Très vite, je me suis promis de ne jamais rester spectateur de tout cela, mais d’être un acteur, un acteur du changement, du vrai changement. La politique n’était donc plus une passion, mais bel et bien une vocation, un devoir. À seize ans, j’adhérais au Front national. Tractages, réunions de circonscription, congrès, j’ai vite pris goût à cet univers. Il y a quelques mois, je devenais le vice-président du groupe FN-RBM du Parlement des Étudiants. Une autre étape de mon engagement.

Depuis quelque temps, j’assiste, comme tous les autres militants, à ces tensions qui secouent le Front. Si la vie n’est pas un long fleuve tranquille, la politique l’est encore moins. Mais je regrette de voir que beaucoup d’adhérents ont enflammé le débat sur les réseaux sociaux, insultant tantôt notre présidente de « traître », tantôt notre fondateur de « vieux débris ». Je pense que la logique aurait été de se taire, au lieu de servir de la soupe sur un plateau d’argent à nos adversaires qui se délectent de notre « crise ».

En ce qui me concerne, je n’ai pas une vision manichéenne de ce conflit, et ne tiens pas à faire partie d’un « camp », car je veux encore croire à l’union, et non à la division. Notre présidente Marine Le Pen a pris les décisions qu’elle devait prendre, et a démontré ses capacités de chef d’État en prenant une décision difficile, sans rebrousser chemin. Je la soutiens, et la soutiendrai toujours, car en la soutenant, je soutiens la France. En la soutenant, je soutiens ses idées. En la soutenant, je soutiens un avenir meilleur.

En revanche, je ne tomberai jamais dans l’ingratitude envers notre fondateur. Cet homme que j’admire, et que j’admirerai toujours, a dirigé le Front pendant quarante ans. La reconnaissance qu’on lui doit est imprescriptible, intemporelle. Sans lui, le Front n’existerait pas. Sans lui, nous n’en serions pas là. Alors oui, il est vrai que je continue de le soutenir. Mais je ne pense pas que le soutenir fasse de moi une sorte de « frondeur ». Certains militants préfèrent retourner leur veste et le vilipender sur les réseaux sociaux, alors qu‘ils l‘idolâtraient il y a quelques mois, mais moi je ne suis ni un arriviste ni un ingrat. Je respecte mon président d‘honneur. Et tout bon frontiste devrait faire de même.

Le Front n’a pas besoin de guerre entre ses militants. Chacun doit rester à sa place, participer aux prochaines élections, continuer la bataille des idées, mais ne pas sombrer dans l’anarchie. Marine Le Pen et son père sont assez grands pour régler leurs déboires. Espérons juste que leur conflit idéologique ne fasse pas émerger des listes concurrentes aux élections. Ce serait une grossière erreur. Car je n’oublie pas que si je me suis engagé au Front, ce n’est ni pour Marine, ni pour Jean-Marie, mais pour la France.

Des divergences avec le programme du Front National, j’en ai. Tout le monde en a. Et heureusement, car c’est ce qui permet d’avancer. C’est cette confrontation idéologique qui permet de construire un programme solide et fiable. Qui choisira la ligne du Front ? La majorité, tout simplement. C’est pourquoi un militant qui a des divergences avec le programme frontiste ne doit en aucun cas quitter le parti, enflammer la Toile, ou demander la démission d’un cadre. Il doit conserver ses convictions, évoluer avec, et tout faire pour les imposer de façon démocratique, par le débat, par le vote.

Le Front national n’est pas sectaire. Un homme de convictions et de compétences peut facilement évoluer dans le parti, afin de proposer ses idées. La ligne d’un parti évolue lorsqu’un certain nombre de cadres portent des idées nouvelles, et non lorsqu’un groupe de militants menacent de quitter le parti ou de le détruire. Alors, à nous de nous serrer les coudes, peu importent nos divergences, afin de s’unir, et non de se fragmenter. Nos ennemis ne sont pas au Front, mais au pouvoir. Unissons-nous face à eux. Car unis, les Français sont invincibles.

