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Paroles d'Actu
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6 janvier 2012

François Hollande (2003) : "Assumer la responsabilité d'agir pour transformer la société"

Je n'ai pas de doute là-dessus : je n'obtiendrai pas d'interview de M. François Hollande pour Paroles d'Actu d'ici à l'élection présidentielle de 2012. Parce qu'il réserve sa parole, qui est rare, aux médias susceptibles de relayer son message le plus largement, le plus efficacement possible. Surtout, parce qu'il est aujourd'hui un homme ô combien occupé. Sorti largement vainqueur des Primaires citoyennes d'octobre 2011, il est depuis lors le candidat soutenu par le Parti socialiste et le Parti radical de gauche pour accéder à la magistrature suprême. Les sondages le présentent comme le challenger numéro 1 de Nicolas Sarkozy. Si l'on en croit ces études d'opinion, il battra le président sortant. Sur le papier, François Hollande est et sera le prochain président de la République.

 

En 2003, alors que Paroles d'Actu n'existait pas encore, j'étais déjà, à 18 ans, très intéressé par la politique. Je m'occupais depuis un an du forum d'actualité que j'avais créé, le Forum 21. Et j'écrivais pour un webzine aujourd'hui disparu. À cette époque, François Hollande est le Premier secrétaire d'un Parti socialiste encore sous le choc de l'élimination de Lionel Jospin en 2002. Avec la réélection de Jacques Chirac, et une majorité UMP écrasante au Parlement, François Hollande se retrouve à la barre d'un parti résolument ancré dans l'opposition. Je lui avais envoyé un mail à l'époque pour chercher à lui poser quelques questions. C'est avec beaucoup de générosité qu'il avait accepté de me répondre. Une précision : je n'ai pas demandé à la campagne de François Hollande l'autorisation de publier de nouveau ce texte après tant d'année. Il va sans dire que les mots du François Hollande de 2003, s'ils fournissent un éclairage intéressant sur le présent, sont à prendre pour ce que constitue cet article : une interview d'archive. Rien de plus. Une exclusivité F21-PdA, évidemment. Phil Defer. EXCLU

 

(Edition du 8 juillet 2012, par Phil Defer) : François Hollande est, chacun le sait, le nouveau président de la République. Une bonne partie des réponses qui m'avaient été apportées lors de cet échange de mails en 2003 concernaient des sujets (la politique menée par Jean-Pierre Raffarin, etc...) qui ne sont plus d'actualité aujourd'hui. Surtout, elles étaient en grande partie tirées mot pour mot, et pas toujours de manière très heureuse, de la motion "Pour un grand Parti socialiste" qu'avait présentée le Premier secrétaire d'alors lors du Congrès national de Dijon de mars 2003. Cela n'enlève rien à la générosité d'esprit qui a conduit M. Hollande à me répondre. Pour autant, étant donné que je ne souhaite que de l'inédit sur ce blog, je ne garderai ici que sa conclusion, qui résume bien les idées, la philosophie de François Hollande. Ces quelques phrases n'apparaissent nulle part ailleurs. Merci encore.

 

 

ARCHIVE EXCLUSIVE DE 2003 - PAROLES D'ACTU

FRANCOIS HOLLANDE

Premier secrétaire du Parti socialiste

 

"Assumer la responsabilité d'agir

 

pour transformer la société"

 

https://storage.canalblog.com/70/11/871067/71658644.jpg

(Photo : RTL.fr)

 

 

Q : 02/08/03

R : 22/10/03

 

 

 

(...)

 

Nous, socialistes, avons le souci d'être utiles aux Français. C'est-à-dire aller au-delà de la nécessaire opposition critique en montrant sur chaque grand sujet (éducation, protection sociale, emploi) qu'une autre voie est possible. De même, le renouveau de l'engagement altermondialiste, les aspirations à un monde plus juste, l'exigence écologique, le souci de défendre les services publics et le refus de la « marchandisation » de l'éducation, de la santé, de la culture sont autant de nouveaux thèmes de réflexion pour la gauche.

