Marion Pilat : « Il faut choisir la difficulté qui vous rendra le plus heureux ! »
Il est parfois des rencontres qui, sur le moment, sont incontestablement sympathiques, mais auxquelles on n’imagine pas forcément de suite. Travaillant pour Easydis, la filiale logistique de Casino, j’en ai croisé, du monde, surtout des intérimaires, de passage pour quelques semaines ou quelques mois. Parmi eux, au printemps 2021, une certaine Marion Pilat : nous n’étions pas plus proches que cela au taf, mais nos quelques conversations m’ont fait comprendre qu’elle voulait entreprendre de longs voyages, plus en tant qu’aventurière qu’en tant que touriste lambda. Et ça, forcément ça m’avait plu, en tout cas intrigué. Alors, comme souvent dans ces cas-là, on avait échangé les Facebook, pour prolonger un échange après sa fin de mission. Sachant que, la plupart du temps, on ne reprend pas les échanges interrompus.
Il y a quelques mois, j’ai vu passer des stories Facebook dans lesquelles elle documentait, avec talent, le grand trip qu’elle était en train d’accomplir en Amérique latine : les moments incroyables, les rencontres qui marquent, les galères aussi (et de galères elle a eu son lot). J’ai à cette occasion repris la discussion avec elle, et de fil en aiguille, je lui ai parlé de Paroles d’Actu. Je lui ai notamment présenté mon interview avec Sophie Mousset, voyageuse humaniste comme on en fait peu. J’ai proposé à Marion une interview, dans laquelle elle pourrait raconter un peu son parcours, son voyage (377 jours, entre septembre 2024 et septembre 2025), son état d’esprit et ses engagements. Et nous dire deux mots de l’asso qu’elle a créée il y a deux ans, Inamoroad. Je la remercie pour ses réponses, et pour son message, aussi généreux qu’inspirant ! Une exclu Paroles d’Actu, par Nicolas Roche.
EXCLU - PAROLES D’ACTU (23/09-07/10/25)
Marion Pilat : « Il faut choisir
la difficulté qui vous rendra
le plus heureux ! »
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PALLAY PUNCHO, PÉROU : LA RÉALITÉ
Photo représentative du voyage au global : beaucoup de montagnes, mon van,
la liberté, la spontanéité et les galères, mais le bonheur presque tout le temps.
Cette journée était un énième échec pour accéder aux montagnes colorées du Pérou.
Boue, éboulement, routes effondrées, j’avais dû m’arrêter sans pouvoir continuer,
mais finalement cette journée est un superbe souvenir...
Marion Pilat bonjour. Qu’aimerais-tu que l’on sache de toi avant d’aller plus loin dans la discussion ?
Hello ! Eh bien déjà, merci pour ta démarche, je me sens très privilégiée. Ce que j’aimerais qu’on sache avant tout, c’est que je ne suis pas une personne hors du commun. Je viens de la classe moyenne, je n’ai pas de talent particulier, je ne suis pas plus douée que quelqu’un d’autre. Mon parcours, c’est simplement le résultat d’une volonté profonde de réaliser mes rêves et d’une détermination à toutes épreuves. C’est quelque chose que tout le monde peut entreprendre.
D’où te vient ce goût pour les voyages, pas ceux qu’on fait comme un touriste du samedi au samedi, ceux qu’on fait, mieux qu’on "vit" comme un aventurier ? T’est-il venu sur le tas, ou aussi par des récits, des livres que tu aurais lus ?
Très bonne question. Je ne sais pas trop... Ce qui est sûr, c’est qu’il ne m’a pas été transmis, puisque personne dans ma famille proche, ni éloignée, ne voyage !
La piste des récits est vraiment très possible. J’ai toujours été une très grande fan d’aventuriers. Autant mes lectures se tournent souvent vers des récits inspirés d’histoires réelles, autant j’adore les histoires complètement irréalistes d’aventuriers et aventurières hors normes via le grand écran, et ça depuis toujours ! Indiana Jones, Lara Croft, La Momie, Pirates des Caraïbes, Mission Impossible, Voyage au centre de la terre… Ce sont des aventures qui m’ont profondément marquée, comme pour, j’imagine, beaucoup d’autres.