 

Mathieu Latrille de Lorencez

Mathieu Latrille de Lorencez (18 juillet)

 

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Le Front national est le premier parti politique chez les moins de vingt-cinq ans, c’est une donnée très importante car elle signifie que c’est le parti qui incarne l’espérance. Chaque militant frontiste considère le Front national comme le dernier moyen légal de sauver la France et les Français, de retrouver la prospérité et la gloire. Avant de parler de ce qui, dans mon parcours personnel, m’a conduit à adhérer au mouvement national, je souhaite évoquer rapidement une caractéristique très importante du Front national, celle qui m’a convaincu. Le Front national est un parti patriote, qui défend la France en tant que nation, peuple et civilisation. Cette idée est très importante pour moi, permettez-moi de vous dire pourquoi.

Je suis né dans la banlieue Est parisienne, plus précisément dans la banlieue rouge, à Champigny-sur-Marne, dans le Val-de-Marne. La ville historique de Georges Marchais, qui fut le secrétaire général du Parti communiste français jusqu’en 1994. Mon père est un ancien communiste, devenu socialiste avec l’âge, et ma mère est centriste ; je n’ai pas vraiment grandi dans une atmosphère Front national. Passionné d’Histoire depuis ma plus tendre enfance, j’ai appris à aimer celle de mon pays et je suis devenu très tôt patriote. Longtemps, un de mes rêves a été de participer au défilé du 14 juillet. Le premier choc qui a réveillé ma conscience politique se produisit au collège, j’étais alors en cinquième ; une camarade de classe d’origine algérienne me dit, parlant des Algériens : « Nous, on est là pour l’argent et on s’en fout de la France ». À partir de ce moment, j’ai compris que j’étais Front national. C’était en 2005-2006, et tous les évènements qui ont suivi n’ont fait que confirmer mon positionnement politique.

Au départ, je ne pensais m’engager en politique mais, en terminale, j’ai eu un déclic. Un bon matin, je me suis levé en me disant : « C’est bien beau de se plaindre, mais il faut agir pour changer les choses ». J’ai pris ma carte par internet en septembre 2012, et voilà comment je suis entré dans le grand mouvement pour la renaissance française. Je suis aujourd’hui conseiller municipal à Villiers-sur-Marne et secrétaire départemental FNJ du Val-de-Marne.

Le Front National traverse aujourd’hui une période difficile. La figure de Jean-Marie Le Pen est assez contrastée à mes yeux. A la fois, j’ai une grande admiration pour lui, sa vie et ce qu’il représente. C’est un ancien combattant qui a quitté son mandat parlementaire pour défendre la grande France ; il a résisté à son niveau pendant la Seconde Guerre mondiale et a dirigé pendant quarante ans le Front national qui, sans lui, n’aurait surement jamais connu de succès. Mais, d’un autre côté, de par ses provocations néfastes pour le mouvement, il nuit à la progression du Front national et à son arrivée au pouvoir. Or, notre pays a besoin de nous, de Marine pour se relever. La ligne que je suis est celle qui place la France avant tout. Par conséquent, j’aurais rejoint, hier, le Front de Jean-Marie Le Pen, et je me sens pleinement à ma place dans celui de Marine Le Pen aujourd’hui. Mais c’est dans Marine que je place tous mes espoirs pour l’avenir ; si Jean-Marie est un frein, un obstacle, il devra être écarté, car la cause est plus grande.

Les convictions propres ne sont pas importantes quand on est membre d’un parti politique comme le Front national. Nous avons une seule ligne politique, elle est décidée par le bureau politique, et chacun doit s’y tenir. Certes, nous avons des débats en interne ; il est normal qu’il y ait plusieurs sensibilités au sein d’un grand parti comme le Front national. Cela fait aussi notre force. Nous sommes un parti qui continue à produire des idées, des propositions novatrices pour l’avenir de notre pays. La ligne du mouvement est assez riche pour que celui ou celle qui souhaite réellement que la France renaisse y trouve son pain, c’est là notre but à tous.