 

Notre démarche est ouverte, sans exclusive et s'adresse à tous ceux qui partagent avec nous l'ambition d'assumer la responsabilité d'agir pour transformer la société.

 

Je vous prie de croire, Monsieur, à l'assurance de toute ma considération.



François HOLLANDE

Premier Secrétaire

 

 

 

Merci à François Hollande pour ces quelques mots qu'il avait bien voulu m'accorder, il y a de cela huit années. Deviendra-t-il le septième président de la Cinquième république ? L'avenir, cet avenir que seul le peuple français est à même d'écrire, nous le dira... Merci pour votre lecture. Belle et heureuse année 2012 pour toutes et tous ! Phil Defer

 

 

 

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Modification de la présentation de l'article le 8 juillet 2012

 

Times New Roman > Georgia : 02/10/12

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13 novembre 2011

Najat Vallaud-Belkacem : "Une société plus juste et solidaire"

Cette fois, c'est officiel. C'est François Hollande qui portera les couleurs du Parti socialiste et du Parti radical de gauche lors de l'élection présidentielle de 2012. Mais pour quelle politique, dans un monde bouleversé par la crise et où les marges de manoeuvre financières semblent, plus que jamais, restreintes ? Najat Vallaud-Belkacem a accepté de répondre à mes questions par mail (transmises dès juillet 2011). Une nouvelle exclusivité PdA, par Phil Defer.  EXCLU

 

 

ENTRETIEN EXCLUSIF - PAROLES D'ACTU

NAJAT VALLAUD-

BELKACEM

Adjointe au Maire de Lyon (Grands événements, jeunesse et vie associative)
Conseillère générale du Rhône (Lyon III - Montchat)

 

"Une société plus juste et solidaire"

 

https://storage.canalblog.com/92/27/871067/77335342.png
(Photo : François LAFITE, http://desirsdavenir.blog.fr)

 

 

Q : 07-10/11

R : 28/10/11

 

 

 

Note : Najat Vallaud-Belkacem est la porte-parole de Ségolène Royal. Alors qu'elle n'avait pas encore répondu à mes questions, à la mi-octobre, je lui avais envoyé un nouveau message pour lui faire part du ressenti qui avait été le mien à la vue des résultats du premier tour des primaires. Je trouvais que l'extrême faiblesse du résultat de Ségolène Royal (à peine 7% pour la candidate de 2007) n'était pas méritée, et qu'au fond les larmes de celle-ci au soir du 9 octobre nous rappelaient à quel point la vie politique pouvait être cruelle, parfois. J'ai donc dit à Najat Vallaud-Belkacem que, si Ségolène Royal n'était pas ma candidate pour 2012, elle avait malgré tout ma sympathie et mon respect. Elle a répondu à cela en même temps qu'aux autres questions.

 

Najat Vallaud-Belkacem : Merci beaucoup pour ce message de sympathie et de soutien.

 

Pour être honnête, le résultat a été très dur. A mes yeux, nous avions mené une très belle campagne. L'accueil sur le terrain et la reprise de nos idées par la plupart des candidats ne nous laissaient pas présager un score aussi sévère.

 

J'ai été d'autant plus émue par la dignité et l'émotion de Ségolène Royal que j'étais à ses côtés.

 

Au-delà de la déception, nous devons désormais nous engager corps et âmes aux côtés de François Hollande pour offrir aux Français l'alternance qu'ils méritent.

 

 

 

Paroles d'Actu : Comment vous présenteriez-vous en quelques mots pour qui ne vous connaîtrait pas ?

 

Najat Vallaud-Belkacem :

 

Sur le plan local :

 

Depuis mars 2008, je suis Adjointe au Maire de Lyon, déléguée aux Grands Évènements, à la Vie associative et à la Jeunesse.