Ce qui m’a mis le pied à l’étrier, ce sont les colonies de vacances. Ma mère bénéficiait d’un très bon CE, qui nous permettait de partir en vacances pendant 3 semaines l’été, à moindre coût. Recevoir le catalogue, tourner ces feuilles de papier glacé et découvrir les programmes pour choisir la colo, c’était une sensation incroyable. Tu imagines, là, on te glisse un magazine dans les mains avec des pages entières de choix entre la colo équestre, celle où tu feras du quad, du surf, celle où tu resteras à un endroit paradisiaque ou celle où tu feras un voyage itinérant… Et ton seul rôle c’est de choisir une page et préparer ta valise. Aucune autre responsabilité, Incroyable. Bien sûr, j’ai rapidement compris que les voyages itinérants me correspondaient parfaitement, ils stimulaient ma curiosité, mon hyperactivité, mon besoin de changement perpétuel, de rencontres, et c’est de là que la passion du voyage est née. Après, pendant plusieurs années, j’ai voyagé surtout en couple. L’amour du voyage solo, je l’ai découvert un peu plus tard, quand j’avais 24 ans, après une rupture difficile.
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MAP DU VOYAGE
Mon voyage a commencé au Brésil, en sac à dos, pendant 1 mois, le temps
que mon van traverse l’Atlantique sur un cargo et que je le retrouve en Uruguay.
Je suis d’abord remontée au Brésil pour aller découvrir les merveilleuses chutes
d’Iguazu, puis j’ai roulé sur l’interminable Ruta 3 argentine jusqu’au bout du monde :
Terre de Feu, Ushuaia. J’ai zig-zagé dans les Andes, entre le Chili et l’Argentine,
puis je suis remontée jusqu’en Colombie avant de remettre Zarsha (mon van)
sur un bateau, et de voyager à travers l’Amérique centrale jusqu’au Mexique.
La suite au prochain épisode en 2026...
Tu as arpenté, pendant pas mal de temps, les coins et les recoins de l’Amérique latine. Qu’est-ce qui t’a attirée dans cette zone-ci du monde en particulier ?
J’ai beaucoup hésité c’est vrai quant à la destination pour ce voyage ! En fait, au départ ce devait être un « simple » voyage en couple de 6 mois à travers l’Europe. Puis les choses ont changé : j’étais célibataire et alors, le champ des possibles s’est élargi. Il y a des pays qui m’attirent particulièrement partout dans le monde. En Amérique du Sud, la Bolivie et le Guatemala étaient en haut de la pyramide, mais je suis très attirée aussi par le Kirghizistan, par la Mongolie, l’Éthiopie… Sur chaque continent, j’ai une ou plusieurs destinations de rêve (rires).
Si j’ai fini par choisir l’Amérique du Sud c’est parce que c’est ce qui me paraissait le plus compliqué. Je suis jeune, énergique, je n’ai jamais choisis la facilité et j’ai toujours fini par sauter dans le grand bain, comme on dit. Alors, comme l’Atlantique à traverser c’est pas une mince affaire, j’ai foncé dans cette direction en me disant que l’Afrique et l’Asie pouvaient attendre encore un peu.
Qu’est-ce qui t’a le plus frappée lors de tes voyages jusqu’à présent ? On imagine que beaucoup des gens que tu as rencontrés ne roulaient pas nécessairement sur l’or... Dirais-tu que ces expériences t’ont ouvert les yeux comme nulle autre sur les réalités du monde ?
Alors mes yeux étaient déjà bien ouverts sur les réalités du monde. Avant ce voyage, je suis notamment allée en Égypte et au Pakistan, pour ne citer que ces deux pays, et je suis quand même assez engagée pour m’être intéressée au monde avant même de voyager. Mais ce qui est sûr, en effet, c’est que voyager te sort d’un narratif, ce n’est plus une histoire que tu lis, qu’on te raconte, c’est une vérité immédiate et contemporaine. Et pour le coup, je ne connaissais pas grand chose de l’Amérique latine. Je me suis renseignée lorsque j’ai entamé des recherches pour connaître la situation socio-économique des pays que j’allais traverser, dans l’objectif de mener des actions humanitaires pour améliorer les conditions de vie justement, via notre association Inamoroad.