 

Gilles Parmentier

Gilles Parmentier (26 juillet)

 

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14 juin 2015

"Deux ans pour faire une véritable politique de gauche", par Martial Passi

Il y a de cela six mois, M. Martial Passi, maire PCF de Givors (Rhône), vice-président du Grand Lyon et de lAMF, acceptait de coucher sur papier numérique l’expression de ses inquiétudes et revendications d’homme de gauche sous forme d’une « lettre au président de la République » de ma suggestion, pour Paroles d’Actu. Fin mai, je lui ai proposé de prendre part à une série d’interventions de personnalités politiques autour d’une thématique posée simplement : « vingt-quatre mois ». Le temps qui nous sépare des grandes échéances électorales nationales du printemps 2017. Les élus auxquels j’ai soumis cette invitation (outre M. Passi, un socialiste, deux UMP devenus LR et une Front national) étaient invités à réfléchir aux perspectives des deux années à venir et, en particulier, aux orientations de leur famille politique respective telles qu’ils les souhaitent. Le texte de M. Passi - que je remercie ici pour sa contribution - m’est parvenu le 12 juin. Plus que jamais, il s’inscrit dans la ligne de cette gauche qui, au-dehors comme au-dedans du Parti socialiste, n’entend pas abandonner au couple exécutif Hollande-Valls le monopole des possibles en matière d’idéaux progressistes. Une exclusivité Paroles dActu. Par Nicolas Roche. 

 

 

« Deux ans pour faire une véritable politique de gauche »

par Martial Passi, maire de Givors (Rhône), vice-pdt de la Métropole de Lyon et de lA.M.F.

 

Il y a trois ans, une majorité d’électrices et d’électeurs se prononçaient pour le changement en élisant François Hollande à la présidence de la République. Chacun se souvient de son slogan, « Le changement c’est maintenant », et de sa phrase choc, lancée lors d’un meeting au Bourget : « Mon véritable adversaire, [...] c’est le monde de la finance ».

Cette victoire et ces orientations sont malheureusement restées lettre morte.

Trois ans après, une politique d’austérité sans précédent, dictée par les marchés financiers et l’Union européenne, étouffe littéralement les collectivités locales, les services publics, le dynamisme économique, les organismes sociaux et les associations de notre pays. Le chômage n’a jamais été aussi élevé. Le pouvoir d’achat des populations ne cesse de dégringoler et les protections sociales continuent d’être démantelées, générant une aggravation alarmante des inégalités et une destruction du tissu social, ce qui met gravement en cause les valeurs et les fondements de la République et du vivre ensemble. Seule une minorité de riches et de privilégiés profitent de cette politique qui permet à la bourse de battre des records.

Exsangues financièrement et corsetées par des décisions prises au plus haut niveau de l’État, les collectivités locales sont menacées dans leur souveraineté et leur existence mêmes. Après des années de gel désastreux sous les gouvernements précédents, les dotations d’État sont amputées de façon historique (28 milliards d’ici 2017 et 53 milliards d’euros d’ici 2019), causant des effets cataclysmiques. 1 500 communes et la moitié des départements sont en quasi cessation de paiement et 18 000 communes pourraient l’être en 2017. Stigmatisés en permanence, les élus locaux font face à une situation devenue inextricable et l’on ne compte plus les fermetures de services, les annulations de projets, l’explosion de l’endettement et la hausse des impôts locaux. L’agonie programmée de nombreux territoires peut conduire à des drames terribles tant pour les populations que pour les territoires.

Politiquement et moralement, le pays est profondément atteint. La gauche est divisée du fait d’un exécutif socialiste qui applique une politique qui doit plus à la droite qu’à la gauche. La responsabilité de cette déstabilisation profonde des repères et des résistances collectives, où l’égoïsme et le rejet de l’autre prennent de plus en plus le pas sur la solidarité et la lucidité, est également portée par l’UMP, devenue « les Républicains », qui choisit d’aggraver ces dérives en se positionnant de plus en plus à l’extrême droite, et par le Front national qui se trouve aux portes du pouvoir, en instrumentalisant et dévoyant les frustrations, le désarroi et les humiliations des populations.