 

J’ai également été élue Conseillère Générale du Rhône dans le canton de Montchat (Lyon 3e) : je siège depuis dans l’opposition de l’Assemblée départementale.

 

Sur le plan national :

 

Depuis 2007, je suis la porte-parole de Ségolène Royal.

 

En 2008, je suis devenue Secrétaire nationale du parti socialiste aux questions de société. Depuis j’ai travaillé sur des questions aussi diverses que les questions bioéthiques, le mariage et l’adoption pour les couples homosexuels, la mixité sociale et la lutte contre les discriminations ou encore les thèses du Front National et les réponses à y apporter.

 

 

PdA : Pour vous, c'est quoi, être "de gauche" ?

 

N.V.-B. : Être de gauche c’est être convaincu que l’action politique, lorsqu’elle est au service du bien commun et qu’elle respecte un certain nombre de valeurs fondamentales, a le pouvoir de faire progresser la société.

 

 

PdA : Quel bilan faites-vous de la gestion de l'État depuis 2002 par la droite ?

 

N.V.-B. : Les chiffres sont là et ils sont partout très mauvais.

 

Certains argueront qu’il y a eu une crise économique qui a fortement dégradé notre situation, mais il n’en demeure pas moins qu’elle a été très mal gérée par l’équipe en place.

 

Des mesures toutes plus injustes les unes que les autres, le bouclier fiscal, la recapitalisation des banques sans aucune contrepartie, la diminution aveugle du nombre de fonctionnaires, l’asphyxie organisée des collectivités territoriales...  le bilan n’est pas très glorieux. Sans compter un relâchement de la parole publique, notamment sous l’effet des coups de boutoir de la droite populaire, qui fait peser des risques lourds sur la  « cohésion sociale » dans notre pays.

 

 

PdA : Vous êtes très engagée sur les questions dites de société. Si la gauche l'emporte en 2012, quels sont pour vous les chantiers qu'elle devra impérativement lancer en la matière ?

 

N.V.-B. : De grands chantiers sont à mes yeux essentiels, ils ne coûtent pas nécessairement aux finances publiques mais permettent de faire progresser la société. Parmi eux :

 

- la question de la jeunesse de France : sa place dans les procédures décisionnelles, son sort en matière économique et sociale, sa réussite en matière d’éducation, sa diversité qu’il faudra enfin reconnaître.

 

- la question de la pauvreté : cf ma toute récente tribune dans le Monde : nous devons comprendre que ses formes ont changé et que nous sommes désormais dans une société de la précarité généralisée : il faut apporter des réponses notamment en termes de droits fondamentaux (accès aux biens essentiels, à l’énergie, au logement… ce ne sont pas des questions accessoires mais le cœur de ce que doit être une politique de gauche)

 

- le mariage et l’adoption pour les homosexuels car il est important de mettre fin à cette injustice et anomalie républicaine

 

- la mise en œuvre d’une politique volontariste de lutte contre toutes les discriminations, en particulier territoriales, car notre pays ne peut plus supporter l’existence de véritables quartiers de relégation en son sein.

 

 

PdA : À l'heure où les marges sont minces et où la question de la dette fait la une de l'actualité, la gauche de gouvernement peut-elle réellement se démarquer en matière de budget, et ne pas au fond laisser l'impression d'abandonner le socio-économique au profit du sociétal ?

 

N.V.-B. : À la tête des collectivités territoriales, la gauche a montré ses capacités gestionnaires.

 

Tout en contenant les déficits, nous avons été sur deux fronts :

 

- sur le front social, nous avons essayé tant bien que mal de pallier l’absence de politique sociale du gouvernement;

 

- sur le front économique, nous avons mis en œuvre des politiques pour encourager la compétitivité de nos territoires et de nos entreprises locales.