J’ai cependant été très surprise de constater que dans ces pays là aussi, l’extrême pauvreté existe, et à large échelle. Je ne sais pas, dans mes a priori, c’était le cas en Afrique, en Inde, mais je ne croyais pas la situation si grave en Amérique latine. Il faut dire que quand on entend parler de l’Amérique latine, c’est surtout pour parler du Brésil, de la Colombie, on s’imagine les favelas en périphérie des villes, on se souvient de ces images aux contrastes de richesses saisissants dans nos livres d’histoire-géo… Mais ce que j’ai vu va bien au-delà de tout ça...
Peut être aussi parce que je voyage en van et que j’ai traversé les campagnes reculées de tous ces pays. Des millions de familles vivent dans des maisons de briques ou de terre, avec en guise de fenêtres de simples ouvertures, un toit de tôle ou parfois seulement de tissu, et pour seul aménagements le lit, le frigo et la cuisinière, parfois un canapé à l’extérieur, et toujours une ou deux chaises en plastique. Bien sûr, le sol reste en terre : ici, pas de dalle de béton, donc quand il pleut tout devient boue... Les chiffres donnent le vertige : 170 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, dont 66 millions en extrême pauvreté, c’est à dire l’équivalent de toute la population française qui n’aurait même pas de quoi se nourrir.
Quelques visages qui t’ont vraiment marquée à vie ?
Oh que oui ! En général, les humains qui nous marquent à vie sont ceux que l’on rencontre lorsque nous sommes vulnérables. C’est mon cas en tout cas.
Je pense notamment à Patricia, cette Argentine qui m’a tendue la main pendant que je désespérais, luttant contre ce que je croyais être des punaises de lit dans mon van. Elle m’a vu vider l’intégralité de mes affaires sur le trottoir en face d’une laverie et prendre d’assaut toutes les machines de ce commerce de quartier. Au lieu de me traiter comme une pestiférée, elle m’a invitée chez elle, présenté sa famille, offert une douche et un déjeuner, et même glissé des cadeaux souvenirs avant mon départ. Je crois que ce sont les premières larmes que j’ai versées, celles qui coulaient sur mes joues alors que mon van reprenait la route et s’éloignait de leur maison.
Toujours en Argentine, on m’a brisé les vitres de mon camion et je me suis retrouvée chez mon ami Hernan et sa famille pour plusieurs jours : je me suis sentie si bien entourée qu’une partie de mon cœur est vraiment restée là-bas avec eux...
Il y a aussi la famille de Ronald et Reina, des Vénézuéliens réfugiés en Colombie, sans papiers, mais qui ont construit un refuge très utile, que je suis venue aider avec l’association. Ce sont les personnes les plus généreuses, combatives, résilientes et aimantes que j’ai jamais rencontrées.
Et puis il y a les visages de ces vieilles personnes, à la peau brûlée et fripée par des années d’exposition au soleil, qui travaillent dans le froid en Bolivie, portent des charges lourdes sur le dos au Pérou, dorment dans le rues derrière leurs kiosques de marchandises etc… Oui, je n’oublierai jamais tous ces visages.
Tu évoquais tout à l’heure une forme de désespoir. Est-ce que parfois, au cours de tes voyages, tu as ressenti un découragement tel que tu aurais pu rentrer en France ? Voire même, parfois, une peur réelle pour ta vie ?
Oui, et non. Jamais je n’ai eu l’envie de jeter l’éponge et de rentrer. Mais j’ai eu plusieurs fois peur pour ma vie. La foudre est tombée à trois mètres de moi, je me suis retrouvée sur une route très étroite à flan de falaise avec des éboulements et de la boue en Équateur… Ce sont surtout les éléments naturels qui m’ont fait peur pour ma vie. Après bien sûr, j’ai eu beaucoup de challenges pas simples à gérer, des embourbements, un pneu crevé, une fois j’étais bloquée dans un canyon, le chemin n’existait plus et se transformait en grosse rivière… Beaucoup d’anecdotes de galères, mais jamais au point de me décourager !