Ce bilan est accablant, le pays court à la catastrophe. Il est plus qu’urgent de changer de cap, de reconstruire l’espoir et de fédérer le rassemblement des énergies pour répondre aux besoins des populations.

Dans les deux ans qui restent,

● au lieu de prendre l’argent dans les budgets des collectivités locales, des services publics et des populations, c’est le contraire qu’il faut faire : donner la priorité à l’intérêt général en faisant contribuer les plus gros patrimoines et la spéculation financière, qui ne cessent de battre des records boursiers.

Dans les deux ans qui restent,

● au lieu de plomber les carnets de commandes des petites et moyennes entreprises par l’assèchement suicidaire de l’investissement public, et d’asphyxier l’activité économique dans les territoires par le coût exorbitant des dividendes versés aux actionnaires, la limitation drastique du crédit aux acteurs économiques et l’étouffement de la consommation intérieure par une paupérisation généralisée des populations, c’est le contraire qu’il faut faire : réorienter les richesses créées dans l’économie réelle, les salaires, la formation, la recherche et la satisfaction des besoins humains.

Dans les deux ans qui restent,

● au lieu de remettre en cause les moyens et les mesures pour mettre en œuvre une véritable transition énergétique et faire reculer tout ce qui contribue au réchauffement climatique, à l’exemple des conférences internationales sur le climat sans aucun engagement contraignant pris par les États, ou a celui, scandaleux, des coups portés au transport collectif (TVA apportée à 10%, hausse du seuil de 9 à 11 salariés pour les entreprises soumises au versement transport, casse des trains intercités, loi Macron favorisant la mise en concurrence de la SNCF par les cars privés, etc.), c’est le contraire qu’il faut faire : créer une véritable alternative au tout routier en faisant des transports collectifs une priorité nationale, développer la recherche pour innover dans tous les domaines pour un développement durable, mobiliser toutes les énergies pour changer les façons de produire, de consommer et de vivre, afin de préserver notre environnement et notre planète, en mettant en cause les sources de profits générées par des activités qui portent atteinte à l’avenir même de l’humanité.

Dans les deux ans qui restent,

● au lieu d’imposer une austérité insupportable aux peuples européens et de combattre Syriza en Grèce, Podemos en Espagne, les mouvements syndicaux, sociaux et alternatifs en Allemagne et dans d’autres pays, et le Front de gauche et l’ensemble des composantes d’une vraie alternative de gauche en France, c’est le contraire qu’il faut faire : contribuer à faire entendre la voix des peuples contre le diktat des institutions financières et des grandes fortunes.

Dans les deux ans qui restent,

● au lieu de spéculer sur la montée des extrémismes de toutes sortes et la recherche de boucs émissaires qui divisent nos concitoyens, fragilisent notre société et remettent en cause nos valeurs républicaines de liberté, d’égalité, de fraternité et de solidarité, c’est le contraire qu’il faut faire : mettre en œuvre une vraie politique de gauche pour répondre aux besoins des populations et reconstruire une espérance collective, permettant à nos concitoyens de vivre ensemble en paix, de se sentir considérés, quels que soient leur origine, leur milieu social, leur engagement politique ou philosophique et leur croyance.

De toute l’histoire de l’humanité, il n’y a jamais eu autant de richesses produites par le travail, mais aussi autant de prélèvements gavant les grandes fortunes et les privilégiés, et autant d’inégalités, d’injustices, d’exclus de tout. La situation catastrophique dans laquelle se trouve notre pays et la grande majorité de ses habitants appelle à des changements de cap urgents dans tous les domaines pour les deux années qui restent.

Avant qu’il ne soit trop tard et que le pire arrive.

 

Martial Passi

 

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