 

D’ailleurs, une économie locale dynamique permet de dégager des moyens qui peuvent être mis en partie pour le social et en partie pour la diminution des déficits.

 

 

PdA : Qu'est-ce qui, dans votre esprit, rend la victoire de la gauche essentielle en 2012 ? Pourquoi la gauche doit-elle l'emporter ?

 

N.V.-B. : La gauche doit l’emporter ;  nos valeurs et nos acquis sociaux ont été trop abimés ces dernières années. L’abaissement de la France sur la scène internationale, le démantèlement de nos retraites, de notre Éducation nationale et de nos services publics, ça suffit ! Surtout, la Gauche porte un projet politique bien plus ambitieux que celui de la droite : plutôt que de se laisser sombrer dans la crise en imposant des cures d’austérité, investir dans des secteurs d’avenir, la croissance verte notamment, qui permettront enfin au pays de se redresser.

 

 

PdA : Finalement, quels sont vos arguments pour tous les sceptiques, les indécis ? Pourquoi faudra-t-il voter à gauche en 2012 ?

 

N.V.-B. : La gauche est bien consciente qu’elle n’a plus le droit de décevoir. Nos promesses sont mesurées et nos propositions sont financées. Contrairement à la droite, la gauche refuse de démissionner face à la toute puissance des marchés et compte bien instaurer une société plus juste et solidaire.

 

 

 

Je tiens à remercier de nouveau Najat Vallaud-Belkacem pour la gentillesse de sa réponse et l'intérêt de celles qu'elle m'a fournies ! Phil Defer

 

 

 

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Le site de Najat Vallaud-Balkacem

 

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Modification de la présentation de l'article le 8 juillet 2012, le 10 octobre 2012

 

Times New Roman > Georgia : 02/10/12

15 juin 2011

Georges Sarre : "Abolir la peine de mort ? C'était notre devoir. Simplement notre devoir."

La France, ou du moins une bonne partie de ce que l'on appelle le "peuple de gauche" a commémoré, le mois dernier, le trentième anniversaire de l'élection à la présidence de la République de François Mitterrand. C'était le 10 mai 1981. Il y a cinq ans, à l'occasion cette fois du dixième anniversaire de son décès, j'avais pris l'initiative d'interroger, par mail, un certain nombre de personnalités au sujet de cet homme. Le seul président de gauche de la Cinquième république. M. Georges Sarre, plusieurs fois ministre, député durant de nombreuses années, avait eu la gentillesse de répondre à mon questionnaire. À ce moment là, il est maire du 11e arrondissement de Paris, et Premier secrétaire du Mouvement républicain et citoyen (MRC) de Jean-Pierre Chevènement. Une exclusivité Paroles d'Actu. Par Nicolas Roche, alias Phil Defer. DOCUMENT

 

 

ARCHIVE EXCLUSIVE DE 2006 - PAROLES D'ACTU

GEORGES SARRE

Ancien Ministre sous la présidence de François Mitterrand

Ancien Maire du 11e arrondissement de Paris

 

« Abolir la peine de mort ?

C'était notre devoir.

Simplement notre devoir. »

Georges Sarre raconte François Mitterrand

 

Georges Sarre     François Mitterrand

(Photo de G. Sarre : http://www.georges-sarre.net.

Photo de F. Mitterrand : http://www.britannica.com.)

 

Q : 05/01/06

R : 23/05/06

 

Paroles d'Actu : Qu'est-ce qui vous vient à l'esprit, tout de suite, à l'évocation de François Mitterrand ?

 

Georges Sarre : C'est évidemment le 10 mai 1981, ce jour où, comme le dira le Président Mitterrand quelques jours plus tard dans son discours d'entrée à l'Elysée, « la majorité sociale du pays s'est identifiée à sa majorité politique ». C'est-à-dire le jour où le peuple français, plein d'espoir, a décidé de reprendre la parole. C'est ce 10 mai dont je me souviens, la liesse et le sentiment d'un devoir immense à accomplir, lorsque nous avons connu le résultat...