Parle-nous un peu des actions que tu entreprends, notamment via l’association que tu as fondée et que tu as déjà un peu évoquée ? Être utile, faire ce qui a un sens, c’est vraiment quelque chose d’essentiel à tes yeux ?
Oui c’est essentiel ! Je pense qu’on a tous notre part à jouer dans le monde. Toi, moi, et sûrement tous tes lecteurs, s’ils vivent en France et ont un toit sur la tête, alors on fait parti des 20% des personnes les plus riches du monde. Même si on est au RSA. Et je crois profondément que chaque petite action compte, mais que nous devrions tous choisir au moins une cause qui nous tiens à cœur et agir dans cette direction. Chacun à son échelle ! Ça peut être de s’abonner à des associations sur les réseaux sociaux, c’est gratuit, ça prend cinq secondes, et aujourd’hui c’est vraiment utile pour démarcher des sponsors et organiser des actions à plus grande échelle (c’est le moment de s’abonner à Inamoroad s’il vous plaît, haha). Ça peut être sous forme de dons, si on a pas de temps à y consacrer, ou de bénévolat si on n’a pas d’argent à donner, ça peut aussi être des dons matériels, etc… Il y a beaucoup de façons de s’impliquer plus ou moins, et je crois sincèrement qu’un petit peu, plus un petit peu… ça peut faire la différence !
Dans quelle mesure dirais-tu que ces expériences t’ont changée ? Orientée dans tes choix de vie à venir ? Pour être plus précis : quel job ne pourrais-tu plus faire maintenant, et comment comptes-tu être utile à l’avenir ?
Je ne sais pas si j’ai beaucoup changé dans le sens où, avant de partir, je n’étais pas perdue comme j’ai pu l’être à la fin de mes études, je n’étais pas brisée comme après une rupture ou un deuil, j’allais bien et j’étais heureuse. Mais ce voyage m’a quand même apporté certaines réponses. Je questionnais mon désir de maternité, maintenant je sais que j’aimerai être maman un jour, je repense à l’adoption. Professionnellement, même si mon travail est en totale contradiction avec certaines de mes convictions, il me permet de vivre de ma passion, de financer un peu l’association, d’être libre et de dégager du temps, donc je continuerai de produire des événements dans la mode. Je réfléchis cependant de plus en plus à m’orienter vers d’autres secteurs qui me faisaient rêver et que je n’ai jamais approchés encore, comme celui du cinéma ou du sport auto. Ce voyage m’a changée au niveau de mes peurs : j’en ai vaincu certaines, comme ma peur des chiens par exemple, et à l’inverse, de nouvelles sont apparues. Maintenant j’ai peur de la foudre...
Perçois-tu le décalage a priori gigantesque entre cette réalité que tu as touché du doigt et le milieu pro dans lequel tu évolues (la mode) comme quelque chose de difficile à concilier à terme, ou peut-être essaies-tu justement d’insuffler un peu plus d’éthique, de développement solidaire dans tes activités ?
Oui le décalage est très important et j’évolue dans une industrie qui nourrit le capitalisme, l’élitisme, et beaucoup de concepts auxquels je suis moi-même réfractaire... Mais on ne choisit pas vraiment ses passions et je pense que lorsqu’on se sent à sa place en termes de compétences et d’utilité, qu’on se sent bien avec les personnes qui évoluent autour de nous, alors il faut aussi savoir accepter de ne pas être parfait et accueillir le bonheur que ça nous procure, car il est suffisamment rare et difficile de trouver sa place. Et la réalité c’est que ce travail me permet d’être libre, d’organiser mon temps comme je le décide, de financer des projets personnels et caritatifs à côté... Donc j’y trouve mon équilibre comme ça et je suis très heureuse.
J’intègre aussi une dimension RSE dans les projets sur lesquels je travaille et j’essaie d’insuffler des plus ou moins grandes améliorations à mon échelle. La mode est destructrice et inutile, comme pourrait l’être le cinéma. Nous n’avons pas besoin de nouveaux vêtements, ni de regarder la télé, mais c’est un art, qui crée beaucoup d’emplois dans plein de secteurs différents, qui fait rêver les gens dans un monde assez déprimant, et qui est un véritable moyen d’expression et outil d’émancipation sociale. Donc c’est une contradiction de plus à mon arc (rires) mais je suis bien avec ça.
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SALAR UYUNI, BOLIVIE : LE RÊVE
Photo qui me rappelle une période du voyage que j’affectionne particulièrement.
Ma meilleure amie était venue me rejoindre, on visitait le Salar d’Uyuni, c’est-à-dire
l’un des deux endroits qui m’ont fait venir sur ce continent. On était très bien entourées,
les paysages étaient époustouflants et Bilma, ici sur la photo, nous avait fait
les meilleurs fluffy pancakes de toute ma vie (rires).
Quels prochains voyages rêves-tu d’entreprendre ? Ceux que tu ne te verrais vraiment pas faire ?
Je rêve de traverser l’Asie centrale en moto jusqu’en Mongolie, je rêve d’explorer l’Afrique en 4x4 aménagé… Ce sont des projets de plutôt grande envergure, et j’ignore s’ils deviendront réalité, mais j’ai des étoiles dans les yeux quand je l’imagine (rires). Sinon j’ai très envie de découvrir les paysages de l’Islande, les coutumes birmanes, la philosophie de vie en Indonésie… mais je ne me verrais pas du tout aller en Inde seule ni aller visiter en tant que touriste des pays qui souffrent, tels qu’actuellement le Venezuela par exemple.
Lorsque j’ai interrogé une autre grande aventurière, Sophie Mousset, elle m’a parlé de son expérience en Afghanistan, et du fait que sous les talibans elle s’y est sentie "comme une afro-américaine qui séjournerait dans un pays dont l’esclavage n’est pas aboli". Te verrais-tu voyager dans des pays où les femmes sont véritablement considérées comme étant inférieures à l’homme, où leurs droits élémentaires sont à peine reconnus ?
Non pas vraiment, je ne suis pas journaliste, et je ne pourrais rien faire pour les aider directement. Je ne souhaite pas du tout participer à l’économie d’un pays qui opprime ouvertement une catégorie de personnes. Ne jamais dire jamais, mais ce qui est sûr c’est que si je me rends dans un pays avec une telle situation, ce sera pour documenter, reporter, dénoncer ce que je verrais, ce que je vivrais. Certainement pas pour visiter et découvrir de merveilleux paysages.
C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai décidé de ne pas aller au Venezuela, qui est pourtant un pays magnifique en termes de nature et biodiversité, de culture. Mais j’étais très mal à l’aise avec les voyageurs se vantant d’y être allés et véhiculant le discours du "n’écoutez pas les préjugés et allez-y, c’est pas si dangereux"... Tout n’est pas toujours une question de sécurité envers SOI, il faut aussi parfois penser aux autres. Bien sûr que l’expérience en tant que voyageur dans un pays n’est pas comparable à celle de la population locale et ce, peu importe notre façon de voyager. Je refuse d’aller profiter de mes privilèges dans un pays où la majorité de la population est en danger et fuit à l’étranger pour survivre, c’est pas un mouvement naturel d’aller à contre-sens. C’est comme courir vers un incendie que tout le monde fuit, juste parce qu’on a la chance d’être équipé d’une combinaison anti-feu, et tout ça non pas pour éteindre le feu mais pour prendre une photo des flammes. C’est non !
Quels conseils donnerais-tu à qui aurait envie de voir le monde, de s’y frotter, mais sans forcément oser le faire, parce que c’est difficile de tout plaquer du jour au lendemain pour partir à l’aventure ?
C’est difficile de tout plaquer, oui, c’est vrai, mais c’est aussi difficile de se réveiller un matin le cœur rempli de regrets. Il faut choisir la difficulté qui vous rendra le plus heureux ! Aussi, ne pas donner trop d’importance aux bruits du monde, aux avis d’ici et là de personnes qui n’ont jamais bougé à l’étranger et qui vous diront que tout est dangereux risqué et effrayant. Écouter votre instinct et vos désirs profonds. La vie, vous n’en avez qu’une. Il s’agit de la VIVRE, comme bon vous semble. Et si je l’ai fait, tout le monde peut le faire !
Un message pour quelqu’un en particulier, à l’occasion de cette interview ?