 

J'ai aussi une autre image qui me vient en tête : celle de la cérémonie au Panthéon, à laquelle j'assistais. Du premier rang où je me situais, je voyais François Mitterrand remonter la foule, une foule de roses et de sourires, pour aller rendre hommage aux grandes figures de notre histoire, et notamment de la gauche - je pense évidemment à Jean Jaurès.

 

PdA : Quel regard portez-vous sur l'homme, sur sa vie romanesque ? Sa discrétion sur son passé, sa maladie et sa double vie ?

 

G.S. : Je n'ai que le regard d'un militant et d'un responsable politique sur un camarade, un leader, et un homme d'État. Je n'ai jamais été un courtisan, je n'ai jamais cherché à l'être. La vie privée de François Mitterrand, pour moi, ne concernait que lui, et concerne aujourd'hui sa famille. J'ai partagé avec François Mitterrand des aventures politiques extraordinaires. Je pense à la fondation du PS à Epinay, où, avec les postiers socialistes qui me faisaient confiance et le CERES, que j'animais avec Chevènement, Gomez, Motchane et d'autres, nous avons permis l'élection de Mitterrand comme Premier secrétaire. Je pense aussi à la campagne de 1981, qui fut exceptionnelle d'efficacité et de romantisme. Voilà, ce sont des souvenirs politiques, et je garde un regard politique. J'ai eu aussi des désaccords importants avec François Mitterrand. Je les ai exprimés alors qu'il était encore au pouvoir. J'ai même quitté le Parti socialiste avec Jean-Pierre Chevènement et beaucoup d'autres en 1993. C'est sur ce plan-là, de l'accord, de l'action, des désaccords, toujours politiques, que se sont situées nos relations.

 

Evidemment, ses qualités personnelles ont eu un rôle dans son dessein politique, et c'est sur celles-ci que j'ai un regard : Mitterrand était un homme d'une grande intelligence, d'une grande culture, et d'une sérénité profonde, que d'aucuns considèrent comme du cynisme. Il avait incontestablement l'épaisseur d'un homme d'État.

 

J'ai aussi une estime profonde pour Danielle Mitterrand qui, encore aujourd'hui, mène un beau combat pour un monde plus juste, pour la souveraineté et la coopération des peuples... En plus de partager avec elle beaucoup d'analyses, sur la mondialisation et sur l'Europe notamment, j'admire son courage hors du commun.

 

PdA : Quid de votre regard sur, cette fois, le chef d'État ?

 

G.S. : Comme je vous le disais, nous avons divergé très vite, après le "tournant de la rigueur" de 1983, et plus encore après la première Guerre du Golfe puis le traité de Maastricht. Je crains qu'il n'ait posé là les jalons de ce qui, après lui, allait devenir l'abandon par la France de sa souveraineté, et donc de sa capacité d'agir pour une société française et pour un monde plus justes. Mais si François Mitterrand a sans doute posé les bases de cette abdication de la volonté politique, il ne s'en est pas rendu coupable lui-même, en tous cas beaucoup moins que ses successeurs. Lui n'a rien privatisé. Lui n'a jamais remis en cause l'unité de la République. Lui a continué, partiellement, à faire entendre la voix de la France dans les relations internationales... Peut-être même n'aurait-il pas en 1983 pris le virage de la "rigueur", qui allait conduire au fil des années à substituer le mythe européïste à l'idéal socialiste, s'il s'était senti plus sûr de lui, plus fort... Mais on ne réécrit pas l'Histoire.

 

PdA : Les bonnes choses et les "moins bonnes" accomplies durant ses présidences ?