Merci à mes parents, qui m’ont permis d’économiser pour financer le voyage en supprimant le loyer de mes dépenses mensuelles. Même s’ils n’ont jamais trop compris mon désir d’aventures, sans eux je n’aurais jamais pu aménager mon van et partir aussi rapidement, et avec un budget limité.
Merci à ma sœur et ma mère, mes amies Laurène et Mélodie, et mon cousin Jérémy, qui m’ont beaucoup aidée pour l’association Inamoroad. Merci au sens large à tous ceux qui ont encouragé la démarche, qui continuent de la soutenir comme ils le peuvent, qui participent à nos actions…C’est vraiment très significatif.
Merci à ceux qui ont vécu mon voyage à travers leur écran. J’adore voyager seule, mais je ne suis pas quelqu’un de solitaire, c’est l’une de mes nombreuses contradictions, et j’ai vraiment adoré, au-delà de vivre cette aventure à 100%, le fait de pouvoir la partager, déclencher des conversations avec des personnes avec qui je n’avais plus parlé depuis le collège, le lycée... Tu en es d’ailleurs le parfait exemple, et ma vie à tellement changé depuis Easydis ! Quand j’étais sur ce banc à la pause déj, je cherchais une opportunité professionnelle, je voulais réaliser mes rêves, et aujourd’hui je peux dire que je me construis vraiment la vie qui me faisait tant rêver et qui m’enthousiasme. Et je souhaite à tout le monde de trouver et de suivre sa voie !
Merci à ceux qui partagent leur vie sur internet et qui m’inspirent tous les jours (rires) ! Et merci la vie, je suis vraiment reconnaissante de tout ce qui arrive, jour après jour.
Parle-nous, précisément, des activités d’Inamoroad ? Des événements de sensibilisation sont-ils prévus bientôt, à Lyon, Paris, ou ailleurs ?
Les activités d’Inamoroad sont variées et se distinguent en deux catégories grosso-modo.
D’abord, les manifestations qui permettent de financer l’asso : collectes (de matériel scolaire, vêtements, conserves, pharmacie...), vide-dressing, tournois sportifs, vide-grenier... D’ici la fin 2025, il y aura peut être une participation à un tournoi sportif du côté de Lyon et un vide-dressing où nous sommes basés, à Saint-Étienne-le-Molard, mais je n’en dit pas plus car il est encore tôt pour le confirmer. Et puis ensuite, les actions terrain : don de matériel, bénévolat dans des refuges, sensibilisation dans des écoles...
Actuellement, la suite est un peu floue. Je vais profiter de mon retour en France pour faire le bilan de ces deux premières années d’activité, la première en France ayant servi à financer les actions de la seconde en Amérique latine. Il est désormais temps de réfléchir à la suite et à la prochaine destination. Malheureusement, ce ne sont pas les possibilités qui manquent et les besoins humanitaires ne font que croître...
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REFUGE DE MIGRANTS VÉNÉZUELIENS, COLOMBIE :
CHACUN SA PART AU MONDE
Celle photo, elle m’émeut beaucoup parce qu’elle représente la semaine que j’ai passée
avec cette famille vénézuélienne, migrante en Colombie, qui a construit un refuge
qui aide jusqu’à 400 autres migrants par jour, fournissant nourriture, douche, WC,
internet, appel, soutien psychologique... Autrefois appuyés par des organisations
internationales telles que l’UNICEF, SOS International, On the Ground, World Vision, etc...
Aujourd’hui, ils sont seuls. Eux-mêmes sont dans une situation très difficile : sans papiers,
sans ressources fixes, travaillant d’arrache-pied... Ce sont les personnes les plus combatives,
résilientes et généreuses que j’ai rencontrées. Ils sont devenus mes amis,
et la rencontre la plus marquante de mon voyage.
Un dernier mot ?
Je vous laisse avec ma citation préférée : soyez la personne que vous aimeriez rencontrer. Et comme j’aime à le dire : je vous souhaite la santé tous les jours, de rire et pas qu’à moitié, d’aimer entièrement et sans limite, et de vivre des aventures à n’en plus savoir que dire ! Et si vous voulez découvrir mes aventures passées et à venir, c’est sur inamorizon !
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