 

G.S. : Les nationalisations de 1981 furent les meilleures avancées des présidences Mitterrand, car elles auraient pu permettre à la puissance publique et donc au peuple de maîtriser le cours de l'économie, au lieu de subir les choix de l'oligarchie financière, qui se font toujours à son propre profit. On cite souvent aussi l'abolition de la peine de mort, mais je considère que cet acquis était tellement évident, tellement indispensable, tellement consubstantiel à l'humanisme élémentaire, que nous avons fait là non pas une grande avancée, mais simplement notre devoir.

 

PdA : Quel bilan tirez-vous, globalement, de ses années de pouvoir ?

 

G.S. : Comme je vous le disais, le bilan de François Mitterrand est paradoxal : il fut à la fois porteur d'un immense espoir, instigateur de grandes avancées comme les nationalisations, et, en même temps, il prit des décisions (tournant libéral, Acte unique, Traité de Maastricht, première Guerre du Golfe) qui devaient enfermer la France, pour les années suivantes, dans un carcan privant ses dirigeants et son peuple de toute indépendance et toute marge de manoeuvre, et remettant les clés de l'avenir du pays dans les mains d'une oligarchie européenne. Lui-même ne se serait-il pas sorti de ce carcan ? Personne ne le sait... mais les dirigeants français qui se sont succédés à l'Elysée ou à Matignon après 1995 ont laissé la France partir à vau-l'eau.

 

PdA : Qui serait le "nouveau Mitterrand" aujourd'hui ?

 

G.S. : Personne. Les hommes ne se ressemblent pas. Les grands hommes encore moins. Et, qui plus est, François Mitterrand avait une personnalité trop riche et trop complexe pour être copié !

 

En revanche, quelqu'un peut et doit à nouveau réconcilier la majorité sociale des Français avec leur majorité politique, et mettre à nouveau le peuple de France aux commandes de son destin. Jean-Pierre Chevènement, qui avait écrit le programme « Changer la vie », a cette capacité intellectuelle d'offrir aux Français un grand projet qui les rassemble. La gauche est riche de personnalités de valeur, qui ont pris des positions courageuses, par exemple à l'occasion de la campagne référendaire. Je pense en particulier à Laurent Fabius, qui, comme Chevènement et Mitterrand, est incontestablement un homme particulièrement intelligent.

 

PdA : Un sondage a récemment présenté François Mitterrand comme étant le président de la Ve République préféré des Français. Partagez-vous ce choix, et comment l'expliquez-vous ?

 

G.S. : Le président qui a le plus fait pour la France sous la Ve République est sans aucun doute, pour moi, le général de Gaulle, même si j'étais en désaccord avec lui sur nombre de sujets. Mais François Mitterrand a incarné un espoir politique puissant, à une date somme toute assez récente. Cette popularité est celle de l'homme du 10 mai 1981. Elle est méritée.

 

PdA : Quelles traces François Mitterrand laissera-t-il dans l'Histoire, d'après vous ?

 

G.S. : Je pense que la victoire de 1981, dans la foulée du Front Populaire et de la Libération, restera comme un grand moment d'incursion du peuple dans l'écriture de sa propre Histoire. C'est en soi un événement majeur qui marquera l'Histoire pour longtemps. Il y a aussi la création du PS, mais le PS saura-t-il s'inscrire dans la durée ? Il a déjà provoqué une scission, celle des mes amis du MDC, devenu MRC aujourd'hui, du fait de ses reniements. Il n'est pas sûr que la décomposition s'arrête là. J'espère qu'à moyen terme, nous reparviendrons à créer un grand parti unitaire de la gauche sur des bases républicaines et socialistes.

 

Physiquement, François Mitterrand laisse aussi des traces de ses présidences : la pyramide du Louvre, l'Arche de la Défense, et tous les grands travaux.

 

Je ne pense pas du tout que l'"oeuvre européenne", comme disent les européistes, laissera des traces, car j'ai la conviction que la fuite en avant dans une Europe libérale et oligarchique a connu un coup d'arrêt le 29 mai 2005, et qu'elle en connaîtra d'autres, jusqu'à ce que les peuples viennent à bout du carcan bruxellois. Alors, dans dix ou vingt ans, l'Europe de Bruxelles sera devenue une "parenthèse", et non un leg. En tous cas je le souhaite.

 

PdA : François Mitterrand manque-t-il à la France d'aujourd'hui ? Vous manque-t-il... ?

 

G.S. : Il manque à la France un vrai leader politique capable de dessiner un horizon conforme aux aspirations du peuple, et d'entraîner ainsi un vaste mouvement de reconquête démocratique, civique, sociale.

 

Deux questions complémentaires : le MRC, les perspectives de MM. Sarre et Chevènement pour 2007...

 

PdA : Quelles sont les grandes idées originales du MRC ?

 

G.S. : Notre mouvement est né d'une scission du Parti socialiste, avec lequel nous nous sommes trouvés en désaccord sur trois enjeux majeurs.

 

En 1983, nous avons dénoncé le "tournant de la rigueur", c'est-à-dire le renoncement du PS à mener une politique interventionniste et keynésienne, au profit d'une politique néo-libérale et monétariste. Nous restons partisans d'une réorientation profonde des politiques monétaires, budgétaires, commerciales, industrielles, aux niveaux européen et national.

 

Pour ce faire, il faudrait remettre en cause un certain nombre de traités européens ; dès 1992, contrairement à la majorité du PS, nous étions contre le Traité de Maastricht. Nous considérons que l'Europe doit prolonger des nations souveraines et se construire en fonction de projets partagés. Nous récusons l'intégration forcée de l'Europe, qui passe sous la toise les différentes nations, pour nous ramener tous au plus petit dénominateur commun : le marché !

 

Notre troisième désaccord a porté sur la conduite des relations internationales de la France : en 1991, nous avons refusé la première guerre du Golfe, parce qu'elle était la manifestation de l'impérialisme états-unien et qu'elle ouvrait la voie à un choc des civilisations que tout le monde redoute désormais.

 

En somme, nous sommes socialistes, patriotes, internationalistes, quand une partie de la gauche est devenue libérale, européiste et atlantiste. Voilà le clivage ! Un mot aussi de la laïcité, que nous défendons bec et ongles, comme l'unité de la République... quand d'autres veulent morceler la République en communautés et autres territoires autonomes.

 

PdA : Quelles sont vos perspectives, celles de Monsieur Chevènement pour 2007 ?

 

G.S. : Nous souhaitons participer en 2007 à une candidature présidentielle qui donne une suite positive au "non" massif du 29 mai 2005 contre le traité "constitutionnel" européen. Nous souhaitons dans cette perspective une candidature à vocation majoritaire pour gagner l'élection. Laurent Fabius a des arguments. Nous verrons qui est choisi par le PS. Si le candidat du PS devait tourner le dos au vote des Français le 29 mai 2005 et si personne ne devait porter un véritable projet de gauche républicaine en 2007, alors je pense que Jean-Pierre Chevènement serait candidat. Le MRC et moi-même, nous nous y préparons dès aujourd'hui. Nous sommes en ordre de marche et nous serons bientôt en ordre de bataille pour ce grand rendez-vous avec les Françaises et les Français.

 

 

>>> Le Traité de Lisbonne, copie presque conforme du texte rejeté en 2005 par les Français, a finalement été ratifié par le Parlement national, sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Nous sommes en 2011, et l'hypothèse d'une nouvelle candidature de Jean-Pierre Chevènement n'est pas exclue...

 

 

Je remercie de nouveau, très sincèrement, M. Georges Sarre, ainsi que son assistant de l'époque, pour ces réponses, pour la générosité avec laquelle ma requête avait été considérée... Un commentaire ?

 

 

Quelques liens...

 

 

Times New Roman > Georgia : 02/10/12. Présentation remaniée : 12/11/13.

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